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"Au bonheur d'Elise"
29 janvier 2014

Mes débuts dans l'ABA suite et fin ...

article publié dans l'Express

Voici la suite de la première partie qui relate mes débuts dans l’ABA.

 

Juin 09 : au bord du gouffre

C’est la catastrophe : le programme est inhumain : on le savait, mais on ne s ‘est pas écoutés.

Julien crie de plus en plus, nous n’arrivons pas à ignorer ses cris. À l’école c’est de pire en pire. Je vais le chercher à chaque fois avec une énorme boule au plexus, je suis pliée en deux devant le portail : je sais bien que l’AVS (Auxiliaire de vie scolaire) répondra qu’il a passé son temps dehors ou dans le couloir car il crie et dérange les autres. Julien a compris qu’en criant, il avait immédiatement ce qu’il voulait : la paix, courir dehors. En conséquence, il crie de plus en plus. Pratiquement tout le temps,  pour tout, même en mangeant. Moi, M., les intervenantes n’arrivons pas du tout à nous rendre attractifs, alors que c’est l’objectif principal visé dans le programme ! Mais c’était couru d’avance, comment se rendre attrayant quand on met toute notre spontanéité à la poubelle, quand tout est soigneusement calculé ? Julien est très sensible et se bien rend compte que nous ne sommes pas naturels !

À bout, nous supplions de l’aide à L., qui répond à nos messages par la phrase : « La réponse à ce message vous sera facturée XX £, le coût téléphonique sera de xx £. »

Nous avons sans cesse des factures de sa part, complètement incompréhensibles, tournant autour de 50, 100 £.

Nous devons payer (par pay pal) si nous voulons une réponse à nos questions.

Je n’en peux plus, d’autant que je suis déjà plus qu’extrêmement sensible aux bruits. Chaque cri me fait mal dans le corps, comme si on m’enfonçait une épine dans la peau. Je suis désespérée car je ne sais pas du tout comment réagir, comment faire pour qu’il comprenne qu’il faut qu’il arrête de crier.

Ce mois-ci, nous suivons une formation en suisse sur le comportement verbal, à nos frais. Épuisée, je n’arrive pas à tenir les deux jours de formation. Nous repartons avec des outils théoriques que nous connaissions déjà et qui ne nous serviront pas.

 

Juillet 2009 : mise en place d’un accompagnement VB, 2ème tentative

Cherchant désespérément de l’aide sur internet, je finis par trouver grâce à une autre maman, via un yahoogroupe francophone, une analyste en VB : elle est américaine mais parle très bien français et vient de s’installer en France, à Rouen. Je lui saute littéralement dessus. Elle démarre juste et n’a pas encore beaucoup de travail et a donc du temps libre : elle me donne des conseils presque chaque soir sur skype, gratuitement. Pour moi c’est le bonheur, je lui suis tellement reconnaissante de son dévouement, on sent que son seul but est que Julien aille mieux.

On décide alors d’arrêter le programme avec L. et de continuer avec C. en septembre, qui nous propose le même genre de contrat mais avec une vraie possibilité de communiquer sans que chaque mail, appel téléphonique ne soit payant, et une transparence totale dans les factures.

C., habitant Rouen, se déplacera tous les 3 mois pour superviser l’équipe que nous devrons refaire. Nous recruterons en septembre deux nouvelles intervenantes, employées par nous et formées « sur le tas ». Nous sommes partie prenante du programme, assurons nous-mêmes des séances, faisons le lien entre les intervenantes et l’analyste, remplissons les données, filmons les séances pour les montrer à C.

 

 

Et Julien dans tout cela ? (Août 2009)

En attendant, Julien a toujours de gros troubles du comportement (hurlements…) Nous les comptons, il y en a 200 par heure à certaines heures.

Je commande sur conseil de Maria le livre « Educate toward recovery » , qui décrit le VB. Il est écrit en anglais. Peu importe, je le dévore, c’est pour moi un mode d’emploi rempli de bon sens pour savoir comment gérer Julien, changer la donne. Je décide immédiatement d’en traduire quelques chapitres sauvagement (je suis bien loin d’être anglophone), pour mon entourage. Je colle même un résumé de chapitre sur une porte : « Les 7 étapes du contrôle instructionnel » et nous tentons de les appliquer.

Je réalise que tout ce qui est décrit dans ce livre est exactement ce qu’a tenté de nous enseigner L.. Seulement, nous avions tous été complètement sonnés par la quantité d’informations, par tout ce que nous devions remettre en question, désapprendre, le tout en une journée, que nous avons perdu tous nos repères.

Je tiens à ce que le livre soit traduit en français : il faut que tout le monde sache ce livre est nécessaire, vital… Je prends contact avec une maison d’édition spécialisée et l’auteur. Il faut trouver maintenant un traducteur : c’est chose faite après bien des péripéties, et finalement sa diffusion en français est annoncée pour cette année 2014.

 

Un livre très clair, plein de bon sens et écrit avec beaucoup d’humilité

Fin août, Julien crie toujours autant ! C’est bientôt la rentrée on ne sait vraiment pas comment on va faire… Un jour où nous faisons les courses dans un grand magasin, Julien se met à hurler, hurler… Nous savons qu’il faut ignorer et, ne sachant que faire, finalement nous nous cachons derrière un rayon, jusqu’à ce qu’il se calme. Au retour, je suis au bout du bout.. je dis à M.que je vais partir, n’importe où, mais seule.

Heureusement, avec cette crise nous venons, sans le savoir encore, de dépasser le moment où Julien comprend enfin, enfin, que crier ne sert à rien. Ses cris diminueront fortement par la suite. Ouf…

Mais tout n’est pas encore rose, et nous mettrons bien un an pour récupérer Julien, pour qu’il accepte simplement de rester avec nous au lieu de nous fuir en permanence.

 

Et en 2014 ?

Sur le plan personnel ma situation a évolué, je me suis séparée de M. (pas pour des raisons reliées à l’autisme de Julien).

Sur le plan de sa prise en charge aussi, il y a eu beaucoup de changements, enfin la routine quoi.

Ces deux articles ne concernent que les débuts dans l’ABA qui s’étalent sur un an, et ne retrace que la partie ABA de ce que nous devons faire sans arrêt pour que Julien bénéficie d’un accompagnement adapté. Il faut y ajouter en plus la partie administrative remplir chaque année, les dossiers MDPH, contester éventuellement les décisions, faire les contrats de travail des intervenants, et gérer tout ce qui est relatif à l’école (PPS, relations avec le personnel de l’école, faire respecter ses droits), anticiper ce que Julien fera l’année suivante.

Tout est à construire, sans cesse.

Je pense à ces mères qui ont sacrifiées leur vie, leur santé, carrière, couple, pour trouver, créer des solutions adaptées tout en se battant contre ce que veut nous imposer l’Education Nationale, le médico-social, contre ces absurdités administratives, contre ce système d’une hypocrisie sans nom, voire pervers… Et qui aujourd’hui sont épuisées, isolées, et désespérées par le futur, réellement en danger et absolument non assistées par l’Etat : Eglantine Emeyé a 10000000000 fois raison sur ce point.

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