Autisme. Owen à l'école de l'inclusion
Modifié le 02 avril 2017 à 08h27
En classe comme dans la cour, Owen (en rouge) joue un rôle fédérateur dans la conscience et l'acceptation des différences au sein d'un groupe.
Owen avait trois ans et demi lorsqu'un médecin l'a diagnostiqué autiste. Peut-être finira-t-il par parler. En attendant, il s'exprime. Et pas qu'un peu. « Il m'épate », commente Jannick Delchambre, alors que le garçon, désormais âgé de sept ans, vient d'empiler des cubes par ordre de volume décroissant. L'assistante de vie scolaire suit Owen à l'école publique de Trémaouézan depuis trois années. « Avec l'objectif de le rendre le plus autonome possible. Au début, c'est à peine si on pouvait l'approcher. Aujourd'hui, il sait utiliser les toilettes, prendre ses repas, s'habiller ».
Les bénéfices ordinaires des sollicitations quotidiennes avec les copains, dont les gestes sont repris par mimétisme. « À la cantine, au moins, il prend sa cuillère », sourient Sandrine et David Gourlay, parents légitimement fiers du moindre petit exploit. Parents, maillons essentiels de cette démarche inclusive d'une efficacité remarquable, si tout le monde y contribue. À commencer, bien entendu, par les enseignants. En la matière, l'école de Trémaouézan s'inscrit à la pointe. Désormais en poste à Brest, dans la première unité d'enseignement en maternelle pour les enfants avec troubles autistiques, Frédérique Baron a impulsé le mouvement dans la petite mais dynamique école (*) du bassin landernéen lorsqu'elle la dirigeait.
« Ici, c'est l'adulte, l'enseignant, qui s'adapte aux difficultés d'apprentissage. Avec Owen, nous travaillons sur des étiquettes. Jannick tient un rôle fondamental. Nous réfléchissons ensemble à la meilleure façon de le faire progresser. À son rythme. Comme n'importe quel enfant. Professionnellement, c'est très motivant », témoigne Corinne Lalande, maîtresse des GS-CP. Dans la classe, Owen s'occupe de la distribution des photos. Ses camarades lui répondent merci en langue des signes. La maîtresse leur a montré le geste. Sa copine Elsa aime bien jouer avec lui. Les autres ne sont pas en reste. Dans la cour, les grands l'enlacent. Owen adore ça.
« Il y a beaucoup d'attention entre enfants. Pour eux, le groupe ne se constitue pas d'une somme de concurrences mais de différences qui ont toutes leur place. Dans cette conscience civique, Owen, comme Augustin (autre enfant autiste de l'école), jouent un rôle fédérateur », rapporte Corinne Lalande. « Ils ont beaucoup à nous apprendre ». L'école de campagne de Trémaouézan aussi : « Inclure un enfant autiste n'a rien d'insurmontable, pour peu qu'on y accorde beaucoup de motivation ». Y compris pour se payer les formations que ne couvre pas l'Éducation nationale. L'enseignante et l'assistante de vie scolaire, ancienne éducatrice spécialisée en institut médico-éducatif, continuent d'autofinancer leurs stages de perfectionnement. Tout comme Sandrine et David Gourlay ont décidé de prendre sur leurs économies (elle de se mettre à mi-temps) pour régler les notes des spécialistes privés et accélérer la prise en charge médicale : « Le but a toujours été d'emmener Owen le plus vite possible à l'école. Aujourd'hui, il bénéficie d'un environnement exceptionnel ». Un fragile « privilège ». Il suffirait d'un refus d'agrément, d'un enseignant moins convaincu, pour qu'il vole en éclats. L'inclusion d'Owen ne devrait-elle pas, au contraire, figurer la norme ? Une question à poser, aujourd'hui, en cette Journée mondiale de sensibilisation à l'autisme. * Près de 100 élèves dans une commune de 550 habitants.