Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
"Au bonheur d'Elise"
19 mars 2012

L'infiltrée ... témoignage d'une éducatrice, Maman d'enfant autiste

Cette semaine j'ai répondu, avec quelques collègues, à l'invitation d'un grand centre psychiatrique qui ouvrait ses portes à l'occasion de "la semaine de la santé mentale". Cette visite, réservée aux professionnels partenaires, débutait par une table ronde sur la pédopsychiatrie dans le département puis par la visite et présentation de deux unités : l'hospitalisation temps plein et l'hôpital de jour.

La table ronde est animée par un cadre de santé qui nous présente l'actuel dispositif pédopsychiatrique dans notre département : il distingue les divers structures (cattp, cmp, hj, htp), décrit les missions de chaque structure et les professionnels qui y interviennent, énumère les problèmatiques des patients et parle de la politique d'économie qui touche le secteur et de ses répercutions. J'y apprends par exemple qu'à l'heure d'aujourd'hui, une journée d'hôpital de jour coûte 800€ par enfant et 1 100€ la journée quand il s'agit d'hospitalisation temps plein... (mais il paraît que l'heure est aux économies...).

Vient ensuite un temps où les professionnels invités peuvent poser leurs questions... J'attends sagement mon tour puis me lance :

J'aimerais savoir :

- Quelles sont les spécificités des prises en charge en pédopsychiatrie ?

- Quelles sont les influences ou approches retenues ?

La réponse est claire et sans détour :

- C'est le médecin psychiatre qui chapote les unités qui en décide. (Petite précision à avoir en tête : l'actuel médecin psychiatre supervise 3 structures et a plus de 300 dossiers d'enfants en suivi...)

Je passe sur les détails de la 1ère visite des locaux de l'hospitalisation temps plein (le public accueilli est en majorité des pré-ados et ados en "souffrances", malmenés par la vie, nous dit-on).

Passons aux choses sérieuses : l'hôpital de jour pour enfants. Nous sommes accueillis par 2 charmantes jeunes femmes (l'une infirmière, l'autre éducatrice spécialisée).

Elles commencent par nous décrire la population accueillie: enfants autistes, enfants déficients et enfants avec dysharmonie évolutive... Les enfants (de 2 à 8 ans) ne sont plus répartis, comme fut un temps, en groupe par pathologie mais désormais par tranches d'âge (3 groupes: petits, moyens, grands).

Chaque enfant vient à la carte (certains viennent seulement par demi-journées, d'autres tous les jours en fonction de leur projet thérapeutique personnalisé). C'est le médecin psychiatre qui préscrit les activités thérapeutiques dont bénéficie l'enfant (n'oublions pas le nombre d'enfants qu'il suit...).

S'en suit une visite des locaux, plûtot agréables. Groupe de vie, salle de classe, cour de récréation puis... le bassin thérapeutique. Les explications me semblant un peu vagues, je demande quelques précisions (espèrant bien provoquer quelques remous...) :

- Qui s'occupe du bassin thérapeutique ?

- Et avec quelle formation ?

Car il est bien écrit sur la porte "bassin thérapeutique" et non piscine plouf-plouf et barbotages... L'infirmière me répond qu'il s'agit de la psychomotricienne, quant à la formation elle n'est pas sûre qu'elle en ai suivi une précisemment mais c'est de l'aquathérapie : c'est un moyen d'entrer en communication avec l'enfant, d'améliorer son bien-être, de l'apaiser... puis précise qu'actuellement, les enfants qui en bénéficient sont ceux qui ne peuvent être emmenés à la piscine pour raison de propreté (ben oui... les couches spéciales piscine pour enfants n'ont pas réussi à se frayer un chemin jusqu'à l'hôpital de jour... zut alors!).

Nous arrivons ensuite dans la salle de musicothérapie et d'emblée elle précise qu'une infirmière a passé son diplôme de musicothérapeute pour assurer cette activité. Et blablabli-blablabla, les vertus musicothérapiques... jusqu'à ce qu'elle me tende une sacrée perche "activité permettant aux enfants de pouvoir s'exprimer autrement que par la parole". Là, je lève la main :

- Justement, dis-je, à propos de communication, les enfants que vous accueillez sont-ils verbaux ?

- Non, répond-t-elle, sur les 10, aucun ne parle mais fort heureusement nous avons une orthophoniste à temps plein !!!!

Je lui fais remarquer que c'est une chance incroyable, que beaucoup d'entre nous les envions car dans nos établissements, nous courons après les créneaux d'orthophonie en libéral, grosse galère... Elle détaille en disant que l'orthophoniste prend les enfants en individuel sur une matinée et le reste du temps travaille aux côtés des infirmières et éducs en journée sur les groupes et que c'est une collaboration très utile.

- Et quels moyens de communication alternatifs avez-vous mis en place ou expérimenté ?

- Euh....... là, c'est le blanc...

Je tente de préciser ma pensée :

- Je ne vois pas de pictogrammes dans les salles ?

- Vous n'utilisez aucun moyen de communication visualisé ?

- Ah si si... me répond-t-elle (me voilà un tantinet rassurée...), nous en avons, les enfants ont tous leur photo avec leur prénom dans leur groupe !

Là, j'ai une pensée émue pour certaines de mes collègues qui, depuis 20 ans, accueillent le matin des enfants non-verbaux par un immuable rituel : le groupe de paroles !!!!!!!!! Non, vous n'êtes pas seules les filles ! D'autres persistent sur la même voie que vous !!!!

Nous finissons la visite par la salle d'art-thérapie (plus communément appelé atelier pataugeoire ou barbouillage...) puis le bureau du personnel (ouah! la belle machine à café ! je suis jalouse...).

Le groupe se disperse et je rejoins nos 2 guides qui discutent avec une directrice de c.a.m.p.s. . La discussion tourne autour du fait que la psychiatrie a mauvaise presse (quelle belle prise de conscience, ça me fait chaud au coeur !) et l'infirmière nous demande si nous sommes satisfaites de la visite. La directrice se dit rassurée par cette visite et avoue que jusqu'à maintenant, elle n'avait jamais "orienté" de parents (après un diagnostic) vers les hôpitaux de jour mais plutôt vers les c.m.p., ce qui finalement revient au même, dit-elle, car nous n'avons pas d'autre solution, faute de structure "innovante".

Je rebondis sur le diagnostic et demande si tous les enfants sont diagnostiqués ?

- Non, me répond-t-on, car ce n'est pas une volonté institutionnelle. Il y a diagnostic si c'est une demande des parents et s'ils ont déjà entrepris une démarche à l'extérieur mais le médecin psychiatre et ses équipes y sont généralement opposés car cela fige l'enfant, on lui colle une étiquette alors qu'il peut encore évoluer.

Je dis quand même que parfois, et même souvent, un bon diagnostic précoce peut orienter vers des prises en charge adaptées et permettre une progression rapide. La directrice ajoute qu'effectivement c'est le cas avec l'autisme et le repèrage en C.R.A..

L'infirmière lève alors les yeux au ciel et lâche : "ah oui! l'A.B.A., qu'est-ce qu'on en entend parler de ça !!!!".

J'enchaîne en lui disant que bon nombre de ces méthodes ont fait leurs preuves à l'étranger et je lui demande si certains membres de l'équipe s'y intéressent puisqu'ils accueillent des enfants autistes. Réponse négative.... (bizarre, j m'en doutais...). Je demande si c'est simplement par manque d'intérêt ou d'information ou si c'est une volonté institutionnelle ?

- C'est une volonté institutionnelle, c'est le médecin psychiatre qui imprègne ses équipes de l'approche qu'il souhaite.

L'occasion est trop belle... c'est l'heure de la question qui tue :

- Je vais faire ma curieuse mais entre nous, vous pourriez me dire comment ont été accueillies les préconisations de l'H.A.S. par votre médecin et par l'équipe ?

Là, c'est le grand blanc, je me dis que je l'ai mis mal à l'aise (vilaine que je suis...) mais c'est bien pire .... 

- Les quoi ?! ...

Face à la mine décomposée de la directrice, je développe :

- La haute autorité de la santé qui dit que les enfants autistes ne doivent plus être pris en charge en psychiatrie, que l'approche psychanalytique est inefficace ...

Bon ben là, c'est plus le grand blanc, c'est carrément la banquise, verglacée, je manque de me péter la gueule face à leur tête façon "arrêt sur image", elles viennent d'apprendre un truc apparemment...

Je précise :

- Oui, c'est sorti le 8 mars après 2 ans d'études sur la question... ça fait grand bruit dans les médias vous savez !

Non, elles ne savent pas, de toute évidence. La grande nouvelle, comme pour les couches spéciales piscine, n'a pas franchi les murs de l'hôpital de jour. C'est grand silence sur la banquise...

Là-dessus, on leur souhaite un bon week-end. Y'a des jours où s'ouvrir au monde s'avère épuisant.

Bref, j'ai passé l'après-midi en pédopsychiatrie...

Publicité
Publicité
Commentaires
P
bonsoir à tous,<br /> <br /> <br /> <br /> pourquoi tant de haine? c'est deja si difficile de prendre en charge des personnes dites autistes que l'on devrait ne pas se battre pour telle école de pensée, je crois qu'il y a du bon partout mais que pour chaqe façon de faire (psychanalyse, comportementaliste, ...) il y aussi des limites à prendre en compte. La H.A.S. elle aussi est a prendre avec des pincettes. ses rcommandations ne valent que pour elle souvent, elle dit tout et son contraire, et si elle devait vraiment se positionner elle trouverait les moyens de faire passer des lois pour interdire telle ou telle pratique, et c'est pas le cas car on le sait bien personne n'a la science infuse! <br /> <br /> la douleur des parents c'est vrai est immense et inconsolable donc elle motive. mais je crois aussi que les parents veulent trop s'occuper de ce ui se passe ds les institutions, mais en meme temps il se passe des choses pas nettes comme on dit mais pas partout non plus. pas besoin d'être autiste pour être mal reçu à l'hopital. les personnes qui peuvent répondre aux soignants sont tout aussi maltraité ds les petits rien de la prise en charge, débat sans fin, ... c'est la nature humaine qui veut cela, on traite mal autrui pr de tas de raisons,.. notre utopie nous pousse a vouloir croire ue tout se règle avec des discours ou l'intelligence des relations, mais y croit on? moi plus du tout!
Répondre
B
démocratie oblige et retour de congés aussi,.. je m'exprime librement. ne vous en déplaise.<br /> <br /> Mon culot? seriez vous pour le monologue celui qui irait uniquement dans votre sens? Voyons!<br /> <br /> je ne partage pas du tout vos postures. <br /> <br /> Le packing, tient en voilà un sujet passionnant.<br /> <br /> savez-vous pourquoi il est pratiqué et sous quelles formes?
Répondre
H
Et voici un lien pour résumer votre point de vue, qui n'est ni plus ni moins, que du centrisme qui se croit éclairé et éclairant . <br /> <br /> <br /> <br /> Evidemment le progrès est bien loin de ce programme mou que vous nous proposez .<br /> <br /> <br /> <br /> Mais libre à vous de croire que vous participez par votre immobilisme benoît et utopique à de quelconques avancées dans le domaine de l'autisme !<br /> <br /> <br /> <br /> http://www.autismeuneapprocheplurielle.org/Lettre_ouverte_au_Conseil_de%20l-ordre_des_m-decins_et_aux%20familles_de_personnes_autistes.pdf<br /> <br /> <br /> <br /> Hervé .
Répondre
A
Bonjour <br /> <br /> <br /> <br /> Voici 12 minutes du film "l'enfant autiste et sa famille : L'évolution des pratiques des secteurs de psychiatrie infanto-juvénile".<br /> <br /> Le film témoigne, loin des polémiques et des caricatures, de la réalité du travail des secteurs de psychiatrie infanto-juvénile.<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Le lien sur You tube est : <br /> <br /> <br /> <br /> www.youtube.com/watch?v=fS9zcCTOtBU
Répondre
L
Je viens de lire l'ensemble. Très drôle ! Même si on rit jaune. Concernant les couches j'ai ma petite idée : les soignants préfèrent que les enfants soient nus. Parce que parfois, ils se "touchent" et ça intéresse beaucoup l'équipe, ce genre d'analyse, voyez-vous... on en revient à Freud, et comme ça, à défaut de faire progresser les enfants, ils auront quelque chose à écrire dans leur compte rendu ! Blague mise à part, je suis bien contente d'avoir enlevé mon fils d'un tel endroit. Il va bien, est en 6eme avec une AVS et ne rate aucun cours à cause des "soins". D'autres du collège sont à mi-temps en hôpital de jour, c'est une catastrophe, non seulement ils prennent du retard scolaire, mais en plus ils sont complètement déphasés, perdus, stigmatisés parce que des types en blouse blanche viennent les chercher devant les autres... Pour terminer, je poserai une question : comment la théorie psyk peut-elle tenir debout, lorsqu'on a 4 enfants dont un seul Asperger, 3e de la fratrie ? Je suis devenue un méchant crocodile en 2002 puis une super-maman en 2006 ??? Faudra m'expliquer docteur.
Répondre
Publicité
"Au bonheur d'Elise"
Visiteurs
Depuis la création 2 397 147
Newsletter
"Au bonheur d'Elise"
Archives
Publicité