Tribune. Depuis plus de six mois, nos associations participent à la concertation institutionnelle sur le revenu universel d’activité (RUA), qui a vocation à réformer le système des minima sociaux en France, jugé trop complexe, et à intégrer, en son sein, une dizaine de minima sociaux, dont l’allocation aux adultes handicapés (AAH).

Depuis plus de six mois, nous rappelons sans cesse, arguments à l’appui, que l’intégration de l’AAH dans le RUA va à l’encontre des droits des personnes en situation de handicap, et que nous refusons de voir bafouer ces droits fondamentaux. Mais dans les faits, les logiques comptables et de rationalisation des politiques publiques, qui prédominent dans notre pays, sont en train d’ériger une société où les spécificités du handicap sont peu prises en compte, voire ignorées, renforçant alors la mise à l’écart des personnes.

Depuis plus de six mois, nous expliquons que, comparée aux autres minima sociaux, l’AAH a une vocation spécifique : ce sont les conséquences des déficiences et incapacités de la personne qui fondent l’accès à cette allocation et pas sa situation de vulnérabilité sociale.

Depuis plus de six mois, nous entendons beaucoup parler de simplification, d’harmonisation, d’universalité, de solidarité, d’équité dans le cadre de la concertation autour de la réforme.

«Pauvres», «jeunes», «handicapés», «vieux», la réforme a vocation à s’adresser à ces millions de personnes. Pourtant, leurs parcours de vie sont différents et spécifiques. Mais elles sont trop souvent comparées dans une perspective de nivellement et d’opposition des catégories de bénéficiaires de minima sociaux pour faire le jeu de statistiques parfois orientées. Parmi elles, nous avons d’ailleurs entendu dire qu’il y aurait inévitablement des «perdants» suite à la réforme, nos interlocuteurs se gardent bien de les identifier.

Depuis plus de six mois, cette concertation n’est qu’un simple outil de la communication gouvernementale ayant pour seul objectif de nous «vendre» cette réforme.

Nos associations en ont assez. Assez de se faire enfermer dans des salles pour entendre des approximations et des propos politiques contradictoires. Assez de prendre la parole sans être écoutées. Assez de participer à une soi-disant concertation alors même que nos ministres semblent avoir déjà pris leurs arbitrages et s’engagent d’ores-et-déjà ouvertement vers des décisions qui ne respectent pas la majorité des voix exprimées. Rappelons que dans le cadre de la consultation citoyenne, 61% des votes sont défavorables à l’intégration de l’AAH dans le RUA. Les citoyens sont-ils écoutés ou bien juste embarqués dans un semblant de démocratie participative ?

Plus que jamais à l’écoute des personnes que nous défendons, nos associations refusent une réforme qui viendrait dégrader les droits des personnes handicapées en imposant une logique de gagnant/perdant.

Nos valeurs, nos expertises, les milliers de personnes que nous défendons, nous poussent à maintenir une position qui ne trouve aucun écho dans le cadre de cette concertation. Nous sommes opposés à l’intégration de l’allocation aux adultes handicapés dans le revenu universel d’activité.

Nous refusons d’être les témoins silencieux de la mort d’un droit acquis de longue date.

Signataires : Jean-Louis Garcia président de la Fédération Association pour adultes et jeunes handicapés (APAJH), Alain Rochon président d’APF France handicap, Marie-Jeanne Richard présidente de l’Unafam, Luc Gateau président de l’Unapei.

Les associations représentantes des personnes en situation de handicap