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"Au bonheur d'Elise"
16 décembre 2011

article publié sur le site de la CIPPA (autisme et psychanalyse aujourd'hui)

Réponse aux mises en cause répétées des abords psychanalytiques des troubles autistiques

RECTIFICATIONS. Non, ce n'est vraiment pas la référence à B. Bettelheim, telle qu’elle apparaît fréquemment dans les médias, qui inspire de nombreux psychanalystes s’occupant d’autisme, mais ce sont surtout les psychanalystes anglais F. Tustin[1] et D. Meltzer[2] largement traduits, diffusés, enseignés, commentés et prolongés depuis trois décennies, en France par exemple. Il importe de remarquer que la conception de B. Bettelheim n’est aucunement d’origine psychanalytique, mais provient de son observation que certains déportés en camp de concentration étaient en retrait autistique. L’application qu’il en fit à la famille des enfants avec autisme, regrettablement culpabilisante en effet, fut évidemment une erreur, mais pourquoi faudrait-il que, commise il y a un demi-siècle, et répétitivement mise en avant dans les médias, elle nuise encore en occultant totalement tous les travaux psychanalytiques, complètement différents, effectués depuis ? Nous ne connaissons pas non plus de collègues qui pensent « que ces enfants doivent être éloignés le plus possible de leurs parents » : les traitements se font en ambulatoire, hormis les cas où un internat est indiqué selon une décision commune parents/professionnels.

MISE AU POINT SUR CE QUE FONT DE NOMBREUX PSYCHANALYSTES DE PLUSIEURS COURANTS[3]. Ils pratiquent l’observation la plus fine possible à la recherche d’un repérage et d’une compréhension de ce que ressentent, essaient de penser, et de communiquer les enfants, les adolescents et encore les adultes, malgré leur handicap autistique. Invités à l’expression spontanée et à l’association libre, fondements de la méthode psychanalytique, avec une participation du thérapeute plus active qu’auprès d’autres patients, ils nous ont entraînés à décrypter leur langage gestuel qui peut paraître d’abord dénué de sens, par ex. déambulations et explorations tactiles des éléments du décor de la pièce et de son mobilier comme à la recherche de représentants d’une contenance corporelle et émotionnelle dont le défaut constitue la grande défaillance du trouble autistique ; ou bien concentration sur les qualités purement sensorielles des objets et mouvements stéréotypés comme agrippements incessants pour surmonter des angoisses de chute anéantissante ou de liquéfaction de leur corps qu'ils parviennent à théâtraliser de diverses manières. C’est une première symbolisation en-deçà de la possibilité d’utiliser des jouets figurés. Ils essaient aussi de communiquer les causes de leur évitement du regard : peurs d’un débordement émotionnel, ou d’une pénétration physiquement blessante. Mais ce langage tente aussi de communiquer leur conscience de la reprise, au cours des traitements, du développement normal - sur lequel ces enfants nous ont beaucoup appris - de la construction de leur image du corps et de l'espace sans laquelle les activités spontanées d’explorations et de jeux sont très difficiles, même si l’enfant a le désir d’apprendre. Il y a donc entre notre abord thérapeutique et les propositions éducatives une complémentarité très souhaitable dans un dialogue créatif au sein des institutions (J. Hochmann)[4] et dans les instances de formation (D . Amy)[5], d’information et de réflexion comme les Centres ressource autisme, complémentarité qui devrait être beaucoup plus développée encore.   

Signalons également que plusieurs équipes animées par des psychanalystes ont déjà mis en place des conditions utiles au diagnostic précoce, et à la prise en charge pluridisciplinaire intensive des cas à risques autistiques, telles que l'équipe du P. Delion, Dépist’ autisme[6], et la recherche Préaut de M.C. Laznik et G. Crespin[7] avec une large sensibilisation des pédiatres aux signes d’alerte.

RENCONTRES AVEC D’AUTRES COURANTS DE RECHERCHES. Nombre de recherches des sciences cognitives et des neurosciences viennent rejoindre les observations faites par les psychanalystes. Ainsi, à propos des difficultés de la rencontre du regard, nous pensons depuis longtemps en suivant les démonstrations des patients que quelque chose est ressenti comme dur, ou explosant, ou éblouissant dans la rencontre du regard d'autrui. Une adulte avec autisme, D. Williams, le décrit très bien : cette rencontre était engloutissante et lui faisait perdre pour un temps « des pans entiers de signification »[8]. On peut donc discuter de ce qui gêne le plus le décryptage des émotions sur le visage : ce n’est peut-être pas un trouble primaire lié à une non activation de la zone cérébrale de reconnaissance des visages comme le soutiennent certains chercheurs ; en effet, cette non activation ne serait-elle pas plutôt  une conséquence de la rareté du contact direct avec le visage de l'autre, rareté précisément due à cette gêne du regard ? En ce sens, nous avons l’information récente, par la remarquable bibliographie faite dans la revue Sésame-Autisme, organe de l’Association des parents du même nom (n° 155, juillet 2005), que la neurophysiologie confirme l’enregistrement d’une réponse fortement émotionnelle associée à la fixation du regard chez les autistes et que d’autres recherches nous apprennent que le contact oculaire déclenche une sensation de menace inconfortable chez les enfants autistes «ce qui fait suggérer que le détournement du regard présente un rôle fonctionnel ». Nous avons fait une discussion analogue pour la non réception de la voix à propos de l’expérience de M. Zilbovicius (2004)[9]. Des psychanalystes ont ainsi fait depuis une vingtaine d’années des jonctions passionnantes avec des chercheurs non psychanalystes, comme J. Nadel sur l’imitation précoce, C. Trevarthen (Edimbourg) sur le dialogue émotionnel dans les échanges sonores très précoces, et A. Bullinger (Genève) sur les sensorialités et les « plate-formes sensori-toniques et tonico-émotionnelles ». Il est donc faux de déclarer que les psychanalystes s’intéressant à l’autisme seraient enfermés dans une «théorie» loin des réalités dites scientifiques : sans abandonner leur propre scientificité, ils sont en pleine interaction avec la communauté scientifique internationale dans plusieurs champs d’investigation. Beaucoup sont très attentifs aux recherches génétiques en cours pouvant approcher des racines de ce qu’ils ressentent depuis longtemps en termes de vulnérabilité ou de prédispositions particulières. Nous souhaitons que ces dialogues tels qu’ils sont déjà instaurés dans plusieurs équipes, notamment autour du diagnostic précoce, se développent pour le plus grand bénéfice des patients de plusieurs pathologies, sans restriction d'ailleurs à la seule problématique de l’autisme. Certaines thérapies cognitivo-comportementales, comme les « thérapies d’échange » (C. Barthélémy, Tours) sont très intéressantes.

Les signataires affirment qu’ils ne soutiennent pas l’idée d’une psychogenèse purement environnementale de l’autisme, ni non plus l'attitude qui consisterait à  « attendre la demande »,  attitude peut-être appropriée pour d’autres pathologies, alors qu’il faut au contraire aller chercher les sujets avec autisme de manière très vivante (A. Alvarez[10] et autres), et la mieux ajustée possible, ce qui nécessite une coopération étroite avec les parents avec un véritable accompagnement de leurs difficultés.

QUE LES PROFESSIONNELS DE DIVERSES ORIENTATIONS, ACTUELLEMENT EN RECHERCHES INTENSES, SE RASSEMBLENT DAVANTAGE POUR ENTRECROISER LEURS POINTS DE VUE EN RENONÇANT À DES EXCLUSIVES QUI RETARDENT L’AMÉLIORATION, QUALITATIVE ET QUANTITATIVE, DES SOINS, DE L’ÉDUCATION ET DE L’INSTRUCTION, TROIS DOMAINES DEVANT ÊTRE CONJUGUÉS, COMME NOTRE EXPÉRIENCE ET NOS SUPERVISIONS NOUS LE MONTRENT, POUR DONNER LEUR MEILLEURE CHANCE AUX ENFANTS, ADOLESCENTS ET ADULTES SOUFFRANT D’AUTISME.

Pr M. Amar (Nantes), Dr V. Damato (Naples), D. Amy, Dr D. Arnoux, Pr A. Aubert-Godart, P. Barrows (Londres), Pr P. Bizouard (Besançon), Dr E. Castex, M.-Ch. Choppy, Dr G. Crespin, Pr P. Delion (Lille), Dr A. Eiguer, Dr A. Feugère-Engel, Dr V. Flavigny, Dr J. Fortineau, Drs S. et Ch. Frisch (Luxembourg), Pr B. Golse, J.L. et A. Goyena, Dr G. Haag, Pr ém. J. Hochmann (Lyon), Pr D. Houzel (Caen), D. Huon, Dr F. Jardin, Dr M.-Ch. Laznik, Dr B. Lechevalier (Caen), Dr E. Lefort (Corrèze), Dr B. Lehalle, Dr  A.-Y. Lenfant (Lille), Dr S. Lepastier, Dr A. Lévy, Dr S. Maiello (Rome), Pr O. Maratou (Athènes), Dr C. Masson, D. Mellier (Lyon), S. Messeca (Naples), Dr E. Moussaoui (Caen), Dr N. Nakov (Metz), A. Namer, Dr L. Ouss, P. Poyet (Blois), R. Prat, Pr J.-Ph. Raynaud (Toulouse), Dr D. Ribas, Pr M. Rhode (Londres), J. Rochette, Dr D. Rosenfeld (Buenos-Aires), Dr R. Sandri (Bruxelles),  C. Sternis, H. Suarez-Labat, Dr C. Tabet (Lens), Pr S. Tordjman (Rennes),  Dr B. Touati, J. Tricaud, S. Urwand, Dr A.-M. Vaillant (Corrèze) (l’absence d’indication de localité signifie Île de France).

[1] Tustin F. (1981), trad. 1986, Les Etats autistiques chez l’enfant, et 3 autres livres, Paris, Le Seuil

[2] Meltzer D. (1975), trad. 1980, Explorations dans le monde de l’autisme, Paris, Payot.

[3] Haag G. (2000), Le moi corporel in L’enfant, ses parents, et le psychanalyste, C. Geissmann et D. Houzel eds, Paris, Bayard.

(2005), Comment les psychanalystes peuvent aider les enfants avec autisme et leurs familles, in Médecine et Enfance (n° de mai) et in Autisme : état des lieux et horizons, 31520 Ramonville, Erès

[4] Hochmann J., 2004, Au risque de la psychiatrie communautaire : une expérience de suivi au long cours d’enfants, puis d’adolescents autistes, Revue Sesame autisme, n° 152.

[5] Amy D. (2004), Comment aider l’enfant autiste ?, Paris, Dunod

[6] Delion P. et coll., 1998, Les bébés à risque autistique, Erès.

[7] Crespin G., 2004, Aspects cliniques et pratiques de la prévention de l’autisme, Cahiers de Préaut, Paris, L’Harmattan.

[8] Williams D. (1992) trad. Si on me touche, je n’existe plus, Paris, R. Laffon

[9] Haag G., avec le soutien de 160 collègues et de quelques chercheurs non psychanalystes : Réflexions de  psychothérapeutes de formation psychanalytique s’occupant de sujets avec autisme, Carnet PSY mars 2005, cf. Le Monde, 18/05/05, par C. Vincent.

[10] Alvarez A. (1992), trad. 1997, Une présence bien vivante, 56260 Larmor-Plage, Le Hublot.

http://old.psynem.org/Cippa/Presentation/Non/index.htm

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14 décembre 2011

information sur le site de Vaincre l'Autisme

Dans le cadre de son action contre le Packing, VAINCRE L’AUTISME a saisi la Haute Autorité de Santé afin qu’elle procède à :

- L’évaluation médico-économique des traitements (packing, holding, pataugeoire ainsi que la psychothérapie psychanalytique) reçus par les autistes dans les structures sanitaires, médico-sociales et médico-éducatives (hôpitaux de jour, IME…) sur le territoire national ;

- L’évaluation du coût économique de ces traitements pour le contribuable ;

- L’évaluation de l’efficience/efficacité de ces traitements sur la santé publique ;

- Une étude sur la littérature scientifique internationale sur le Packing et ses effets ;

- L’intégration dans ses recommandations de bonne pratique sur les interventions  éducatives  et thérapeutiques coordonnées chez l’enfant et l’adolescent avec autisme ou autres troubles envahissants du développement (TED), de l’article « Against le Packing : A Consensus Statement ». 

 

 Saisine HAS étude litteraire (PDF)

 Saisine HAS étude médico-économique (PDF)

http://vaincrelautisme.org/content/packing-saisines-de-la-haute-autorite-de-sante

14 décembre 2011

article publié dans le blog de médiapart le 13 décembre 2011

Analyse des affirmations de Mme Eliacheff sur "Le Mur : la psychanalyse à l'épreuve de l'autisme " par Jacques van Rillaer

 
Gérard Mercuriali
Inscrit(e) depuis Aug. 2011

" href="http://blogs.mediapart.fr/blog/G%C3%A9rard%20Mercuriali">Gérard Mercuriali

 

Analyse des affirmations de Mme Eliacheff

sur le Film « Le Mur : la psychanalyse à l'épreuve de l'autisme »

Emission  Les Matins de France-Culture  du  7 décembre 2011

http://www.franceculture.fr/emission-les-idees-claires-de-caroline-eliacheff-les-idees-claires-de-caroline-eliacheff-2011-12-07

« Des personnes bien intentionnées, c'est bien pire que celles qui le sont mal »

Jacques Lacan, Séminaire XX, Seuil, 1973, p. 64.

 

1. Une trentaine de psychanalystes

« se sont fait rouler dans la farine »

Mme Eliacheff reproche à Sophie Robert de s’être présentée comme journaliste travaillant pour Arte, raison pour laquelle ces analystes ont accepté d’accorder de longs interviews. Mme Eliacheff souligne que tous ces analystes ont « une renommée nationale voire internationale ». Autrement dit, ce sont des experts des profondeurs de l’âme[1].

Celui qui connaît bien les mœurs freudiennes et lacaniennes ne s’étonne guère de la naïveté de ces personnages de grande renommée. Freud lui-même, brillant théoricien et écrivain, manquait totalement de clairvoyance quand il s’agissait d’évaluer des personnes. Les deux disciples auxquels il a accordé les plus hautes responsabilités (Adler s'est vu nommé en 1908 Président de la Société viennoise de Psychanalyse et Jung, en 1910, Président de l'Association internationale de Psychanalyse) sont devenus des « dissidents » très peu de temps après leur nomination. Rank et Ferenczi, qui furent longtemps les disciples préférés après la rupture avec Jung, se sépareront également de Freud. Ils diront que « Freud n'avait pas plus d'intuition qu'un petit garçon » (cités par Jones[2]). Par contre, Freud s’est toujours méfié de Jones et d’Abraham, des disciples qui lui resteront fidèles jusqu'à la mort.

Moi-même j’ai été le premier assistant du professeur Jacques Schotte, à l’époque Président de l’Ecole belge de psychanalyse (l’équivalent belge de l’Ecole freudienne de Paris). En 1972, j’ai défendu ma thèse de doctorat sur Freud, devant un jury composé de quatre psychanalystes et un psychosociologue (c’était l’époque où, à l’université de Louvain, le feudo-lacanisme régnait souverainement). Le jury a trouvé que c’était tellement « brillant » (en fait, tellement conforme aux dogmes freudo-lacaniens) que deux ans plus tard j’étais nommé chargé de cours à temps plein à la Faculté de médecine de l’université de Louvain. Les professeurs qui m’avaient fait nommer étaient bien sûr des psychanalystes ou des gens favorables à ce courant (c’est le système de cooptation, assurant « la reproduction »[3]). Comment n’ont-ils pas vu que j’allais changer d’avis en 1979 et devenir ensuite très critique à l’égard des élucubrations et des mœurs freudiennes ?

L’autre assistant de J. Schotte, Michel Legrand, s’est avéré être d’abord, comme moi, un freudien convaincu, puis un critique acerbe de l’idéologie réactionnaire sous-tendant le freudisme et le lacanisme[4]. Là encore, le Président de l’Ecole belge de psychanalyse n’avait pas du tout compris qu’il avait affaire à un futur renégat.

Pour revenir à Sophie Robert :

ou bien elle n’a pas tendu un piège (elle en est arrivée au fil du temps, en toute bonne foi, à trouver le discours freudo-lacanien de plus en plus aberrant et inefficace),

ou bien elle a manipulé. Mais, si cette seconde hypothèse est la bonne, il faut reconnaître que tous ces analystes de « renommée nationale voire internationale » n’ont, pour reprendre l’expression de Férenczi et Rank, « pas plus d'intuition qu'un petit garçon ».

Quand un(e) journaliste prend contact avec moi, qui ne suis qu’un petit Belge sans renommée internationale, je prends toujours la peine de voir via Internet de qui il s’agit (cela ne prend que quelques minutes). Si son nom n’apparaît pas ou quasi pas dans le moteur de recherche, je lui réponds que je suis malheureusement trop occupé (j’ai en effet autre chose à faire que donner des interviews sans lendemain). Actuellement, plus de la moitié de mes patients ont tapé mon nom dans un moteur de recherche avant de me consulter. Ils me parlent, en passant, de documents qu’ils y ont lus à mon sujet. Aujourd’hui, la majorité des intellectuels ont le « réflexe Google » pour ne pas perdre leur précieux temps. Comment ces analystes, champions de la pensée soupçonneuse, voire paranoïde, ne se sont-ils pas méfiés ? En vérité, ils sont tellement convaincus de leur valeur, leur Moi est tellement gonflé, qu’ils se voyaient déjà glorifiés via Arte. On les comprend : avec France-Culture et Le Monde, Arte est le média par excellence de la diffusion de la doctrine psychanalytique pour les happy few.

D’autre part, Sophie Robert aurait-elle présenté un document orienté, qui aurait le droit de lui jeter la première pierre ? Ceux qui ont vu des émissions d’Arte sur Freud ou sur d’autres chaînes françaises ont pu constater que les réalisateurs orientent systématiquement les documentaires dans le sens des légendes freudiennes[5]. Pire : ils mentent sans vergogne. J’ai montré des années durant à mes étudiants un film d’Arte sur Freud où l’on voit Mme Roudinesco et Peter Gay présenter le cas d’Anna O. comme une réussite spectaculaire de la psychanalyse, alors que tous les historiens du freudisme savent parfaitement que « la cure par la parole » avait exacerbé ses troubles au point de devoir l’envoyer dans un institut psychiatrique.

Pour des détails sur Anna O, voir l’ouvrage tout récemment paru de Mikkel Borch-Jacobsen, le meilleur historien actuel du freudisme :

Les Patients de Freud. Ed. Sciences humaines, 2011, 224 p., 14 €

Pour un aperçu,

Taper dans un moteur de recherche : EDPH2277

puis cliquer sur « documents » et enfin choisir : Patiens_de_Freud.doc

Dès qu’il s’agit de venir en aide à un public dupé, exploité, ignorant ou naïf, victime des puissances d’argent et de pouvoir, on a le droit, si pas le devoir, de faire des documents qui aient une certaine force démasquante et même d’employer des méthodes comme la caméra cachée. Il en va ainsi pour la scientologie, l’astrologie et d’autres pseudosciences, parmi lesquelles le freudisme, le lacanisme et le kleinisme.

Il y a quelques jours, la première chaîne de télévision flamande a diffusé un long documentaire sur le sucre. On y voyait : d’abord une famille ayant décidé de ne plus consommer des desserts et des sodas pendant un mois, ensuite les différents méfaits du sucre, une apologie d’une petite plante (stévia) qui donne la saveur du sucre sans aucun des inconvénients du sucre de betterave, un professeur de l’université de Louvain, très convaincant, ayant fait des recherches sur cette plante, la dénonciation du lobby des producteurs de sucre de betterave qui avait entravé durant des années l’autorisation d’employer la stévia dans des biscuits et autres aliments. L’émission se clôturait sur des déclarations de la famille qui avait éliminé une grande quantité de sucre : le père avait perdu plusieurs kilos, l’aîné des garçons disait mieux dormir et les parents ajoutaient qu’il était moins nerveux. Aucun producteur de betteraves n’est apparu à l’écran. On peut trouver cela scandaleux, car que vont devenir ces braves cultivateurs de betterave si on remplace de plus en plus leur production par celle de la stévia ?

Si Sophie Robert est condamnée pour avoir fait un documentaire orienté, il faudra également condamner le réalisateur de ce documentaire sur le sucre, mais surtout quasi tous les journalistes qui interviewent des hommes politiques. On imagine facilement les politiciens, de gauche comme de droite, venir encombrer les tribunaux avec des histoires de « Castration » ou de leur propos.

 

2. Le soi-disant traficotage des interviews

Mme Eliacheff déclare :

« L’une de ses techniques [de Sophie Robert] a consisté à refaire hors champ une question concernant l’autisme en donnant comme réponse des phrases tronquées extraites d’un autre contexte. L’effet de ridicule est assuré mais plus grave, le message est inversé » (je souligne)

Sur quels faits précis Mme Eliacheff se fonde-t-elle pour affirmer que Sophie Rober a utilisé cette technique d’« inversion » ? Est-elle extralucide ? Elle ne donne PAS UN SEUL EXEMPLE. Il faut la croire sur parole.

Actuellement, très peu de personnes peuvent en juger. Pas même la juge au moment de présider l’audience du 8 décembre (elle n’avait pas encore visionné les rushes), pas moi et pas davantage Mme Eliacheff. En l’absence de l’examen approfondi des rushes, nous ne pouvons absolument pas en juger. Il me revient que, lors du procès, les plaignants n’ont PAS donné UN SEUL EXEMPLE CONCRET du procédé d’« inversion » qu’aurait utilisé Sophie Robert à leur encontre.

Mais pour Mme Eliacheff il s’agit d’une évidence. La mise en question de la doctrine et de la corporation ne peut être que l’expression d’une honteuse malhonnêteté.

 

3. Le trépied de Mme Eliacheff

Mme Eliacheff déclare :

selon S. Robert, les psychanalystes « sont les uniques responsables du retard pris par la France dans la mise en place de méthodes éducatives qui, elles seules, je dis bien seules, seraient efficaces. En réalité, ces spécialistes de l’autisme non seulement défendent, mais mettent en pratique un trépied comportant, comme l’un d’eux le résume, une approche éducative toujours, une approche pédagogique si possible et une approche thérapeutique si nécessaire ».

1° La France, en matière de traitement de l’autisme, a pris un retard considérable par rapport à la majorité des pays occidentaux. Son retard concerne également la psychothérapie et d’autres domaines médicaux. Le professeur Alexandre Minkowski, qui avait réellement une réputation internationale pour des recherches médicales de haut niveau, a décrit ce décalage de la France par rapport à d’autres pays, notamment les Etats-Unis. Pour prendre mieux la mesure des dégâts provoqués par dogmatisme des mandarins, j’invite le lecteur à taper dans un moteur de recherche : EDPH2277

puis cliquer sur « documents » et enfin choisir : Universites.US.versus.France.doc

2° Quant à recommander un « trépied comportant, comme l’un d’eux le résume, une approche éducative toujours, une approche pédagogique si possible et une approche thérapeutique si nécessaire », c’est peut-être le cas de « l’un d’eux » comme le dit Mme Eliacheff, mais ce n’est pas du tout le cas des autres. Pour confirmation, je renvoie aux parents d’enfants avec un trouble autistique et aux différents sites que des parents désespérés ont constitués pour s’épauler.

Ce n’est que sous la  pression des événements ACTUELS que les membres de la CIPPA se sont empressés de faire le mois dernier des déclarations en totale contradiction avec ce qu’ils pratiquent réellement depuis des années et dont témoigne le film de Sophie Robert. Par exemple, Alexandre Stevens, l’un des trois accusateurs, est parfaitement explicite quant au refus de l’approche éducative des TCC :

« Dans le monde francophone, l’envahissement par les techniques cognitivo-comportementales est un envahissement nouveau, récent, mais très présent actuellement. La psychanalyse se bat contre cet envahissement, n’est-ce pas. Certain nombre de collègues, spécialement Jacques-Alain Miller, ont pris la tête de cette lutte, de ce combat, d’autres aussi dans d’autres mouvements, n’est-ce pas. C’est un combat très important pour maintenir vivant la dimension au fond de la subjectivité par... c’est-à-dire des singularités de chaque sujet par rapport au fond à cette idée comportementale du réglage par cases »

Le traitement de l’autisme illustre cette conclusion du célèbre épistémologue anglais, Frank Cioffi, qui a été un des premiers à mettre le doigt sur les mensonges de Freud (fausses guérisons, cas inventés, etc.) : « le mouvement psychanalytique dans son ensemble est l'un des mouvements intellectuels les plus corrompus de l'Histoire[6] ».

 

4. Mais pour qui roule Mme Eliacheff ?

Mme Eliacheff déclare dans son émission :

« Mais pour qui roule Sophie Robert ? Pour une association de parents d’enfants autistes, “Vaincre l’autisme” qui mène depuis des années une véritable croisade d’intoxication contre les psychanalystes. »

En fait, le film se trouve sur le site d’« Autistes sans frontières ».

Mme Eliacheff ignore peut-être qu’il existe plusieurs associations, mais c’est très peu important.

Ce qui l’est infiniment plus, c’est de savoir pour qui roule Mme Eliacheff.

 

1ère hypothèse

Mme Eliacheff roule pour le lobby lacanien, puissant, riche (pensons seulement à l’immense fortune amassée par Lacan[7] et héritée par J.-A. Miller, qui a fourni son avocat aux trois plaignants), un lobby omniprésent sur France-Culture, Le Monde et quantité d’autres pourvoyeurs de l’idéologie freudo-lacanienne.

Pour des illustrations de ce lobby, on lira avec profit l’article d’Esteve Freixa i Baqué

« Le pouvoir (pas le moins du monde occulte) des psychanalystes »

paru dans la revue Science et pseudo-sciences (n° 293).  Disponible en ligne :

http://freixa.over-blog.com/article-le-pouvoir-pas-lemoins-du-mondeocculte-68132844.html

 

Ou encore, de Patrice Van den Reysen

« Lettre à la chaîne de télévision franco-allemande : ARTE » :

http://vdrpatrice.pagesperso-orange.fr/Arte.html

 

2e hypothèse, dans le style freudien : la fidélité à la mémoire de la mère

Mme Eliacheff est la fille de Françoise Giroud, qui a eu l’immense privilège d’être psychanalysée par Lacan lui-même, pendant 400 séances, à un prix d’ami. Il y a là de quoi vouer une reconnaissance éternelle au Gourou parisien.

Dans Leçons particulières, la co-fondatrice, avec J.-J. Servan-Schreiber, de L’Express, consacre huit pages à son analyse chez Lacan. En 1963, elle a entrepris ce traitement suite à une rupture sentimentale, très mal vécue parce que « l’homme qu’elle aimait avait préféré une autre femme ». A l’époque, elle était déjà amie de Lacan. Elle écrit : « Il n’est pas d’usage qu’un analyste traite quelqu’un de proche, mais il se moquait des usages. Je fus bientôt parmi ses patients » (éd. Le livre de Poche, 1990, p. 106).

Soulignons au passage que les dirigeants politiques et les journalistes — détenteurs du quatrième pouvoir — bénéficient toujours, chez les psychanalystes soucieux de la propagation de leur doctrine, d’un statut tout à fait particulier.

La journaliste de L’Express a manifestement bénéficié de grands privilèges. Elle écrit :

« Le prix, c'était à la tête du client. Il [Lacan] ne m'a jamais matraquée, peut-être par amitié. Certains ont rapporté qu'il expédiait ses patients en dix minutes[8]. Je ne suis jamais restée chez lui moins d'une demi-heure, toujours écoutée avec attention comme deux mots percutants, lâchés ici ou là, le montraient. Peut-être, dans ses dernières années, a-t-il été
moins scrupuleux, ou disons plus cynique, désenchanté » (p. 111).

A lire F. Giroud, on constate que le bénéfice de ses 400 séances se résume à deux choses : ne plus « crouler sous le poids des mots refoulés, des cris avalés, des conduites obligées, de la face à sauver, toujours cette sacrée face » (p. 105) ; « reconstruire avec un homme une relation harmonieuse et solide sur un nouveau diapason » (p. 109). Quelques années plus tard, elle répétera : « Quand la représentation que l'on se fait de soi devient insupportable, le remède est là. [...] Ne plus rougir de soi, c'est la liberté réalisée. C'est ce qu'une psychanalyse bien conduite enseigne à ceux qui lui demandent secours »[9].

N’étant plus analyste freudien, je m’en tiendrai à ces hypothèses, sachant parfaitement qu’on peut en imaginer encore bien d’autres. Je m’abstiendrai d’affirmer la véritable motivation qui fait rouler Mme Eliacheff.

Jacques van Rillaer

Professeur de psychologie émérite à l’Université de Louvain-la-Neuve

& aux Facultés universitaires St-Louis (Bruxelles)

 

 


[1] Tout à la fin de sa vie, Freud, une fois de plus, écrit : « La psychanalyse est une partie de la science de l’âme (ein Stück der Seelenkunde). On l’appelle aussi “psychologie des profondeurs” («Some elementary lessons in Psycho-analysis» (1938), rééd. dans Gesammelte Werk, Fischer, XVII, p. 14). Freud s’est défini comme un investigateur de l’âme et non comme un observateur du comportement. Pour lui, les comportements ne constituent pas un objet d’étude en soi : ils ne sont qu’un reflet mensonger et inintéressant des profondeurs de l’âme. De là, la négligence de la simple observation de comportements et l’élaboration d’interprétations délirantes, sous prétexte d’être le Champollion de l’Inconscient.

[2] La vie et l'œuvre de Sigmund Freud, P.U.F., 1969, tome III, p. 198.

[3] Aujourd’hui, à l’université de Louvain, le système a radicalement changé. Les commissions de nominations tiennent fortement compte de la valeur des recherches effectuées et des publications dans des revues de haut niveau. C’est ce qui explique que les nominations de psychanalystes deviennent de plus en plus rares.

[4] Voir p.ex., M. Legrand, Psychanalyse, science, société. Maradaga, 1983, 280 p.

[5] Pour une revue des principales légendes freudiennes, voir

http://www.mythesfreudiens.com/fiches.html

[6] In C. Meyer et al.,  Le Livre noir de la psychanalyse. Ed. Les Arènes, 2005, p. 45.

[7] Pour des témoignages sur l’assuétude de Lacan à l’argent et sur la pratique extraordinairement rentable des didactiques : taper dans un moteur de recherche : EDPH2277 - puis cliquer sur « documents »

et choisir les texte suivants : Argent.Lacan.doc — Argent.Miller.doc

[8] L’analyse de Fr. Giroud s’est déroulée de 1963 à 1967, époque où Lacan pratiquait déjà les séances courtes, mais pas encore ultra courtes, ni les « séances zéro », où les futurs analystes lacaniens venaient simplement payer, quotidiennement, le privilège d’être membre reconnu par l’Ecole freudienne de Paris.

[9] F. Giroud, Le nouvel Observateur, n° 1610, 14-20 septembre 1995. « Ne plus rougir de soi », s'estimer davantage : c’est un apprentissage que favorisent, avec raison, beaucoup de psychothérapies. Les thérapies comportementales et cognitives s'en sont fait une spécialité. Voir p.ex. F. Fanget : Affirmez-vous ! Odile Jacob, 2000, 222 p. — Osez. Thérapie de la confiance en soi. Odile Jacob, 2003, 288 p.

http://blogs.mediapart.fr/blog/gerard-mercuriali/131211/analyse-des-affirmations-de-mme-eliacheff-sur-le-mur-la-psychanal

13 décembre 2011

article publié dans corsematin.com le 12 décembre 2011

Toute la prise en charge de l'autisme est désormais bien organisée

 
Toute la prise en charge de l'autisme est dés - 15290946.jpg Réunis autour d'une même table, les différents intervenants, les praticiens et l'Agence régionale de santé ont montré une belle unanimité dans ce projet. Louis Vignaroli
Au 1er mars 2012, le centre de ressources autisme fonctionnera dans les locaux du CMPP pour assurer le diagnostic mais aussi l'orientation vers les établissements de soins. Une révolution pour l'autisme
 

C'est un pas de géant qu'a fait la santé publique en 2011 en Corse car depuis des décennies, l'île attendait une prise en charge complète et précise de l'autisme. Dominique Blais, directeur général de l'agence régionale de santé, vient en effet d'annoncer à Bastia la création d'un Centre de ressources autisme (CRA). Un outil de diagnostic, de formation et d'information.

« Le CRA sera matérialisé au CMPP et il ouvrira vraisemblablement le 1er mars, précise Dominique Blais. En fait, il y aura deux pôles. Ici, à Bastia, outre pédiatres et pédopsychiatres, l'évaluation se fera avec un éducateur spécialisé, une psychologue, une psychomotricienne et une orthophoniste. À Ajaccio, il y aura un neuropédiatre, un neuropsychologue, des généticiens. Mais ce qui est important, c'est que l'évaluation se fera sur cinq demi-journées avec des outils communs, validés tant en France qu'en Europe. »

Environ 400 enfants concernés en Corse

Une naissance sur 150 est concernée par l'autisme et on estime à 400 le nombre d'enfants autistes dans l'île. Qui, souvent, doivent partir sur le continent pour se faire soigner et, déjà, diagnostiquer. Le but du projet est de rester en Corse et ainsi de ne pas ajouter un stress à des enfants déjà suffisamment perturbés. Le docteur Élisabeth Giamarchi, pédopsychiatre, a coordonné le travail de construction du réseau : « Il fallait aussi rassurer les parents qui doivent affronter la nouvelle d'un enfant ainsi malade. Maintenant, ils savent qu'en Corse, la prise en charge pourra être complète. Car il y a en plus un Sessad, un établissement d'accueil de 20 lits qui vient tout juste d'ouvrir ses portes à Bastia. »

Comme le rappelle justement Nonce Giacomoni, président d'Espoir Autisme Corse, il n'y a pas un médicament, pas une recette pour guérir de l'autisme. Mais des multitudes. « Il faut être capable de sélectionner la ou les bonnes méthodes selon le diagnostic, annonce-t-il. Il y a trois ans, il n'y avait pas grand-chose dans l'île; aujourd'hui, nous sommes sur une voie plutôt réconfortante. Il restera toujours des choses à améliorer mais le constat est clair : le chemin est tracé. »

Aujourd'hui, c'est donc le CMPP qui accueille le CRA. Mais les Pupilles de l'Éducation Publique, dont dépend le centre, ont acheté récemment un terrain de 3 600 m2 pour un nouveau bâtiment où prendra alors place le CRA. Marcel Torracinta, directeur du CMPP, poursuit : « Nous continuons à travailler avec tous les spécialistes comme auparavant mais le CRA met du liant entre tous; il fait circuler l'information, il gère l'enfant dans son diagnostic et son traitement. »

Pas de batailles de méthodes

Réunis autour d'une même table, les intervenants, les praticiens, l'agence régionale de santé ont montré une belle unanimité dans le projet. Ce qui n'est pas si fréquent dans le traitement de l'autisme, source de nombreux conflits entre spécialistes. «C'est vrai qu'il y a de nombreuses méthodes, reconnaît Nonce Giacomoni. Aba, Teach, Makaton… Aux États-Unis, il y a quasiment une méthode par état ! Et elles ne sont pas toutes reconnues ici. Le plus important, c'est d'avoir tous ces outils pour apporter la bonne réponse tant les enfants sont différents ». Le docteur Claude Allard, psychiatre, confirme : « On essaye d'additionner les compétences, de puiser dans les différentes écoles. Il y a des facteurs de la genèse de l'autisme qui nous restent inconnus. Mais ce qui compte désormais, c'est la précocité du diagnostic et donc de la prise en charge ». Un numéro vert sera bientôt mis en service pour joindre le CRA. Loin de tout discours béat, l'autisme est devenu un combat et la Corse est entrée sur le ring.

http://www.corsematin.com/article/bastia/toute-la-prise-en-charge-de-lautisme-est-desormais-bien-organisee

13 décembre 2011

article publié dans leParisien.fr le 10 décembre 2011

Ces autistes qui trouvent refuge en Belgique

Faute de places en France, de nombreuses personnes déficientes intellectuelles sont prises en charge dans des établissements spécialisés en Belgique. Eponine a ainsi quitté Beauvais pour vivre à la Pommeraie, un foyer belge, avec Herbert, un autre Oisien arrivé en 2009.

E.P. | Publié le 10.12.2011, 09h58

Les différents ateliers aboutissent à de nombreuses productions : jus de pomme (ici), gaufres vanille, huile de noix, objets d'arts...L'argent des biens revendus est réinvesti pour les résidants de La Pommeraie.
Les différents ateliers aboutissent à de nombreuses productions : jus de pomme (ici), gaufres vanille, huile de noix, objets d'arts...L'argent des biens revendus est réinvesti pour les résidants de La Pommeraie. | LP/Arnaud DUMONTIER

Ils poussent comme des champignons à la lisière belge. Les foyers d’hébergement pour polyhandicapés et autistes fourmillent le long de la frontière et accueillent de nombreux Français dont beaucoup de l’Oise. Faute de places dans l’Hexagone, ce sont près de 5 000 personnes déficientes* françaises qui sont prises en charge en Belgique, aux frais des conseils généraux et de l’assurance maladie.

 
Une solution économique pour la ? « Faux, tranche Charles Ghesquière, de l’association Apim HF**, cela engendre des pertes d’emplois, nous sommes largement perdants. » Si ce dernier admet que la procédure de construction d’un centre est « plus longue et plus exigeante en qu’en Belgique », il dénonce « un manque de volonté politique et de soutien aux associations promotrices d’établissements ».


Les handicapés peuvent rester trente ans dans le même centre

En France, la classification des établissements est très fragmentée selon les degrés du handicap : maisons d’accueil spécialisées (MAS, handicap lourd), foyers de vie ou foyers d’accueil spécialisés. L’âge est également un critère, ce qui conduit les résidants à changer fréquemment de lieu de vie. Une segmentation avec laquelle ne s’embarrasse pas la Belgique : un même établissement peut réunir des résidants de tous statuts (MAS, foyer de vie…). Un point rassurant et stabilisant pour les familles, selon Charles Ghesquière : « C’est une sécurité de savoir que leurs proches les plus gravement handicapés vont rester vingt ans, trente ans dans un même centre. »

Le système belge reste toutefois à deux vitesses : les établissements médico-sociaux agréés et contrôlés par l’Agence wallonne pour l’intégration des personnes handicapés (Awiph) font face à la concurrence des foyers privés (sous forme d’association ou de société commerciale). Point sensible pour ces derniers, « Ils sont sujets à des normes minimales et rarement contrôlés », indique Charles Ghesquière.

Conscient des problèmes rencontrés par les personnes handicapées et leurs familles, le conseil général de l’Oise a annoncé que sa priorité pour l’année prochaine serait de faire revenir 50 % des Oisiens aujourd’hui accueillis en Belgique, entre 2012 et 2017. Il prévoit de développer les services dédiés et de créer de nouvelles places d’accueil dans des foyers spécialisés.

* Selon l’Unapei (Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis). ** Aide aux personnes inadaptées mentales hors de France.

CLES :


5 000 déficients intellectuels français sont en Belgique. 1 500 enfants et 3 500 adultes déficients, dont des autistes et polyhandicapés, sont hébergés en Belgique à l’heure actuelle. En 1985, ils étaient près de 1 500.
500 ouvertures de places en foyers belges ont été recensées ces cinq dernières années.
3 000 emplois en Belgique sont générés par l’accueil de handicapés mentaux.
De 140 à 180 €. C’est le prix de la journée pour une personne, supporté par les conseils généraux et l’assurance maladie française, d’un foyer de vie ou foyer d’accueil spécialisé belge.

POUR L’OISE :

269 personnes sont hébergées en Belgique (60% de handicapés psychiques, 10% d’autistes, 30% de déficients intellectuels), 1169 dans l’Oise.
13,6 M€. C’est le coût des Oisiens hébergés en Belgique pour le conseil général, sur un budget total de 67 M€ pour l’ensemble des personnes handicapées.

EN FRANCE :
480 maisons d’accueil spécialisées, pour 19823 places.
511 foyers d’accueil médicalisé, pour 14111 places.
1 395 foyers de vie, pour 38711 places.
Soit un total de 2 386 établissements médico-sociaux pour adultes handicapés et 72 645 places.
Source : Unapei (Union nationale des amis et parents d’enfants inadaptés).

http://www.leparisien.fr/oise-60/ces-autistes-qui-trouvent-refuge-en-belgique-10-12-2011-1762028.php

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13 décembre 2011

Entretien avec le professeur Gilbert Lelord sur le site du CRA de Tours

L'Autisme à Tours - Entretien avec le Pr Gilbert Lelord

Le Centre de Ressources Autisme a le plaisir de vous proposer de visionner un entretien inédit à caractère historique de l'un des pionniers de l'autisme en France, le Pr Gilbert Lelord.

http://www.cra-centre.org/index.php?option=com_content&view=article&id=38:un-entretien-inedit-du-pr-lelord&catid=32:dossiers-cra&Itemid=60
Le lien a été communiqué sur le forum autisme de yahoo accompagné de la note suivante :

"Le C.R.A. région Centre a le plaisir de vous inviter à visionner une interview d'un des pionniers de l'approche neurophysiologique de l'autisme en France, Le Pr Gilbert Lelord.

Aujourd'hui à la retraite, il a été le fondateur de "l'école de Tours" et du service de pédopsychiatrie de Tours, ancien chercheur en physiologie du cerveau, il a travaillé avec de grands noms (Schoppler, Rimland, Tanguay...) et contribué à la formation de scientifiques reconnus (Pr Barthélémy, Monica zylbovicius, etc.)

Il témoigne, dans ce film de 20 minutes, d'une histoire de l'autisme à Tours de la fin des années 50 à nos jours.

A noter que vous serez peut-être étonné des propos de M. Lelord sur l'hôpital de jour, mais il faut savoir que les enfants reçus en HdJ à Tours ne le sont que rarement à temps complet mais le plus souvent en complément d'une scolarisation partielle voire à temps complet. En 1991, M. Lelord publiait avec le Dr Perrot, l'un des premiers livres en France sur l'intégration scolaire des enfants autistes. L'équipe de l'HdJ pilote une U.E.A. (Unité d'Enseignement Autisme - projet en expérimentation depuis 3 ans) située en milieu ordinaire, en collaboration avec l'Education Nationale. C'est donc dans le contexte d'un HdJ ouvert sur l'extérieur et sur les parents qui faut entendre son intervention; le soin s'intégrant toujours dans une prise en charge globale incluant l'éducation structurée."

12 décembre 2011

article publié sur le site d'Autisme Infantile le 11 décembre 2011

Ensemble, c’est tout!

C’était chouette, ce 8 décembre. A Paris, à Lille. Dans le froid, et parfois entre les gouttes (conséquence sans doute de mes prouesses vocales – pour info, mon frère biologique est ténor professionnel, j’ai donc juste honte).

C’était un moment de communion. Communion d’intérêts, d’envie, d’énergies.

C’était un mouvement spontané, en dehors des mouvements associatifs, une démonstration bon enfant de notre détermination. C’était bien sympa, mais il ne faudra pas s’arrêter là. Il faut maintenant que les professionnels, les associations, les comités de recherche, les personnes qui font autorité dans le domaine de l’autisme, sortent du bois, et osent apporter leur soutien publiquement à notre mouvement. Estève Freixa i Baqué, Jacques Van Rillaer, Vinca Rivière, Thomas Bourgeron, Berbadette Roger, notamment, ont apporté leur soutien, soit en participant aux rassemblements, soit en adressant un document écrit à Sophie Robert.

Nous sommes nombreux à avoir des activités associatives, à rencontrer chaque jour des professionnels. Demandons leur de prendre officiellement position!

Quelle est la position de l’ARAPI, de Sésame Autisme? Quelle est la position de votre pédopsychiatre? De votre neurologue? Quelle est la position du Centre de Ressources Autisme qui a diagnostiqué votre enfant? Quelle est la position de votre pédiatre? De votre psychomotricien? De votre orthophoniste?

Recueillez leur témoignage, leur soutien, leur position. Les grands noms anglo-saxons soutiennent le Mur. La plus grosse organisation mondiale associative, Autism Speaks (un million de personnes consultent son blog), soutient aussi le Mur. C’est le moment ou jamais de s’activer!

Une telle occasion de démontrer l’absurdité et l’inefficacité du système français ne se présentera pas plusieurs fois. Jacques Alain Miller a déclenché un effet Streisand, profitons de cette opportunité et impliquons-y les professionnels.

On va briser le Mur si l’on s’y met ensemble. C’est tout!

http://autismeinfantile.com/informations/actualites/ensemble-cest-tout/?utm_source=feedburner&utm_medium=feed&utm_campaign=Feed%3A+AutismeInfantile+%28Autisme+Infantile%29

12 décembre 2011

information publiée sur le site de l'Assemblée Nationale

N° 4045

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 décembre 2011.

PROPOSITION DE LOI

visant à faire de l’autisme la grande cause nationale 2012,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Daniel FASQUELLE,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La Haute Autorité de Santé a fait état, le 24 mars 2010, d’une donnée statistique alarmante : dans notre pays, un enfant sur cent cinquante (1/150) est atteint d’un trouble appartenant au spectre autistique.

L’autisme de ces enfants ne sera diagnostiqué en moyenne qu’à six ans quand les données épidémiologiques internationales font état d’un diagnostic possible dès l’âge de deux ans. Le manque de formation des professionnels de santé de ville quant au dépistage de cette pathologie n’explique pas à lui seul ce retard. Le manque d’information du grand public sur ce handicap en est également responsable.

Tout aussi préoccupante est la situation des familles d’enfants autistes qui doivent faire face à une pénurie de structures offrant à leur enfant un accompagnement éducatif permettant de stabiliser leur handicap, de les intégrer et de les maintenir en milieu scolaire ordinaire.

Cette double constatation appelle, dans un pays comme le nôtre, des mesures d’urgence.

Le Plan Autisme doit permettre que la situation évolue favorablement dans les années qui viennent. Mais les mesures qu’il préconise pour une meilleure prise en charge de l’autisme dans notre pays, doivent s’accompagner d’une grande mobilisation qui impliquera non seulement les pouvoirs publics et les professionnels de santé, mais aussi l’ensemble des citoyens français.

La lutte pour une meilleure identification de l’autisme est une priorité. Déclarer l’autisme Grande cause nationale 2012 pour améliorer le dépistage précoce, développer l’accompagnement des enfants autistes et favoriser leur intégration et leur maintien en milieu scolaire ordinaire, serait l’expression d’une volonté politique forte de faire face à ce grave problème de santé publique.

La Grande Cause permettrait à l’autisme d’être clairement identifié par l’ensemble des Français en battant en brèche les idées reçues qui parasitent aujourd’hui son diagnostic précoce et compromettent donc l’efficacité de sa prise en charge. Elle permettrait enfin de récolter des fonds pour financer des programmes éducatifs favorisant l’intégration des enfants autistes en milieu scolaire ordinaire, facteur clé dans l’évolution du handicap et de la vie de l’enfant.

Il est de notre devoir d’informer, d’alerter, de rassurer et d’accompagner les 500 000 familles touchées par ce handicap.

Pour toutes ces raisons, et en tant que Président du Groupe de travail sur l’autisme à l’Assemblée nationale, j’ai décidé de soutenir le dossier déposé par le rassemblement « Ensemble pour l’autisme », organisé par le Collectif Autisme regroupant plus de 200 associations de parents et 800 associations gestionnaires d’établissements, représentant ainsi plus de 100 000 familles.

Je vous propose de bien vouloir adopter la proposition de loi suivante afin de faire de l’autisme la Grande Cause nationale 2012.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

L’autisme est déclaré grande cause nationale 2012 pour améliorer son dépistage précoce, développer l’accompagnement des enfants autistes et favoriser leur intégration et leur maintien en milieu scolaire ordinaire.

Article 2

Les charges qui pourraient résulter pour l’État de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Les charges qui pourraient résulter pour les organismes de sécurité sociale de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

http://www.assemblee-nationale.fr/13/propositions/pion4045.asp?utm_source=tw&mid=54

11 décembre 2011

article publié dans le nouvel observateur le 9 décembre 2011

Autisme : feu sur la psychanalyse

Publié le 09-12-11 à 18:58    Modifié le 10-12-11 à 19:35     par Le Nouvel Observateur  

Les adeptes de la théorie freudienne sont mis en cause dans un documentaire promu par des parents partisans d'une approche beaucoup plus pragmatique. Par Jacqueline de Linares.

Pénélope, une autiste de 9 ans à Paris (JOEL SAGET / AFP)
Pénélope, une autiste de 9 ans à Paris (JOEL SAGET / AFP)

La salle était pleine de parents, jeudi 8 décembre devant le tribunal de Lille. Les parents d’autistes, dont certains brandissaient à l’extérieur des photos de leur enfant, étaient venus en nombre soutenir la documentariste Sophie Robert, poursuivie par trois psychanalystes, interviewés dans son documentaire "Le Mur, la psychanalyse à l’épreuve de l’autisme".  

Trois membres de l’Ecole de la Cause Freudienne demandent  le retrait de leur interview ou, à défaut, l’interdiction du film, estimant  que leurs propos ont été "défigurés" au montage. Qu’il "ridiculise" la psychanalyse. Dans le documentaire, montage brut de réponse aux questions de Sophie Robert, on entend des morceaux d'anthologie tels que : "Ils [les enfants autistes] sont restés dans l'utérus, pourquoi voulez-vous qu'ils parlent ?" Ou bien : "Avec un enfant autiste, j'en fais très peu. Je pose mes fesses, je me mets à côté de lui et j'attends." Le tribunal, qui rendra sa décision le 26 janvier, doit décider si Madame Robert est sortie des autorisations de tournage signées par les plaignants. Mais en réalité, derrière ce procès, c’est toute la question de l’approche de l’autisme qui est en jeu.

Quand des psychanalystes prétendent soigner l’autisme comme une maladie mentale, les parents réclament pour soigner leurs enfants le recours aux méthodes comportementalistes basées sur la rééducation et la répétition utilisées à l’étranger, et selon eux, beaucoup plus efficaces. Or, depuis plusieurs années, la guerre fait rage en France entre psychanalystes et comportementalistes. A Lille, la salle a frémi lorsque le défenseur des psy, Maitre Christian Charrière-Bournazel, a déclaré, évoquant les méthodes comportementalistes utilisées pour les autistes : "Répéter et apprendre des gestes comme on dresserait un chimpanzé".

"On nous a exclus, critiqués", déplorent les parents d’autistes

Les parents d'autistes sont très en colère contre la psychanalyse. Ils accusent les soignants inspirés par les théories freudiennes de continuer à les mettre en cause. "Avez-vous fait cet enfant par amour ? " se sont entendus dire ces parents, interdits par la psychologue de ce CHU parisien. Impavide, elle insistait. "Notre enfant se tapait la tête contre les murs et, en gros, on nous accusait de sa maladie", se souvient Florent Chapel, délégué général du collectif Autisme, regroupement de presque toutes les associations de parents.

Sybille, elle, raconte sa convocation à l'hôpital psychiatrique pour la prise en charge de son enfant autiste. Une horreur. Le bébé était-il désiré ? La mère avait-elle été heureuse pendant sa grossesse ? Avait-elle aimé sa propre mère ? Insinuant, le psychiatre lui parlait d'elle. Mais pas de son enfant. Sybille a claqué la porte de l'hôpital. Sur internet, les témoignages affluent : "Nous aussi, on nous a exclus, critiqués ! Ne nous laissons pas faire !"

Plus personne ne soutient, à l'instar du psychanalyste américain Bruno Bettelheim, que les autistes sont victimes de mères castratrices et dépressives. En pratique, pourtant, les parents reprochent aux adeptes de Freud de traiter l'autisme comme une maladie mentale et non pas un handicap, "comme s'ils n'avaient pas intégré depuis vingt ans les nouvelles connaissances sur le rôle de la génétique dans cette maladie", explique Marcel Hérault, président depuis quinze ans de Sésame Autisme. Ils accusent, surtout, "la toute-puissance de la psychanalyse en France d'empêcher l'introduction de méthodes éducatives comportementalistes qui feraient beaucoup mieux progresser nos enfants", selon Florent Chapel.

"La prise en charge de nos enfants, c’est la loterie"

Nombre de psychanalystes revendiquent de ne pas faire pression sur l’enfant au nom du respect du "sujet". Ou de l'idée selon laquelle l'autisme résulterait d'un "refus résolu" de l'enfant d'entrer en relation avec le reste du monde. Une non intervention qui fait bouillir les parents.

Les parents d'autistes ne digèrent pas, non plus, de se sentir si souvent mis en cause dans la maladie de leur enfant. Parano de parents écorchés ? Pas vraiment. "Les réflexions des psychiatres, des psychologues, des éducateurs, suggèrent souvent que le comportement des parents entrave le développement de l'enfant", écrit la chercheuse Brigitte Chamak (1), après une plongée dans une dizaine d'établissements hospitaliers ou médico-sociaux traitant de l'autisme. Pis, dans "les services qui adoptent une approche psychodynamique" [d'inspiration psychanalytique NDLR], la plupart des parents "n'avaient pas reçu de diagnostics". Comme si l'annonce de la maladie aux parents risquait d'empirer ou de figer la situation. Refus de diagnostic, soupçons d'incompétence, méfiance... "Cette approche va rie beaucoup selon les services, les établissements, dit Marcel Hérault. En France, faire prendre en charge son enfant, c'est la loterie."

Vincent Gerhards, président du collectif Autisme, journaliste à France Télévisions, a découvert en voyageant que la France est un des derniers pays où la psychanalyse a une telle importance pour traiter cette pathologie. "Ailleurs, on applique les méthodes d'origine comportementaliste", explique-t-il. Fondées sur la rééducation, la répétition, l'entraînement, voire les punitions et les récompenses - ce que déplorent leurs adversaires -, elles ont pour nom Teacch (Treatment and Education of Autistic and related Communication handicapped Children), ABA (Applied Behavior Analysis), Pecs (système de communication alternatif)... Elles représentent le diable pour les intégristes des théories freudiennes, qui crient au "dressage", persuadés d'être le dernier rempart humaniste contre ces formes de "conditionnement". "Mais avec cet entraînement, nos enfants se sont mis à parler, devenir propres, à s'habiller seuls, lacer leurs chaussures, communiquer", hurlent les parents du collectif Autisme, brandissant dix exemples d'enfants ainsi sortis du silence ou devenus un peu plus autonomes.

"Un bric à brac d’arnaques en tout genre"

Problème. Faute de trouver ces approches dans les circuits psychiatriques où on les envoie, les parents les plus nantis sont prêts à se précipiter dans toutes sortes de cabinets privés. Avec deux risques : "D'abord, croire qu'il existe des solutions magiques", comme dit Marcel Hérault. De l'autiste de haut niveau à l'enfant qui n'accédera jamais au langage même avec la rééducation comportementale, chacun évoluera différemment. Autre danger : que les charlatans occupent le créneau que les parents ne veulent plus laisser à la psychanalyse. Mère d'un enfant qui ne parlait pas, avant d'être pris en charge en Israël, Olivia Cattan est allée étudier les méthodes à l'étranger. Elle en est revenue avec une pétition, qu'elle a fait signer notamment par Sandrine Bonnaire, soeur d'une autiste, et Francis Perrin, dont le fils est atteint. "L'autisme est devenu un véritable 'marché' pour certains, un bric-à-brac d'arnaques en tout genre entre formations bidon et remèdes miracles", dit la pétition. L'enjeu n'est pas mince alors que d'ici à quelques mois, la Haute Autorité de Santé doit se prononcer sur l'accompagnement de l'autisme.

Jacqueline de Linares - Le Nouvel Observateur 

(1)  "L'autisme dans un service de pédopsychiatrie", "Ethnologie française 3", 2009, pp. 425-433.

http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20111209.OBS6415/autisme-feu-sur-la-psychanalyse.html

9 décembre 2011

article publié dans l'union.presse.fr le 9 décembre 2011

Paul-Loup, 7 ans et autiste, a besoin d'attention

Jean-Marie Gaignette, nouveau volontaire, accompagné de Paul-Loup.

Jean-Marie Gaignette, nouveau volontaire, accompagné de Paul-Loup.

 

Paul-Loup est âgé de 7 ans et a été diagnostiqué autiste à l'âge de 20 mois. Il habite à Mourmelon-le-Petit, un petit village d'environ 800 habitants situé entre Châlons et Reims. Cela fait plus de trois ans que plusieurs dizaines de volontaires (bénévoles et professionnels) venant de toute la Marne, se mobilisent pour jouer avec lui. Ils appliquent la méthode des 3I (intensive, individuelle, interactive) avec le soutien de l'association « Autisme espoir vers l'école » (site internet : www.autisme-espoir.org).


Plus de volontaires pour plus de progrès


Ainsi, petit à petit et surtout sans forcer les choses, Paul-Loup franchit les étapes essentielles au développement d'un enfant. Il apprécie la compagnie de ces volontaires, qu'il accompagne volontiers dans sa salle de jeu spécialement aménagée au domicile de ses parents. Depuis, il est plus autonome, il ne parle pas encore mais il « vocalise » de plus en plus. Il sait très bien se faire comprendre, il apprécie les promenades à pied comme à poney, et les câlins se font nombreux. Paul-Loup est en train de passer un cap et il est primordial de maintenir le rythme d'une quarantaine d'heures de jeu par semaine. C'est pourquoi, il faut à tout prix trouver des volontaires pour palier le manque qui se fait plus grand, notamment lors des vacances. La période estivale et son lot de déménagements ont été sources de pertes en termes de bénévoles. Du lundi au dimanche, avec 6 heures par jour pour le mieux, trente personnes est un chiffre qui peut paraître énorme, mais il est évident qu'il faut plus de volontaires !
Que vous soyez un homme, une femme, actif ou retraité, il suffit de se laisser guider par l'enfant. Vous pouvez chanter, le chatouiller, lui raconter des histoires, le balancer dans son hamac… seule directive : s'amuser ! Par ce don de 60 minutes de votre temps, il est possible de changer la vie de ce garçon et lui permettre d'avoir un avenir et de vivre le plus normalement possible avec sa famille.


Jean-Marie Gaignette, 50 ans, est employé municipal à Mourmelon-le-Grand. Il est papa d'une grande fille de 20 ans, et c'est en lisant des affiches et des articles sur les appels à l'aide des parents de Paul-Loup qu'il s'est décidé à devenir bénévole. Jean-Marie va ainsi rendre visite à Paul-Loup environ une heure tous les samedis, et fait donc parti des six à sept personnes qui se relaient chaque jour afin que le petit Paul-Loup soit constamment accompagné.
« Durant cette heure, tout se fait en fonction des envies du petit, que ce soient des jeux, des câlins, de la balançoire, etc. Ce que j'espère, comme l'ensemble des bénévoles, c'est lui améliorer la vie, et mieux encore, réussir à lui faire sortir un mot. Lui apporter de la tendresse, le voir rire, ça, c'est important ! ». À la fin, Jean-Marie discute avec Didier et Carole, les parents de Paul-Loup, afin de débriefer sur l'heure qui s'est écoulée.
Comment devenir volontaire ? Les parents de Paul-Loup vous accueilleront par téléphone et à leur domicile pour, dans un premier temps, faire connaissance. Toutes les explications vous seront données ainsi que des documents. Vous pourrez également participer à une heure de jeu, accompagnés par la psychologue de l'Association ou un des volontaires. Seulement ensuite, vous pourrez décider ou non de faire partie de cette chaîne représentant le seul espoir que ses parents ont trouvé pour sortir leur fils de sa bulle.
Vous informer ne vous engagera en rien, alors n'attendez plus, appelez au 03.26.70.33.12 (ou par mail à carole.dessert@orange.fr), Paul-Loup vous attend avec impatience !

http://www.lunion.presse.fr/article/chalons-en-champagne/paul-loup-7-ans-et-autiste-a-besoin-dattention

9 décembre 2011

article publié sur le site d'Autisme Infantile le 9 décembre 2011

Père Noël, si tu existais…

Père Noël, si tu existais...

Je m’appelle Nathan, j’ai 11 ans et demi, je suis autiste, et moi pour Noël je ne veux pas de jouets – j’en ai déjà plein, toute l’année, de la part de ma famille et de mes amis.

Je ne crois pas en toi, Père Noël, je n’y ai jamais cru, même tout petit, car papa et maman m’ont toujours dits que tu n’existais pas, mais que tu étais un simple monsieur déguisé, et que si j’avais des cadeaux c’est qu’ils venaient des gens autour de moi, qui m’aimaient sincèrement, et pas d’un monsieur bedonnant habillé en rouge qui ne me connait pas.

Moi, pour Noël, mais aussi pour tous les autres jours de l’année, je voudrais:

  • que les gens arrêtent de me regarder comme un extra-terrestre dangereux,
  • que les gens arrêtent de dire que je suis mal élevé, impoli, bête, méchant,
  • que les gens, au lieu de me dévisager, viennent vers moi et apprennent à me connaître,
  • que les gens arrêtent de penser que je suis contagieux et empêchent leurs enfants de jouer avec moi,
  • que les gens arrêtent de s’adresser à moi comme si j’étais un bébé ou un idiot.

Je voudrais des choses simples, finalement, à la portée de tous, et ce toute l’année, et pas que le mois de Noël. On doit être gentils toute l’année, pas qu’un seul mois, c’est idiot de ne penser à être gentil, généreux, qu’au mois de décembre – et les autres mois alors? Ils ne comptent pas?

Moi, je voudrais:

  • que l’on me regarde comme un enfant qui aime jouer, rire comme tous les autres,
  • qu’on arrête de me critiquer, ou de dire que mes parents m’ont mal élevé,
  • que les enfants comme les adultes arrêtent de se moquer de moi,
  • tout simplement je veux que l’on me respecte comme je suis.

Je suis autiste, et je n’en guérirai jamais, mais je suis aussi un garçon qui peux vous apporter beaucoup si vous prenez le temps d’apprendre à me connaître.

Ce ne sont pas mes différences qui me font souffrir, mais le fait que certaines personnes ne les respectent pas.

http://autismeinfantile.com/temoignages/stephanie-et-nathan/pere-noel-si-tu-existais/?utm_source=feedburner&utm_medium=feed&utm_campaign=Feed%3A+AutismeInfantile+%28Autisme+Infantile%29

9 décembre 2011

article publié dans leParisien.fr le 8 décembre 2011

Psychanalystes et familles d'enfants autistes se sont affrontés jeudi à Lille sur la prise en charge de l'autisme en , à travers le procès d'une documentariste accusée d'avoir dénaturé les propos de psychanalystes.
Sophie Robert était assignée au civil devant le tribunal de grande instance de Lille par trois psychanalystes qui l'accusent d'avoir "défiguré" leurs propos dans son "Le Mur, la psychanalyse à l'épreuve de l'autisme", pour lequel ils ont été interviewés avec une trentaine de leurs confrères.
Esthela Solano-Suarez, Eric Laurent et Alexandre Stevens demandent le retrait de leurs interviews ou à défaut l'interdiction du , diffusé sur internet, ainsi que des dommages et intérêts.
Leur avocat, Me Christian Charrière-Bournazel a dénoncé "une entreprise polémique destinée à ridiculiser la psychanalyse", devant une salle pleine à craquer de parents d'enfants autistes, venus soutenir Mme Robert.
Selon le conseil, "certaines questions ont été coupées au montage et d'autres plaquées dessus", alors que la défense parle d'une retranscription "fidèle". La justice a déjà saisi les rushes du tournage pour les comparer à la version montée.
Le tribunal doit déterminer si Mme Robert est sortie des autorisations de tournage signées par les plaignants, et si les interviewés peuvent être considérés comme co-auteurs du film et en empêcher la diffusion.
Dans le documentaire, des psychanalystes attribuent une origine psychique à l'autisme, qui pourrait être la conséquence d'une dépression maternelle ou d'un refus de l'apport masculin pour la conception. Certains parlent de mère "psychogène", de "stade de folie transitoire" de la mère, voire de "désir incestueux".
Le film oppose cette vision à des méthodes comportementales appliquées par certaines familles, basées sur des recherches qui estiment que l'autisme est d'origine génétique. Par conséquent, il "participe au débat public" sur le sujet, selon Me Titran, avocat de la réalisatrice du documentaire.
"La médecine officielle envoie les familles vers des psychiatres qui sont très souvent des analystes", a expliqué Arnaud Ribert, porte-parole d'un collectif d'association, qui demande que le documentaire "soit largement diffusé pour que les parents puissent avoir le libre choix de la prise en charge de leur enfant".
Pour Mme Solano-Suarez, le film tente de montrer "que nos traitements sont passéistes et que nous culpabilisons les parents".
Le jugement a été mis en délibéré au 26 janvier.

http://www.leparisien.fr/lille-59000/autisme-les-traitements-par-la-psychanalyse-en-filigrane-du-proces-d-un-documentaire-08-12-2011-1760002.php?mid=54

9 décembre 2011

article publié dans la Voix du Nord le 9 décembre 2011

VIDÉOS - Pour « Le Mur », film controversé sur l'autisme, deux procès en une seule audience

vendredi 09.12.2011, 05:25- LAKHDAR BELAÏD

 À l'extérieur du palais de justice, un comité de soutien à Sophie Robert. PHOTO PATRICK JAMES À l'extérieur du palais de justice, un comité de soutien à Sophie Robert. PHOTO PATRICK JAMES

| TRIBUNAL DE LILLE |

Combat d'images. Combat autour d'images et de leur éventuel galvaudage. Impossible de trouver un siège, hier après-midi, dans la salle des audiences civiles du palais de justice de Lille. La plupart ont déjà été pris d'assaut par des adultes ayant épinglé des larges photos d'enfants à leur col. Une coutume malheureusement banale chez les proches de personnes kidnappées. Ou prises en otage. ...

 

Face à ces parents, aussi bien Christian Charrière-Bournazel, l'avocat de trois psychanalystes ayant saisi la justice, que la présidente Elizabeth Polle, le martèlent : « Il ne s'agit pas de faire le procès de l'autisme ou de la manière dont on pourrait le soigner. » En 2010, la productrice Sophie Robert contacte une série de psychanalystes. « Il s'agit de préparer un documentaire », explique Christian Charrière-Bournazel, insistant sur la neutralité induite dans le terme « documentaire ».


le mur : la psychanalyse à l'épreuve de... par autisme_info31

Un an plus tard, le film Le Mursort avec, en jaquette, le commentaire : « Sophie Robert a réalisé une longue enquête auprès d'une trentaine de pédopsychiatres-psychanalystes, dont quelques-uns parmi les plus grands spécialistes français de l'autisme, afin de démontrer par l'absurde - de la bouche même des psychanalystes - l'inefficacité de la prise en charge psychanalytique de l'autisme. » Reconnus par leurs pairs, réputés sur le plan international, Esthela Solano-Suarez, Éric Laurent et Alexandre Stevens saisissent la justice. « On a le droit de trouver la psychanalyse absurde et de le dire, résume leur avocat. Mais pas de piéger les gens ! »

Après avoir récupéré les six heures de rushes de ses clients et les avoir croisés avec le film, Christian Charrière-Bournazel se sent à l'aise pour dénoncer des coupures ou des ajouts de questions dénaturant les propos. Le film doit donc être interdit. Du moins, tant que ses clients y apparaissent.
le mur : la psychanalyse à l'épreuve de... par autisme_info31

« Conditionnement »

En face, Benoît Titran, défenseur de Sophie Robert, ou Lætitia Benard, avocate de l'association Autistes sans frontières, on parle bien droit à l'image. Et, pas mal aussi, de critiques subies par la France sur le traitement de l'autisme. « Là, le tribunal n'est pas compétent », rappelle la juge.

On touche pourtant le point douloureux. Dans la salle, les techniques cognitivo-comportementales (TCC) comptent plus d'un adepte. Jugement de l'avocat des plaignants : « Répéter et apprendre des gestes comme on dresserait un chimpanzé... » Houle horrifiée dans le public. À l'extérieur, une praticienne des TCC évoquera, elle, une thérapie par le « conditionnement ». « Parlons plutôt d'apprentissage ! », la corrige aussitôt un collègue. Décision le 26 janvier.


Le mur : la psychanalyse à l'épreuve de... par autisme_info31

 

http://www.lavoixdunord.fr/Region/actualite/Secteur_Region/2011/12/09/article_pour-le-mur-film-controverse-sur-l-autis.shtml?mid=54

9 décembre 2011

article publié dans libération le 8 décembre 2011

Autisme : «dogmatismes» en duel au tribunal de Lille

Plainte. Interrogés pour un documentaire, des psychiatres contestent la dénaturation de leurs propos et demandent l’interdiction du film.

Par STÉPHANIE MAURICE LILLE, de notre correspondante

Un procès pour tentative de «ridiculiser la psychanalyse» : c’est ce qui arrive à la documentariste Sophie Robert, assignée aujourd’hui au tribunal de grande instance de Lille pour son film, visible sur le Net, le Mur, la psychanalyse à l’épreuve de l’autisme. Trois psychiatres, Estela Solano-Suarez, Eric Laurent et Alexandre Stevens, lui reprochent d’avoir «dénaturé» leurs propos. Ils demandent l’interdiction du documentaire, arguant qu’ils sont les auteurs des interviews et ont un droit de regard sur leur utilisation. «J’aurais escamoté des propos qui font que ce qu’ils disent n’est pas ridicule», ironise Sophie Robert.

Le film dénonce le même message, répété de psychanalyste en pédopsychiatre : les enfants autistes sont victimes d’une mère soit trop froide soit trop chaude et s’enferment dans une bulle. «Le grand public ignore que, pour les psychanalystes, les mères sont pathogènes par essence, s’enflamme Sophie Robert. J’ai fait un film qui ne les condamne pas. Ils se condamnent tout seuls avec leurs propos.»

«Financeur». Sauf que les intéressés ne s’y reconnaissent pas. «Ces théories sont totalement dépassées», affirme le professeur Pierre Delion, pédopsychiatre au CHRU de Lille. Et ce serait «calomnieux» de faire croire l’inverse. Interviewé par Sophie Robert, il n’a pas porté plainte mais s’est senti «victime d’un abus de confiance», avec l’utilisation de «cinq secondes d’entretien totalement détachées du contexte». Il dénonce le face-à-face du docu entre la psychanalyse «inefficace» et les méthodes comportementalistes, Aba ou Teach, que la réalisatrice plébiscite.

La thèse de la prédominance des méthodes comportementalistes sur la psychanalyse est portée par l’association de parents d’autistes, Autismes sans frontières, «financeur principal du film», reconnaît Sophie Robert, qui assume son parti pris. Dans les hôpitaux, ces méthodes comportementalistes, basées sur la répétition des mêmes gestes, tiennent leur place à côté du thérapeutique, présent «si nécessaire», selon le professeur Delion, qui souligne : «La psychanalyse sert à comprendre ce qui se passe entre l’enfant et ses accompagnants. Elle n’est pas dans l’explication des causes de l’autisme.»

Génétique. Il est désormais acté que l’autisme a une cause génétique. Les psychanalystes qui attaquent, proches de l’Ecole de la cause freudienne (gardiens des œuvres de Lacan), refusent de s’exprimer. Un connaisseur du dossier, psy, soupire : «Ils adorent les procès. Cette affaire, c’est la rencontre entre deux dogmatismes», l’Ecole de la cause freudienne contre les comportementalistes. Il conclut : «Les modérés sont pris entre les deux comme dans un casse-noisettes.»

http://www.liberation.fr/societe/01012376312-autisme-dogmatismes-en-duel-au-tribunal-de-lille

9 décembre 2011

article publié sur le site de l'Ecole de la Cause Freudienne le

Petite note sur l'autisme chez Lacan

Jean-Pierre Rouillon

Petite note sur l'autisme chez Lacan - Jean-Pierre Rouillon- membre de l'ECF

Si l’autisme reste pour celui qui fait la rencontre d’êtres parlants qui en sont affectés, une énigme, le terme même d’autisme est un paradigme de la façon dont la question du mental est traitée dans nos sociétés modernes.
C’est en effet, à partir de la question de l’autisme, que la notion de maladie mentale, pour ce qui concerne les enfants, est devenue obsolète, qu’elle a laissé progressivement la place à la dimension du handicap. Le handicap qui trouve sa cause hypothétique dans les profondeurs du corps, entre neurones et gènes, vient nommer un déficit, un dysfonctionnement qu’il s’agit de compenser par la voie d’apprentissages permettant à l’autiste d’accéder à l’autonomie, ce qui est un comble pour celui qu’on définit comme en retrait de tout lien social.
Dès son plus jeune âge, il s’agit de donner un diagnostic à ses troubles, il s’agit de le stimuler, de le soumettre à des apprentissages afin qu’il sorte de son monde, afin qu’il puisse vivre dans le nôtre en se sentant utile. On devine qu’il s’agit là d’une tâche infinie qui laisse peu de repos aux différents protagonistes de cette aventure qui se décline en livres, reportages et témoignages.
 C’est l’autre versant que nous dévoile l’autisme. Il ne s’agit plus d’une question de spécialistes, il ne s’agit plus non plus d’une question dont se saisit la société pour s’interroger sur l’humaine condition, il s’agit d’un fait de société qui trouve sa pleine expansion dans les médias, sur les sites internet. On y trouve une somme d’informations, d’affirmations, de conseils, de manuels dont la série ne converge pas toujours vers le sérieux, mais le plus souvent vers la revendication et l’invective. C’est le signe d’une souffrance qui touche au plus profond de leur être, les personnes qui sont concernées d’une façon ou d’une autre par cette expérience qui renvoie aux confins de l’intime. Ainsi l’autiste, dans une société qui a fait de la communication sa valeur la plus fondamentale, est le signe, le symptôme de l’impasse où vient s’inscrire une des faces de l’impossible à supporter.
Le psychanalyste, averti par Freud de l’irréductible du malaise de la civilisation, pourrait se contenter d’interpréter ce signe en le renvoyant à chaque fois à la constellation particulière qui a prévalu à son émergence, donnant ainsi sens à ce qui a fait trou dans l’histoire. C’est d’ailleurs, ce qu’il n’a pas manqué de faire en inscrivant la causalité dans le registre de l’événementiel et de l’histoire familiale. Les élèves de Freud, dans leur volonté de nouer la psychanalyse à la psychologie, dans leur souhait d’effacer la dimension de scandale que présente l’invention de la psychanalyse, se sont d’abord livrés à une lecture développementale de l’autisme, trouvant alors son origine dans la relation, ou plutôt l’absence de relation de l’enfant à la mère. Cette lecture qui épousait de façon trop parfaite l’air du temps, ainsi qu’en témoignent les articles de Kanner, faisait certes sens, mais ne permettait en rien de mettre en œuvre un traitement psychanalytique de l’autisme, de fait de s’égarer dans les chemins illusoires de la régression et de la réparation. Cette déviation de la voie psychanalytique devait d’ailleurs se payer au prix fort, par la mise en cause de la psychanalyse comme méthode inadaptée au traitement de l’autisme.
C’est justement cette déviation de la psychanalyse que Lacan a critiquée dès le début de son enseignement non seulement de façon théorique, mais en nous donnant des indications précises sur le traitement analytique des enfants. Un certain nombre de ces indications concernent la question de l’autisme, et l’on doit prendre en compte le fait que dès le Séminaire I1, Lacan consacre deux leçons de son Séminaire à des cas d’autisme, le cas Dick et le cas du petit Robert. Dans ces deux leçons, Lacan nous donne une description précise du monde dans lequel vit l’autiste, un monde où tout le symbolique est réel et où l’imaginaire ne trouve pas forme dans la relation spéculaire. Pourtant là où l’on ne voit qu’agitation et destruction au niveau des comportements, qu’égarement et détresse, Lacan prend acte de la présence d’un sujet qui se défend contre le réel sans loi auquel il est soumis. Il se guide non pas sur ce qui fait défaut à ce sujet embrouillé, sur ce qui lui manque alors qu’il est aux prises avec le réel, mais sur ce qui le relie à la communauté humaine. Ce qui le relie, c’est un mot « Le Loup », mot où la loi vient se présentifier sur son versant insensé. L’autiste a ainsi affaire au surmoi, non celui de l’Œdipe qui ordonne le désir à la loi, mais un surmoi féroce qui le livre à la jouissance de l’Autre. Ce signifiant insensé qui le soumet à tous les égarements est pourtant aussi bien celui qui va le soutenir dans son opération d’élaboration du monde dans lequel il a été jeté dès lors que l’analyste, Rosine Lefort, consent à l’incarner dans sa rencontre avec le sujet. Elle peut l’incarner en nommant les unes après les autres, les diverses tentatives de ce sujet pour faire trou dans le réel. C’est ce qui lui permet de se livrer à cette scène du baptême où son corps peut enfin prendre forme d’extraire l’objet qu’il était face à la gueule béante de l’Autre.
Nous trouvons ainsi dès ce premier séminaire ce qui oriente le psychanalyste dans sa rencontre avec l’autiste : l’autiste a affaire au signifiant, il est comme tout sujet, effet du signifiant, et l’analyste ne doit pas reculer devant le fait de lui dire quelque chose. Lacan précisera ensuite la nature du signifiant en jeu dans l’autisme2, puis ce en quoi consiste le dire dont il s’agit.
Le signifiant, dans l’autisme, ne se présente pas sur son versant d’articulation, sur son versant de sens. Il se présente comme unique, comme tout seul, aussi bien sur le versant du commandement que sur le versant d’une satisfaction liée à ce qui résonne de sa substance sonore. Quant au dire, il ne doit pas se situer dans les rivages du sens, mais ouvrir par la voie du redoublement à l’émergence d’une écriture singulière où ce qui s’entend peut trouver à se satisfaire dans une adresse à l’autre. C’est dans cette adresse à l’autre que vient se dessiner le lieu d’une perte délivrant le sujet du sacrifice de son être. C’est cette voie qui permet au sujet autiste de construire un espace où s’appareiller dans son rapport au réel. Ce n’est pas le langage qui structure le monde de l’autiste, mais sa langue particulière, dès lors qu’elle lui donne matière à trouver une satisfaction dans un dialogue avec l’autre, satisfaction qui vient faire limite à l’exigence infinie de la jouissance.
Le psychanalyste ne doit pas reculer devant l’autisme. C’est en effet, à partir de ce qu’il a pu extraire de sa propre analyse, qu’il peut offrir au sujet autiste qui y consent, la chance d’un dialogue au cours duquel peut se tisser dans une adresse inédite, une voie enfin singulière au-delà de la pulvérulence des entendus.          

1- Jacques Lacan : Séminaire I : Les écrits techniques de Freud, Seuil, 1975. Chapitres VII et VIII.
2- Jacques Lacan : Séminaire XI, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, Seuil , 1973, chapitre XVIII.

Bibliographie
Jacques Lacan, « Allocution sur les psychoses de l’enfant » in Autres écrits, Seuil, 2001.
Jacques Lacan : « Conférence à Genève sur le symptôme » in Le bloc-notes de Psychanalyse, n°5, 1985. 
Rosine et Robert Lefort, Naissance de l’Autre, Seuil, Paris, 1980   

http://www.causefreudienne.net/etudier/essential/petite-note-sur-l-autisme-chez-lacan.html?mid=54     

9 décembre 2011

article publié dans la-Croix.com le 8 décembre 2011

Audience tendue autour d’un documentaire sur l’autisme

Jeudi 8 décembre, trois psychanalystes ont demandé à la justice d’interdire un documentaire sur l’autisme, auquel ils reprochent de «ridiculiser» leur discipline.

Dans la salle du tribunal de Lille, de nombreux parents d’enfants autistes étaient venus soutenir l’auteur du film, Sophie Robert.

Devant le tribunal de grande instance de Lille (Nord), une quinzaine de familles d’enfants autistes sont venues manifester, le jeudi 8 décembre. Sur leurs pancartes, on pouvait lire «Quarante ans de retard dans la prise en charge de l’autisme, ça ne vous suffit pas ?», ou encore « Merci Sophie », en référence à Sophie Robert, l’auteur d’un documentaire très critique sur la prise en charge de l’autisme par la psychanalyse et qui, depuis sa diffusion sur internet cet automne, suscite une vive controverse

Jeudi 8 décembre, devant les juges, trois psychanalystes interviewés dans ce film ont ainsi tenté d’obtenir son interdiction, au cours d’une audience tendue. Esthela Solano-Suarez, Eric Laurent et Alexandre Stevens reprochent en effet à Sophie Robert d’avoir dénaturé leurs propos et plus largement, d’avoir « ridiculisé » la psychanalyse.

Dans la salle comble, leur avocat, Me Christian Charrière-Bournazel a tout de suite précisé les limites du débat. « Nous ne sommes pas là pour faire le procès de l’autisme ou de la façon dont on pourrait le soigner ou le prendre en charge autrement » a-t-il commencé. L’avocat sait bien que le terrain est miné. En France, les associations de parents déplorent que de nombreux psychanalystes continuent à considérer l’autisme comme un trouble psychique lié à la mère alors que depuis plus de trente ans, la communauté scientifique internationale affirme qu’il s’agit d’un trouble neurologique d’origine génétique. 

« Outrage ou pas »

Mais, devant les juges, là n’est pas la question, rappelle l’avocat. Ce jeudi, il s’agit de déterminer si, comme il l’affirme, Sophie Robert a « fait outrage » aux droits fondamentaux de ses clients, à travers un montage « tripotage » dénaturant en profondeur leurs dires et leur pensée. A en croire Me Charrière-Bournazel, des phrases auraient été « coupées, exploitées, défigurées », des questions remplacées par d’autres, dans une « entreprise polémique » n’ayant d’autre but que de mettre à bas la psychanalyse. Il affirme, en particulier, qu’aucun des trois analystes ne considère que la mère a une responsabilité dans la pathologie de son enfant autiste, contrairement à ce qui ressort dans le film.

En face, Benoît Titran, l’avocat de Sophie Robert, nie toute dénaturation au montage. Il maintient ainsi que Esthela Solano-Suarez reconnaît « un lien de causalité entre le trouble maternel et l’autisme de l’enfant », de même que ses confrères. Laëtitia Bénard, qui défend l’Association Autisme Sans frontières, fait remarquer pour sa part que certains propos sont choquants en soi, quels que soient les mots que l’on place avant ou après. « La maternité est psychogène en soi », cite-t-elle en exemple, en référence à des déclarations entendues dans le film.

« Mais ce ne sont pas les propos de mes clients ! » , bondit l’avocat de la partie adverse, en rappelant que de nombreux médecins ont été interrogés dans le documentaire. La défense ne nie pas mais poursuit sur un autre terrain, celui de l’argent, en soulignant que l’accusation demande « 270 000 € en tout ». De quoi financer la prise en charge « d’une trentaine d’enfants autistes à l’école pendant un an », observe Me Bénard. La décision sera rendue le 26 janvier.

Marine LAMOUREUX, à Lille

http://www.la-croix.com/Actualite/S-informer/France/Audience-tendue-autour-d-un-documentaire-sur-l-autisme-_NG_-2011-12-08-745263

9 décembre 2011

article publié dans RUE89 le 8 décembre 2011

Autisme : trois psys répondent aux accusations du film « Le Mur »Partager l'article sur Facebook

Geneviève Haag
psychanalyste

A l'occasion du procès de la réalisatrice du documentaire « Le Mur » , dont l'audience se tient ce jeudi 8 décembre, et qui a suscité un important débat sur Rue89, nous donnons la parole à des psychanalystes membres de la Coordination internationale de psychothérapeutes psychanalystes s'occupant de personnes avec autisme (CIPPA). L'un des signataires, Bernard Golse, est interviewé dans le film, mais ne le poursuit pas devant la justice. Le film accuse la psychanalyse d'apporter de mauvaises réponses à l'autisme infantile. Geneviève Haag et ses deux co-signataires répondent.

La Coordination internationale de psychothérapeutes psychanalystes s'occupant de personnes avec autisme (CIPPA), reconnaît la diversité des pratiques et des hypothèses théoriques concernant l'autisme dans les courants psychanalytiques, et peut discuter avec certains membres du courant lacanien.

Les trois signataires de cet article

Geneviève Haag, pédopsychiatre et psychanalyste. Elle a tenu la plume.

Bernard Golse, chef de service de pédopsychiatrie à l'hôpital Necker - Enfants malades (Paris) et membre du conseil d'administration de la CIPPA, et

Dominique Amy, présidente de la CIPPA et auteure de deux livres sur l'autisme.

Elle dénonce la condamnation abusive des « psychanalystes » et de « la psychanalyse » dans un amalgame autour de certaines formulations émises dans le documentaire « Le Mur ».

Il serait nécessaire de rétablir l'authenticité des propos émis par les interviewés car ceux-ci ont été coupés et remontés, certains fragments ont même été recollés de façon complètement déformante.

Ainsi, Bernard Golse dénonce le rapprochement de ses propos sur la biologie de la grossesse, indépendante des questions sur l'autisme, de propos parlant de mouvements inconscients de rejets du futur bébé. Il réfute le lien de causalité entre les mouvements inconscients de la mère dans la période prénatale et l'autisme.

Le courant que nous représentons, regroupement de praticiens résolus à améliorer leurs pratiques, ne se reconnait en aucune façon dans une série d'accusations.

L'accusation de la culpabilisation des parents

Dominique Amy souligne la nécessité de contacts fréquents avec les parents au cours des prises en charge en institutions. Elle insiste aussi sur le partage des observations et des tentatives de compréhension tenant compte des difficultés spécifiques de chaque enfant. La psychothérapie psychanalytique, individuelle et groupale proprement dite, loin d'être un placage d'une théorisation préalable périmée, est le lieu d'une observation très détaillée et patiente du langage corporel préverbal que les enfants eux-mêmes nous ont aidés à décrypter.

Les enfants cherchent ainsi à communiquer des vécus corporels pénibles (tomber, se répandre, perte du sentiment de peau, perte de sensation de certaines parties du corps), que nous verbalisons. Ces apports se relient très bien à toutes les recherches en cours - qu'elles soient cognitives, neuroscientifiques ou génétiques - sur les particularités sensorielles, perceptives et de représentation.

L'accusation d'empêcher les enfants d'accéder à l'éducation et à l'instruction

Nos membres proposent la compréhension et les soins psychanalytiques dans un esprit de constante articulation avec les autres approches : stratégies éducatives et instructives variées, scolarité et approches rééducatives : orthophonie, psychomotricité, ergothérapie, coordonnées et ajustées à chaque enfant (comme décrit dans le livre Autisme : L'accès aux apprentissages d'Anne-Yvonne Lenfant et Catherine Leroy, 2011).

Certains d'entre nous se sont formés eux-mêmes au TEACCH et à l'ABA ainsi qu'aux stratégies de communication alternative au langage verbal PECS et MAKATON pour comprendre ces méthodes et pouvoir accompagner ceux qui les utilisent. Nous en avons pris le meilleur, mais critiqué certains professionnels qui préconisent et mettent en pratique une trop grande élimination de la relation affective et ludique.

L'accusation de l'isolement

La théorisation purement psychogénétique de l'autisme et l'ignorance ou le mépris des apports des recherches cognitivistes neurophysiologiques et génétiques ne nous concerne pas. Plusieurs d'entre nous ont participé au Réseau interdisciplinaire Autisme Sciences (RIAS, rattaché au CNRS), au Cercle de neuropsychologie et psychanalyse (CNEP).

Dans « Comment aider l'enfant autiste » (Dunod, 2004), Dominique Amy affirme que les recherches neurophysiologiques et génétiques mettent à juste titre les mères et les pères hors de cause concernant l'émergence de l'autisme chez leur enfant. Nous pensons cependant qu'ils ont à être très soutenus afin de les aider à mieux surmonter leur détresse, à comprendre les difficultés de leur enfant et à lui proposer un environnement adapté, avec des actions éducatives et thérapeutiques couplées à une scolarisation bien accompagnée (AVS et soutien du personnel enseignant).

L'accusation de refuser toute évaluation

Certes nous avons pris du retard en matière d'évaluations formalisées utilisant les outils recommandés. Dès sa fondation en 2004, la CIPPA a recommandé à ses membres les évaluations standardisées et beaucoup d'équipes se sont formées et/ou travaillent en coopération avec les Centres de diagnostic . Pour les psychothérapies proprement dites, nous participons au Pôle Autisme du réseau INSERM de recherche fondée sur les pratiques psychothérapiques.

L'accusation de ne pas solliciter des diagnostics

Il est faux de dire que nous ne proposons pas de prises en charge précoce, car bon nombre d'entre nous collaborons avec les PMI et les crèches afin de favoriser autant et dès que possible la prévention et les suivis nécessaires. Nous sommes en étroite liaison avec les recherches de l'association Préaut, de dépistage de l'autisme.

http://www.rue89.com/2011/12/08/autisme-des-psys-alertent-sur-les-meconnaissances-227345

7 décembre 2011

article publié dans El Watan.com le 7 décembre 2011

La double solitude des autistes

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le 05.12.11 | 01h00 3 réactions

 

Amener le gouvernement à prendre sérieusement en charge les personnes autistes : tel est le combat de Samira Khaled, une brillante orthophoniste qui travaille au service pédiatrie du CHU de Sétif, où elle s’est mise entièrement à la disposition des enfants autistes. «J’ai constaté qu’il y avait beaucoup de personnes qui venaient consulter pour des troubles du langage.

La majorité de mes patients sont des autistes. Mais comme il n’y a pas assez de professionnels et pas assez de structures spécialisées pour les prendre en charge, j’ai décidé de me consacrer à l’autisme et de me spécialiser dans cette pathologie», explique Samira Khaled. Notre interlocutrice a lancé depuis peu une pétition intitulée : «Pour que l’autisme soit reconnu par le gouvernement algérien» (voir encadré). La pétition a recueilli jusqu’à présent (samedi 3 décembre, ndlr) 700 signatures. Interrogée sur la spécificité des troubles liés à l’autisme, Samira Khaled dira : «L’autisme est une pathologie dont les causes ne sont pas bien cernées. Cela touche trois domaines : les interactions sociales, la communication et le comportement. Elle fait partie des troubles envahissants du développement.

Cela affecte les différents domaines du développement (imitation, perception, motricité globale et fine, cognition, socialisation). Mais l’autisme, c’est des degrés : léger, moyen et sévère. Il y a des autistes qui, avec une prise en charge précoce et intensive peuvent même améliorer leurs capacités, contrairement aux retardés mentaux, et cela peut aboutir à leur scolarisation.» Quid des symptômes de l’autisme ? «Pour détecter l’autisme, il faut une fine observation, en plusieurs séances. Exemple : l’enfant ne parle pas. Ajouté à cela, il ne manifeste aucun intérêt pour la communication, il est comme renfermé dans un autre monde propre à lui. Il a parfois des comportements bizarres, stéréotypés. Il ne s’intéresse pas aux autres, même pas à ses parents. A la différence des retardés mentaux, on sent qu’il ne veut pas parler, pas qu’il ne peut pas parler. Les autistes ne sont pas sociables. Ils sont irritables aux moindres signaux du monde extérieur.»


Un déficit criant en formation


A partir de son expérience de praticienne, l’orthophoniste dresse un état des lieux peu reluisant des moyens thérapeutiques disponibles : «Il y a quelques centres, mais cela ne suffit pas. La carence principale se situe au niveau de la formation», dit-elle. Une carence qui a pour conséquence un manque flagrant de personnel qualifié sachant qu’on «ne peut pas confier plus de 8 autistes par jour à un orthophoniste». «A travers mes consultations, j’ai commencé à recevoir beaucoup d’enfants autistes», poursuit Samira Khaled. «Je me trouve seule à Sétif à m’occuper de ces enfants. Certes, il y a le centre de Aïn Abassa, mais comme il est loin, tout le monde préfère venir chez moi, alors que je n’ai qu’un simple bureau et pas assez de matériel. Je suis la seule formée par rapport à mes collègues. Donc la charge est lourde.»  Samira insiste sur l’attention dont doivent faire l’objet en priorité «les cas lourds qui présentent de graves troubles du comportement».

«Ceux-là, il faut les suivre en permanence pendant au moins trois ans, à raison de deux à trois fois par semaine», préconise-t-elle. Elle avertit contre les risques d’aggravation de ce handicap, si les choses ne sont pas traitées à temps. «Sachez qu’un autiste qu’on n’éduque pas, qu’on ne stimule pas, régresse et devient violent», prévient-elle. Une situation qui a peu de chances de s’améliorer faute d’établissements dédiés aux personnes autistes : «Il n’y a pas suffisamment de centres pour prendre en charge tous ces enfants qui s’accroissent de jour en jour, ce qui attise la souffrance des parents. C’est vrai qu’il existe quelques centres à Alger, à Blida, à Annaba, à Oran, à Constantine, un nouveau centre à Sétif. Ils fonctionnement souvent en forme d’association. Mais qu’en est-il des villes du Sud ? Qu’en est-il de Biskra, de M’sila, de Ouargla, de Béchar, de Tébessa ? Ce n’est pas du tout suffisant. Il y a peu de structures adaptées à ce genre de patients, ce qui suppose de grands espaces, un matériel éducatif adéquat. Il n’existe pas non plus de tests pour évaluer ces enfants.»


Scolarité compromise


Parmi les structures de référence en la matière, elle cite le service du professeur Mahmoud Ould Taleb, un de nos meilleurs pédopsychiatres, chef de service de la clinique de pédopsychiatrie Garidi II de l’EHS Drid Hocine. «C’est là que j’ai effectué mon stage», précise-t-elle. Auteur d’un ouvrage fort pertinent pour notre sujet : Le Spectre de l’autisme. Pour une meilleure orientation des parents, le professeur Ould Taleb a lui-même alerté à maintes reprises les pouvoirs publics sur l’ampleur qu’est en train de prendre cette pathologie et l’urgence d’y remédier. Dans une interview au site www.setif.info, le professeur indique que «l’autisme constitue le motif essentiel des consultations et d’hospitalisation en pédopsychiatrie». «En Algérie, la prise en charge est actuellement très insuffisante et les parents vivent un véritable calvaire du fait de l’absence de structures adaptées à la prise en charge scolaire, éducative, sociale et thérapeutique de leurs enfants». 

C’est un peu pour provoquer un électrochoc au sein de l’opinion et donner un coup de pied dans la fourmilière que Samira Khaled a décidé donc de lancer sa pétition. «Les familles m’ont demandé de créer une association en m’assurant de leur soutien. Comme j’étais très affectée par leur douleur, et voyant que rien ne se fait concrètement pour améliorer les choses, j’ai pensé à rédiger une pétition», confie la jeune orthophoniste, avant d’ajouter : «Je l’ai lancée exactement le 28 octobre 2011 et l’ai adressée directement au gouvernement, en ciblant en priorité les ministères de la Santé, de la Solidarité et de l’Education nationale, car il est important de donner à ces enfants une chance pour être scolarisés. Il a fallu que j’écrive des lettres aux écoles pour accepter ces enfants autistes. C’est toujours nous les professionnels qui nous battons pour leur scolarisation.»

39 000 cas recensés

Selon un chiffre rendu public par l’ex-ministre de la Solidarité nationale, Djamel Ould Abbès, (aujourd’hui ministre de la Santé), le nombre de personnes autistes était de 39 000 en 2010. «Nous avons recensé 39 000 autistes à l’échelle nationale. Cette maladie a été occultée pendant longtemps, c’est pour cette raison que nous avons décidé que l’année 2010 soit l’année de l’autisme», avouait Djamel Ould Abbès dans une déclaration reprise par l’APS. Dans le texte de la pétition qu’elle a initiée, Samira Khaled revoie le chiffre officiel à la hausse : «Certaines statistiques font état de 65 000 adolescents atteints par l’autisme. Cela touche 3 à 4 fois plus les garçons que les filles», rapporte l’orthophoniste.

Le désarroi des parents

Selon les observations faites par Samira Khaled, les familles ayant un enfant autiste sont le plus souvent désemparées et complètement livrées à elles-mêmes en l’absence de centres spécialisés proches de leur lieu d’habitation, le maillage en structures adéquates étant loin de couvrir l’ensemble du territoire national. Témoin de l’angoisse des parents, l’orthophoniste nous fait part des questions lancinantes qui les taraudent : «Les questions qui reviennent souvent sont : qu’est-ce qu’il a mon enfant ? C’est quoi l’autisme ? Quel sera le devenir de mon enfant ? Pourra-t-il aller à l’école ? Où dois-je mettre mon enfant ? Pourquoi il n’existe pas de centres pour autistes ? On est marginalisés, on prend nos enfants pour des fous alors qu’ils ne le sont pas. Où sont les droits de nos enfants ? Pourquoi l’Etat ne fait rien pour nous ? Je ne trouve pas de spécialiste pour prendre en charge mon enfant autiste.» Autant de questions souvent sans réponses…

Des autistes artistes

C’est l’un des clichés les plus répandus sur les autistes : on leur prête des dons exceptionnels. Une image que le cinéma a largement contribué à populariser, notamment le film Rain Man de Barry Levinson (1988) avec Tom Cruise et Dustin Hoffman, ce dernier campant le rôle d’un autiste génial.
Les autistes sont souvent présentés comme des artistes, des surdoués dotés de talents insoupçonnés, une manière de compenser leur handicap. «Ce sont des degrés», tempère Samira Khaled. «Il y a des autistes qui ont un bagage langagier riche, mais qui ne savent pas l’utiliser convenablement dans des conversations. Le côté pragmatique du langage qui permet de transmettre le message se trouve altéré.» Elle confirme cependant que certains d’entre eux sont réellement doués : «Les autistes peuvent témoigner d’une habileté dans un domaine précis, avec un centre d’intérêt particulier. Il y a ceux qui aiment la musique, ceux qui aiment dessiner, ceux qui aiment construire… Il y a aussi les autistes de haut niveau. Ceux-là ne présentent pas de retard du langage ni dans les capacités cognitives. Ils excellent toujours dans un domaine spécifique : les mathématiques, l’informatique, la littérature ou autre. Il n’empêche qu’ils souffrent beaucoup dans les interactions sociales.»

Pétition. Pour que l’autisme soit reconnu par le gouvernement algérien :

A l’attention du gouvernement,
L’autisme est reconnu, au niveau international, comme une pathologie neurologique d’origine génétique qui constitue un handicap cognitif sévère.

En Algérie, la prévalence de cette pathologie est estimée à 4 cas pour 1000 naissances. Certaines statistiques font état de 65 000 adolescents atteints par l’autisme. Elle touche 3 à 4 fois plus les garçons que les filles.
Mais la prise en charge dans notre pays est actuellement très insuffisante, et les parents vivent un véritable calvaire du fait de l’absence de structures adaptées à la prise en charge scolaire, éducative, sociale et thérapeutique de leurs enfants.

Sachant que les meilleurs résultats sont obtenus lorsque l’enfant bénéficie d’une prise en charge éducative et comportementale dès ses 2 ans, ainsi que les enfants qui présentent un autisme moyen à léger, ils pourraient bénéficier d’une scolarisation tout comme leur pairs (non-autistes).

Il est temps que l’autisme soit enfin reconnu conformément aux critères de l’OMS et de faire de cette cause, une cause nationale, que cette année soit une année de lutte active contre l’autisme avec la mobilisation des autorités responsables, à savoir le ministère de la Santé, de la Solidarité et de l’Education nationale, ainsi que la sensibilisation de la société civile.

Cependant, il serait indispensable d’effectuer des formations pour l’ensemble des spécialistes de l’équipe pluridisciplinaire (psychologues, orthophonistes, pédiatres, éducateurs, psychomotriciens, ergothérapeutes…). Qu’ils soient tous formés aux différentes méthodes : ABA «analyse appliquée du comportement», TEACCH «Treatment and Education of Autistic and related Communication handicaped Children», qui ont fait leurs preuves depuis des années à l’étranger, et qui restent inconnues en Algérie.

Nous n’accepterons plus désormais que vous laissiez les personnes autistes et leurs proches dans cette situation intolérable, et vous exigeons que la répartition des budgets permette dorénavant une prise en charge adaptée pour les personnes atteintes d’autisme.
Sachez qu’un autiste qu’on n’éduque pas, qu’on ne stimule pas, régresse et devient violent. Leur refuser les soins, l’éducation est aussi maltraitant que de refuser l’insuline à un diabétique.


Cordialement Mlle Samira Khaled, orthophoniste

Pour signer la pétition

http://www.mesopinions.com/Pour-que-l-autisme-soit-reconnu-par-le-gouvernement-algerien--petition-petitions-03a361f40ad00d843a74fed69a7232d5.html

Mustapha Benfodil

http://www.elwatan.dz/actualite/la-double-solitude-des-autistes-05-12-2011-149777_109.php

7 décembre 2011

article publié sur le site d'Autisme Infantile le 7 décembre 2009

Les méthodes révolutionnaires, miraculeuses, à la mode

Le costume sur mesure et à la mesure des uns et des autres: avec l’autisme, adieu la « fashion victim attitude ».

Nos filles adolescentes, presque chaque matin, devant leur armoire pleine à craquer, se heurtent au même drame: elles n’ont plus rien à se mettre! Nos hommes politiques retournent sans cesse leur veste, c’est sans doute cela le changement! Le torréro revêt ses habits de lumière pour entrer dans l’arène. Les actrices mettent de belles robes d’autrefois, ou se promènent carrément nues sur la pellicule, artistiquement habillées par le regard du réalisateur. Certains se travestissent pour chercher l’amour dans le monde de la nuit.

À Halloween, on croise des monstres dans les rues. À Carnaval, ce sont des princesses, des arlequins, des super-héros, des indiens qui viennent réclamer des bonbons à nos portes. Les petites annonces et les faits divers du canard quotidien isolent les clochards du froid des trottoirs. Il paraît que le Mascara habille le regard d’une femme et que les nouvelles combinaisons font une seconde peau aux nageurs olympiques. Depuis Cro-Magnon, la peau de bête, puis les vêtements,  habits,  fringues,  frusques,  sapes… les accoutrements, les effets, les défroques et les uniformes. Du haut jusqu’en bas, on peut en faire toute une Histoire.

Alors, deux questions en passant: « L’habit fait-il le moine? »… « L’armure habille-t-elle le chevalier? ». Et tant que nous y sommes, un souvenir aussi, celui de ce vendeur dans une boutique m’assurant onctueusement « Oh ! Madame, un rien vous habille! ». Introduction certes, un peu longue – disons que la broderie met en évidence ce qu’il faut montrer!

Un enfant autiste, même s’il « en tient une bonne couche », selon certains,  ne se retrouve jamais « rhabillé pour l’hiver »: il est nu pour affronter le froid et le regard des autres.

Nous avons dû nous lancer dans la couture pour notre fils, car le prêt-à-porter ne lui allait pas. Le sketch « Le tailleur » de Fernand Reynaud se rejouait chaque jour à la maison. Le « costard » ne tombait pas si mal mais il y avait comme un défaut. On nous disait que la coupe pouvait surprendre mais qu’Antoine pourrait s’y faire s’il apprenait à se tenir contre sa nature. C’était dit avec tant d’assurance que nous avons failli déclarer comme Fernand Reynaud « Merci, Monsieur le Tailleur, nous avons de la chance que vous ayez réussi un si beau costume sur un garçon aussi mal foutu! »

Antoine a eu chaud! Nous avons repris le patron initial, coupé, ajusté, assemblé, essayé, réajusté pour que que le costume en question convienne mieux à notre mannequin aux mensurations et exigences uniques.

Ce vêtement doit le protéger du regard des autres. Il doit être confortable, un reflet de ce qu’Antoine veut bien dévoiler de lui même, un passeport social.

Les recettes TEACH, PECS, communication facilitée, Makaton, ABA, ne sont rien sans la collaboration entre les parents et les professionnels, sans tenir compte de l’histoire personnelle de chaque famille et de son environnement. Aucune méthode ne peut-être imposée à tous. Tout doit être essayé pour un seul, avec cohérence, humilité, respect et empathie.

Parents: si, sur Internet, vous lisez une étude affirmant que telle méthode décrite est efficace à 100%, méfiez-vous des marchands de miracles… et des campagnes publicitaires!

Si vous songez à déménager, vous déraciner pour aller voir ailleurs, dans une grande ville par exemple, rappelez-vous du vieil adage « l’herbe paraît toujours plus verte dans le champ du voisin ».

Si vous êtes tentés de baisser les bras, de laisser courir, soyez sûrs que votre enfant n’ira pas loin, que personne ne sera prêt à aller jusqu’au bout pour le chercher à votre place.

Les méthodes ou les protocoles sont souvent appliqués de manière trop empirique et dépersonnalisée. L’enfant doit trouver du plaisir dans son apprentissage pour qu’une stratégie puisse fonctionner.

Tout doit être aux mesures de votre enfant et à la mesure de ce que vous et les professionnels pouvez mettre en marche. Mesurez ce qui doit être changé, ne touchez pas à ce qui ne peut l’être.

http://autismeinfantile.com/prise-en-charge/a-la-maison/suggestions-aux-parents/les-methodes-revolutionnaires-miraculeuses-a-la-mode/

7 décembre 2011

article publié sur le site de l'association CeRESA le 7 décembre 2011

Point de vue du Pr Bernadette Rogé concernant le Film "LE MUR"

Le_Mur_RogeJ’ai visionné le film intitulé « Le mur » et j’y ai relevé des propos totalement erronés d’un point de vue scientifique et relevant d’une prise de position idéologique en opposition avec l’intérêt des personnes atteintes d’autisme et de leurs familles :

L’autisme y est encore considéré comme une psychose, un refus de communiquer. L’organisation mondiale de la santé considère l’autisme comme un trouble neurodéveloppemental et la haute Autorité de santé a adopté ce point de vue dans les recommandations pour le diagnostic de l’autisme.

La dépression maternelle serait responsable de l’autisme : aucune donnée ne vient étayer cette affirmation. Cette déclaration concernant la responsabilité de la mère est pourtant assortie de considérations telles que « le symptôme qu’il lui est imparti d’avoir par le lien maternel », « une partie des gènes vient de la mère, une partie vient du père et la mère rejette cette partie, je ne reconnais pas ce bébé, je veux l’éjecter ». La mère est incriminée : «  la folie maternelle est à l’origine de l’autisme », « l’enfant est aliéné à la mère », « il pense qu’il est le phallus de la mère », «la mère est trop chaude ou trop froide », « la mère est du côté animal, le père est du côté de la culture ».Le père quant à lui serait là « pour interdire, protéger l’enfant du désir incestueux de la mère ».  Le père « a fait l’enfant, la mère nie son existence. Il est comme un figurant. Quand la mère considère la parole du père, l’enfant parle, si le père ne porte pas la fonction symbolique, il y a carence ». L’autisme proviendrait d’un état de fusion avec la mère.

 

Si l’on en croit ces affirmations, l’autisme s’installerait donc par un mécanisme psychologique. Tous les travaux de recherche montrent au contraire que l’origine de ce désordre est neuro-développementale. Là encore on relève des propos dogmatiques : « tant qu’on est fusionné dans l’autre on ne peut pas parler », « le cerveau… cette façon de concevoir la causalité de l’autisme est réductrice, les autistes sont malades du langage, ils ont une façon de se défendre de la langue ».

Les mères déjà tellement mises à mal par la difficulté qu’elles ont à élever un enfant différent n’ont pas à subir ce genre de jugements dénués de tout fondement et pourtant si destructeurs.

Lorsque les traitements sont abordés, on y entend que sont préconisés l’attitude d’observation, le retrait, l’absence de volonté éducative. Tout ceci est en contradiction flagrante avec ce que la communauté scientifique internationale préconise. Enfin, on apprend que la psychanalyse est en combat contre les techniques cognitivo-comportementales pour maintenir la subjectivité et que les résultats scientifiques ne changent pas la pratique des psychanalystes. Pourtant, des travaux scientifiques démontrent l’efficacité des techniques cognitivo-comportementales pour aider l’enfant à se développer et pour améliorer la qualité de vie des enfants et des parents.Lorsque l’on demande sur quoi reposent toutes ces affirmations, la réponse est « çà vient des écrits psychanalytiques », ce qui confirme l’absence de fondements scientifiques et la référence à des textes qui sont des élaborations intellectuelles dénuées de base empirique.

Les propos tenus traduisent une méconnaissance de l’autisme, une volonté de ne pas prendre en compte l’évolution des connaissances en termes de causes de l’autisme et de traitements.Il s’agit d’une attitude contraire à l’éthique et qui doit être dénoncée. Elle contribue largement à la détresse des parents et à la stagnation d’enfants dont le développement est entravé sévèrement si les interventions adaptées (qui font consensus au niveau international) ne sont pas appliquées.

Professeur Bernadette Rogé
Bernadette Rogé est professeur des Universités, psychologue, spécialiste de l’autisme. Elle travaille dans ce domaine depuis les années 80. Elle a effectué des formations spécialisées à l’Université  de Californie à Los Angeles, à l’Université de Chapel Hill en Caroline du Nord, à l’institut de psychiatrie de Londres, et plus récemment (cet été) au M.I.N.D. Institute à Sacramento (USA).Elle est présidente du Comité scientifique de l’arapi (association pour la recherche sur l’autisme et la prévention des inadaptations).  Elle a  été vice-présidente de l’aftcc (association française de thérapie comportementale et cognitive). Elle a participé au Consortium International de génétique moléculaire de l’autisme et au consortium international AGP (Autism Genome project). Elle a participé à de nombreux programmes de recherche européens sur l’autisme (Educautisme, Depistautisme, MOLGEN et en cours COST). Elle est donc au contact de la communauté scientifique internationale et  se  tient régulièrement informée  des avancées dans le domaine de l’autisme. Elle assure des enseignements dans le cadre du l’université de Toulouse le Mirail mais aussi à l’Université de Mons en Belgique et de Fribourg en Suisse. Elle a été professeure invitée à l’Université du Québec à Montréal (UQAM).Par ailleurs, elle travaille avec le CERESA (Centre Régional d’Education et de Services pour l’Autisme) où elle dirige un SESSAD (Service d’éducation et de soins à domicile) et une plateforme associative à Toulouse, et une structure expérimentale à Martel dans le lot.

http://ceresa.fr/actualites/autisme/128-point-de-vue-du-pr-bernadette-roge-concernant-le-film-qle-murq?mid=5489

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