Des parents témoignent des limites du suivi à domicile par l'ABA
vendredi 22.01.2010, 05:06 - La Voix du Nord
En novembre 2008, le centre Albert-Camus ouvrait ses portes à Villeneuve-d'Ascq.
| • NOTRE ENQUÊTE LE RETOUR SUR LA PRISE EN CHARGE |
Dans
la prise en charge de l'autisme, Vinca Rivière a été pionnière en
France en promouvant la méthode ABA. Mais le centre Camus de
Villeneuve-d'Ascq ne dispose que de vingt places. Le suivi à domicile
offre une alternative, mais à quel coût et pour quels résultats ? Des
parents témoignent.
PAR ALICIA GAYDIER
metro@lavoixdunord.fr PHOTO ARCHIVES PATRICK JAMES
2 500 enfants sur liste d'attente et seulement 20 places au
centre Albert-Camus de Villeneuve-d'Ascq. Voilà le terrible ratio
auquel sont confrontés les parents d'enfants autistes. En 2004, la
psychologue Vinca Rivière crée une formation en « Analyse appliquée du
comportement » (ABA) à l'université de Lille III, première et seule du
genre en France. Et, en novembre 2008, ouvre le centre Camus. De ces
initiatives naissent beaucoup d'espoirs... parfois déçus.
C'est le cas pour la famille Turan. En 2006, Jacques Turan,
dont le fils Zacharie est autiste, s'inscrit au diplôme universitaire
dispensé par Vinca Rivière. Médecin, il réside en Franche-Comté avec sa
famille. Décision est prise de « tout quitter pour venir à Lille », où,
leur promet-on, Zacharie sera « prioritaire » à l'ouverture du centre.
En septembre 2007, la famille Turan s'installe à Lille.
Zacharie bénéficie d'une prise en charge à domicile par l'entremise de
l'association Pas à Pas, créée par Vinca Rivière. Mais, à l'ouverture
de Camus, Zacharie n'est pas pris. Commence alors un calvaire. M. et
Mme Turan dénoncent la valse des intervenants, en master et « sans
expérience » et l'absence d'amélioration durable. « Zacharie servait de
cobaye et nous, à payer des étudiants », s'insurge Jacques Turan. La
facture s'élève à 3 000 E par mois. « Nous croyons en l'efficacité de
l'ABA, mais nous critiquons le manque de sérieux de l'association Pas à
Pas », dit le papa de Zacharie. En mars dernier, les Turan apprennent
par lettre recommandée la fin de la prise en charge de Zacharie, alors
âgé de 8 ans. Cet automne, ils ont quitté Lille pour Paris, où leur
fils doit être admis dans une structure.
À Paris justement, une autre maman (qui souhaite garder
l'anonymat) témoigne du suivi de son fils. Elle aussi était prête à
venir à Villeneuve-d'Ascq, mais aucune place n'était disponible. « Des
psychologues envoyés par Vinca Rivière » se succèdent alors auprès de
son fils. « On n'avançait en rien, ils n'apportaient pas de
solutions. » Quand elle commence à émettre des doutes, Vinca Rivière
devient « injoignable ». Après coup, cette maman analyse : « J'ai fait
comme tout le monde, j'ai porté aux nues cette dame, j'ai cru qu'elle
pouvait m'aider...
Ce qui la choque : que les intervenants soient « en formation » et les tarifs « exorbitants ».
Sabine Remmerie vit à Roubaix et aurait souhaité que son fils
Marco soit pris à Camus. « On était sur liste d'attente. Mais, au bout
d'un moment, on a compris que ce n'était pas la peine. » Son fils est
alors suivi par une psychologue, au départ via Pas à Pas, puis en
libéral. À raison de 50 E de l'heure en moyenne, « un trait commun à
tous les parents est le surendettement », dénonce Sabine Remmerie.
Concernant l'association, cette maman note : « La couverture
médiatique a beaucoup servi la cause, mais a aussi créé beaucoup
d'espoirs. Or, ils ne peuvent pas satisfaire toutes les demandes. » La
solution, selon elle ? « Que d'autres universités proposent des
formations à l'ABA.