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"Au bonheur d'Elise"
4 décembre 2017

TÉMOIGNAGE. Julia raconte sa vie chaotique de jeune autiste Asperger

Julia March, jeune femme autiste asperger, dédicace son livre "La fille pas sympa" ce vendredi 1er décembre 2017 à Nantes
Julia March, jeune femme autiste asperger, dédicace son livre "La fille pas sympa" ce vendredi 1er décembre 2017 à Nantes | DR

Stéphanie LAMBERT.

Depuis toujours, Julia March se sent en décalage. Et en souffre. Diagnostiquée autiste Asperger il y a trois ans, la Nantaise de 28 ans raconte sa vie turbulente dans un livre. De son métier de prof d’espagnol à son expérience dans la Zad de Notre-Dame-des-Landes.

Julia March, Nantaise de 28 ans, professeure d’espagnol en collège, est l’auteure de La fille pas sympa (éditions Seramis, 290 p, 21 €). Elle raconte dans son livre, sa « vie chaotique et turbulente d’une jeune autiste Asperger ». Entretien.

Qu’est-ce qui est le plus gênant dans la vie de tous les jours ?

Je ne comprends pas le langage non verbal. Si on attend quelque chose de moi sans me le dire clairement, ou avec des sous-entendus, je ne vais pas répondre. Ce qui n’est pas très sympa. Or, plus de la moitié de la communication passe par ce langage. Pas très pratique ! Cela provoque nombre de situations cocasses.

Enfant, je prenais les signes d’amitié de mes camarades de classe pour des agressions. Ça peut encore m’arriver ! Je dois apprendre les codes en permanence, la gestion des relations sociales… C’est épuisant !

J’ai mis un an et demi avant d’adresser la parole à mes copains de fac. Il me faut beaucoup plus de temps pour m’adapter aux nouveautés que les gens « normaux ». Ils me surnommaient « l’autiste ». Ils ne croyaient pas si bien dire…

Il faut dire que vous cumulez : élevée chez des Témoins de Jéhovah, zadiste de Notre-Dame-des-Landes…

Ça fait beaucoup pour une seule femme, en effet ! C’est pourquoi j’ai écrit cette histoire, qui au-delà de la thématique de l’autisme, peut toucher plus largement.

J’y parle de situations difficiles sur lesquelles j’aurais moi-même aimé lire : dépression, embrigadement sectaire, exclusion, harcèlement scolaire… Mais en dédramatisant, avec ma pêche et mon humour.

Votre témoignage est précieux car on parle plus souvent des hommes Asperger que des femmes. Pourquoi ?

Nous avons plus de facilités, nous les femmes, à nous fondre dans la masse, à dissimuler nos différences, à mimer et à nous adapter socialement. C’est pourquoi nous passons plus souvent inaperçues et sommes détectées plus tardivement.

C’est la double peine : nous sommes invisibles et personne ne parle de nous.

Comment avez-vous reçu le diagnostic posé sur vous, il y a trois ans ?

Comme un soulagement : je peux mettre des mots sur quelque chose qui n’est ni une maladie ni une honte. Aujourd’hui, je suis salariée handicapée. Je me sens protégée.

Pour autant, la tâche reste ardue : expliquer aux autres, apprendre continuellement cette langue qui m’est totalement étrangère…

Mais je ne me prends plus la tête. J’avance.

Vous enseignez l’espagnol dans un collège. Qu’en pensent vos élèves ? Ce travail est-il compatible avec votre état ?

Ils ne sont pas au courant. Mais le bruit qu’ils font, leurs discussions au fond de la classe, parfois, me gênent. La gestion du temps est également problématique. Mais j’organise et planifie au maximum.

Quels sont vos projets ?

Je me suis lancée dans l’écriture de ce livre grâce à mon amie Julie Dachez, elle aussi nantaise, elle aussi Asperger, elle aussi auteure (La Différence invisible, BD parue chez Delcourt). J’y ai pris goût.

Je voudrais poursuivre l’exercice, pourquoi pas à travers des romans mettant en scène des personnages aux profils atypiques, en marge, et dont on parle si peu.

Ce vendredi 1er décembre 2017, à 18 h 30, à la librairie Durance, 4, allée d’Orléans, à Nantes. Autres dédicaces samedi 16 décembre, à 15 h, à l’espace culturel Paridis, et le samedi 17 février, à 15 h, à la Fnac.

Julia March dédicace à Nantes son livre
Julia March dédicace à Nantes son livre "La fille pas sympa. La vie chaotique et turbulente d'une jeune autiste Asperger" | DR
Elle quitte Paris pour la Zad…

En mai 2013, Julia est étudiante à Paris lorsque le diagnostic tombe. Elle a tous les symptômes du syndrome d’Asperger, une forme d’autisme affectant sa manière de communiquer et ses interactions avec les autres. L’idée d’être ainsi pour toujours la plonge dans une profonde errance intérieure.

Changer de quotidien à tout prix… Voilà comment, dans la foulée, la Nantaise quitte illico sa résidence universitaire pour se retrouver en plein milieu des champs, dans la Zad de Notre-Dame-des-Landes, avec des gens qui, croyait-elle, allait comprendre sa différence. « Cataclysme familial », commente-t-elle. Mais c’était ça, ou elle pétait les plombs.

« Naïve », elle croira « fuir la violence du monde » pour, explique-t-elle, « rencontrer une autre violence, celle du milieu militant ». Cette parenthèse lui aura tout de même permis de « souffler, de rencontrer des gens à mon image, perdus ou meurtris par trop d’années passées à jouer la comédie dans le monde dit normal ».

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