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"Au bonheur d'Elise"
9 février 2014

Nous pourrions désormais dépister l'autisme beaucoup plus tôt

article publié dans Sciences et Avenir

Hugo Jalinière Publié le 07-02-2014 à 18h13

Yehezkel Ben-Ari, directeur de recherche émérite à l'Inserm, revient sur les espoirs et les inquiétudes que suscite la publication de ses travaux sur l'autisme.

Le centre Albert Camus pour jeunes autistes de Villeneuve-d'Ascq, en novembre 2008. (C.BAZIZ/SIPA)
Le centre Albert Camus pour jeunes autistes de Villeneuve-d'Ascq, en novembre 2008. (C.BAZIZ/SIPA)

ACCOUCHEMENT. En injectant un diurétique à des souris porteuses d’une forme d’autisme juste avant qu’elles n’accouchent, des chercheurs français sont parvenus à prévenir les comportements autistiques dans leur descendance. Ils ont ainsi mis en lumière le rôle prépondérant d'une hormone produite au moment de l'accouchement dans l'apparition de la maladie.

S&A : Vos recherche permettent-elles d'envisager un remède contre l'autisme ? 

Yehezkel Ben-Ari : Non, il n'est pas envisageable à l'heure actuelle de soigner l'autisme. Car prévoir que tel ou tel enfant à naître sera touché par l’autisme n’est pas possible. Le mécanisme d’apparition du syndrome autistique décrit dans notre étude permet de mieux comprendre la maladie, mais pas d’anticiper son apparition et encore moins de la traiter de façon préventive.

Il est vrai qu'on a réussi à prévenir l’apparition de l’autisme chez des souris en administrant des substances diurétiques à leur mère peu avant l’accouchement, mais parce qu’on savait que, sans ce traitement, ces souris à naître développeraient l'autisme. Chez l’homme cela reste impossible. Notamment car on ne peut pas mesurer le taux de chlore neuronal chez l’homme. Et on ne va pas administrer de diurétique à toutes les femmes enceintes avant qu’elles n’accouchent !

Prévenir l'apparition de la maladie avant la naissance serait éventuellement envisageable avec une pathologie comme la trisomie 21 (ndlr : ce n'est pas le cas), car son apparition peut être observée et confirmée très tôt.

LireAutisme: l'hormone de l'accouchement impliquée

S&A : Quel espoir cette découverte offre dans la lutte contre l'autisme ?

Yehezkel Ben-Ari : Notre étude permet d’envisager le développement d’outils de dépistage très précoce. Actuellement on est en mesure de diagnostiquer l’autisme chez l’enfant à partir de ses 2 ans. Certaines études montrent que des différences cérébrales sont identifiables dès 6 mois. Nous pouvons désormais espérer dépister l’autisme au bout de quelques mois. Or, on sait que dans ce type de maladie, plus on la repère vite plus les traitements envisagés seront efficaces.

Surtout, on peut désormais travailler sur certaines molécules comme les substances diurétiques utilisées dans notre études en sachant de façon certaine qu’elles peuvent être bénéfiques. Développer ce type de traitement en même temps que le dépistage très précoce permettrait d’améliorer considérablement la prise en charge de l'autisme.

Encore une fois, il n’est pas question de guérir l’autisme, mais de trouver des traitements qui réduisent le mieux possible le syndrome. L’autisme est aussi une maladie sociétale, et c’est à la société de se donner les moyens d’accompagner les malades par le biais de structures adaptées.

S&A : Votre étude montre l'importance de l'hormone de l'accouchement dans l'apparition du syndrome autistique. Ne pourrait-on pas agir au moment de l'accouchement pour réduire les risques d'apparition de la maladie ?

Yehezkel Ben-Ari : L’accouchement est un moment clé dans l’apparition du syndrome autistique. Pour autant, c’est un processus qui engage des mécanismes hormonaux très complexe et il n’est pas réaliste d’envisager qu’on puisse détecter et donc pallier le déficit d’ocytocine au moment de la naissance.

L’ocytocine est l’hormone que la mère (ou l’enfant on ne sait pas bien) déclenche au moment de l’accouchement. C’est elle qui provoque une baisse du taux de chlore et permet aux neurones de se développer normalement. On sait qu’une naissance prématurée favorise l’apparition de la maladie. C’est également vrai lorsque des problèmes de détresse respiratoires surgissent lors de l’accouchement.

Nos travaux doivent emmener la communauté scientifique à poursuivre et approfondir les études épidémiologiques sur le lien entre accouchement par césarienne et autisme. Car jusqu’à présent les études suggérant ce lien sont controversées. Ces recherches sont particulièrement urgentes en ce qui concerne les césariennes programmées, dites de confort. Si on me donnait demain un financement de 100 000 euros je le ferais tout de suite ! Je ne suis pas obstétricien et ne peux donc pas m’avancer, mais si ces études épidémiologiques étaient menées, nous pourrions avoir des surprises.

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