article publié dans la Tribune de Genève le 9 février 2011
09.02.2011
Un nouveau mécanisme dans la formation du cerveau
Une étude de l'Institut Scripps Research a dévoilé un mécanisme qui contrôle la formation du cerveau. Les résultats ont des implications pour la compréhension de nombreuses maladies comme certaines formes de retard mental, l’épilepsie, la schizophrénie ou l'autisme.
Les chercheurs du Scripps Institute ont découvert un nouveau mécanisme de migration des neurones. Mueller/Scripps
Publiée dans la revue Neuron, cette nouvelle étude se focalise sur une protéine appelée reelin, qui serait un acteur clé de la migration des cellules nerveuses vers le néocortex, la partie du cerveau régulant les fonctions supérieures comme le langage ou les perceptions sensorielles. Les chercheurs ont découvert que reelin affecte ce processus de migration indépendamment des cellules gliales, souvent impliquées dans l’orientation des mouvements neuronaux.
Une migration critique
Lorsque le cerveau se développe, les cellules nouvellement formées voyagent de leur lieu d’origine vers les différentes régions du cerveau. Une fois qu’elles atteignent leur destination, elles créent des liaisons entre elles pour former des circuits et des réseaux complexes responsables des diverses fonctions du cerveau. (Voir le numéro de Sciences et Avenir de février).
Des mutations de
reelin ont également été retrouvées chez des enfants humains souffrant
de microcéphalie, un cerveau trop petit. Bien que ces observations
indiquent que reelin doit jouer un rôle clé dans la formation du cerveau
proprement dit mais jusqu'à présent ce rôle n’était pas décrit.
A la découverte de la fonction de reelin
Depuis l'identification du gène reelin en 1995, les chercheurs ont découvert que la protéine correspondante est libérée par certaines cellules nerveuses et se lie aux récepteurs d'autres cellules nerveuses. Cette fixation déclenche alors une cascade de réactions chimiques, une voie de signalisation, dans la cellule nerveuse.
« Nous savions que reelin se lie à plusieurs récepteurs sur les cellules nerveuses et déclenche différentes voies de signalisation mais nous avons voulu savoir si voies régulent la mobilité des neurones » s’interroge Ulrich Mueller, auteur principal de l’étude.
Pour commencer à répondre à
ces questions, les scientifiques ont marqué les cellules nerveuses dans
le cerveau d'embryons de souris avec des colorants fluorescents et les
ont observé se déplacer en temps réel vers le néocortex du cerveau. Ils
se sont alors aperçus que chez les souris mutantes le déplacement des
cellules est bloqué.
Un mécanisme encore mal compris
Bien que le mécanisme par lequel reelin influe sur la migration n'est
pas totalement compris, les chercheurs ont pu montrer que reelin
contrôle les cadhérines de petites molécules qui servent de colle aux
cellules lorsqu’elles se déplacent. « Nous savons déjà que certaines
cadhérines sont impliquées dans les troubles autistiques » précise
Ulrich Mueller.
Des études complémentaires devraient permettre de trouver d’autres molécules cibles de reelin et d’identifier des mutations dans les gènes codant pour celles-ci. « Nous pourrions trouver d'autres gènes impliqués dans la schizophrénie et l'autisme » conclut le chercheur.