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"Au bonheur d'Elise"
28 mars 2018

Lannion. Autiste, Brice espère juste passer en 1re théâtre

article publié dans Ouest France

Brice devant ses cahiers de cours, entouré de Janic Drouot intervenante à domicile, de sa mère, Hélène Tadié et de Noémie Libouban, une amie monitrice éducatrice formée à l’autisme.
Brice devant ses cahiers de cours, entouré de Janic Drouot intervenante à domicile, de sa mère, Hélène Tadié et de Noémie Libouban, une amie monitrice éducatrice formée à l’autisme. | Sylvie Ribot

 

Pour devenir auteur ou monter sur les planches, le lycéen trégorrois doit remonter ses notes. Sa famille réclame quelques aménagements pour mieux tenir compte de sa différence.

« Ce que je veux, depuis 3 ans, c’est devenir auteur, acteur, scénariste de films ou de jeux vidéo. » Quand Brice Le Thous, 17 ans, élève de 2de, a une idée en tête, elle est bien ancrée. Et surtout elle le motive à fond pour surmonter sa différence et mettre les bouchées doubles. Alors que Brice a été diagnostiqué autiste Asperger à l’âge de 10 ans, sa mère Hélène Tadié a dû batailler, à chaque étape, pour que le garçon aille dans une classe comme les autres. Accompagné d’une AVS, auxiliaire de vie scolaire.

Bien adapté socialement

Dernièrement, le moral du jeune homme en a pris un coup parce qu’avec son changement de lycée, les notes ont dégringolé. « Au collège de Plouaret, en fin de 3e, il avait 14,6 de moyenne en français, 14 en histoire géo, 13,7 en maths… Il a eu son brevet. Là, il est à 6 de moyenne », se désole sa maman.

À la suite d’une erreur d’aiguillage administratif, Brice, qui habite Plouaret, s’est retrouvé inscrit au lycée Le Dantec (Lannion) en septembre, puis a bifurqué à sa demande sur Savina (Tréguier) après la Toussaint, pour pouvoir prendre l’option théâtre tant espérée en 1re.

« Il s’est hyper bien adapté socialement et s’est fait des copains à Savina. Sa nouvelle AVS est super », trouve Janic Drouot, intervenante comportementale à domicile (32h/mois), qui suit Brice depuis 2013. Celle-ci a pu faire une information auprès de la classe et d’un prof pour expliquer ce qu’engendre l’autisme de Brice.

Mais pour l’instant, les préconisations qu’Hélène avait données à la direction de l’établissement tardent un peu à se mettre en place. « Ils manquent sans doute de moyens ou de temps, mais c’est dommage parce que c’est son avenir qui est en jeu », s’alarme la maman.

Exos à trous et QCM

« Brice a surtout besoin que les cours ou exercices soient écrits plus gros. Que les exercices soient plutôt avec des questionnaires à trous ou des QCM. Que les contrôles aient moins de questions pour lui ou qu’il ait droit à plus de temps pour y répondre », car l’écriture manuscrite « et la motricité fine », ça n’est pas son point fort. C’est d’ailleurs son AVS qui assure la prise de notes. « Autre problème, son attitude, quand il n’est pas motivé et son hyperfatigabilité peuvent vite passer pour de la nonchalance », reconnaît Hélène Tadié.

À sa demande, une réunion d’ESS (équipe de suivi de la scolarisation) va se tenir ce jeudi 29 mars avec les équipes du lycée, la prof référente de la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées), l’AVS, l’intervenante à domicile, Brice, Hélène… Il espère qu’elle lui permettra d’ouvrir une nouvelle page de sa vie scolaire. « Je souhaite tellement aller en 1re L option théâtre ! » explique le jeune homme, à l’aise en impro, prompt à inventer des histoires « qui n’ont pas de fin », et incollable sur l’univers de la fantasy, de Lovecraft, Star wars…

« Moi, j’aime les univers sombres, avec des créatures. Sur l’histoire de World of Warcraft, je suis pointilleux, j’en deviendrais insupportable ! » Ses proches opinent. Pour les « journées d’expression » à Savina, ne laissant aucun détail de côté, il s’est teint les cheveux en roux et s’est levé à pas d’heure pour se maquiller en Joker de la série Gotham.

« J’ai pas mal d’imagination : hélas pour vous, heureusement pour moi ! » lance-t-il avec aplomb. « Vous », c’est les autres. Ceux dont il sent parfois les regards « même si je suis de dos. Ces regards observateurs, j’ai horreur de ça, ils sont comme l’œil de Sauron dans le Seigneur des anneaux. » Rien à voir, pour lui, avec le regard du public sur un comédien qu’il espère connaître un jour.

Le lycée va faire un point d'étape sur les besoins de Brice
Anne d’Angely, proviseur adjointe du lycée Savina, de Tréguier. | DR

Trois questions à

Anne d’Angely, proviseur adjointe du lycée Savina, de Tréguier.

Comment se prépare l’arrivée d’un élève ayant un handicap comme Brice ?

On reçoit la famille en amont et on est en lien avec l’enseignant référent de la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées). Pour Brice, j’avais été contactée dès février 2017 et invitée à une réunion de suivi dans son collège. Sa mère m’avait même donné une fiche rédigée par son médecin, alors que d’habitude, on nous dit juste les symptômes mais sans nous stipuler le diagnostic. Là au moins, c’était transparent : Brice est autiste.

Quel dispositif a été mis en place pour lui ?

Il a une AVS (auxiliaire de vie scolaire) et un emploi du temps adapté : pas de 2e langue vivante, d’EPS, d’enseignement d’exploration, et 1 h de maths en moins car il a une grande fatigabilité. S’il faut des textes plus gros ou des exercices à trous, on doit pouvoir l’organiser assez vite.Après, du côté des enseignants, cela peut être compliqué si à chaque fois il faut préparer une variante d’exercice. Des fois les profs ont aussi du mal à évaluer si, quand on leur rend une copie blanche, cela relève du handicap ou d’un éventuel manque de travail, c’est vrai. On a peut-être un peu raté le coche, à un moment, avec une réunion de présentation aux équipes qui n’a pas pu se tenir.Cependant, une info aux élèves a été faite et les profs ont tous été prévenus du handicap de Brice. J’aurais voulu le faire plus tôt mais ce jeudi, on a une réunion avec nos équipes, la MDPH et la famille pour voir comment ça se passe et parler de l’orientation de Brice. Un point d’étape pour voir si ce que l’on fait correspond bien à ses besoins… Parce qu’il ne faut pas oublier qu’on parle d’humain.

Le lycée n’a pas de moyens supplémentaires pour l’accueil d’élèves handicapés ?

Non. À part les AVS (1) et/ou des ordinateurs affectés aux élèves sur décision de la MDPH, on n’a pas de moyens financiers ou de personnels en plus. Pourtant, le suivi d’un tel élève est plus difficile au lycée parce qu’il n’a pas qu’un seul enseignant comme en primaire et que les profs ont aussi l’objectif de préparer tous les élèves au bac.

(1) Savina en a 5 cette année qui suivent 7 élèves. Sur les 670 élèves, 46 ont une scolarité adaptée dont 14 relevant du handicap.

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