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"Au bonheur d'Elise"
13 juin 2017

Maxime Gillio, écrivain et papa : l’hommage cinglant à sa fille autiste

Par Morgane Garnier
Publié le 12/06/2017 à 15:57
Maxime Gillio et sa fille Gabrielle

Dans son nouveau livre baptisé "Ma fille voulait mettre son doigt dans le nez des autres", l’auteur de polars change de registre pour livrer un constat alarmant sur l’autisme en France, à travers un témoignage poignant et sans langue de bois.

Tout est parti d’une page Facebook créée il y a trois ans. Maxime Gillio, romancier dunkerquois, y livrait ses états d’âme et racontait son quotidien avec une enfant autiste d’une façon assez singulière : à la manière d’un journal intime dans lequel il fait part de ses réflexions, de ses doutes et de ses moments de joie, le père s’adresse directement à sa fille, Gabrielle. Un moyen de lui témoigner son amour, mais aussi de tenter de répondre à une question plus profonde : comment gérer la différence de son enfant et la faire comprendre aux autres ? Cette page est devenue un livre le 22 mars dernier.

Handicap invisible, frustration perceptible

Si le livre n’offre pas de véritable réponse à cette interrogation, il “donne des clés” pour nous aider à appréhender la vie d’une famille avec un enfant autiste, un handicap qui touche quelque 650 000 personnes en France. Car l’auteur insiste : “Ce qui a décidé mon éditrice et moi à publier ce livre, c’est l’ampleur qu’a pris cette page. Je me suis rendu compte que ce que je racontais était vécu par des milliers d’autres personnes. Le seul but de ce livre, c’est de faire partager une relation d’un parent avec son enfant, il n’y a pas de démarche militante. C’est un témoignage.

Et ce que l’on apprécie particulièrement dans cet ouvrage qui retrace les grandes étapes de l’évolution de Gabrielle notamment au travers d’anecdotes marquantes, c’est le franc-parler de son père qui n’a pas peur d’avouer ses faiblesses, ses imperfections et son ras-le-bol du handicap : “Je ne pense pas que ce soit un livre dans lequel je manie la langue de bois. Il y a des moments où je suis en colère, je pense que c’est important de les partager.” Un récit réaliste, parfois cynique pour mieux mettre en lumière l’une des choses les plus difficiles à gérer pour les parents d’enfants autistes : le regard des autres. “J’insiste beaucoup là-dessus parce que l’autisme est un handicap dit invisible et à ce titre, on se heurte à l’incompréhension et à la méconnaissance des gens.

couverture livre Ma fille voulait mettre son doigt dans le nez des autres de Maxime Gillio

Handicap et scolarisation : une prise en charge inadaptée

D’autant plus dans le système éducatif. D’ailleurs, cet ancien professeur de français n’hésite pas à parler de “trahison” de la part du corps enseignant à plusieurs reprises dans son livre : “Il y a un gros problème de méconnaissance complète, d’altération de la vision de l’autisme, explique-t-il. Dans l’éducation nationale, le problème vient du fait que l’on refuse de voir la réalité en face. Face à une situation problématique d’un enfant, au lieu de chercher à la comprendre, la régler, à trouver des solutions, on la rejette. Les personnes avec des responsabilités comme les directeurs, par exemple, achètent la paix sociale dans leur établissement en cloisonnant, cloîtrant. L’éducation nationale ne favorise pas forcément l’intégration des enfants différents.

Et Maxime Gillio sait de quoi il parle. Le papa a bataillé pour scolariser sa fille dans des classes ordinaires – un exploit, quand on sait que 80% des enfants autistes ne sont pas inscrits à l’école. Mais avant ça, Gabrielle est passée par les classes ULIS (Unités Localisées pour l’Inclusion Scolaire), des dispositifs qui permettent la scolarisation des enfants présentant tous types de troubles dans des classes spéciales en favorisant également des temps d’inclusion au sein des classes ordinaires. A la rentrée 2015, on en comptait 3329 en France. Un système qui n’a fait que renforcer le sentiment d’exclusion de Gabrielle, et qui présente des lacunes selon son père : “Déjà, il devrait y avoir davantage de structures et de places ! Et depuis deux ans, il n’y a plus de spécificités dans les ULIS. Avant, il y avait des ULIS spéciales pour les malvoyants, pour les trisomiques, etc. Maintenant, les enseignants se retrouvent avec des groupes d’une douzaine d’enfants où il y a un dysorthographique, un malentendant et un autiste. On va pouvoir retrouver des profils complètement différents, une hétérogénéité du handicap qui, forcément, nuit à la prise en charge.

Etre exigeant pour l’avenir

Si le sujet de l’école tient tant à cœur à l’écrivain, c’est parce qu’il doit faire face à une difficulté quotidienne que tous les parents d’enfants souffrant d’un handicap connaissent et que l’on retrouve dans chacun des chapitres de son livre : l’angoisse liée au caractère imprévisible de ce dernier et à un futur incertain. Alors le papa lutte pour que sa fille ait le plus de clés en main possible pour assurer son avenir : “Je pense que l’exigence des parents est très importante. Vous pouvez discuter avec des centaines de parents d’enfants handicapés, et il y en aura toujours qui vous diront : ‘Avec notre enfant, on a réussi à aller au-delà de ce que les médecins nous avaient annoncé pour lui’. On n’est pas des super-héros, on est juste exigeants pour le futur. Ce serait tellement facile de se dire : ‘On nous a dit que Gabrielle était handicapée à hauteur de 80%, alors on ne fait pas d’efforts, on s’en contente.’ Mais ce n’est pas du tout ça le but.

Un témoignage humble qui offre une véritable leçon de vie à tous les parents, que leurs enfants soient touchés par le handicap ou non.

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