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"Au bonheur d'Elise"
26 octobre 2012

L'enfant autiste peut-il récupérer des fonctions cognitives et sociales par le lien à l'animal ?

article publié sur :
Sandie Bélair décembre - 4 - 2008

Les relations homme-animal intéressent les jeunes chercheurs et c’est avec enthousiaste que nous accueillons leurs travaux et recherches. Après Jérôme Michalon, c’est Marine Grandgeorge , doctorante en psychologie, qui a accepté de se présenter et de nous parler de sa thèse…

 

Marine, pouvez-vous SVP vous présenter et nous parler de votre cursus universitaire?
Avant d’être en doctorat de psychologie à Rennes, j’ai effectué mon cursus universitaire à Strasbourg en Sciences de la Vie. Après m’être focalisée aux détails de l’organisme, notamment par mon année de licence de physiologie animale et biologie cellulaire, je me suis intéressée à l’animal à son entier. J’ai donc acquis des connaissances en écologie, biologie des populations et des écosystèmes et surtout éthologie. A la fin de mon cursus, j’ai donc obtenu mon Master 2 « Recherche en Ethologie et Ecophysiologie ».

Vous êtes issue de la biologie et de la science, pourquoi vous êtes vous orientée vers les sciences humaines et notamment la psychologie? Pouvez-vous nous préciser votre spécialité?
Dans le monde de la recherche actuel, il est nécessaire de décloisonner les projets et de ne pas rester centré sur sa propre discipline. C’est pourquoi j’ai voulu me diriger vers les sciences humaines et sociales et précisément vers la psychologie du développement (ma spécialité) qui reste très proche de l’éthologie humaine mais qui aborde les mêmes sujets sous un autre angle. Cette interdisciplinarité me permet d’avancer dans la recherche sans œillère, ou du moins, en les réduisant au maximum.

Vous portez semble t-il un grand intérêt aux relations homme-animal. Pourquoi?
Cet intérêt à des sources multiples. La première remonte à l’enfance ; en effet, j’ai eu la chance de grandir entourée d’animaux (chien, chat, tortue, oiseaux, hamsters, …). Les liens que nous, humains, pouvons développer avec les animaux sont des choses ancrées en moi et donc naturelles. La deuxième fut mon stage de Master 2 que j’ai effectué avec D. Grémillet dans au DEPE à Strasbourg. J’ai travaillé sur une thématique touchant les oiseaux marins, et je me suis beaucoup documentée sur l’impact de l’Homme sur ces populations de la Mer du Nord. Mon encadrant m’a donné l’envie de faire de la recherche et mes diverses expériences m’ont finalement conduites à mettre au cœur de mon projet les relations entre les Hommes et les Animaux.

Vous préparez d’ailleurs une thèse sur les relations entre des enfants autistes et des animaux. Pouvez-vous nous expliquer l’origine de cette recherche (question de départ) et nous présenter votre travail? Quelles sont vos hypothèses?

En fait, mon sujet s’intéresse plus largement aux relations que les enfants autistes développent avec les animaux domestiques. Au départ, je n’avais pas arrêté de choix d’espèce pour avancer sans œillères. Désormais, je travaille plus sur 3 espèces, par choix méthodologique, à savoir le chien, le chat mais aussi le cochon d’Inde.

En ce qui concerne la genèse de ce projet…en toute franchise, je n’en ai pas été l’actrice principale mais celle qui a permis de lancer un projet sommeillant depuis quelques années dans le tiroir de deux chercheurs : M. Hausberger, directrice du laboratoire d’éthologie à Rennes, et S. Tordjman, professeur en pédopsychiatrie.

L’idée de cette recherche est partie de l’autisme. Ce syndrome clinique est défini par un ensemble de troubles du comportement comme un déficit des interactions sociales et de la communication. L’hétérogénéité du syndrome implique une hétérogénéité des prises en charge des patients et des thérapies qui leur sont proposées. Des thérapies alternatives existent comme la musicothérapie, l’arthérapie ou encore la thérapie assistée par l’animal. Si cette dernière ne fait pas l’objet d’un consensus, des observations suggèrent que les enfants autistes amélioreraient leur communication sociale en présence d’animaux (e.g. dauphin, cheval). Toutefois, il s’est révélé qu’il y avait un manque de recherche dans ce domaine.

L’utilisation de l’animal comme moyen thérapeutique a de bons appuis théoriques pour les individus souffrant d’autisme, et notamment les enfants. L’animal est un stimulus multisensoriel, globalement plus prévisible et plus facile à décoder qu’un être humain. Les animaux domestiques semblent jouer un rôle crucial dans le développement cognitif et social des enfants. Les animaux domestiques pourraient agir théoriquement en tant que substitut social, permettant aux enfants, et plus particulièrement ceux souffrant de troubles envahissant du développement, d’établir des liens avec eux, puis de prolonger/transférer éventuellement ces liens aux autres êtres humains.

La formation de liens sociaux, difficile pour les enfants autistes, pourrait donc être théoriquement facilitée par la présence d’un animal domestique. Avant d’envisager de mettre en place une thérapie, notamment celle assistée par l’animal, il nous a donc semblé nécessaire (1) de mieux appréhender le type de relation établie entre l’enfant et l’animal, (2) d’obtenir des données objectives et quantifiables quant aux apports de cette relation, et (3) d’examiner les modalités d’interaction et leurs conséquences sur l’aptitude de l’enfant à communiquer et développer ses compétences cognitives.

Comment procédez-vous (démarche), sur combien d’enfants portent vos travaux? Quels sont vos outils?

En premier lieu, j’ai eu l’occasion de réaliser 250 entretiens directifs avec des parents d’enfants autistes (tout âge) sur les relations qu’ils avaient pu établir avec des animaux. A partir de là, l’étude s’est découpée en 2 phases, à savoir (1) la définition de la relation entre l’enfant de 6 à 12 ans et l’animal familier (chien et/ou chat) dans le contexte habituel grâce à des observations éthologiques, et (2) la définition des stratégies d’approche des enfants du même âge face à un animal inconnu (i.e. cochon d’Inde). Ces observations sont faites pour environ une vingtaine d’enfants autistes auxquels j’ai associées une vingtaine d’enfants au développement typique (même âge, même sexe).
Pour ouvrir mon sujet de recherche, j’ai, à terme, envie de réfléchir à des clés à donner aux thérapeutes utilisant l’animal afin d’améliorer l’efficacité de leur démarche.

Pour ouvrir votre sujet de recherche, vous parlez de clés, qu’entendez-vous par ce terme? Parlez-vous de modèles, de démarches, de grilles de lecture? Pouvez-vous préciser vos propos SVP?
Pour l’instant, les clés peuvent être multiples, comme vous les citez. D’une part, j’aimerais créer, par exemple, une grille de lecture simple afin de caractériser la relation qui s’établit entre l’enfant et l’animal (ex : quelle modalité sensorielle est privilégiée), ce qui permettrait d’affiner les prises en charge. D’autre part, j’aimerais dégager grâce à ma recherche si des caractéristiques générales de l’enfant, de l’animal ou de l’environnement ont tendance à être associée à un type de comportement afin de le privilégier ou de ne pas aller contre. Je m’explique : si globalement, il semble que les enfants de 6 à 9 ans ne privilégient pas spontanément le canal sensoriel tactile quand ils sont avec un chien dans leur milieu familier, on pourrait en tenir compte en thérapie, par exemple, pour simuler cette sensorialité si l’enfant est en confiance avec l’animal ou alors utiliser les autres canaux sensoriels pour le mettre en confiance.

Pouvez-vous déjà nous faire part de vos premiers résultats? On est très curieux!!!
Je suis désolée, mais je vais vous décevoir…Il est encore trop tôt pour donner des résultats fiables et certains. Je peux vous dire simplement que l’environnement social de l’enfant autiste (constitué par les animaux familiers mais aussi par la fratrie et les parents) joue beaucoup sur la relation qu’il développe avec les animaux mais aussi plus largement (e.g. développement du langage). Pour ceux que cela intéresse, je publie régulièrement des informations sur mon blog.

Qu’attendez-vous d’une telle recherche?
De cette recherche, j’attends surtout une connaissance plus fine des modalités d’interactions privilégiées par les enfants autistes mais aussi une meilleure connaissance des facteurs pouvant faire varier la qualité de la relation. En effet, pourquoi un enfant, qu’il soit autiste ou non, est plus attiré qu’un autre par un animal ?
Et surtout, cela va peut être vous étonner, j’attends que l’on démystifie le pouvoir de l’animal comme « guérisseur ».

Comment a t elle été accueillie par l’Université?
Au delà de l’Université, c’est plus l’accueil par tous les membres du laboratoire et des chercheurs associés au projet qui m’importait. Il fut très bon car c’est un sujet qui touche tout le monde. Ce qui me permet d’échanger facilement et de communiquer autour de ma recherche.

Que pensez-vous de l’engouement actuel pour les interactions homme-animal et pour l’utilisation à des fins thérapeutiques de l’animal?
En toute honnêteté, cela me fait un peu peur car il y a toujours des gens malhonnêtes qui profitent de la détresse des familles. Mais quand les thérapies sont utilisées aussi bien dans le respect des animaux, des patients et des thérapeutes, je n’y vois que du bon. Gardons cependant toujours à l’esprit que l’animal ne sera jamais guérisseur mais source de bien être et uniquement pour certains patients.

Quel avenir pour cette pratique selon vous?
En veillant au respect de chaque protagoniste, je pense qu’elle peut vraiment apporter un plus dans l’alternative aux thérapies classiques. Cependant, à mon humble avis, une réglementation devrait être mise en place pour permettre que chaque chose se passe du mieux possible.

Après votre doctorat vous souhaitez vous orienter vers quel domaine?
Mes projets post doctorat sont divers car je ne veux me fermer à aucune opportunité. Mais, vous vous en doutez, comme tout jeune chercheur, je souhaite décrocher un poste de maître de conférences pour continuer mes recherches mais aussi sensibiliser les étudiants à cette thématique en enseignant à l’Université.

Pour conclure, souhaitez-vous ajouter un autre élément?
Pour finir, je voulais simplement vous encourager à continuer d’informer le grand public sur ce vaste domaine que sont les relations entre les hommes et les animaux. Merci à vous.

Un grand merci à Marine pour sa participation et bon courage à elle pour la suite de sa thèse… Nous espérons qu’elle viendra nous présenter les conclusions dès que ses travaux seront achevés. En attendant, n’hésitez pas à lui poser des questions et à aller visiter son blog!

Pour en savoir plus:

Le blog de Marine : www.relationenfantanimal.blogspot.com
La bibliographie de Marine : http://mabibliographie.blogspot.com

Sandie

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25 octobre 2012

Comme cette Maman inscrivez vous sur Egalited : de l'entraide, de l'info & de la convivialité !

Je voulais juste dire un GRAAAAND MERCIIII !!! À tous ceux qui m'avaient aidée sur docti, (père castor, ...)
À vous tous ici, à ceux qui sont à l'origine du site "Egalited"!!!
Les progrès de mon fils, l'efficacité de la PEC, la date de la réunion de l'équipe pédagogique que j'ai réussi à fixer, le complément 4 de l'AEEH qui vient de nous être accordé, ... Je vous le dois!!!!

Vous ne fournissez pas d'efforts vains, vous ne vous démenez pas pour rien, vous réussissez à transformer le quotidien des familles et à améliorer le pronostic de nos loulous!!!

MERCI!!!!
25 octobre 2012

Magazine Déclic - octobre 2012 - NEWS

Déclic News Octobre 2012 
  Handicaps : vivre mieux aujourd'hui et préparer demain  
     
  > Fratrie, préparer l’avenir…
> J.O de Londres : la maman d’un champion raconte
> L’éducation structurée pour les autistes
> Pas d’établissement au Québec : c’est mieux ?
> Guides Déclic, tout chauds !
> Au sommaire du prochain numéro
 
   
  Fratrie, préparer l’avenir…
Ils s’entendent très bien aujourd’hui, mais seront-ils solidaires plus tard ? Penser à l’avenir de ses enfants, lorsque l’un d’eux est handicapé est source d’angoisse pour bien des parents. 8 experts choisis par Déclic vous aident à poser les bonnes questions, à réfléchir et à anticiper les problèmes délicats comme le logement, les ressources ou la tutelle… et à gagner en sérénité.
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  J.O de Londres: la maman d’un champion raconte
Ils avaient tous l’air si épanouis, ces athlètes des jeux paralympiques de Londres, que nous avons voulu connaître le secret de fabrication. Et comme il y a souvent une maman derrière un champion, Déclic a interviewé celle de Dominique Rumeau.
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  Abonnez-vous à Déclic !  
   
  L’éducation structurée pour les autistes
Jardiner, bricoler, s’habiller, mettre la table… L’éducation structurée est un moyen d’encourager et de valoriser toutes les activités du quotidien. Visite dans un établissement lyonnais qui la pratique.
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  Pas d’établissement au Québec : c’est mieux ?
Au Québec, les établissements ont définitivement mis la clé sous la porte il y a 40 ans pour laisser la place à une prise en charge individualisée. Mais ce changement, censé permettre une meilleure intégration du handicap dans la société, n’a pas que des avantages…
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Guides Déclic, tout chauds !
Parents, vos droits, Les aides financières, Après ses 18 ans : trois guides Déclic revus et augmentés avec de nouvelles infos, les dernières versions des textes de loi en matière d’emploi et de congés spéciaux pour les parents d’enfants handicapés, d’aides financières pour Lulu… et pour vous !
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  Au sommaire du prochain numéro de Déclic
La question d’actu Handicaps sensoriels : quel accès à la culture ?
Démarche : Prêt pour le passage devant le TCI ?
Reportage photo Maisons de parents : aux portes de l’hôpital
Banc d’essai Des poussettes pour petits et grands
Psycho Toilette : une question à fleur de peau
Apprentissage & Formation Lui apprendre la valeur de l’argent
La parole aux parents La prescription de 7 parents à leur médecin
Notre dossier spécial « Préparer l’avenir en pensant à ses frères et sœurs »
Retrouvez le sommaire complet
 
   
  Autisme France  
 

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Tél. : 04 72 84 00 10 - Fax : 04 72 84 21 10
declic@agenceinmediasres.fr - www.magazine-declic.com

25 octobre 2012

Le cinéma Kosmos & ciné-ma-différence à Fontenay-sous-Bois

L'association Envol Loisirs organise en collaboration avec le cinéma Kosmos des séances ouvertes à tous et adaptées aux personnes handicapées mentales. Ici sont tolérés les émotions, les mouvements, les agitations de celles et ceux qui ne peuvent les maîtriser.

"A cette séance la norme c’est nous "

 

le président


Merci aux 110 personnes présentes ce soir pour les Saveurs du Palais, pour leur enthousiasme, leurs encouragements, leur goût pour les vins bio-dynamiques proposés (Bergerac et Cahors) et, c'est vrai, nous ne le disons pas assez, le Cinéma Kosmos c'est 3,5 euros la place !

25 octobre 2012

Le Projet de loi instituant la Journée mondiale de sensibilisation à l'autisme adopté (...) par la Chambre des communes

article publié sur le site de la Fédération québécoise de l'autisme

23 octobre 2012 - OTTAWA – Aujourd’hui, une semaine après son adoption par le Comité de la santé de la Chambre des communes, le projet de loi S-206 du sénateur libéral Jim Munson, Loi instituant la Journée mondiale de sensibilisation à l’autisme, a été adopté de façon expéditive par les députés de la Chambre des communes.

« Il s’agit d’un moment historique. Octobre est le mois de sensibilisation à l’autisme au pays et le moment ne pouvait être mieux choisi pour que le Parlement adopte le projet de loi S-206 », a déclaré le sénateur Munson. « Chaque année dorénavant, le 2 avril sera reconnu officiellement comme la Journée mondiale de sensibilisation à l’autisme au Canada. »

Seulement un petit nombre de projets de loi d’initiative parlementaire parmi des centaines présentés durant une session parlementaire deviennent loi. Le projet de loi instituant la Journée mondiale de sensibilisation à l’autisme est l’un des rares à recevoir le soutien des députés libéraux, conservateurs, néo-démocrates, bloquistes, verts et indépendants. Initialement présenté au Sénat par le sénateur Munson, le projet de loi S-206 a été parrainé par M. Harold Albrecht, député de Kitchener—Conestoga, à la Chambre des communes.

« J’espère que les familles qui sont touchées par l’autisme considéreront ce geste comme un signe leur rappelant qu’ils ne sont pas tombés dans l’oubli », a-t-il ajouté. « Il reste encore beaucoup de travail à faire, mais l’adoption de ce projet de loi illustre que les législateurs canadiens se soucient de l’autisme et de la sensibilisation à cette maladie. »

 

Renseignements :

L’honorable Jim Munson, sénateur
munsoj@sen.parl.gc.ca
613-947-2504
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25 octobre 2012

Le monde va trop vite pour l'enfant autiste

article publié dans La Recherche

Plusieurs expériences montrent que les enfants autistes peinent à décoder le monde environnant : son tempo est trop rapide pour eux. D'où l'idée que des désordres perceptifs seraient au coeur du syndrome. Un nouvel espoir émerge : aider les enfants en ralentissant « leur monde ».

L a science-fiction s'inspire parfois de la science mais précède souvent celle-ci. En 1964, Philip K. Dick publiait Glissement de temps sur Mars, où un médecin évoque une nouvelle théorie de l'autisme : « Elle suppose un trouble dans la perception de la durée chez l'individu autiste, de sorte que son environnement est tellement accéléré qu'il ne peut plus l'affronter ; en fait, il est incapable de le percevoir correctement, exactement comme s'il regardait un programme de télévision accéléré, dans lequel les objets fileraient si vite qu'ils en deviendraient invisibles, et dont le son ne serait plus qu'un charabia incompréhensible... » Le monde irait-il trop vite pour certaines personnes atteintes d'autisme, ce trouble du développement qui affecte le langage, la communication non verbale, les interactions sociales et les comportements ? Nos travaux de recherche, menés en collaboration avec différents laboratoires du CNRS à Marseille et à Aix-en-Provence depuis une quinzaine d'années, semblent donner du crédit à cette intuition du romancier.

 

Mimiques faciales

En 1996, avec Scania de Schonen, de l'université René-Descartes, et Béatrice de Gelder, de l'université de Tilburg aux Pays-Bas, nous avons montré que les aspects des visages les plus difficiles à traiter pour des enfants autistes concernent les mouvements des yeux et des lèvres, et les mimiques faciales émotionnelles.

 

Posture corporelle

Parallèlement, avec Daniel Mestre et Guillaume Masson de l'université Aix-Marseille, nous avons étudié la perception visuelle des mouvements physiques dans l'autisme avec l'expérience suivante. Des enfants autistes de faible niveau de développement (verbal et moteur) regardaient une scène visuelle animée constituée de cercles concentriques qui se dilataient et se contractaient tour à tour. L'enfant immobile avait ainsi l'impression d'être dans un tunnel qui avance et recule alternativement. Dans une telle situation, un enfant de niveau de développement normal oscille d'avant en arrière de manière synchrone avec le mouvement de l'image. Parfois, il finit même par tomber. Il compense ainsi l'illusion de voir son environnement se déplacer. Dans notre expérience, les enfants autistes oscillaient peu, voire pas du tout. Conclusion : ils ne savent pas utiliser correctement les informations visuelles sur les mouvements de leur environnement pour adapter la posture globale de leur corps [1] .

Ce résultat a été confirmé et précisé : les enfants autistes de faible niveau de développement ont d'autant plus de difficultés à percevoir et à intégrer les mouvements de l'environnement que la vitesse desdits mouvements est rapide. Cela pourrait expliquer en partie les très fréquents troubles moteurs retrouvés dans la population autistique, et leur corrélation avec la sévérité du syndrome.

Puis, en 2001, nous avons fait, un peu fortuitement, une découverte importante : les enfants autistes présentent de relativement bonnes capacités de reconnaissance des mouvements faciaux, émotionnels (joie, tristesse...) ou langagiers (prononciation de voyelles), si on leur montre ces mouvements sur une vidéo à une vitesse deux fois plus lente que la « normale ». Dans la vie courante, un sourire dure en moyenne une seconde. Or dans les séquences filmées que nous avions montées pour notre expérience, il se trouve que le sourire durait deux secondes. Nous avons constaté alors avec étonnement que la plupart des enfants autistes qui ont vu ce film, réussissaient à reconnaître les mimiques faciales au ralenti [2] .

 

Troubles sensoriels

Ces résultats et d'autres nous ont conduits à proposer dès 2002 le concept de « Malvoyance de l'E-Motion ». De quoi s'agit-il ? Notre hypothèse est que certains déficits des enfants autistes pourraient découler d'un trouble de l'intégration visuo-motrice de tous les mouvements, aussi bien ceux du monde physique que ceux des êtres vivants, qu'ils soient ou non chargés d'émotions [3] . En d'autres termes, l'environnement visuel change trop vite jusqu'à générer parfois chez eux une aversion pour les stimuli trop rapides. Cela expliquerait notamment leur évitement du regard, signe quasi spécifique de l'autisme. Et ces particularités sensorielles entraîneraient en cascade des difficultés à utiliser les informations visuelles dynamiques rapides pour décoder, reconnaître, comprendre et imiter correctement et en temps réel les mimiques faciales et les mouvements corporels d'autrui. De là viendrait leur problème pour interagir socialement de manière synchrone et adaptée avec un interlocuteur.

Plusieurs témoignages d'adultes autistes de « haut niveau », ou atteints du syndrome d'Asperger * , confortent notre approche. Ainsi Temple Grandin, devenue célèbre par ses témoignages, écrit : « Il se pourrait que les problèmes de contact oculaire rencontrés par les autistes résultent en partie d'une incapacité à supporter le mouvement des yeux d'un interlocuteur. Un autiste a raconté qu'il lui était difficile de regarder les yeux de quelqu'un parce qu'ils n'étaient jamais immobiles. » Ces difficultés à percevoir un environnement visuel perpétuellement changeant expliqueraient la propension des personnes autistes à se concentrer sur les détails visuels statiques et à développer des habiletés visuo-spatiales parfois très supérieures à la normale. Elles enregistreraient beaucoup plus de détails statiques dans leur mémoire spatiale. Et cela leur permettrait, par exemple, de réaliser des puzzles très rapidement en se concentrant uniquement sur le contour des pièces.

Ces difficultés expliqueraient aussi un certain nombre de comportements sensori-moteurs répétitifs, destinés à « ralentir » le monde environnant. Donna Williams, une autre adulte autiste, témoigne : « Le changement perpétuel qu'il fallait affronter partout ne me donnait jamais le temps de me préparer... La tension qu'exigeait la nécessité d'attraper les choses au vol pour les assimiler fut le plus souvent trop forte pour moi. Il me fallut trouver un biais pour ralentir les choses afin de m'accorder le temps de négocier avec elles. [...] L'un des procédés qui me permettait de ralentir le monde consistait soit à cligner des yeux, soit encore à éteindre et à allumer alternativement la lumière rapidement... »

 

Flux sonore

En 2002, avec Jean Massion, directeur de recherche émérite au CNRS, nous nous sommes aussi demandé si les mêmes problèmes existeraient à l'égard des sons et de l'anticipation des mouvements. Premier résultat : sur le plan auditif, le monde sonore semble lui aussi aller trop vite pour les enfants autistes. Avec Véronique Rey, de l'université Aix-Marseille, nous avons en effet montré que certains enfants autistes perçoivent un phonème complexe tel que MNA (constitué de la superposition des phonèmes MA et NA) de manière incorrecte, lorsque celui-ci est présenté en vitesse normale. En revanche, quand la vitesse du flux sonore est deux fois plus lente, le traitement auditif tend à se normaliser. Plusieurs équipes utilisant la magnéto-encéphalographie ont confirmé récemment que certaines personnes autistes décodaient avec peine le langage à cause de la trop grande rapidité du flux de la parole. D'ailleurs, Daniel Tammett, autre adulte autiste célèbre, raconte : « G. parlait très vite et parfois je la trouvais difficile à suivre... D'une certaine façon, la succession rapide des questions avait quelque chose d'intrusif, comme le plic-ploc continu de la pluie sur mon crâne, et il me fallait du temps pour lui répondre. » En fait, un tel trouble du traitement du flux verbal et son amélioration par un ralentissement de la parole ont déjà été démontrés il y a trente ans chez certains enfants dysphasiques et dyslexiques. Or les troubles du langage des jeunes autistes présentent de nombreux points communs avec ceux de ces enfants.

Deuxième résultat : l'anticipation des mouvements pose aussi un problème aux enfants autistes, en partie parce qu'ils utilisent moins bien les informations proprioceptives * que les enfants ordinaires. C'est ce que nous avons mis en évidence avec Christina Schmitz et Christine Assaïante du CNRS à Marseille (lire « Anticiper un mouvement », p. 58).

L'ensemble de ces résultats expérimentaux nous a conduits à élargir le modèle de la malvoyance de l'E-motion, qui concernait uniquement la sphère visuelle. Aujourd'hui, nous proposons que des désordres du traitement spatial et temporel des informations émanant de plusieurs sens sont au coeur de l'autisme [4] . En d'autres termes, certaines personnes autistes n'arriveraient pas à percevoir en temps réel le flux continu rapide d'informations visuelles, auditives et proprioceptives en provenance de leur environnement.

 

Désynchronisation

Elles intégreraient difficilement et de manière atypique ces informations dans leur propre corps. Incapables d'accorder leur rythme à celui d'un environnement perpétuellement changeant, elles y répondraient souvent avec un temps de latence. La désynchronisation des échanges langagiers, émotionnels et sociaux propre à l'autisme résulterait au moins en partie de ces désordres perceptifs [fig. 1] . Pour s'adapter à un monde dans lequel les changements sont trop rapides pour elle, la personne autiste aura logiquement tendance à vouloir le ralentir, voire l'arrêter, ou le fragmenter spatialement en de multiples détails plus faciles à percevoir et à intégrer.

 

Ralenti

Comment utiliser ces résultats au bénéfice des personnes autistes ? Tout récemment, avec France Lainé, de l'université McGill à Montréal, nous avons mesuré chez des enfants autistes l'impact d'une présentation ralentie de signaux visuels (mouvements faciaux et corporels) et auditifs (sons, mots, phrases) sur ordinateur. Un logiciel a été spécialement conçu à cet effet par Stéphane Rauzy et Philippe Blache de l'université Aix-Marseille : il ralentit de manière synchrone les signaux visuels et auditifs, sans altérer la fluidité des mouvements, ni l'intelligibilité de la voix. Nous avons utilisé ce logiciel, qui est encore à l'état de prototype, dans un contexte expérimental. Résultat : certains enfants et adolescents autistes, en particulier les plus sévèrement atteints, reconnaissent mieux des mimiques faciales et imitent mieux des gestes faciaux et corporels présentés au ralenti, et ils comprennent mieux les consignes verbales présentées lentement [5] . Chaque enfant autiste semble avoir son propre « tempo perceptif » : les uns ont besoin d'un léger ralentissement, les autres d'un ralentissement plus important.

La prochaine étape consistera à développer ce logiciel et à en mesurer son utilité chez des enfants autistes, lors de sessions répétées de ralentissement. Enfin, à plus long terme, l'idée est d'utiliser le ralentissement dans la vie quotidienne des enfants autistes avec l'espoir de remédier à leurs fonctions altérées.

Bruno Gepner ET Carole Tardif

L'essentiel

- L'ENVIRONNEMENT sonore et visuel change trop vite pour certaines personnes autistes.

- EN DÉCOULENT UNE MAUVAISE COMPRÉHENSION du langage verbal et corporel d'autrui, donc des difficultés d'interaction.

- UN LOGICIEL en cours de développement, qui ralentit le son et l'image, pourrait les aider.

Anticiper un mouvement

Dans la tâche dite du « garçon de café » (par allusion au plateau que celui-ci porte sur sa main), le sujet doit soulever un poids fixé à son poignet par un aimant, ce qui génère chez lui une perturbation de la posture de son avant-bras. Afin d'anticiper le mouvement nécessaire pour minimiser cette perturbation, le sujet doit d'abord évaluer rapidement le poids à soulever, puis construire une représentation mentale de cette perturbation posturale.

Dans ce type de tâche, les enfants autistes arrivent à compenser la perturbation posturale, mais au prix d'un ralentissement du mouvement. Cela serait lié à une altération de leur proprioception*, c'est-à-dire à un défaut de perception de la nature du poids à soulever et des perturbations mécaniques que ce geste va engendrer.

Ces altérations dans le traitement des informations proprioceptives pourraient expliquer un certain nombre de difficultés motrices et sensori-motrices chez les enfants autistes, par exemple une certaine maladresse et des difficultés d'ajustements et d'anticipation des gestes.

24 octobre 2012

Humour ... (Merci Annette)

24 octobre 2012

Vivre, pour entendre ces mots qui viendront peut-être, ou pas.


Chercher, jour après jour…

J’ai souvent l’impression de vivre chaque journée comme si je devais chercher dans les moindres recoins de ma vie quotidienne un objet vital : une minuscule perle de bonheur. Je tourne et retourne chaque coin de mon quotidien, semblable à une maison délabrée. Je soulève les tapis pleins de poussière, affronte cet entassement d’objets inutiles pour moi mais essentiels à beaucoup de personnes.

Pendant un bon moment, j’étais persuadée que je trouverais cette perle un jour. L’enjeu en valait la peine, car sans bonheur, à quoi ça sert de vivre ?

J’ai souvent eu cette sensation d’être née à moitié entière, comme si on m’avait volée une partie de moi. Ce que je cherche, cette perle, c’est peut-être cette autre moitié qui donnerait du sens à ma vie ?

 

Quête insensée ?

Quand on a perdu un objet très précieux dans notre maison, on cherche fébrilement. On sait qu’on le trouvera, puisqu’il ne peut être que dans cet endroit, certes vaste, mais bien délimité. On fait des pauses, mais on ne lâche pas, on y retourne… Mais quand l’objet peut être n’importe où, on peut se lasser, faire une croix dessus.

C’est ce que je me dis aujourd’hui. Peut-être que cette moitié de moi n’existe tout simplement pas. Cette quête est donc insensée. Je n’aurais pas du naître, ou alors vivre sans conscience, comme les plantes.

 

L’amorce d’un mot, la fin des maux ?

Le fait que Julien, 7 ans, n’ait toujours pas prononcé un mot, n’aide pas à changer cet état d’esprit. C’est très dur de ne jamais avoir de retour par un mot. J’ai quand même des retours, par un regard, un geste, mais…

Parfois je suis admirative du tour de force qu’il a réussi : sans un mot, avoir tout ce qu’il veut. Finalement, sa façon de faire a du sens. Pourquoi parler, si on peut tout avoir sans parler ? Parler, cela veut dire prendre des risques, se livrer. Perdre le contrôle,voir toute sa logique de penser, d’entrer en relation, être remise en question.

Le pire est que, malgré tous nos efforts placés sur la communication, je l’ai aidé malgré-moi à réaliser cet « exploit ». Et plus le temps passe, plus c’est dur pour lui de renoncer à ce pouvoir que je lui ai permis d’avoir, en lui montrant que je comprenais ses mots silencieux…

 

Je pense que ce que je cherche aujourd’hui, ce n’est plus cette autre moitié, c’est ce petit mot que Julien me dira peut-être un jour…

 

Un ami, Rom, aujourd’hui décédé, avait écrit un joli texte sur Julien. Je l’ai mis en chanson : « Les mots silencieux de Julien. »

24 octobre 2012

Travail. Qui a dit "handicap" ?

article publié dans le Télégramme

24 octobre 2012

Dans la course à la professionnalisa- tion et à l'emploi, le handicap n'est pas forcément un... handicap. Il peut même servir de détonateur et démultiplier la motivation des jeunes. Particulièrement quand ils sont accompagnés par Osons l'Égalité.

Pour travailler dans le bâtiment, nul besoin de courir le 100m en moins de dix secondes ou d'être marathonien. Aucune raison, donc, à ce qu'Angélique Leduc, parfois obligée d'utiliser un fauteuil roulant, ne puisse y apporter sa pierre.

Aller sur le terrain

«En fait, le fauteuil, je n'en parlais pas toujours quand je devais chercher un stage. Je pensais que cela me donnerait moins de chances d'être prise. Mais, depuis que j'ai rencontré Osons l'Égalité, j'en parle systématiquement», confie la Malouine âgée de 22 ans. Titulaire d'un BTS «Économie du bâtiment et de la construction» après un BEP et un bac pro STI «génie civil», la jeune femme vient d'entamer une formation par alternance de dessin assisté par ordinateur: «Je ne me voyais pas rester assise derrière un bureau toute la journée. J'ai donc voulu suivre une formation complémentaire qui me permettra d'aller sur le terrain».

Question d'organisation

Sur le terrain? Certes, pas question pour Angélique de monter à l'échelle ou de porter un sac de 10kg. Une faiblesse musculaire congénitale l'empêche également de marcher longtemps. Pour autant, cela fait belle lurette qu'elle a intégré ces contraintes dans son quotidien: «Question d'organisation. J'ai mon fauteuil roulant dans mon petit monospace et je m'en sers selon les besoins. C'est tout simple». «En fait, le vrai problème pour les jeunes, ce n'est pas tant la situation de handicap que de savoir quelles sont leurs compétences et ce qu'ils veulent faire. Et de ce côté, Angélique était bien armée quand on l'a rencontrée, il y a quatre ans. On l'a simplement aidée à faire un CV plus personnalisé et plus percutant. Les entreprises sont prêtes à former les jeunes, à condition qu'ils soient motivés et qu'ils ne viennent pas seulement pour valider un stage», explique Bénédicte Sauer, directrice d'Osons l'Égalité.

Aide-toi...

L'association bretonne, créée il y a quatre ans, a accompagné 116 jeunes (de la troisième à la licence pro) durant l'année 2011-2012: «Au départ, nous étions en contact avec 150 familles. Mais c'est la motivation du jeune qui fait la différence. Nous ne sommes pas des distributeurs de stages. De fait, nous sommes en contact avec des entreprises et contribuons à ce que les choses se passent de façon plus relax. Mais on fait de la présentation de profils et de projets, élaborés avec les jeunes. On n'est pas là pour de la simple mise en relation», souligne la directrice. Bref, aide-toi, le ciel t'aidera. Ce qui n'empêche pas l'association d'être très présente auprès des jeunes. Ainsi, pas question de laisser tomber Angélique qui doit absolument trouver une entreprise pour son contrat de professionnalisation, avant la fin novembre. Vu la baisse d'activité du bâtiment, il va falloir démarcher de grands groupes en dehors de la Bretagne. Mais Bénédicte Sauer est confiante. Angélique regorge de qualités et l'école Osons l'Égalité a fait ses preuvescontact@osonslegalite.fr (www.osonslegalite.fr), tél.02.96.78.14.86.

jusqu'à transformer les situations de handicap en atout.
Hervé Queillé Contact

23 octobre 2012

Le temps d'une pose : quelques citations pour réfléchir

Citations favorites *

« Peu de gens ont suffisamment de notoriété pour modifier le cours de l'histoire, mais chacun de nous peut travailler à changer un petit nombre d'évènements... Ce sont d'innombrables actes de courage et de foi qui façonnent l'histoire de l’humanité »
(Robert Kennedy).

"Il n'est rien au monde d'aussi puissant qu'une idée dont l'heure est venue" (Victor Hugo)

"Ce que tu fais pour moi, si tu le fais sans moi, tu le fais contre moi"
(Ghandi)

« Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire. »
(Voltaire)

Inspiré de G. Bernard Shaw : "Le rêveur essaie d'adapter le monde à ses rêves. Le réaliste adapte ses rêves au monde actuel. Tout progrès vient donc du rêveur"

* PS Merci à Isabelle R. une de mes nouvelles amie fb (jjdupuis)
23 octobre 2012

L'étonnante plasticité du cerveau humain

 

Les acquis de nos aptitudes manuelles et intellectuelles dépendent d'une machinerie cérébrale parfaitement ordonnée et bien hiérarchisée.

L'étonnante plasticité du cerveau humain
 
 
Mots clés : cerveau
Par figaro iconPierre-Marie Lledo - le 19/10/2012
Tous les mois dans Le Figaro , des membres de l'Académie des sciences répondent aux grandes questions de l'actualité scientifique. Pierre-Marie Lledo, neurobiologiste au CNRS et à l'Institut Pasteur vous répond.

Avec ses 86 milliards de cellules nerveuses et ses millions de milliards de connexions, le cerveau de l'homme moderne est une merveille de complexité qui n'a pourtant rien d'immuable et de figé comme le sont les composés d'un ordinateur. Si connexions, mémoire et langage il y a, ceux-ci sont faits de chair vive: matière changeante construite pour le changement et qui n'existe elle-même que par le changement. Cela veut dire que cet organe incarne un devenir: il confère la faculté d'accomplir demain des opérations que nous sommes incapables de réaliser aujourd'hui.

Toutes nos aptitudes particulières, manuelles ou intellectuelles, qui concourent à faire de chacun d'entre nous un spécialiste, un expert unique, sont pour une grande part façonnées durant les premières phases du développement cérébral de l'enfant et de l'adolescent. Mais tout ne se joue pas si précocement. L'étude de la croissance du cerveau de l'homme moderne montre deux caractéristiques importantes que l'on ne retrouve pas chez les autres primates.

La première singularité concerne la lente croissance de notre cerveau qui nécessite plusieurs décennies pour s'accomplir. Cette croissance apathique offre la possibilité d'une longue période d'éducation où l'instruction sera centrale pour sculpter la formation des circuits cérébraux. La seconde caractéristique est illustrée par le retard du cerveau du fœtus à se développer. Alors que le cerveau d'un nouveau-né humain atteint à peine 25 % de la complexité du cerveau adulte, au même stade, celui du macaque est déjà ébauché à plus de 75%.

Programmés pour apprendre

Pendant cette longue période de croissance, le cerveau de l'enfant reçoit des signaux du monde extérieur, interagit avec son groupe social et l'imite. La transmission génétique, principalement à l'œuvre dans la construction du cerveau du primate non humain, s'efface alors devant un nouvel ordre où la transmission sociale, culturelle et technologique, prime avant tout.

C'est par ce biais que des fonctions cognitives, comme le langage ou la pensée symbolique, sont apparues durant l'odyssée de l'espèce humaine, pour permettre l'immense saut qualitatif qui facilitera l'émergence du cerveau humain moderne avec ses capacités uniques d'abstraction. Or ces nouvelles facultés mentales nécessitent un système nerveux malléable, flexible et non plus précâblé, qui se nourrit des interactions avec l'autre. Bien sûr, les acquis de nos aptitudes manuelles et intellectuelles dépendent d'une machinerie cérébrale parfaitement ordonnée et bien hiérarchisée selon un déterminisme génétique. Mais il faut en même temps que cette organisation soit en partie adaptable et reconfigurable à tout moment, et à tout âge. En définitive, les différences neurobiologiques qui existent entre les êtres humains proviennent, certes, des caractères dont ils ont hérité, mais surtout de l'apprentissage qu'ils ont reçu et de l'influence du milieu dans lequel ils ont vécu. En somme, nous sommes programmés, mais programmés pour apprendre! Ces interactions entre le monde extérieur et les activités nerveuses fournissent un mécanisme grâce auquel l'environnement peut influencer la forme et les fonctions du cerveau pour produire un individu unique, affranchi, capable de réponses adaptées mais aussi imprévisibles.

Aujourd'hui, les neurosciences apportent leurs lots incessants d'arguments témoignant des propriétés protéiformes du cerveau humain même lorsqu'il atteint un âge avancé. Loin d'être immuable, notre cerveau adulte reste un organe façonnable qui dispose d'une grande capacité d'adaptation aux sollicitations de l'environnement. Sous l'action d'un apprentissage, même tardif, de nouvelles cellules nerveuses naissent dans certaines régions cérébrales, de nouvelles connexions sont établies ou renforcées, tandis que d'autres sont éliminées.

C'est à l'aune de cette plasticité cérébrale permanente que l'on prend toute la mesure de ce qu'écrivait l'humaniste hollandais Desiderius Erasmus Roterodamus (1466-1536): «On ne naît pas homme, on le devient.»

* Lauréat 2012 du prix Mémain-Pelletier décerné par l'Académie des sciences.

23 octobre 2012

Autisme : Dassault subventionne une recherche sur un traitement potentiel

 article publié par le Nouvel Observateur

Créé le 18-10-2012 à 17h40 - Mis à jour à 18h01

PARIS (Sipa) -- Le groupe Dassault a alloué jeudi pour la première fois 150.000 euros pour la recherche sur la santé mentale, via deux prix, dont l'un couronne des travaux sur un traitement médicamenteux potentiel de l'autisme.

Ces travaux sont "très innovants" parce qu'il n'existe actuellement "pas de stratégie thérapeutique médicamenteuse dans l'autisme", a indiqué Marion Leboyer, directrice de la fondation publique de recherche sur la santé mentale FondaMental, qui a établi un partenariat pour trois ans avec le groupe Dassault.

La scientifique qui a été distinguée comme chercheur de l'année 2012 par le prix Marcel Dassault pour la recherche sur les maladies mentales est le Pr Angela Sirigu, de l'Institut des sciences cognitives de Lyon, dont l'étude a été publiée en 2010 dans une grande revue scientifique.

Menée sur 13 patients, cette étude a démontré l'effet thérapeutique d'un médicament déjà utilisé en gynécologie (l'hormone ocytocine) sur la forme la moins sévère de l'autisme, le syndrome d'Asperger où les fonctions intellectuelles et le langage sont préservés. Ces patients ont bénéficié d'une amélioration de leurs capacités sociales évaluées par des tests d'échanges de regards et de balles. L'ocytocine a été administrée par spray nasal pour une action directe sur le cerveau. L'effet de l'hormone a été cependant limité dans le temps.

La chercheuse n'a pas été en mesure de préciser à Sipa à quelle échéance l'ocytocine pourrait avoir une indication dans l'autisme reconnue par les agences du médicament. Mais elle a rapporté que des familles qui se procurent l'ocytocine en Suisse ont déploré le coût du traitement et l'absence de remboursement par la Sécurité sociale. En Suisse, l'hormone est disponible sous forme de spray nasal alors qu'en France on ne peut se la procurer que sous forme injectable, a-t-elle indiqué.

Après la publication de son étude, la chercheuse a été aussi beaucoup contactée par des timides maladifs, qui ont également pris de l'ocytocine.

vv/sbo/mw

23 octobre 2012

Encore un triomphe pour Laurent Savard !

Laurent Savard poursuit sa tournée triomphale avec son spectale "Le bal des Pompiers" !

Samedi dernier il était à Lesigny, invité par l'association ASDAA dont il est le parrain.

Salle comble comme d'habitude et public conquis (ici avec les bénévoles de l'association)

laurent savard à lesigny avec les bénévoles

23 octobre 2012

Autisme, un nouveau blog pour les adultes et les familles !

adulte-autiste-en-france

Comment vont-ils nos adultes autistes ?

21 Octobre 2012, 21:38pm

Publié par magali et Lena-Anne

Chers parents, ami(e)s et sympathisant(e)s de la cause de l'autisme
  • Je me suis trouvée dans un vide total ce soir-là face à mon fils autiste âgé de 35 ans qui devait quitter son énnième centre d'hébergement pour affronter, à nouveau, pour la 3ème fois de sa vie un sevrage de neuroleptiques à mon domicile.

  • Au même moment j'ai lu une publication sur un adulte autiste souffrant de l'absence de prise en charge adéquate en France. J'ai tenté de contacter l'auteur de l'article et c'est ainsi que j'ai pu rencontrer une personne généreuse, ouverte et qui s'apprêtait à partager mes soucis de mère dans ces moments critiques. Et en plus elle a voulu apporter pleinement sa compétence et sa patience pour la création de ce blog et de m'intégrer comme co-animatrice de ce lieu de rencontre, destiné aux adultes autistes.

  • Que mon souhait de Bienvenue à vous tous soit aussi accompagné de mes remerciements à l'auteur qui a initié ce blog.

  • À l'heure où pratiquement aucune création de structure pour adultes autistes ne voit le jour en France et pire, quand aucun programme gouvernemental ne laisse entrevoir un quelconque souci vers cette population en détresse et en particulier vers ces parents vieillissant, faiblis, épuisés et parfois tres malades qui doivent assurer à leur domicile de maniere permanente leur adulte avec autisme agés de 20, 30, 40 ans et au delà parfois, il est urgent de sortir nos enfants de cet oubli trop injuste et trop cruel pour eux comme pour leur famille .

  • Le jour où votre enfant atteint ses 20 ans et que vous ne trouvez pas de prise en charge dans une structure en France ou que vous vous trouvez devant les structures dont la prise en charge ne répond pas aux besoins de votre enfant, c'est le cas de la plupart des instituts pour adultes en France qui ne se détachent pas de leur médication à base de psychotropes par exemple, vous n'avez qu'un seul choix : chercher une place en Belgique ou ailleurs et même certaines MDPH vous conseillent la Belgique, voyant cela comme une solution salutaire évidente pour vous. Mais, hélas, vous prendrez le risque de tomber sur un institut qui reproduit le même schema de prise en charge antérieure que vous venez de fuir.

  • Apres trente ans de combat, après avoir connu quelques expériences de classe d'intégration mises en place en collaboration avec quelques parents dans les années 80, après avoir affronté en vain l'obstination de certains inspecteurs d'académie, l'intégration n'a plus été possible pour mon fils et il est entré dans un IME puis dans un Foyer d'Accueil Médicalisé entrecoupé par périodes par des prises en charge à domicile.

  • D'une institution à l'autre il n'a pas échappé à la coupe psychiatrique et sa médication à base de psychotropes. Finalement, au paroxysme de la dépendance, à 30 ans, il a été deposé à la porte d'un service psychiatrique et par la suite exilé sans aucun autre choix vers une MAS en Belgique, faute de structures en France. Je n'ai pas pu le garder à domicile, mes activités professionnelles et ma situation financière ne me le permettaient pas. La chose est mal faite, je le regrette, je me culpabilise ... Et ces jours-ci, retraitée, âgée je recommence un sevrage pour lui .

  • L' expatriation vers la Belgique et vers d'autres pays prive nos enfants de l'équilibre familial et en premier lieu de l'affection de ses parents, créant ainsi une souffrance morale continue. Je connais bon nombre d'adultes autistes placés en Belgique qui, du 1er janvier au 31 décembre, n'ont pas pu avoir une seule visite de leur famille car la distance, lâge des parents et le coût des déplacements font obstacle.

  • Une autre question se pose : la prise en charge de nos enfants autistes dans les pays voisins justifie-t -elle le rapport qualité prix ? J'ai constaté d'après mon expérience personnelle que le droit de regard des parents sur le bien-être quotidien de leur enfant placé en Belgique est quasiment impossible compte-tenu des obstacles mentionnés et compte-tenu surtout de la loi de l'offre et de la demande, à mon avis personnel .

  • Si vous le voulez bien nous pourrons échanger sur quelques autres sujets liés à la prise en charge de nos adultes autistes. Que notre cri sorte du désert et que l'union de nos voix puisse mieux nous faire entendre. À vous les parents, adultes avec autisme, ami(e)s de venir partager fraternellement nos points de vue.

Lena Anne

23 octobre 2012

L'Education nationale vue par Grand Corps Malade ... BRAVO !

L'Education nationale vue par Grand Corps Malade

article publié dans le Nouvel Observateur

Créé le 22-10-2012 à 12h41 - Mis à jour à 22h35

Alors qu'une nouvelle loi sur l'école se prépare en haut lieu, le slammeur décrit l'inégalité des chances sur le terrain.

Grand Corps Malade, le 17 octobre 2012, lors de l'enregistrement de l'émission "Au Field de la nuit", sur TF1. (PMG/SIPA)

Grand Corps Malade, le 17 octobre 2012, lors de l'enregistrement de l'émission "Au Field de la nuit", sur TF1. (PMG/SIPA)

"J’m’appelle Moussa, j’ai 10 ans, j’suis en CM2 à Epinay…" Alors qu’il poursuit ses consultations avec les organisations syndicales et les différents ministères concernés, pour préparer la rédaction de sa future loi de programmation et d’orientation pour l’école, Vincent Peillon peut se passer en boucle " Education nationale " de Grand Corps Malade, le slammeur à la voix de contrebasse. Histoire de garder en bouche les mots tout simples d’un enfant des quartiers de Seine-Saint-Denis qui raconte son école de pauvre, et "les moyens de survie locaux". Une chanson qui commence à hauteur de gamin, classe trop bruyante, maîtresse en détresse, et qui embraye avec les mots martelés par le chanteur : "Ne laissons pas s’creuser l’fossé d’un enseignement à deux vitesses".

En juillet dernier, la Cour des Comptes a envoyé un référé au Premier Ministre où elle rappelle, elle aussi, cette injustice : en France plus qu'ailleurs, les inégalités scolaires sont corrélées aux inégalités sociales. Et les moyens ne sont pas alloués en fonction des besoins réels. Quand il a fallu quatre mois de concertations savantes pour en accoucher, en quelques phrases l’artiste énonce les priorités : "Faut rajouter des profs et des autres métiers qui prennent la relève/Dans des quartiers les plus en galère, créer des classes de 15 élèves…". Sans vitupérer, sans se départir de son calme, le chanteur met le ministre en demeure d’agir. Pour qu’au plus vite, naître à Epinay ou naître à Neuilly cesse d’être le marqueur de la réussite scolaire. Pour que Moussa ne puisse plus dire "C’est pas d’ma faute à mois si j’ai moins de chance d’avoir le bac/C’est simplement parce que j’vis là, que mon avenir est un cul de sac".

22 octobre 2012

Qui est christel Prado, présidente de l'UNAPEI

Une Caennaise choisie pour présider l'UNAPEI

article publié dans la Manche Libre

Une Caennaise choisie pour présider l'UNAPEI

Une Caennaise choisie pour présider l'UNAPEI

Dans les hautes sphères parisiennes, il est des élections qui surprennent. Celle d'une Normande à la tête de la puissante UNAPEI, l'Union nationale des associations de parents de personnes handicapées mentales, en fait partie.

Il est vrai que ce n'est pas tous les jours qu'une Caennaise se retrouve à la tête d'une organisation si influente. L'UNAPEI fédère 600 associations et apparaît aujourd'hui à travers 2 800 établissements en France, impliquant l'action de 75 000 professionnels. 180 000 personnes handicapées sont ainsi aidées. "C'est une grosse force politique pour influer sur notre société", assure fièrement Christel Prado, la toute nouvelle présidente depuis le 11 juin.

Une deuxième famille
Christel Prado, 42 ans, a déjà clairement établi la liste de ses priorités. "Notre objectif est de ne plus avoir d'enfants exclus de l'Education nationale, ils sont encore 5 000. C'est de ne plus avoir de personnes handicapées vieillissantes dans des situations inadaptées, elles sont encore 15 000. Nous visons aussi l'égalité pour toutes les personnes handicapées mentales sur l'ensemble du territoire".
Pour expliquer son engagement, elle évoque souvent son expérience personnelle : Maman d'une jeune femme polyhandicapée et autiste de 19 ans, elle évoque des regrets : "quand ma fille est née, je n'ai pas voulu rejoindre d'association en me disant que j'allais ajouter ma misère à celle des autres. Si j'avais su que j'allais trouver une deuxième famille et que c'était là que j'allais trouver une solution adaptée à mon enfant, alors j'y aurais couru".
Cette présence à la tête de l'UNAPEI pour quatre ans contribuera certainement à rattraper le temps perdu.


Publié par S.L le 14/07/2010 à 15h21


AVIS

du Conseil économique, social et environnemental (CESE)

présenté par Mme Christel Prado, rapporteure

C'est ICI

 


 

Lire un article où elle prend position

Aujourd’hui samedi 21 janvier 2012, Magali Pignard, membre du « Collectif Soutenons Le Mur et Défendons les Droits de la Personne Autiste en France » a interpelé Christel Prado, présidente de l’UNAPEI, par e-mail, suite au communiqué dans lequel l’UNAPEI demande le retrait de la proposition de loi de Daniel Fasquelle.

Christel Prado a autorisé la publication de sa réponse : « Si vous pensez que c’est utile pour les familles. Bien entendu. En entier, s’il vous plait ».

Cependant cette réponse appelle à un commentaire. L’UNAPEI en insistant sur le libre choix des familles oublie que le débat central préalable doit être l’interdiction du packing et de la psychanalyse dans l’autisme. Comment demander aux familles de choisir, lorsque les alternatives sont peu déployées et non-soutenues par l’État ?

Clarification de l’UNAPEI

Envoyée par Christel Prado, présidente de l’UNAPEI le Samedi 21 janvier 2012 à 15h32 :

« Bonjour et merci d’avoir pris le temps de vous adresser a moi.
Il n’est nullement question dans le communique de presse de l’Unapei d’encourager la psychanalyse. Il n’est d’ailleurs nulle part question du packing. Il est question du libre choix des familles. Aujourd’hui, nous nous mobilisons tous pour dire que les méthodes éducatives structurées apportent de meilleurs résultats que d’autres approches. C’est aux familles de choisir et notre devoir est de les conseiller pour qu’elles n’acceptent jamais quelque chose qui puisse nuire a leur dignité ou a celle de leur enfant.
C’est simplement de cela dont il est question.
Et le jour ou la recherche aura avance, ou les prises en charges éducatives auront été précoces et ou nous serons en mesure d’affiner nos réponses pour accompagner encore mieux les personnes autistes, nous nous réjouirons ensemble de cette victoire.

Bien sincèrement,

Christel Prado »

 

22 octobre 2012

Fiers d'être autistes : la neurodiversité, un mouvement polémique

article publié dans Sciences Humaines le 23 juin 2011

Sarah Chiche

Mis à jour le 23/06/2011

Dans de nombreux pays anglo-saxons, des mouvements activistes remettent en cause la représentation de l'autisme comme une maladie et l'envisagent désormais comme un autre mode de fonctionnement cognitif, avec des aspects positifs et créateurs. Qu'en est-il en France, et quelles peuvent être les conséquences sur notre façon d'envisager non seulement les personnes autistes, mais la notion de normalité ?
Doigts écartés, bras tendus de chaque côté d'un corps potelé qu'elle balance d'avant en arrière, une petite femme aux cheveux courts marmonne face à sa fenêtre, suit de sa main, filmée en gros plan, les contours d'un bouton de tiroir, passe compulsivement ses doigts sur un clavier d'ordinateur, agite un collier devant la lumière et enfouit voluptueusement son visage contre les pages d'un livre en grognant. Au bout de trois minutes, la voix lisse et synthétique d'un logiciel de synthèse vocale, agrémentée de sous-titres apparus soudain en bas de cette vidéo postée sur Youtube, explique de façon très précise que tout ce que l'on vient de voir est bien une façon à part entière de penser et d'interagir avec l'environnement, puis lance : « Pendant que j'y suis, sachez que je trouve particulièrement intéressant que mon incapacité à apprendre votre langage soit vue comme un déficit alors que votre incapacité à apprendre mon langage vous semble parfaitement naturelle, vu que l'on décrit les gens comme moi comme mystérieux et déroutants. Cela, au lieu d’admettre que ce sont les autres qui sont déroutés… » On sent poindre derrière les pixels quelque chose qui pourrait bien ressembler à du sarcasme, mais le spectateur, médusé, comprend que c'est bien la même femme que l'on voit à l'écran, qui s'est filmée, a fait un montage de cette vidéo, y a inclus des commentaires grâce à un logiciel informatique et l'a mise en ligne, toute seule.
Quand l'américaine Amanda Baggs, diagnostiquée comme « autiste de bas niveau » sans langage oral, a filmé ses stéréotypies – les mouvements répétitifs que font les autistes – c'était, explique-t-elle dans cette vidéo vue des centaines de milliers de fois sur Internet, non pas pour se donner en spectacle, mais dans un but politique, afin d'attirer l'attention des gens sur leur fâcheuse tendance à sous-estimer les autistes. « La façon dont je pense et je réagis face à mon environnement est si différente des concepts standards, dit Amanda Baggs, que certaines personnes considèrent qu'il ne s'agit pas du tout là de pensée. Mais c'est une façon de penser à part entière. Pourtant, ajoute-t-elle, c'est seulement lorsque je tape sur mon clavier d'ordinateur des choses dans votre langue que vous parlez de moi comme d'une personne apte à communiquer. Je respire les objets. J'écoute les objets. Je sens les objets. Je goûte les objets [...] Mais il se trouve des gens pour douter que je sois un être pensant. »

De la maladie au handicap. Du handicap à la différence.

Loin d'être un cas isolé, la vidéo d'Amanda Baggs est particulièrement emblématique du développement de mouvements activistes de personnes présentant un handicap. Dans de nombreux pays anglo-saxons, des groupes de personnes se constituent pour remettre en cause la représentation traditionnelle du handicap comme un problème individuel d'ordre médical, et l'envisager sous le prisme sociopolitique. Chercheuse à l'INSERM, sociologue et neurobiologiste (1), Brigitte Chamak travaille notamment sur les transformations des représentations de l'autisme. Or, dit-elle, l'étude de la dynamique historique des associations de personnes autistes au niveau international révèle une remise en cause profonde de l'autisme comme « maladie » (2).
Les formes d'activisme des personnes présentant un handicap amènent à repenser les rapports entre pensée et société, et témoignent de nouveaux types de mouvements sociaux qui se constituent dans une logique d'empowerment par le biais d'une politique culturaliste forte. Historiquement, ce sont les Alcooliques Anonymes qui constituent en 1935 les premiers groupes d'autosupport. Ces mouvements, ainsi que les mouvements de minorités (femmes, noirs, gays...), ont servi de modèle aux associations de personnes présentant un handicap puis à celles ayant un problème de santé mentale, avant d'inspirer, dès les années 1990, dans les pays anglo-saxons, les actions des personnes autistes.
Utilisé à l'origine par Judy Singer, une australienne présentant des caractéristiques autistiques, dont la mère et la fille avaient été elle-même diagnostiquées avec un syndrome d'Asperger, le concept de neurodiversité reprend le discours des neuroscientifiques sur le fonctionnement atypique du système nerveux. Par extension, il prône l'idée selon laquelle des développements neurologiques atypiques comme l'autisme, ou, par exemple, la dyslexie, le syndrome Gilles de la Tourette ou les troubles du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité, sont un style de vie.
Si la question de la neurodiversité n'est pas réductible à l'autisme, l'analyse historique et sociologique des représentations de l'autisme permet de mieux penser l'émergence du concept. Initialement décrit par Freud dans une lettre à Jung (3), puis par Bleuler, l'autisme apparaît comme catégorie diagnostique en 1943, avec les descriptions de Leo Kanner, et a longtemps été classé dans la catégorie « psychose ou schizophrénie ». Or, aujourd'hui, la classification internationale de l'OMS (CIM-10) et le DSM-IV définissent l'autisme comme trouble envahissant du développement (TED) (4) apparaissant avant l'âge de 3 ans, et caractérisé par une perturbation des interactions sociales, des problèmes dans la communication verbale et non verbale, des stéréotypies et une restriction des intérêts. Cette catégorie, aux contours assez flous, regroupe aussi bien des personnes très handicapées sans langage - au sens où nous l'entendons -, que des personnes avec des capacités langagières mais des difficultés d'interactions sociales et des intérêts retreints. Ce changement de catégorie nosographique a eu un impact notable sur la représentation que l'on se fait de la maladie. En France, si certains psychanalystes ont pu déplorer que l'autisme ne soit plus classé dans le champ des psychoses - cela occultant, selon eux, toute la dimension psychopathologique du trouble -, des associations de parents ont salué ces transformations, qui ne mettent plus en avant dans l'étiologie du trouble de supposés problèmes relationnels avec la mère comme La cause de tout. En France, la loi Choissy du 11 décembre 1996 reconnaît l'autisme comme un handicap. L'enjeu est de taille : à partir du moment où il ne s'agit plus d'une maladie psychiatrique mais d'un handicap, les associations de parents ont pu réclamer l'intégration scolaire de leurs enfants (5).
Dans les pays anglo-saxons, les associations de personnes autistes vont plus loin que les associations de parents, puisque c'est l'idée même de maladie qu'elles remettent en cause. Tout comme certaines personnes veulent être reconnues non plus comme souffrant d'hallucinations auditives mais comme « entendeurs de voix », les associations de patients autistes militent pour la reconnaissance de leur neurodiversité, c'est-à-dire pour que l'autisme soit envisagé comme un fonctionnement cognitif à part entière.
Président de l'association française Vaincre l'autisme, M'hammed Sajidi a un point de vue plus nuancé. Pour lui, « la neurodiversité est un concept défendu majoritairement par des personnes atteintes d’autisme ''léger'' ou du syndrome d’Asperger. C’est une démarche intéressante dans le sens où elle améliore les débats autour de la problématique de l’autisme, et notamment de la reconnaissance de ses besoins spécifiques. Les promoteurs de la neurodiversité ont raison concernant l’aspect du respect des droits de la personne et de sa particularité (« différence ») qui, à notre avis, concerne toute personne. » Toutefois, selon le président de Vaincre l'autisme, une chose est sûre : « La neurodiversité ne doit pas faire abstraction de l’aspect médical de la maladie. Les promoteurs de la neurodiversité font souvent et hâtivement abstraction des connaissances scientifiques et médicales avérées actuellement, et des souffrances générées par la ''maladie'' de l’autisme ou des Troubles du Spectre Autistique (TSA). »
Mais pour les militants de la neurodiversité, la question de la souffrance semble passer au second plan. Il s'agit avant tout de construire une politique identitaire forte, de produire un discours de type culturaliste autour de l'autisme et de former les personnes autistes à défendre leurs droits. Selon Brigitte Chamak : « Le succès de la mobilisation réside, en partie, dans les changements opérés non seulement dans la façon dont les personnes voient leur situation de vie, mais également dans l’opinion qu’elles se font d’elles-mêmes. »


Albert Einstein, Glenn Gould, et nous, et nous, et nous !
 
Les récits autobiographies de Temple Grandin (1986) et de Donna Williams (1992) ont largement contribué à cimenter l'identité autiste. « Des adultes qui se sentaient différents mais ne savaient pas en quoi consistait leur différence se sont reconnus dans la description du fonctionnement autistique, explique Brigitte Chamak. Ils ont d'abord témoigné de leur expérience en écrivant leur biographie. Ils ont ensuite tenté de changer l'image négative de l'autisme en montrant en quoi l'originalité et la créativité des personnes présentant des caractéristiques autistiques enrichissent une société. » Puis les blogs et les forums Internet ont pris le relais, et ce d'autant plus facilement qu'un certain nombre de personnes autistes sont bien plus à l'aise pour communiquer via un ordinateur que dans un rapport direct à autrui. Sur « Whose Planet Is It Anyway ? », « Asperger Square 8 » ou « Cat In A Dog’s World », des personnes autistes échangent conseils et informations utiles et se soutiennent pour mieux faire face à la stigmatisation et aux représentations grotesques dont ils sont parfois l'objet dans les médias. (On se souvient en France des enfants autistes invités il y a une dizaine d'années dans un Ca se discute d'anthologie de Jean-luc Delarue. Si l'émission avait indéniablement contribué à faire connaître au grand public le syndrome d'Asperger, le dispositif n'avait pu se départir d'un côté « freak show » dommageable et pour les enfants et pour leurs parents.)
Car désormais, sur Internet comme dans les récits autobiographiques, il ne s'agit plus de faire le récit personnel de son expérience singulière de l'autisme, mais de contribuer, par son témoignage, à une prise de conscience politique et à l'édification d'une communauté. « L'usage du ''nous'' participe à la construction d'une communauté, avec une culture propre, des expressions et un humour spécifique », note Brigitte Chamak. Car contrairement à une idée reçue, les personnes autistes peuvent faire preuve d'humour. Ainsi, l'Institute for the Study of the Neurologically Typical, un site créé par une personne autiste, décrit le plus sérieusement du monde, à la manière des classifications nosographiques, les personnes non autistes comme présentant un syndrome Neurotypique (NT), caractérisé par des préoccupations sociales, un sentiment de supériorité et une certaine obsession de la conformité.
Cette transformation des représentations de l'autisme a abouti, tout comme c'est le cas avec des minorités sexuelles ou ethniques, à l'émergence d'une « fierté » (pride) autiste, sentiment alimenté par l'idée, relayée par Internet, selon laquelle Albert Einstein, Glenn Gould, et d'autres génies célèbres présentaient un authentique syndrome d'Asperger.


« Ne vous lamentez pas pour nous »
 
Jim Sinclair est le chef de file de l'Autism Network International (ANI), le plus ancien – le mouvement a été créé en 1980 – et plus important regroupement de personnes autistes ou présentant un syndrome d'Asperger. Personnage aussi énigmatique que charismatique, Sinclair, qui n'a pas parlé avant l'âge de douze ans, donne à présent des conférences dans le monde entier. Les rumeurs les plus folles courent à son sujet, certaines remettant même en question la véracité de son autisme. En 1993, lors de la conférence internationale sur l'autisme, Sinclair frappe fort. Dans un discours intitulé « Ne vous lamentez pas pour nous », il critique ouvertement l'attitude d'un certain nombre d'associations de parents : « L'autisme n'est ni quelque chose qu'une personne a, ni une ''coquille'' dans laquelle elle se trouve enfermée. Il n'y a pas d'enfant normal caché derrière l'autisme. L'autisme est une manière d'être. Il est envahissant ; il teinte toute sensation, perception, pensée, émotion, tout aspect de la vie. Il n'est pas possible de séparer l'autisme de la personne - et si c'était possible, la personne qui resterait ne serait plus la même [...] Par conséquent quand les parents disent : '' Je voudrais que mon enfant n'ait pas d'autisme'', ce qu'ils disent vraiment c'est : '' Je voudrais que l'enfant autiste que j'ai n'existe pas. Je voudrais avoir à la place un enfant différent (non autiste)''. C'est ce que nous entendons quand vous vous lamentez sur notre existence et que vous priez pour notre guérison. » (6)

Pourquoi vouloir guérir ?
 
C'est dans cet esprit que plusieurs personnes autistes médiatisées s'opposent à l'idée de « guérison » (cure). Ainsi, Kathleen Seidel, fondatrice du site Neurodiversity.com, trouve proprement « déraisonnable et oppressante » l'insistance avec laquelle il est demandé aux personnes autistes d'apprendre à modifier certaines « particularités pourtant inoffensives pour le confort des autres » : « Estimer qu’il incombe aux citoyens autistes de faire un effort d’adaptation n’a d’autre but que d’épargner aux autres la sensation de gêne face à leurs propres peurs, leur vulnérabilité, et de leur éviter de regarder en face leur attitude destructrice vis-à-vis de la différence », écrit-elle dans son texte, « The autistic distinction » (7). Un point de vue que ne semble pas partager M'hammed Sajidi : « Dans le cadre de l’autisme, les TSA touchent 1 naissance sur 100. L’autisme ''léger'' et le syndrome d’Asperger représentent un pourcentage minime. Sans traitement ni éducation, la majorité des personnes autistes souffrent dans le silence des troubles générés par la maladie des TSA et des maladies sous-jacentes. La neurodiversité ne doit pas oublier cette partie majeure qui génère des souffrances, et nuit à l’état de santé de la personne et de son environnement. » Si elle s'oppose à l'idée de « guérison » sans évoquer explicitement une quelconque affiliation au Neurodiversity Movement, Temple Grandin estime pour sa part qu'il peut être utile d’enseigner aux autistes avec langage à mieux moduler les inflexions de leur voix pour ne pas effrayer leur interlocuteur.
Dans ce contexte, un certain nombre de partisans de la neurodiversité militent pour l'arrêt des Applied Behavior Analysis (analyse appliquée du comportement - ABA), dont la visée, jugée normative, est évidemment à rebours d'une quelconque affirmation de la « différence ». Cette thérapie, qui n'est pas spécifique à l'autisme, est utilisée pour tous les troubles du comportement, y compris dans le cadre de l’entreprise, et vise à réduire les comportements inadaptés chez chaque individu et améliorer ses comportements positifs via des évaluations, des programmes individuels adaptés et des objectifs à atteindre. Or, pour M'hammed Sajidi : « Contrairement à d’autres champs de la psychologie, l’ABA suit une démarche scientifique. Cette thérapie propose des outils performants pour réduire les troubles du comportement chez l’enfant autiste et des outils efficaces pour son éducation, son apprentissage et son accès à l’autonomie. Si les promoteurs de la neurodiversité demandent l’arrêt de l' ABA, c’est que ces personnes ne la connaissent pas, ne l’ont pas reçue dans le cadre de leur développement ou de leur traitement, et ne tiennent pas compte des souffrances subies par la majorité des personnes atteintes de TSA dans le monde qui, sans traitement des troubles du comportement et d’apprentissage ou traitement de certaines maladies associées, finissent dans les chambres d’isolement des hôpitaux psychiatriques pour les pays développés, ou enchaînés dans des lieux sordides dans les pays sous-développés. Nous demandons aux personnes qui, sans fondement, voire par principe idéologique, mettent en cause des outils, qu’ils se posent la question : quel était leur état de santé lors de leur petite enfance ? Quel était l'état de leur famille ? Et qu’elles évaluent la chance qu’elles ont eue dans leur parcours de vie pour atteindre le niveau de développement qui est le leur, par rapport aux 70 millions de personnes touchées par les TSA dans le monde. »


Communautarisme anglo-saxon vs. sollicitude sociale française
 
De fait, si la neurodiversité est en plein essor dans les pays anglo-saxons, elle a pour le moment peu d'ampleur en France. Pour Brigitte Chamak, plusieurs raisons expliquent ce décalage. D'une part, dit-elle, « les psychiatres français ont résisté pendant longtemps aux nouvelles classifications et à une conception élargie de l’autisme. » D'autre part, il révèle « une différence quant aux possibilités d’expression des personnes présentant un handicap quand elles remettent en question le système des professionnels et des associations de parents, comme le font aujourd’hui les associations de personnes autistes au niveau international. »
Si dans les pays anglo-saxons les associations s'organisent en mouvement social qui remet en cause les principes normatifs, en France on se focalise sur la défense des intérêts des personnes autistes et de leur famille. « La spécificité du système associatif français, caractérisé par le partenariat entre l'Etat et les associations de parents, le contexte historique et culturel, et en particulier, l'opposition au communautarisme, apparaissent comme des éléments peu propices au développement de revendications radicales dans le domaine du handicap », analyse Brigitte Chamak. Si l'approche américaine met en avant la notion de communauté au service d'un objectif civique, l'approche française se caractérise par une « sollicitude sociale » qui va de pair avec l'autorité institutionnelle. Pour étayer son propos, Brigitte Chamak cite l'exemple de la surdimudité. « Parce qu'elle allait à l'encontre du discours médical de la déficience et de sa réparation, la langue des signes a été interdite dans les instituts d'enseignement français, entre 1880 et 1990. A l'opposé a été créé dès 1864 à Washington un lycée pour les sourds. » De même, note-t-elle, les disability studies, qui dénoncent la médicalisation du handicap et insistent sur la dimension sociale de la stigmatisation, fleurissent aux États-Unis, au Canada et au Royaume-Uni, mais sont très peu présentes en France.
Reste que pour le président de Vaincre l'autisme, « ne pas parler de guérison, ne pas parler de maladie revient aujourd’hui à condamner les personnes atteintes d’autisme à un état définitif. Ceci pourrait anéantir la lutte contre cette maladie dans les domaines de la recherche, des traitements, de la prise en charge et de l’éducation. Les promoteurs de la neurodiversité militent dans leur démarche face à un charlatanisme, promu sur le Web, d’éventuelle guérison de l’autisme. Il est vrai qu’aujourd’hui il n’y a aucune guérison des TSA. Il est également vrai que l’autisme peut être une modalité existentielle de la diversité humaine. Mais l’autisme ne se limite pas à cela. Notre position est basée sur des fondements avérés et des constats de notre travail dans le domaine de la recherche d’informations et de traitements depuis plus de dix ans. Nous sommes convaincus qu’il faut parler de ''maladie'' multifactorielle, comportant des composantes génétiques et neurologiques qui génèrent un handicap cognitif sévère, dont toutes les causes ne sont pas encore découvertes. Ce qui appelle au développement de programmes de recherche avec les moyens nécessaires pour découvrir les causes et les nouveaux traitements pour lutter contre cette maladie. »
Dans le livre Gamma de la Métaphysique, Aristote énonce le principe de non-contradiction suivant : « Il est impossible que le même appartienne et n'appartienne pas au même et selon le même ». En clair, pour Aristote, ou bien une personne parle comme vous, ou bien elle ne parle pas. Et si elle ne parle pas, c'est-à-dire si elle ne signifie pas une seule chose et la même pour soi-même et pour autrui, c'est une plante (9). La vidéo d'Amanda Baggs n'est-elle pas une réfutation de ce principe ? Car, d'une part, on en vient alors à se demander comment les normes se constituent comme énoncé dans le langage puis s'articulent entre elles pour définir ce qui, dans une société donnée, est dans la norme ou hors-norme. Mais, surtout, pourquoi donc la communication devrait-elle être orale pour être légitime ? Pourquoi les grognements d'Amanda Baggs ou sa façon de frotter son visage contre les pages d'un livre seraient-ils moins légitimes que les phrases à tiroirs qui composent cet article ? Comme le pointe fort justement Brigitte Chamak, ce que nous laissent entrevoir les autobiographies de personnes autistes, leurs discussions sur les forums internet, leurs vidéos et leurs revendications, c'est « l'infinie diversité des modes de fonctionnement humain. Elles nous amènent à interroger nos présupposés, à repenser ce qu'intelligent veut dire et ce que recouvre l'expression ''être humain'' ». Qu'elles en soient ici remerciées.
 
Pour aller plus loin :
Un site très complet sur la neurodiversité : http://www.neurodiversity.com
Le site de Temple Grandin : http://www.templegrandin.com
La vidéo d'Amanda Baggs : http://www.youtube.com/watch?v=JnylM1hI2jc
(1) CERMES3-Équipe CESAMES.
(2) Brigitte Chamak, qui n'a pas eu la possibilité de répondre directement à nos questions, a eu l'amabilité de nous adresser deux de ses articles dont sont extraites certaines des citations qui suivent. Pour consulter ces deux articles dans leur intégralité, voir : B. Chamak, « Autisme, handicap et mouvements sociaux », ALTER, European Journal of Disability Research, 4 (2010), 103-115, et Autisme : des représentations multiples, source de controverses, Enfances & Psy, n.47, pp. 150-158.
(3) Lettre du 13 mai 1907.
(4) Les TED regroupent : l'autisme ; le syndrome d'Asperger ; le trouble désintégratif de l'enfance ; le syndrome de Rett ; les TED non spécifiés.
(5) Notamment en s'appuyant sur la loi du 11 février 2005 sur l'égalité des droits et des chances, qui pose le principe de l'inscription de tout enfant handicapé dans l'établissement scolaire le plus proche du domicile.
(6) Sinclair, 1993. Traduction B. Chamak.
(7) Pour consulter l'intégralité du texte de K. Seidel : http://www.neurodiversity.com/autistic_distinction.html.
(8) Aristote, Métaphysique, livre Gamma, chap. 3, 1005 b 19-20.

(9) Voir notamment sur la réfutation du principe de non-contradiction : B. Cassin, La décision du sens : Le livre Gamma de la métaphysique d'Aristote, Paris, Vrin, 2000.

22 octobre 2012

Autisme et créativité : Envisager l'Autisme de manière Différente

 Une thèse très intéressante

Autisme et créativité : Envisager l’Autisme de manière Différente

Compétences and Potentiels à côté de handicaps

Extraits pour aller à l'essentiel mais la discussion est très intéressante (jjdupuis) :

 

"6.    Les compétences et les aptitudes sociales

Sans aptitudes sociales, les caractéristiques les moins positives de l’autisme vont masquer tous les bénéfices des aspects positifs. Pour commencer, l’apprentissage de comportements sociaux de base permettra la découvertes de compétences par ailleurs masquées pas les attitudes asociales et des troubles du comportement envahissants. Même les artistes et les créateurs les plus talentueux se font rejeter s’ils ne se comportent pas socialement avec un minimum de correction.

Mais à l’inverse, les compétences exceptionnelles pourraient être utilisées comme levier pour développer les aptitudes sociales. Elles pourraient aider à développer chez les personnes autistes l’estime de soi et la socialisation.

Les compétences mènent au succès : Etre constamment en situation d’échec entraîne du désespoir chez l’enfant et plus généralement génère l’angoisse de prochains échecs. Exploiter les potentiels de l’enfant lui donnera l’opportunité de réussir.

Le succès entraîne l’estime de soi : « Je ne suis pas le plus mauvais. Pour ça, je suis meilleur que certains enfants de ma classe »

Les compétences attirent la participation : Reconnaître une compétence particulière chez un enfant attirera d’autres enfants vers lui.

La participation est un pas pour se faire des amis : Rencontrer d’autres enfants ouvre la voie vers les contacts sociaux et potentiellement à se faire des amis

Utilisation positive dans les temps de loisir : Tous les talents et aptitudes spéciales peuvent mener à des activités extrêmement variées qui peuvent rendre les temps de loisirs bien plus structurés et moins problématiques.

Quelques un parmi les individus les plus talentueux ont fait l’expérience d’évolutions remarquables au niveau de leur intégration sociale comme membres à part entière de groupes sociaux. Ils sont reconnus comme de grands contributeurs de la société. Mais même ceux qui ont des talents moins exceptionnels peuvent grandement bénéficier de l’exploitation de leurs compétences. Cependant, dans tous les cas, cela requiert beaucoup de soutien autour de la personne.

 

7.    Les Eclats de compétences chez les individus sans talents apparents

Comme nous l’avons dit précédemment, nous devrions toujours chercher les aspects « positifs » de l’autisme, même lorsqu’il n’y a pas de talents exceptionnels apparents. Ceux ci doivent faire l’objet de recherches parfois proches d’une enquête scientifique, étant donné qu’ils sont souvent cachés derrière les stéréotypies et les troubles du comportement.

Il est aussi parfois difficile d’identifier les talents spéciaux chez les individus autistes plus lourdement handicapés. Cela vient du fait qu’ils peuvent être exprimés à travers des comportements ou des actes auxquels nous ne n’attribuons pas de valeur en tant que neurotypiques. Exploiter de telles compétences peut exiger que nous ayons l’esprit très ouvert et alerte. Une fois découvertes, de telles capacités peuvent s’avérer réellement exceptionnelles et un parent ou professionnel compétent peut se débrouiller pour les tourner à l’avantage de l’enfant.

Résumé

Nous devrions tous être convaincus qu’il y a toujours des compétences exploitables dans l’autisme pour aider les individus à développer une meilleure qualité de vie. Ces compétences peuvent être plus ou moins exceptionnelles et plus ou moins visibles, mais elles sont là. Voici quelques recommandations qui pourraient être utiles pour travailler dans ce domaine :

Cherchez les compétences (talents ou eclats de compétences) Gardez votre esprit ouvert, observez attentivement les compétences émergentes, même si elles ne semblent pas importantes à vos yeux. Elles pourraient s’avérer utiles dans une stratégie éducative plus généralisée.

Entretenez ces compétences : En ce sens, les enfants atteints d’autisme ne sont pas différents des autres. Les compétences doivent êtres entretenues, même si elles semblent naturelles et aisément acquises chez certains des individus les plus talentueux. Cela exigera peut être des approches différentes d’enseignement, appropriées aux style cognitif des personnes autistes. Toutefois, on peut compter sur la motivation, la concentration sur certains intérêts, l’absence d’ennui que provoquent les exercices répétitifs et quelques uns des aspects dont nous avons parlé.

Réexaminez les particularités dans l’autisme « Pensez positif », essayez d’envisager quelques uns des traits de l’autisme comme un différent mode de pensée, plutôt que comme une incapacité.

Utilisez les comme levier pour les apprentissages Utilisez les domaines les plus hauts de compétences pour aider dans l’acquisition de compétences dans les domaines ou l’enfant a plus de difficultés  

Utilisez les pour motiver l’individu Nous avons vu que la motivation est un facteur décisif qui peut être issu des compétences spéciales dans l’autisme, que ce soit une motivation directe (intérêt pour la tâche) ou indirecte (récompense pour un comportement approprié)

Utilisez les pour développer l’estime de soi Cela fera prendre à l’enfant une attitude plus positive envers son propre potentiel

Encouragez le partage social La plupart des personnes autistes les plus talentueuses ont tendance à garder leur travail pour eux. Beaucoup n’ont pas conscience que ce qu’ils ont fait est magnifique et que ça pourrait être partagé avec d’autres. Il peut s’avérer nécessaire de mettre en place une stratégie pour éduquer un tel partage du succès.

Un excellent moyen pour éviter les soucis durant les temps de loisir En fin de compte, comme nous le savons tous, les temps de loisir peuvent être les plus difficiles à gérer avec les personnes autistes. Exploiter les intérêts particuliers et les talents peut se révéler être un très bon moyen pour réduire considérablement ces problèmes.

 

Conclusion

Je crois sincèrement que quelques individus autistes sont de vrais créateurs ou à l’origine d’idées très novatrices, celles que Margaret Boden a appelé « la créativité dure » (Boden 1992). Cela peut être difficile à accepter dès lors que nous sommes bien trop habitués à associer l’art aux compétences intellectuelles et sociales, ainsi qu’à la représentation symbolique. Quelques auteurs ont contesté la créativité des artistes autistes (Zaidel 2005), mais les exemples extraordinaires de créativité magnifique venant d’artistes jeunes et moins jeunes vient contredire ce point de vue.

Il y a le point de vue opposé, qui dit que presque tous les grands créateurs faisaient et font partie du spectre (Fitzgerald 2003).

C’est également exagéré, bien qu’Asperger lui même disait « Il semblerait que pour réussir dans la science et l’art, une pointe d’autisme soit essentielle »

Je crois également que dans des cas d’autisme plus sévères, il existe des potentiels qui pourraient être utilisés pour améliorer la qualité de vies des personnes autistes. Mais j’irais même plus loin, nombre de ces personnes plus handicapées ont aussi des possibilités d’apporter une évolution de notre humanité."

21 octobre 2012

troubles anxieux dans les TSA

Les  troubles anxieux sont très fréquents dans les troubles envahissants du développement sans déficience intellectuelle (TED SDI) mais demeurent encore très souvent sous diagnostiqués.

Myriam Soussana, doctorante en psychologie a présenté ce sujet lors du colloque organisé le 29 septembre à l’Institut Pasteur.  Ces recherches sont financées par la Fondation Orange.

Le groupe de Myriam Soussana s’intéresse aux troubles anxieux dans les troubles envahissants du développement sans déficience intellectuelle : TED SDI. Les TED-SDI regroupent l’autisme de haut niveau (on parle de haut niveau tout simplement car ces personnes n’ont pas de déficience intellectuelle) et le syndrome d’Asperger.

Les personnes avec un TED-SDI ont des difficultés dans les compétences qui nous permettent d’avoir des relations sociales adaptées dans la vie de tous les jours. Malgré un bon vocabulaire et une expression normale, la communication non verbale est limitée : il est par exemple difficile de reconnaitre une émotion sur un visage au cours d’une conversation. En conséquence, on retrouve chez ces enfants et adolescents, des difficultés d’adaptation dans la vie quotidienne avec des problèmes d’interactions sociales (pas d’amis, difficultés à initier une conversation).

De plus, une récente étude a montré que 74% des enfants et adolescents avec un TED-SDI avaient aussi un trouble associé comme : la dépression, des troubles du comportement, un trouble anxieux…

Dans son étude, elle s’intéresse particulièrement aux troubles anxieux, qui sont parmi les plus fréquents dans les TED-SDI. On estime que 45% des enfants et adolescents avec un TED-SDI ont aussi un trouble anxieux : ce qui est plus courant que chez les personnes typiques. Et l’adolescence est une période de risque plus important car les relations sociales deviennent plus complexe (à l’entrée au collège).

Pourtant : le diagnostic de trouble anxieux n’est pas toujours posé car il est assez difficile à réaliser pour cette population. Il n’est pas évident de distinguer certains symptômes des troubles anxieux de ceux du TED.

Objectif

L’équipe de Myriam Soussana a monté une étude pilote qui avait pour objectif de :

  • caractériser les troubles anxieux dans les TED-SDI,
  • comparer les caractéristiques cliniques et socio-familiales d’adolescents  TED-SDI  avec et sans troubles anxieux,
  • comparer ces caractéristiques à un groupe d’adolescents anxieux sans TED.

Cette étude a été menée auprès d’une population de 46 adolescents TED SDI âgés de 11 à 18 ans dont 26 TED non anxieux et 20 TED anxieux.

Il a été observé :

  • pas de prise en charge particulière , que l’adolescent ait un trouble anxieux ou non, sa prise en charge sera la même, traitements médicamenteux identiques dans les deux groupes, (ex : pas + de suivis psychologique ou de prescriptions d’anxiolytiques en présence de troubles anxieux),
  • le niveau intellectuel est un facteur d’anxiété, plus le niveau intellectuel est élevé, plus les risques sont élevés,
  • l’anxiété augmente quand il y a un déficit social,
  • les adolescents avec un trouble anxieux ont plus de difficultés à reconnaitre des émotions sur les visages. On peut faire l’hypothèse que des échecs répétés dans l’interprétation des émotions ont pu jouer un rôle dans le développement de ce trouble anxieux. Avec le risque d’un cercle vicieux…

Conclusion

Pour une meilleure prise en charge de ses troubles anxieux, il faut adapter les outils de diagnostics à la particularité des TED
et trouver des nouvelles formes de prise en charge, la  prise en charge doit aussi être adaptée. Il est aussi nécessaire de mettre en place des programmes d’entrainement aux habiletés sociales et de continuer la recherche.

21 octobre 2012

Le Gouvernement prépare la professionnalisation des AVS

article publié dans le café pédagogique le 17 octobre 2012

Les enfants handicapés seront-ils enfin accompagnés par des professionnels formés et reconnus ? Cette vieille revendication des associations de parents avance d'un pas avec la mise en place, mardi 16 octobre, d'un groupe de travail. Il est chargé de préparer la professionnalisation des AVS en réfléchissant à leur formation et leur statut. Mais la création de ce nouveau métier va devoir trouver son financement...

Deux ministres pour un groupe de travail

Silence poli des invités quand les deux ministres, George Pau-Langevin, ministre déléguée à la réussite éducative et Marie Arlette Carlotti, ministre déléguée aux personnes handicapées, visitent le lycée professionnel Deprez le 16 octobre. Situé près de la Bastille, le lycée Deprez est un petit établissement (500 élèves) préparant aux métiers de l'électricité. Surtout il fait partie des rares lycées qui accueillent une ULIS ce qui justifie la présence des ministres. Mais la classe de bac pro électrotechnique que visitent les deux ministres ne compte aucune fille. Presque tous les élèves et leurs enseignants font partie des "minorités visibles" comme on dit en jargon éducation nationale. Pourtant c'est d'intégration qu'il s'agit. Les deux ministres viennent installer le Groupe de travail "Professionnaliser les accompagnants pour la réussite des enfants et adolescents en situation de handicap".

Le groupe de travail est piloté par Pénélope Komites, adjointe au maire de Paris en charge des personnes handicapées. Il comprend des représentants de l'administration (Dgesco, Dgefp, Direction générale de la cohésion sociale), les principales associations de parents (Fcpe, Peep, Apel) et de parents d'enfants handicapés (Fnaseph, Unapei, FFDys, Autisme France, Apajh, etc.), la Pep, l'Unaisse er l'Unaevs, les syndicats enseignants, les inspecteurs généraux auteurs du rapport de septembre 2012. Un certain nombre de grandes institutions et grandes entreprises (Casino, Sncf, Thalès, etc.) sont aussi représentés ainsi que des élus (l'Adf par exemple).

Quelle formation ?

"Nous inventons un nouveau métier". C'est que depuis le vote de la loi de 2005 prescrivant le droit à la scolarisation des enfants handicapés, les accompagnants, auxiliaires de vie scolaire (AVS) ou assistants de scolarisation, ont un statut précaire et ne sont pas formés pour leur métier malgré l'importance de leur mission.

Le groupe de travail devra d'abord définir un référentiel de formation. "La reconnaissance et la pérennisation de la fonction d’accompagnant doivent en passer par la définition d’un référentiel de compétences et d’activités. Ces professionnels seront appelés à intervenir dans des structures et sous des tutelles différentes. Un niveau de diplôme minimum validé par toutes les institutions concernées devra être envisagé". Ce sera au groupe de  définir si le diplôme de référence existe ou s'il faut en créer un. Il devra aussi recenser les besoins en AVS. "Il faut faire en sorte que les AVS puissent faire un travail de bonne qualité et qu'ils ne soient plus dans l'insécurité" a déclaré G Pau-Langevin.

Quel métier ?

"De 6 à 20 000 enfants ne sont pas scolarisés" a rappelé MA Carlotti. Un des enjeux de cette professionnalisation c'est aussi de scolariser l'ensemble des enfants qui y ont droit. Pour S Cluzel, présidente de la Fnaseph, la création de ce groupe de travail répond à  une revendication ancienne des associations qui chaque année bataillent pour que les enfants disposent des AVS dont ils ont besoin.

Reste que la création de ce nouveau métier, s'il voit le jour, aura un coût. Où trouver le financement de la formation et de vrais salaires pour les AVS alors que l'Etat s'engage dans une austérité renforcée ? François Hollande avait promis durant la campagne électorale qu'il créerait ce nouveau métier. L'Etat s'engage sur  cette voie. Ira-t-il au bout de la démarche ?

François Jarraud

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