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"Au bonheur d'Elise"
1 juillet 2013

Autisme : réponse au Pr. Golse

 

Très cher Pr Golse,

J’ai lu avec une extrême attention l’article paru dans le journal Le Monde du 27 juin 2013, qui reprend votre lettre ouverte à Mme Touraine. Je l’ai lu avec  attention, et aussi, je dois le dire, avec une certaine stupeur.

Nous avons ensemble un certain passif, et je sais parfaitement à quoi m’en tenir en ce qui concerne vos positions. Je ne suis donc pas surpris par votre incroyable démagogie, qui consiste à tenter de nous faire croire que la liberté de choix des parents d’enfants autistes est menacée par le 3ème plan autisme. Que votre discipline s’en trouve elle-même condamnée. Et que tout cela va à l’encontre des recommandations de la HAS.

 

Je dois dire que vos circonvolutions rhétoriques, si elles ne manquent pas d’audace, constituent en tous cas un réel manque de respect pour les familles (dont je fais partie), et pour les associations qui portent leurs voix (dont je suis l’un des représentants).

En vertu de quoi, je souhaite ici vous répondre point par point, en vous citant :

«Je voulais vous dire, (…) à quel point,  avec une immense majorité de mes collègues pédopsychiatres, nous avons été scandalisés par le 3ème plan autisme ».

A la bonne heure ! Qu’est ce qui est scandaleux, au juste ? Que des avancées scientifiques et médicales traversent enfin nos frontières, malgré le mur psychanalytique érigé depuis tant d’années ? A quoi vous attendiez-vous, au juste ?

Pour rappel, le Code de la Santé Publique rappelle que : « Le médecin s’engage à assurer personnellement au patient, des soins consciencieux dévoués et fondés sur les données acquises de la science ».  Pourquoi l’autisme ferait-il exception à la règle ?

L’enfant  autiste n’a pas besoin de la psychanalyse pour « organiser sa représentation du monde », car l’autisme n’est pas la conséquence d’un supposé « vécu d’effondrement » ou « d’angoisse catastrophique », pour reprendre votre jargon.

« L’objectif principal de mon livre est précisément d’essayer d’apaiser les conflits et de plaider pour une prise en charge multidimensionnelle et intégrative des enfants autistes, du fait même de l’origine polyfactorielle de cette pathologie ».

Allons bon. Vous, apaiser les conflits ? On aura tout lu !

Qui dénigre depuis des années les méthodes éducatives et comportementales, et les associations de familles ? Qui tente de manipuler l’opinion publique, les médias et les politiques pour garder la mainmise sur la prise en charge de l’autisme ? Qui soulève le conflit ?

Votre manipulation ultime est d’avoir publié dans ce contexte difficile, un livre nommé « Mon combat pour des enfants autistes ». Quelle ironie. Quelle tromperie… Quel a été, concrètement, votre combat pour ces enfants ? La mise en place des pataugeoires ? L’isolement ? L’hospitalisation ? La séparation d’avec leurs mères, toxiques par nature ? Les méthodes archaïques, tel le Packing ?

Votre livre est un grand fourre-tout, qui appelle à une « convergence neuropsychanalytique » ( ?), et qui, une fois de plus, aborde les troubles de la communication de l’autisme dans une logique de dysfonctionnement mère-enfant.

Au cas où vous ne l’aurez pas compris, c’’est précisément ce genre de théories que les familles rejettent. Et étant donné qu’elles ne reposent sur rien de concret, il serait insupportable qu’elles continuent à avoir courent dans les hôpitaux français. A ce propos, je rappelle que ces théories franco-françaises sont la risée de la communauté scientifique nationale et internationale.

La pluridisciplinarité de la prise en charge de l’autisme peut et doit exister. En effet, les méthodes éducatives et comportementales disposent de plusieurs outils : l’ABA, bien sûr, mais aussi l’approche TEACCH, le PECS, et éventuellement l’orthophonie et la psychomotricité. Toutes ces approches peuvent être complémentaires. Entre elles, un point commun : elles font progresser les enfants et même les adultes autistes, et leur efficacité est mesurable, quantifiable, évaluable. Ce qui n’est pas le cas de la psychanalyse, qui n’a donc, encore une fois, rien à faire dans la thérapeutique de l’autisme.

« Il y a d’abord la liberté de choix des parents qui n’est plus respectée ».

Là, Pr Golse, à un mot près, nous pourrions être d’accord. Sauf que je dirais que « la liberté de choix des parents n’est pas ENCORE respectée ». Car aujourd’hui, la liberté de choix pour les parents est un véritable parcours du combattant.

Je ne compte plus les parents qui nous sollicitent parce que les CRA auxquels ils ont fait appel (ainsi que des CMP, CAMSP et autres) refusent de leur communiquer le diagnostic de leur enfant. Ou refusent de leur transmettre le dossier médical de leur enfant (dans l’illégalité la plus totale). Les cas de menaces, de pression et même de signalement abusif pour « carences éducatives » ou « défaut de soin » sont légion dès lors que les parents essaient de soustraire leur enfant aux prises en charge psychanalytiques et psychiatriques imposées par ces centres. De quelle liberté parlez-vous donc ?

Dans le cas de l’autisme, un autre facteur est à prendre en compte : l’ignorance dans laquelle les professionnels impliqués ont maintenus les parents. Car, pendant des dizaines d’années, les parents n’ont pas eu de choix, tout simplement parce que personne ne les ont informés de l’existence d’alternatives.

C’est grâce à la démocratisation d’internet, et grâce aux forums que les informations ont commencé à circuler sur ce qui se pratiquait avec un succès certain à l’étranger. Ce sont les parents, et les associations de parents (et notamment VAINCRE L’AUTISME), qui ont été les vecteurs de l’innovation. Ce sont eux, et non les pédopsychiatres français (qui pourtant, étaient évidement au courant de la façon dont étaient traités les autistes aux USA, ou en Suède !) qui ont mis en place les premières formations et prises en charge basées sur l’ABA. Il y aurait là de quoi s’interroger sur l’efficacité des CRA, et autres organismes spécialisés, à répondre à leur mission de soin. Moi, en tous cas, je m’interroge.  Car le temps perdu en institution à fait de milliers d’enfants autistes des polyhandicapés, dépendants et enfermés vivants, au sens propre comme au figuré, dans des institutions psychiatriques.

« Aujourd’hui, nous allons vers une impasse, car plus l’Etat se mêle de dicter aux professionnels leurs contenus d’action, plus la liberté de choix des parents se trouve rabotée. »

De quoi parlez-vous, Pr Golse ?

Le principal devoir de l’état est de faire respecter les droits de ses citoyens. Et donc, de veiller à ce que tous ces citoyens aient accès aux traitements les plus efficaces.

Et lorsque vous nous dites encore : « Pensez-vous vraiment que les cardiologues accepteraient que l’on vienne choisir à leur place le médicament de l’infarctus du myocarde ? ».

Non seulement, c’est hors sujet… Mais en plus, pensez-vous vraiment que les cardiologues continueraient à prescrire un médicament couteux, sans la moindre efficacité et potentiellement dangereux ? Croyez-vous qu’en pareil cas l’état ne devrait pas réagir ?

Voilà, votre métaphore a donné le ton, car c’est très exactement ce qu’est la psychanalyse dans le traitement de l’autisme : un outil coûteux, au mieux inadapté, au pire nocif, mais de toute façon inefficace.

Non, « le 3ème plan autisme ne va pas amputer un citoyen de sa liberté d’accès aux soins » comme vous essayez de nous le faire croire. Au contraire, il s’agit de protéger les enfants et les plus faibles de votre influence néfaste, qui nuit à leur progression, à leur autonomie et à la cohésion des familles.

Plus loin, vous évoquez « la créativité médicale », et vous vous interrogez : « Que nous restera-t-il à enseigner à nos étudiants ? »

Là, je vous l’avoue, je ne vous comprends pas. Quelle discipline médicale peut-elle se targuer de faire dans la créativité ? On parle de rigueur, d’application des données scientifiques, de talent, oui, voire même d’instinct. Mais de créativité, non. Vos patients ne sont pas vos cobayes, Pr Golse. Ni vos patients, ni leurs familles. La pédopsychiatrie, en tant que véritable médecine, existe en dehors de la psychanalyse. C’est d’ailleurs le cas dans tous les autres pays, qui ne sont pas, pour autant, totalitaires.

Pour conclure, je vais vous dire le fond de ma pensée : votre article achève de vous décrédibiliser.

En ce qui concerne l’autisme, votre discipline est à l’agonie. Vous vous débattez parce que vous ne supportez pas de ne pas avoir le dernier mot, et vous essayez de récupérer quelques miettes, parce que ces quelques miettes vous rapportent gros.

En tant que psychiatre, vous êtes médecin, et vous devez suivre les avancées de la Recherche et vous y conformer (code de déontologie oblige). De l’autre côté, en tant que psychanalyste, vous rejetez les données scientifiques dont vous disposez, vous campez sur vos théories anachroniques et sans aucun fondement. Hélas, visiblement, c’est le psychanalyste en vous qui prend le dessus sur le médecin.

Vous essayez de faire croire que vous vous battez contre de « dangereux comportementalistes ». Mais vous le savez, il n’y a pas de comportementaliste. Il n’y a que des parents. Des parents qui souhaitent le meilleur pour leurs enfants. Ces parents dont vous dites défendre « la liberté ».

Ce sont eux précisément qui s’élèvent aujourd’hui par milliers pour faire valoir le droit de leurs enfants à des traitements conformes aux données de la science. En tant que citoyens, usagers de la santé publique, nous avons ce droit de réclamer le meilleur pour nous et pour nos enfants.

Moi, Sajidi, je suis un usager, et je représente des usagers. J’ai des droits. J’exige qu’ils soient respectés.

La justice se doit donc de faire cesser l’imposture et l’escroquerie dont sont victimes les autistes de France. Et vous vous rendez coupable de vouloir perpétuer cette situation.

La justice est en marche, Pr Golse. Le débat sur la psychanalyse dans le traitement de l’autisme est déplacé. Clôt. Terminé. Maintenant, il faut vous y faire.

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