La lettre d'information du GCSMS Autisme France - Décembre 2019
article publié sur Corse Net Info
article publié dans Paris-Normandie
Sophie BOGATAY |
Maman d’un garçon autiste de 8 ans, Sylvie raconte sa bataille, celle des parents seuls face à l’administration chargée de gérer « le dossier social ». En très peu de temps, cette trentenaire a appris à parler la langue des sigles pour essayer de rentrer dans les cases et obtenir pour son fils le meilleur avenir possible malgré un TSA (trouble du spectre de l’autisme). Une mère qui lance un SOS au nom des familles épuisées de ne pas être entendues.
« Mon fils a toutes ses capacités intellectuelles, mais il réagit différemment. Les troubles sont apparus vers 4-5 ans, en deuxième année de maternelle. Il était devenu le souffre-douleur en classe. Il a été diagnostiqué tardivement. Quand il a fait les premiers tests, à 6 ans, j’ai compris que la bataille, ce serait 24 heures sur 24, comme me l’a dit une autre maman. »
À force de ténacité, Sylvie réussit à faire changer son fils d’école à la rentrée de septembre 2019. « Il est maintenant scolarisé avec une équipe bienveillante. Mais il ne peut pas manger à la cantine, faute de personnel adéquat et formé, donc je viens le chercher et je le reconduis », raconte Sylvie, qui est à la fois maman et aidante et s’investit à fond dans l’autonomie de son enfant.
Pour cela, elle a sacrifié sa vie professionnelle d’assistante de direction, se dédiant entièrement à la famille qui s’est agrandie avec l’arrivée d’un petit-frère.
Elle a vite compris que l’interlocuteur principal c’est la MDPH (maison départementale des personnes handicapées), où il faut s’armer de la patience d’un bonze. En attente d’un recours auprès de cette structure, qui a entre autres le pouvoir d’accorder une aide scolaire individualisée – dernièrement refusée –, Sylvie ne sait plus à quelle porte frapper. Peut-être un avocat. Elle ne serait pas la première : dans l’Eure une maman a décidé de saisir la justice ; au Havre, une mère avait lancé une grève de la faim. « Je ne vais quand même pas monter en haut d’une grue ? », lance Sylvie.
Ce qu’elle réclame ? « Un traitement plus humain et une véritable aide, au lieu de cette impression d’être au tribunal. Mais aussi une prise en charge des 877 € de frais par mois nécessaires pour le protocole de suivi. On me dit de continuer les traitements dans le circuit libéral, mais à mes frais bien sûr ! »
Il y a de quoi craquer, coincée entre belles paroles et mur du silence. « L’éducation nationale fait des promesses qu’elle ne peut pas tenir. Pourtant je pensais que la priorité était à l’école inclusive et le président Macron était venu annoncer, en avril 2018, à Rouen, un grand plan autisme sur cinq ans. »
« Où est passé ce plan ? Environ 8 000 enfants autistes naissent en France chaque année », s’impatiente Sylvie, dans ses courriers adressés aux ministères et à l’Élysée.
Elle a banni le mot répit de son quotidien. Sa vie sociale se concentre dans des salles d’attente, des consultations, des commissions d’évaluation, des courriers. Et tellement de cogitation : « On me reproche de ne pas me taire, mais je veux avancer. Je pense que les élus en charge du social ignorent ce qui se passe. Je sais que je ne suis pas la seule maman à désespérer. »
article publié dans la République du Centre
Le vendredi 13 décembre 2019
Certains parents de personnes autistes, sur les nerfs et en colère, ont tenté d’empêcher le vote des résidents pour le conseil de la vie sociale dans le foyer Dialogue autisme, à Saran, cette semaine. Une situation plus que tendue qui était à deux doigts de dégénérer…
De dialogue à Dialogue autisme, il n’y en a pas eu mercredi 11 décembre, dans l'après-midi. D’un côté, des parents mécontents soutenus par Jacqueline Mansourian-Robert, fondatrice de cet établissement saranais qui accueille 24 résidents. "Je suis un vilain petit canard, lance cette dernière. J’ai créé l’association et je ne trahirai pas la confiance des parents et de leurs enfants. Je n’ai pas créé cet établissement pour qu’il fasse souffrir les gens. Rien n’est respecté du projet initial."
De l’autre côté, la directrice du foyer, Viviane Lopes, qui cristallise la rancœur et la haine (on peut l’écrire) de certains parents. Tout ce petit monde était réuni mercredi en début d’après-midi dans une pièce du foyer, où de nombreux noms d’oiseaux ont été prononcés et où la tension était extrême. Pourquoi ?
Le conseil de la vie sociale regroupe toutes les parties (direction, professionnels, parents et même résidents). Et c’est ce conseil qui décide des activités futures des résidents (autistes donc). Mercredi, se déroulait le vote de ces mêmes résidents.
Les parents (cinq familles étaient présentes sur les 24 résidents) affirment avoir reçu un e-mail mardi 10 décembre leur indiquant que le vote aurait lieu le lendemain. "La loi", explique Jacqueline Mansourian-Robert, "dit que les parents doivent être prévenus huit jours avant. Pas la veille."
D’autant que certains de ces parents estiment que les gestionnaires (GCSMS, groupement de coopération sociale et médico-sociale) de l’établissement ont "choisi" pour voter certains résidents au détriment de leurs enfants.
"Je ne les ai pas choisis", souligne Viviane Lopes, la directrice. "Si, vous les avez choisis !", lui répond ce parent hors de lui. Le ton monte alors très vite, à la limite d’en venir aux mains. Tout le monde parle en même temps. "Je ne peux pas vous écouter parce que je suis prise en otage", lâche même la directrice.
Des parents, dont trois présents mercredi, ont déjà porté plainte auprès du procureur de la République pour "maltraitances" ; et mercredi, ils voulaient faire reporter le vote. Ce ne sera pas le cas.
"Ce n’est pas juste pour embêter le monde", confie cette mère. "C’est juste qu’ils (les gestionnaires) veulent faire leur truc entre eux." "Mon fils ne parle pas. Comme beaucoup de résidents ici. Il n’a pas le droit de vote", conclut ce père à bout. "Mais là, il aurait le droit de voter ?"
Alban Gourgousse
article publié dans la Nouvelle République
Publié le 13/12/2019 à 06:25 | Mis à jour le 13/12/2019 à 16:54
Le projet dessiné par l’Atelier RVL cherche à préserver le style années 50.
© (Atelier RVL/Document non contractuel)
Libéré par La Poste en 2010, le bâtiment de l’avenue Grammont abritera des logements, dont une partie pour de jeunes adultes autistes. Livraison fin 2021.
Neuf ans déjà que La Poste a quitté son local du 153 de l’avenue Grammont qu’elle louait à la ville. Neuf ans aussi que le bâtiment des années 50 n’accueille plus aucune activité ou logement.
En 2013, un premier projet de pole médical avec SOS Médecins, SOS Kiné, un laboratoire, une maison médicale de garde tourangelle avait été envisagé. Sans aller au bout.
Propriétaire des lieux depuis la fin 2015, la Ligeris (1) vient de présenter un nouveau programme de réhabilitation du bâtiment positionné à l’angle de l’avenue Grammont et de la rue Molière.
Sur les 1.500 m2 de surface, le bailleur prévoit la création de 23 appartements intermédiaires plutôt réservés aux étudiants, tous meublés (21 T1 bis, 1 T4 et 1 T5 en colocation au 5e et dernier étage) et six logements destinés à l’association Alva (2) pour l’hébergement de jeunes adultes autistes (lire par ailleurs).
L’aménagement de deux places de parking, de 234 m2 de locaux tertiaires (laverie, local vélo, espaces de vie et de travail partagés pour les étudiants), d’un jardin, d’un ascenseur complètent cette opération menée par les architectes de L’Atelier RVL et dont le budget avoisine les 3,5 millions d’euros.
Entrées séparées Dans sa présentation, ce dernier a cherché à conserver l’allure d’un bâtiment des années 50, notamment le bandeau des trois baies dans l’angle, et à mettre en valeur la cage d’escalier existante. Il a fallu tenir compte des normes des bâtiments de France, du plan de prévention du risque inondation et des demandes de l’association Alva : ainsi deux entrées bien séparées, l’une pour les étudiants côté rue Molière, l’autre pour les résidants Alva côté avenue Grammont, seront aménagées.
Les travaux de curage ont débuté et dureront jusqu’à la fin février. Place, ensuite, à l’aménagement intérieur pour une livraison attendue à la fin 2021.
(1) A l’époque, la Semivit rachète. Après avoir fusionné avec La Tourangelle immobilier cette année, la Semivit a donné naissance à Ligeris. (2) Accompagnement au long de la vie pour personnes avec autisme et troubles apparentés.
Vue de la Poste de Grammont le 2 décembre 1954, jour de son inauguration.
© Archives NR
On peut constater que le projet architectural du nouveau bâtiment respecte en grande partie la construction initiale. Conçu par l’architecte de la ville, M. Almaric, le bâtiment fut bâti entre 1952 et 1954. Coût de l’opération, supportée par les indemnités des dommages de guerre : 58,7 millions de francs. Il a également accueilli des bains douches, une consultation pour nourrissons, un logement de concierge et 8 logements.
A Niort, l'hôpital dispose d'une structure unique en son genre, le CEAA, le centre expertise autisme adultes. Il propose de l'accueil pour les cas les plus sévères mais aussi du diagnostic.
Dominique Fiard, psychiatre, est responsable de l'Institut du handicap psychique dont fait partie le Centre expertise autisme adultes © Radio France - Noémie Guillotin
Niort, France
Les angles de murs des chambres sont recouverts de mousse pour éviter que les autistes ne se blessent. Dans les couloirs, des panneaux indiquent les placards où se trouvent les extincteurs "parce que parfois ils peuvent voler", raconte Dominique Fiard, psychiatre, responsable de l'Institut du handicap psychique dont fait partie le Centre expertise autisme adultes (CEAA), à Niort, dans les Deux-Sèvres.
Le CEAA peut faire de l'accueil au long court ou de jour et de l'accueil de situations complexes. "On tourne sur trois-quatre lits. Après ce sont des personnes qui sont là parce n'elles n'ont pas d'autres issues et peuvent poser des difficultés à leur famille ou aux soignants habituels", précise le spécialiste.
Pour Dominique Fiard, depuis 2003 et le rapport Chossy, la prise en charge de l'autisme "s'est bien améliorée. Il y a un énorme effort des instances depuis dix-douze ans avec plusieurs plans et un effort particulier pour les adultes. On pourrait imaginer que ce n'est jamais suffisant, on peut toujours faire mieux mais les progrès sont considérables".
Si la qualité de la prise en charge est plus satisfaisante, il y a quand même encore un manque de places estime de son côté le président de l'association Autisme Deux-Sèvres, Jean-Marie Baudouin. "Alors il y en a qui ont de la chance comme mon fils qui est à la maison pour l'autisme de Saint-Martin-lès-Melle. Il y a en général une voire deux MPA par département. Ce n'est pas forcément créer de nouvelles unités. Nous, on pense qu'on pourrait faire des extensions".
A Niort, le Centre expertise autisme adultes joue aussi un rôle unique dans le diagnostic. Les besoins sont importants. "On est sur 75.000 autistes adultes diagnostiqués en France. Il y en a cinq ou six fois plus qui ne sont pas diagnostiqués", précise Jean-Marie Baudouin. La liste d'attente au CEAA est longue. "On doit être à une centaine de personnes avec des délais qui sont trop longs. Ils peuvent aller au delà d'une année", indique Dominique Fiard avec tout de même des possibilités de répondre aux situations d'urgence.