article publié dans la Voix du Nord le 23 janvier 2012
lundi 23.01.2012, 05:23- La Voix du Nord
Jeudi, la documentariste Sophie Robert saura si elle peut continuer à diffuser, en l'état, le film qu'elle a consacré à la prise en charge de l'autisme par la psychanalyse. Trois psychanalystes de renom l'accusent d'avoir galvaudé leurs propos. Ils exigent leur retrait du film. En filigrane, se dessine une opposition sur la prise en charge de l'autisme, mettant face à face défenseurs de la psychanalyse et avocats des méthodes dites cognitivo- comportementales. Des enjeux nationaux, voire internationaux. En France, l'autisme a été déclaré Grande cause nationale 2012. PAR LAKHDAR BELAÏD
metro@lavoixdunord.fr PHOTO ARCHIVES PATRICK JAMES
> Septembre 2011 La réalisatrice lilloise Sophie Robert diffuse, notamment sur internet, son premier documentaire titré Le Mur, ou la psychanalyse à l'épreuve de l'autisme. La fiche explicative du film commente : « Sophie Robert a réalisé une longue enquête auprès d'une trentaine de pédopsychiatres-psychanalystes, dont quelques-uns parmi les plus grands spécialistes français de l'autisme, afin de démontrer par l'absurde - de la bouche même des psychanalystes - l'inefficacité de la prise en charge psychanalytique de l'autisme. » Sophie Robert, 44 ans, se décrit elle-même comme « anthropologue de la psychanalyse ».
> Octobre 2011 Trois psychanalystes de renom - Esthela Solano-Suarez, Éric Laurent et Alexandre Stevens - demandent par voie de justice d'obtenir des rushs du film. La décision judiciaire leur est favorable, mais Sophie Robert conserve ses images, au nom du « secret des sources ».
> Novembre 2011 Devant le juge des référés de Lille, Sophie Robert et son avocat Benoît Titran tentent d'obtenir l'annulation de la décision accordant aux plaignants l'accès aux rushs. « Il n'a jamais été question de récupérer toutes les images, explique Me Christian Charrière-Bournazel, l'avocat des psychanalystes. L'une a été interrogée pendant trois heures, un autre durant deux heures et le troisième une heure. Leurs propos ont été rendus incompréhensibles. Des questions ont été plaquées après coup sur leurs déclarations . » La justice confirme l'accès aux rushs des plaignants et dénie à Sophie Robert le statut de journaliste (notre édition du 30 novembre).
> Décembre 2011 Après avoir visionné les rushs et les avoir croisés avec la version disponible du Mur, Christian Charrière-Bournazel maintient la demande des plaignants. Libre à Sophie Robert de critiquer la psychanalyse et de réaliser des films, mais sans les propos de ses clients. La salle d'audience est pleine à craquer. Des parents d'autistes, des tenants des méthodes dites cognitivo-comportementales sont venus soutenir Sophie Robert (notre édition du 9 décembre). La fille de l'emblématique psychanalyste Jacques Lacan a fait le déplacement. Tout au long de l'audience, la présidente Elizabeth Polle rappelle pourtant : « Il ne s'agit pas du procès de la prise en charge de l'autisme. »
> Jeudi 26 janvier 2012 La chambre civile du tribunal de Lille rendra sa décision. Sophie Robert sera, elle, sur le départ. Son film est présenté vendredi à une conférence internationale sur l'autisme, organisée à Philadelphie, aux États-Unis, par l'association internationale ABAI, promoteur des méthodes cognitivo-comportementales. •