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"Au bonheur d'Elise"
2 février 2006

Définition de l'autisme

Définition de l'autisme

A. La découverte de l'autisme

B. Différentes explications

C. Apparition du terme TED

D. Deux conceptions différentes: l'européenne et l'américaine

E. Définition

F. Prévalence et troubles associés

G. Causes
 
 

I. Historique et définition

A. La découverte de l'autisme

En 1943, Leo Kanner, psychiatre américain, publie un article décrivant 11 enfants présentant un ensemble de symptômes particuliers, qu'il regroupe en sept caractéristiques essentielles:

  • - la solitude;

  • - des obsessions pour des routines;

  • - une mémoire extraordinaire;

  • - l'écholalie;

  • - la sensibilité aux stimuli;

  • - une gamme d'intérêts limitée;

  • - une intelligence normale.

  • Kanner a attribué la présence de l'autisme principalement à l'attitude et à la qualité des contacts des parents envers leurs enfants. Cependant, il n'a pas exclu la possibilité que certains éléments caractériels des parents aient pu passer, de façon héréditaire, chez les enfants.

    Un an plus tard, en 1944, et de façon totalement indépendante, un médecin autrichien du nom de Hans Asperger publie une description d'un groupe de 4 enfants présentant ce qu'il appelle "une psychopathologie autistique". Un certain nombre d'éléments du fonctionnement de ces enfants peut s'apparenter à ceux du groupe de Kanner (le retrait social, les stéréotypes au niveau du langage et du mouvement, une résistance aux changements et un intérêt particulier pour certains objets ou sujets). Toutefois, deux aspects diffèrent: tandis que les enfants du groupe de Kanner avaient un langage très réduit, tous ceux du groupe d'Asperger s'expriment bien et ils sont, de plus, un peu maladroits en terme de motricité globale.

    Chacun des deux auteurs a emprunté le terme "autistique" à Eric Bleuler qui, dans un article en 1908, s'était servi de ce terme pour parler du retrait social qu'il avait observé chez un groupe d'adultes schizophrènes. Cependant, ni Kanner ni Asperger n'ont associé l'autisme à la schizophrénie (bien qu'ils le considéraient comme une psychopathologie): en effet, l'autisme se distinguait, pour eux, par trois éléments: le problème se présente en bas âge, le sévérité du problème semble diminuer un peu avec l'âge et aucun client n'avait rapporté d'hallucinations.

    • En 1966, Andreas Rett rapporte avoir identifié 22 personnes, toutes des filles, qui présentent un ensemble de comportements de type autistique, mais suite à une régression après les cinq ou six premiers mois de leur vie, période pendant laquelle leur développement avait été normal.

    B. Différentes explications

    Après cette période de découverte, vint une période d'explication, ou plutôt de tentatives d'explication. Dans les années 50, Bruno Bettelheim eut beaucoup d'influence avec une théorie qui expliquait les caractéristiques des enfants autistiques par la nature de l'interaction mère/enfant. Il avança la théorie de la "mère-réfrigérateur". De son point de vue, un enfant devient autistique parce qu'il ne peut supporter son environnement menaçant qui manque d'amour. Kanner fut tellement influencé lui-même par cette interprétation psychogénétique qu'il cessa de considérer la possibilité d'une composante héréditaire de l'autisme.

    Le terme "autisme" apparaît pour la première fois en 1968, dans la deuxième édition du manuel de diagnostic et de classification des troubles mentaux (DSM-II), de l'association psychiatrique américaine. L'autisme y est classifié comme la "schizophrénie infantile" et les termes "psychose symbiotique" et "psychose infantile" ont été employés comme synonymes.

    Cependant, les années 60, sont une période de questionnement sur les causes de l'autisme. En 1968, également, paraît un article qui marque le début du changement dans la façon de concevoir l'autisme et qui va vers ce qui est accepté de nos jours. Michael Rutter y publie les résultats d'une analyse exhaustive de la littérature sur l'autisme et les symptômes qui y sont associés. Il propose que ces symptômes soient regroupés en trois grandes catégories:

  • - un manque d'intérêt à socialiser avec les autres personnes;

  • - des perturbations de communication plutôt au niveau qualitatif que quantitatif;

  • - un manque d'imagination manifesté par des intérêts très limités ou des comportements rituels.

  • Rutter a de plus été le premier à spécifier que l'apparition de ces symptômes devait se faire avant l'âge de 3 ans. Au cours des années 70, l'idée fait, petit à petit, son chemin que l'autisme n'est plus une seule entité. En 1979, Lorna Wing propose que l'autisme soit un trouble parmi d'autres, dont le coeur des problèmes se situe au niveau de troubles de socialisation, de langage et d'intérêt/comportement.
     
     

    C. Apparition du terme TED

    En 1980, dans la troisième version du DSM, on voit apparaître le reflet de ce changement de perception. L'autisme s'appelle maintenant "l'autisme infantile" et est regroupé, avec trois autres troubles, dans une nouvelle rubrique intitulée "troubles envahissants du développement" (TED). Les TED sont définis comme un groupe de troubles sévères et précoces, caractérisés par des retards et des déformations du développement des habiletés sociales, cognitives et du développement de la communication.

    Le DSM-III-R, publié en 1987, regroupe les troubles faisant partie des TED, les faisant passer de quatre à deux: l'autisme et les TED non spécifiques. Pour la première fois, les critères utilisés pour poser le diagnostic sont concrets et opérationnels.
     
    En 1994, le DSM-IV positionne l'autisme comme un trouble parmi quatre autres de la catégorie TED. Aujourd'hui, font partie des TED:

            - l'autisme;

    • - le syndrome de Rett;

    • - les troubles désintégratifs de l'enfance (syndrome de Heller), aussi appelés démence infantile ou psychose désintégrative;

    • - le syndrome d'Asperger;

    • - les troubles envahissants du développement non spécifiques.

    Cette classification représente un consensus surtout américain, puisque la Classification Internationale des Maladies élaborée par des experts européens propose, dans sa dixième édition (CIM-10), huit sous-catégories pour les TED:

  • - l'autisme infantile;

  • - l'autisme atypique;

  • - le syndrome de Rett;

  • - le syndrome d'Asperger;

  • - les troubles désintégratifs de l'enfance; - les troubles d'hyperkinésie associés à la déficience intellectuelle et des mouvements stéréotypiques;

  • - les autres troubles envahissants du développement;

  • - les troubles envahissants du développement non spécifiques.

  • Nous pouvons retenir de cette différence qu'à défaut de s'entendre sur la classification et l'organisation des sous-catégories, les deux systèmes de classification tombent d'accord sur la notion des TED. Cette notion est l'aboutissement d'un processus d'évaluation de l'ensemble des symptômes présentés non seulement par des gens ayant la symptomatologie de l'autisme, mais également des gens présentant une symptomatologie semblable. Le résultat est l'identification de d'autres troubles regroupés dans la même grande catégorie.
     
     

    D. Deux conceptions différentes: l'européenne et l'américaine

    Il est utile de noter que le point de vue américain diverge de l'européen quant aux critères de classification utilisés pour établir un diagnostic, avec un impact sur l'intervention subséquente. La communauté médicale française a sa propre classification des maladies mentales (qui situe l'autisme dans la catégorie générale des psychoses infantiles (CCNE, 1996)) et n'utilise pas les classifications diagnostiques internationales reconnues par la communauté scientifique comme validées et fiables.

    Il n'y a pas de concordance entre les descripteurs principaux des différentes classifications. La majorité des psychiatres français privilégie l'hypothèse de l'origine psychogénétique et dirige ainsi les enfants vers le secteur psychiatrique avec une prise en charge d'inspiration psychanalytique. Au Québec, nous suivons au contraire le modèle américain.

    Bien que le diagnostic doit être posé par un psychiatre, l'hypothèse de l'origine organique des troubles du développement y est plus largement acceptée et les enfants tendent plutôt à bénéficier d'une éducation spécialisée spécifique à leurs caractéristiques en leur permettant de s'épanouir au maximum de leur personnalité.
     
     

    E. Définition

    La définition de l'autisme, selon le DSM-IV (1996, p.79), est mondialement reconnue (sinon utilisée). Les caractéristiques essentielles en sont "un développement nettement anormal ou déficient de l'interaction sociale et de la communication, et un répertoire considérablement restreint d'activités et d'intérêts. Les manifestations du trouble varient largement selon le stade de développement et l'âge chronologique" de la personne.

    Les critères diagnostiques du Trouble autistique (toujours selon le DSM-IV, sous le code 299.00) se retrouvent dans trois sphères et douze éléments:

    A) Un total de six (ou plus) parmi les éléments décrits en (1), (2) et (3), dont au moins deux de (1), un de (2) et un de (3):

    (1) altération qualitative des interactions sociales, comme témoignent au moins deux des éléments suivants:

  • (a) altération marquée dans l'utilisation, pour réguler les interactions sociales, les comportements non verbaux multiples, tels que le contact oculaire, la mimique faciale, les postures corporelles, les gestes;

  • (b) incapacité à établir des relations avec les pairs correspondant au niveau de développement;

  • (c) le sujet ne cherche pas spontanément à partager ses plaisirs, ses intérêts ou ses réussites avec d'autres personnes (par ex: il ne cherche pas à montrer, à désigner du doigt ou à apporter les objets qui l'intéressent);

  • (d) manque de réciprocité sociale ou émotionnelle.

  • (2) altération qualitative de la communication, comme en témoigne au moins un des éléments suivants:

  • (a) retard ou absence totale de développement du langage parlé (sans tentative de compensation par d'autres modes de communication, comme le geste ou la mimique);

  • (b) chez les sujets maîtrisant suffisamment le langage, incapacité marquée à engager ou à soutenir une conversation avec autrui;

  • (c) usage stéréotypé et répétitif du langage, ou langage idiosyncrasique;

  • (d) absence d'un jeu de "faire semblant" varié et spontané, ou d'un jeu d'imitation sociale correspondant au niveau de développement.

  • (3) caractère restreint, répétitif et stéréotypé des comportements, des intérêts et des activités, comme en témoigne au moins un des éléments suivants:
    (a) préoccupation circonscrite à un ou plusieurs centres d'intérêts stéréotypés et restreints, anormale soit dans son intensité, soit dans son orientation;
    (b) adhésion apparemment inflexible à des habitudes ou à des rituels spécifiques et non fonctionnels;
    (c) maniérismes moteurs stéréotypés et répétitifs (par ex: battements ou torsions des mains ou des doigts, mouvements complexes de tout le corps);
    (d) préoccupations persistantes pour certaines parties des objets.

    B) Retard ou caractère anormal du fonctionnement, débutant avant l'âge de trois ans, dans au moins un des domaines suivants: (1) interactions sociales, (2) langage nécessaire à la communication sociale, (3) jeu symbolique ou d'imagination.

    C) La perturbation n'est pas mieux expliquée par le diagnostic de Syndrome de Rett ou de Trouble désintégratif de l'enfance.
     
     

    F. Prévalence et troubles associés

    Selon le DSM-IV (1996), les études démontrent que de 2 à 5 cas d'autisme apparaissent pour 10,000 personnes. L'ANDEM (Agence Nationale pour le développement de l'Évaluation médicale) de France parle plutôt d'un taux de prévalence de 4 à 5.6 . Dans la plupart des cas, il existe un diagnostic associé de déficience intellectuelle, dont la fréquence et la gravité varient selon les auteurs. Selon Goldberg (1986) , 85 % des enfants atteints d'autisme auraient également une déficience intellectuelle, la plupart du temps grave, alors que le DSM-IV, parle de 75% des enfants autistes qui auraient une déficience mentale associée, qui serait habituellement de sévérité moyenne (Q.I. 35-50) . Tous s'entendent pour dire que l'autisme touche plus souvent les garçons que les filles, dans une proportion de quatre à cinq hommes pour une femme, sauf l'ANDEM pour qui le "sex ratio" serait de 3 pour 1. Les variations rapportées par les études françaises peuvent s'expliquer par les différences dans la définition et la classification retenue.
     
     

    G. Les causes

    Les opinions varient sur l'origine de l'autisme, bien que la plupart s'entendent pour dire que les causes sont multiples (CCNE, 1996, p.10). Il y a grosso modo deux théories sur l'origine de l'autisme: l'hypothèse psychogénétique (privilégiée en France, comme nous l'avons vu), et l'hypothèse organique (plutôt envisagée ici en Amérique du Nord).

    Selon le CCNE (1996, p.8), la théorie psychanalytique de l'hypothèse psychogénétique explique l'autisme par une dysharmonie dans les interactions précoces entre la mère et l'enfant. Le syndrome autistique serait une modalité particulière d'organisation psychique en réponse à ce dysfonctionnement.

    La théorie psychanalytique a été développée dans les années 50, à une époque où l'on ne disposait pas des moyens actuels d'investigation du système nerveux central. Cette théorie n'a pas été construite sur des données scientifiques, mais elle s'appuie sur des études de cas et propose des modèles d'explication des symptômes à partir de concepts psychanalytiques. Il n'existe aucune étude épidémiologique permettant d'étayer cette théorie.

    Au contraire, des études entreprises dans les années 70, et, surtout anglo-saxonnes, mais corroborées par Fombonne (1995), montrent qu'il n'y a pas d'arguments en faveur des facteurs environnementaux, particulièrement ceux liés à la dépression de la mère. Si on suit les enfants de mères souffrant de dépressions sévères récurrentes, on constate qu'il n'y a pas d'association avec l'autisme. Les enfants élevés dans des conditions extrêmement défavorables comme certains enfants élevés en institutions ou en situation de carence affective ne sont pas sur-représentés dans la population des personnes autistes.

    Introduite dès 1965 par Bernard Rimland, l'hypothèse de l'origine organique de l'autisme est maintenant étayée par des études épidémiologiques qui en éclairent certaines facettes (CCNE, 1996, p.8).

    a) Facteurs infectieux

    Dans la catégorie des facteurs infectieux, on note que leur influence n'est pas démontrée. Bien que le DSM-IV (1996, p.81) mentionne que le syndrome autistique peut être associé à la rubéole congénitale, cela n'est pas concluant puisque certains cas de rubéole congénitale s'améliorent au fil du développement, contrairement à ce qui est observé dans l'autisme.

    b) Facteurs génétiques

    Les facteurs génétiques sont plus susceptibles d'apporter une explication, quoique partielle. Tant le CCNE que le DSM-IV affirment qu'il existe un risque accru de trouble autistique dans la fratrie des sujets atteints du trouble. Ce risque est de 3% (CCNE), ce qui est environ 60 fois plus élevé que dans la population en général. D'autre part, il existe une incidence élevée chez les parents aux premiers degrés (10% chez les parents et 20% chez les frères et soeurs) d'anomalies du développement du langage ou des relations sociales proches de celles observées dans l'autisme.

    Ces anomalies sont toutefois d'intensité mineure (phénotype élargi de l'autisme). Les études entreprises sur les jumeaux montrent chez les monozygotes une concordance de 60 à 70% et de 90% si l'on tient compte du phénotype élargi. Chez les dizygotes, la concordance est de 3 à 4 % et de 10% si l'on tient compte du phénotype élargi.

    Certaines maladies génétiques ou affections médicales ou neurologiques peuvent être associées à l'autisme (CCNE, 1996 et DSM-IV, 1996). Cette association serait d'environ 10% (CCNE). En ce qui concerne la sclérose tubéreuse, on constate que de 1 à 4 % des enfants autistes en sont atteints, alors que de 20 à 40% des enfants ayant la sclérose tubéreuse ont un syndrome autistique. Environ 5% des enfants autistes ont le syndrome de l'X fragile, mais ce pourcentage n'est pas plus élevé que chez les autres garçons déficients intellectuels non autistes. Inversement, 30 à 40% des garçons atteints du syndrome de l'X fragile ont un syndrome autistique.

    Mais il y a trop de filles atteintes d'autisme pour que le syndrome soit uniquement lié au chromosome X. L'autisme serait le trouble psychopathologique le plus largement transmis. Les facteurs génétiques semblent donc déterminants. Les données disponibles suggèrent qu'il ne s'agit pas d'une maladie monogénique (CCNE).

    c) Facteurs neurobiologiques

    Pour certains (CHU de Tours, en France, cité dans CCNE), des études du taux de sérotonine dans le sang conduiraient à penser que les systèmes producteurs et régulateurs des catécholamines pourraient être impliqués dans la physiopathologie du syndrome de l'autisme. Cependant, cette hypothèse est considérée comme n'ayant aucune valeur diagnostique par le DSM-IV (1996).

    d) Facteurs cérébraux

    D'autres chercheurs se sont penchés sur le dysfonctionnement du cerveau et, par imagerie cérébrale, ont essayé de comprendre l'autisme (Bachevalier, 1994; Chesselet, 1984; Courchesne, 1995; Gedye, 1991; Goodwin et al, 1971; Hashimoto et al, 1989, 1995; McKelvey et al, 1995; Nowell et al, 1990; Piven et al, 1995; Thivierge et al, 1990; Zibovicus et al, 1995). Une étude du débit sanguin cérébral a permis de constater un hypodébit frontal chez les enfants autistes âgés de 3 ans. Un nouvel examen chez ces enfants, à l'âge de 6 ans, a montré que le débit était devenu normal. Ces résultats suggèrent un retard de la maturation métabolique des lobes frontaux chez les enfants autistes (CHU de Tours, cité dans CCNE, 1996).

    *Paradis, Suzanne. (1997). Revue de littérature sur l'autisme. Granby: Les Centres Butters-Savoy et Horizon

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    Commentaires
    E
    merci pour toutes ces informations...
    Répondre
    S
    Bravo pour votre courage et merci pour toutes ces nombreuses informations.
    Répondre
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