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"Au bonheur d'Elise"
sophie robert
29 décembre 2012

Bilan de l'année de l'autisme : Le changement, c'est ailleurs.


Et voila, c’est la fin de l’année de l’autisme… Quel bilan en tirer ?

C’est vrai qu’on a parlé d’autisme… Du coup, peut-être que les personnes non concernées pensent que enfin, la France est décidée à rattraper son retard, qu’enfin, les droits des enfants autistes à la scolarisation, à l’éducation seront respectés. Qu’enfin, les prises en charge adaptées seront accessibles aux enfants et adultes, que des aides à l’insertion professionnelle se développeront.

Et bien non, désolée… Le phénomène « Grande Cause Nationale » n’a amené aucun changement pour les familles et personnes concernées, comme le souligne Autisme France. Ce qui aurait pu amener un changement en revanche, c’est la publication tant attendue des recommandations de bonnes pratiques par la Haute Autorité de Santé (HAS) au mois de mars. Mais bon, le gouvernement semble pour l’instant les ignorer…

La France prend un an de retard par année….

 

Pour avoir l’avis d’une personne étrangère au pays, j’ai voulu savoir ce qu’en pensait Isabelle Resplendino, une maman (française) vivant en Belgique depuis 15 ans, et engagée pour l’inclusion des personnes autistes. Je l’ai connue l’année dernière au moment de la diffusion du film « Le mur ; la psychanalyse à l’épreuve de l’autisme », qui est très probablement à l’origine du fait que l’autisme ait été grande cause nationale 2012.

Quelque part, Isabelle est une maman « chanceuse », puisqu’elle a épousé un Belge : son enfant, élevé en Belgique, a pu progresser et grandir parmi les autres, ce qui n’aurait probablement jamais pu se faire en France. C’est cette progression, la façon dont les personnes autistes sont considérées de l’autre coté de la frontière, qui l’a motivée à s’impliquer dans l’autisme dans le but d’essayer de changer en profondeur le système global de prise en charge en France.

En cette fin d’année de l’autisme, elle tire la sonnette d’alarme : le nombre de parents français téléphonant aux associations belges pour scolariser leur enfant n’a jamais été aussi élevé qu’auparavant, l’exil Belge continue plus que jamais… Pourquoi cela ?

Les impôts de G. Depardieu aideront à financer la scolarisation des enfants français en Belgique.

 

Quel est le parcours de ton fils, Wolfgang ?

Wolfgang a eu un diagnostic de trouble autistique (Syndrome d’Asperger) à l’age de 4 ans, par l’hôpital d’Anvers.

À cette époque,  on me donne le choix : ou l’enseignement spécialisé, ou l’hôpital de jour, mais le mieux est dans la langue maternelle (bien qu’il ne soit pratiquement pas verbal). Nous sommes en Flandre. Nous vendons notre maison pour en racheter une autre en Wallonie, dans le Hainaut, dense en enseignement spécialisé. Entre-temps, nous le déscolarisons : il ne supporte plus l’école ordinaire.

Il faut savoir qu’en Belgique, l’enseignement spécialisé dépend de l’éducation nationale : nous ne sommes pas dans le domaine du soin, mais bien dans celui de l’éducation. Les personnels paramédicaux qui sont affectés à l’enseignement dépendent de l’Education nationale.

Wolfgang fait sa rentrée à l’école spécialisée, en maternelle, en janvier 2006, chez une institutrice qui a suivi une brève formation autisme en cours de carrière avec le professeur Ghislain Magerotte.

À Pâques de la même année, il parle couramment, il mange des aliments solides et est propre de jour comme de nuit : nous avons utilisé des renforçateurs (système de croix : au bout de 10 croix un Pokemon).

Wolfgang et Isabelle Resplendino

 

Il continue à faire des progrès. À ma demande, le centre PMS (psycho-médico-social) dont dépend l’école vient le réévaluer : il n’a plus de déficience intellectuelle  il doit changer d’école, celle-là ne s’occupant que d’enfants avec déficience intellectuelle  En septembre 2008, il va dans une autre école, toujours spécialisée, mais qui s’occupe aussi en charge des enfants sans déficience (troubles d’apprentissage et troubles du comportement). Un an plus tard, il intègre l’école ordinaire dans une classe issue des expériences du scientifique Philippe Tremblay (un groupe d’enfants à besoins spécifiques dans une classe ordinaire avec deux enseignants, dont l’un est spécialisé). Sa moyenne oscille entre 90 et 95 %, il est le meilleur élève de l’école.

Aujourd’hui, il est en 5e primaire, nous avons 6 années de primaire en Belgique.

 

De quelle manière t’impliques tu aujourd’hui pour faire évoluer la prise en charge des personnes autistes ?

Dès les premiers progrès de Wolfgang, j’ai eu l’idée, connaissant la situation désastreuse en France, de travailler à un projet politique de scolarisation des enfants à besoins spécifiques. Je me suis aperçue que l’engagement politique n’était pas suffisant, c’est ce qui m’a conduit à venir à l’associatif. Ce n’est pas mon métier (je suis consultante en entreprise par ailleurs), c’est du bénévolat.

Je suis membre et/ou responsable de plusieurs associations (voir leurs références en fin d’article), que je représente dans des instances officielles : j’ai été, entre autres, nommée par la Ministre et le gouvernement de la fédération Wallonie-Bruxelles au Conseil Supérieur de l’Enseignement Spécialisé pour y représenter les fédérations des associations de parents d’élèves et les principales associations du handicap.

Je suis pour les associations et les officiels de Belgique et de France une interlocutrice reconnue pour les Français de Belgique, connaissant bien les deux systèmes.

 

Quelles sont les grandes différences entre la Belgique et la France au niveau prise en charge des enfants autistes, pourquoi les enfants et adultes  autistes français vont en Belgique ?

La grande différence de prise en charge de l’autisme entre la Belgique et la France réside surtout dans le scolaire : nous avons les classes à pédagogie adaptée TEACCH, que Ghislain Magerotte a installé dans l’enseignement spécialisé après être allé les chercher avec son équipe aux USA, en Caroline du Nord (projet Caroline).

Nous avons aussi beaucoup d’enfants qui, sans être dans des classes TEACCH, suivent un programme d’inspiration TCC individualisé.

La scolarisation des enfants handicapés (autisme, polyhandicap, déficiences variées) est la raison de l’hébergement des enfants français en Belgique.

 

Si proche, si loin….

 

Pour les adultes, c’est le manque de structures en France qui pousse à cet exil, les réglementations étant moins strictes : les instituts hébergeurs ne sont pas agréés, mais ont reçu une simple autorisation de prise en charge ; c’est donc moins coûteux à court terme. Mais en termes de perte d’emplois et frais de déplacement, évidemment à la longue ça revient plus cher, ne parlons pas des enfants qui sont hébergés pour être simplement scolarisés !

 

Tu remarques des hausses de demandes des parents qui veulent mettre leur enfant en Belgique, à quoi est-ce du, selon toi ?

Pour moi, l’augmentation des demandes des parents français est due à ce que les parents ont beaucoup espéré des recommandations de la HAS, mais constatent que le gouvernement ne fait rien pour les faire appliquer, que le discours officiel des ministres concernés ne rejette pas du tout, bien au contraire, les approches psychanalytiques, et que les problèmes de scolarité continuent de plus belle…

 

Quel est ton bilan de l’autisme cette année ?

Mon bilan : on s’est fichus de nous.

J’ai assisté à un colloque sur l’autisme organisé par le sénat le 06 décembre.

On nous a annoncé comme une fleur qu’on sortirait les enfants de l’hôpital psychiatrique pour les mettre en IME… Et la scolarisation ? Rien.

La ministre Mme Carlotti a dit qu’elle allait faire pratiquer des études sur l’efficacité de toutes les thérapies sans exclusion et que le gouvernement attribuerait les fonds publics en fonction du résultat. Or ces études ont déjà été faites par le passé, et conclu à l’inefficacité de la prise en charge psychanalytique dans le domaine de l’autisme. De plus, des recommandations de bonnes pratiques viennent d’être publiées par la HAS, donc je ne vois pas l’intérêt de cette étude.

Je crains qu’on nous sorte alors à l’issue de cette étude probablement franco-française que la psychanalyse, mélangée aux autres thérapies, c’est bien, et qu’il faut continuer avec . Or, pour l’avoir constaté sur plusieurs enfants, je peux assurer que la psychanalyse sape le travail éducatif : en effet, l’analyse se focalise sur les comportements inadéquats de l’enfant en y accordant de la valeur, ce qui fait que ces comportements sont renforcés. De plus, relever et commenter des heures le moindre fait et geste, même le plus anodin de l’enfant et n’en rien faire d’éducatif, je ne vois pas l’intérêt, à part jeter l’argent des contribuables par la fenêtre et gaspiller le temps de l’enfant, du personnel et de la famille. Soyons sérieux une minute : partir du postulat que l’enfant est VOLONTAIREMENT autiste, que ce soit conscient ou non, que ce soit la faute de la mère (en off) ou bien : « non on ne dit plus ça » (en public) c’est déjà baser toute sa « thérapie » sur du faux…

 

Comment vois-tu le futur, en France ? 

Je le vois très mal. Les associations d’usagers ont été conviées deux heures par mois en réunion de concertation pour le prochain plan autisme qui sera présenté en janvier. Aucun travail sérieux ne peut y être effectué, ce sont les groupes de travail qui présentent leurs conclusions : les corrections à apporter sont donc à la marge : une virgule par ci, un mot par là… Les associations n’étaient pas dans les groupes de travail. Un proverbe qui est parfois attribué à Gandhi, parfois à un anonyme d’Afrique du Nord, dit cela « Ce que tu fais pour moi, si tu le fais sans moi, tu le fais contre moi ». Ce plan autisme est contre les personnes avec autisme.

Quant à l’inclusion scolaire, j’ai déjà répondu plus haut : ce qui est prévu, ce sont les IME, pas l’école pour nos enfants.

 

La France, bien bas….

 

 

Selon toi, comment faudrait-il faire pour que les choses évoluent ?

Pour que les choses évoluent, je pense que les parents devraient systématiquement faire un recours contre l’État pour défaut de scolarisation. Cela prendra du temps, mais à force l’Etat devra céder.

Je pense aussi que leur pouvoir réside dans leur bulletin de vote, et clairement ils devront exiger aux prochaines échéances d’avoir un programme digne de ce nom pour l’autisme, et voter en masse pour la, le ou les candidat(e)s qui le porteraient.

Sans cela, ils devraient glisser un bulletin où il y aurait écrit dans l’urne « AUTISME », d’autant plus que le compte blanc devrait être comptabilisé. À défaut, les dépouilleurs feront remonter cette action aux sièges de leurs partis respectifs, et cela en fera réfléchir plus d’un. Ceux qui nous gouvernent ne sont que nos employés, mais nous n’avons le pouvoir de les embaucher ou de les licencier que tous les 5 ans : utilisons bien ce pouvoir.

 

 

Isabelle Mostien-Resplendino

 

- Administratrice de l’Association des Parents pour l’Épanouissement des Personnes avec Autisme

www.ulg.ac.be/apepa – www.participate-autisme.be

 

- Représentante de la Concertation des 4 associations :

AFrAHM, (Association Francophone d’Aide aux Handicapés Mentaux)

APEM-T21, (Association de Personnes porteuses d’une Trisomie 21, de leurs parents et des professionnels qui les entourent)

APEPA, (Association des Parents pour l’Épanouissement des Personnes avec Autisme)

AP³ (Association de Parents et de Professionnels autour de la Personne Polyhandicapée)

 

- Représentante de la Fédération des Associations de Parents de l’Enseignement Obligatoire (plateforme commune avec l’UFAPEC, Union francophone des Associations de Parents de l’Enseignement Catholique)

www.fapeo.be – www.ufapec.be

 

- Membre du Conseil Supérieur de l’Enseignement Spécialisé

www.enseignement.be/index.php?page=24406

 

- Animatrice de la Commission Intégration de la Ligue des Droits de l’Enfant

www.ligue-enfants.be

 

- Ligue des Droits des Personnes Handicapées

www.ldph.be

 

- Collectif d’associations « Grandir Ensemble »

www.asbl-grandir-ensemble.net

 

- Ensemble pour une Vie Autonome

www.eva-bap.be

 

- Réseau francophone des acteurs du handicap Synergie-La Maison de l’Autonomie

www.lamaisondelautonomie.com

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5 décembre 2012

Autisme en France (2/3) : l'échec du gouvernement français (Autism Rights Watch)

article publié sur le site de Autism Rights Watch

 

Nous vous proposons ici le deuxième volet de notre analyse sur la situation de l’autisme en France. Après le premier volet sur le packing, nous nous concentrons cette fois sur le volet politique.

Nous faisons le bilan mitigé d’une année symbolique où l’autisme a été désigné Grande Cause Nationale par le Gouvernement français et a connu la multiplication des rapports : rapport Létard en janvier, recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) en mars, avis du Conseil Economique, Social et Environnemental en octobre.

Au final, nous observons surtout une frustration grandissante entre les professionnels, l’Etat et les associations, avec une cristallisation autour du plan autisme III.

La politique publique de l’autisme en France apparaît malmenée avec un gouvernement sous influence, incapable de prendre les mesures nécessaires pour mettre la France en conformité avec les prescriptions du Conseil de l’Europe.


Introduction : La ségrégation persiste en France

L’autisme reste l’objet d’un combat incessant entre, d’un coté, les personnes autistes, leurs parents, les associations d’usagers, et, de l’autre, le gouvernement Français, certaines associations de professionnels psychanalystes et psychiatres, ainsi que les associations gestionnaires d’institutions.

Dès 2004, une résolution du Conseil des Ministres du Conseil de l’Europe été rendue contre la France pour sa ségrégation des enfants autistes, suite à une réclamation collective d’Autisme Europe. Depuis, plusieurs résolutions sur l’autisme ont été émises par le Conseil de l’Europe (2007 et 2009).

La France n’a jamais changé significativement ses pratiques malgré deux « plan autisme ». Elle continue d’organiser la ségrégation des enfants autistes. Elle dispose toujours d’un système médical et médico-social (Hôpitaux de Jour, IME) séparé qui n’inclut pas les enfants dans une scolarité ordinaire. Au contraire, elle emploie toujours des méthodes psychanalytiques et des pratiques inadmissibles comme le Packing. Ce système produit des adultes non-autonomes et incapables de s’insérer dans la société. De plus, les parents d’enfants scolarisés se plaignent de devoir effectuer un parcours du combattant, semé d’embûches. Nombre d’enfants restent non scolarisés. Ceux qui le sont, ne sont scolarisés que quelques heures par semaines, parfois avec des Auxiliaires de Vie Scolaire partagées.

 

La Grand Cause utilisée pour faire oublier « Le Mur » et l’échec du plan autisme II

A l’automne 2011, la sortie du documentaire « Le Mur ou la psychanalyse à l’épreuve de l’Autisme » de Sophie Robert, en lien avec Autistes Sans Frontières, met le feu aux poudres.

Il montre la poursuite en France de l’utilisation de la psychanalyse dans le traitement de l’autisme. En réponse, à la procédure judiciaire intentée par trois psychanalystes interviewés, une campagne de parents et de personnes autistes se met en place pour soutenir Sophie Robert et aboutit à la création du « Collectif Soutenons Le Mur ».

L’autisme s’embrase alors d’autant plus que de nombreux responsables associatifs constatent l’échec du plan autisme II 2008-2010.

Souhaitant probablement éteindre l’incendie ou donner le change, le Premier Ministre François Fillon annonce le 10 décembre 2011 à l’Assemblée Nationale l’octroi du label « Grande Cause Nationale 2012 » à l’autisme. Certaines fédérations et associations françaises, regroupées autour du label « Ensemble pour l’autisme » organisent alors des manifestations, ainsi qu’une campagne de sensibilisation, avec le soutien de l’Etat.

Le 12 janvier 2012, la sénatrice Valérie Létard remet son rapport d’évaluation du plan autisme II 2008-2010, à l’occasion des premières journées parlementaires sur l’autisme (Le rapport Létard est disponible ici). Le Quotidien du Médecin considère le bilan du second plan autisme comme « en demi-teinte » et note que « sur les 30 mesures du plan autisme 2008-2010, beaucoup n’auront été que très partiellement engagées ». Pour 20 minutes, le rapport « pointe le manque de places et un «retard important» dans la mise en place de méthodes adaptées ». L’article donne la parole à Valérie Létard qui observe que « l’opposition entre des conceptions de nature essentiellement psychanalytique, portées par une large proportion de psychiatres, et la demande pressante exprimée par les associations de familles, d’un recours aux approches éducatives et thérapeutiques» n’est pas encore surmontée ».

Le 20 janvier 2012, le Député UMP Daniel Fasquelle dépose une « proposition de loi visant l’arrêt des pratiques psychanalytiques dans l’accompagnement des personnes autistes, la généralisation des méthodes éducatives et comportementales, et la réaffectation des financements existants à ces méthodes ». L’UNAPEI exige son retrait immédiat. Europe Ecologie Les Verts s’y oppose. L’ANCRA « s’inquiète » de la proposition de loi Fasquelle.

Le 26 janvier 2012, le Tribunal de Grande Instance de Lille condamne Sophie Robert et interdit le documentaire (toujours interdit à ce jour, et sans date de procès en appel connue). Le jour même, une conférence de presse est organisée à New York en signe de défiance. Une version modifiée du documentaire est présentée au congrès de l’ABAI à Philadelphie le lendemain. Autism Rights Watch est alors créée par Alex Plank et David Heurtevent pour continuer la défense des droits et l’inclusion des personnes avec autisme à travers le monde.

Le 9 février, le Premier Ministre François Fillon réunit les représentants du mouvement “Ensemble pour l’autisme” et lance officiellement l’année « Autisme Grande Cause Nationale 2012 ». A cette occasion il prononce un discours devant la presse. Un nouveau plan autisme III est annoncé, ainsi que la réactivation du Conseil National de l’Autisme.

 

Les vives tensions autour des recommandations de la HAS

Le 13 février 2012, le quotidien Libération fuite une version de travail des recommandations de la Haute Autorité de Santé sur l’autisme, déclenchant aussitôt une fureur générale. Libération écrit : « L’air de rien, c’est une véritable bombe clinique. La plus haute instance sanitaire française ferme la porte à la psychanalyse dans la prise en charge de l’autisme ». L’article déclenche aussitôt une mobilisation générale des professionnels de la pédopsychiatrie universitaire et de la psychanalyse. Le 28 février, le député Daniel Fasquelle fait état de pressions sur la HAS. Le 4 mars, l’Ecole de la Cause Freudienne organise une conférence au Lutétia, relayée par le site « la règle du jeu » de Bernard Henri Levy. Jacques Alain Miller y évoque « une atmosphère de « croisade » et de « chasse aux sorcières » ».

La HAS rend ses recommandations sur l’autisme le 8 mars 2012. Suite aux pressions, elle revient quelque peu sur sa version de travail. Elle s’abstient sur les interventions psychanalytiques ou de psychothérapie institutionnelle, et s’oppose formellement au packing, sauf dans le cadre de programmes de recherche. La HAS met en avant la mise en place du projet individuel de l’enfant et recommande les méthodes comportementales et éducatives (ABA, TEAACH, PECS, etc.).

Pourtant, certaines organisations professionnelles de la psychiatrie et de la psychanalyse promettent aussitôt de lutter contre la mise en place des recommandations. Dès le 18 mars, Hervé Bokobza, psychiatre et fondateur du Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire prévenait dans l’Express : “les psychanalystes vont entrer en résistance“.

En mai, l’Association Lacanienne Internationale exige le retrait des recommandations de la Haute Autorité de Santé, et essuie une fin de  non recevoir.

Les élections présidentielles, puis législatives, et la mise en place du gouvernement conduisent à une période de calme pendant l’été.

Courant août, ARW attire l’attention de la Ministre de  la Santé sur un cas de maltraitance institutionnelle supposée, sans résultat. La proposition faite à une conseillère de François Hollande de  la rencontrer pour discuter de la situation de l’autisme et lui remettre la pétition de 10 000 signatures lancée par ARW en janvier reste également sans réponse.

En revanche, le Dr. Paul Matcho, psychiatre des hôpitaux et psychanalyste (Collectif des 39) est reçu le 13 septembre  au Ministère de la Santé par Laurent Chambaud, coordonnateur du pôle “Santé publique et sécurité sanitaire” au cabinet de la Ministre Marisol Touraine. Il lui rappelle leur opposition aux recommandations.

 

Un avis du CESE partial

Mi-septembre, le KOllectif du 7 janvier jette un doute sur la volonté réelle des professionnels d’appliquer les recommandations de la HAS. Franck Ramus, directeur de  recherche au CNRS, observe la sortie d’une  5ème édition de la Classification française des troubles mentaux de l’enfant et de l’adolescent (CFTMEA) et pose ouvertement la question : « Peut-il y avoir une exception française en médecine ? » Le KOllectif du 7 janvier publie également une liste noire des formations sur l’autisme prévues en 2012 et 2013. On y observe que près des deux tiers des formations sont soit non conformes, soit partiellement conformes aux recommandations de la HAS.

En parallèle, Autism Rights Watch observe que l’Association Nationale des Centres Ressource Autisme (ANCRA) invite à Caen Pierre Delion, le promoteur du packing, ainsi que Christel Prado, rapporteur du CESE, et présidente de l’UNAPEI. ARW décide donc manifester à Caen le 29 septembre 2012 pour dénoncer ces invitations, la politique du gouvernement et les conflits d’intérêts. Le 3 octobre 2012, ARW obtient également l’annulation d’une action de formation sur le packing à l’université de Toulouse, déclenchant des injures de la part du docteur Alain Gillis, du professeur Pierre Delion et du Collectif des 39.

Le 6 et 7 octobre 2012, soit quelques jours avant la sortie de  l’avis du Conseil Economique Social et Environnemental (CESE), l’Ecole de la Cause Freudienne se réunit en congrès à Paris sur la « politique de la psychanalyse », rebaptisé journées « autisme et psychanalyse ». Au préalable, ils expédient un livre « Autisme ; nouveaux spectres ; nouveaux marchés » aux parlementaires, comme en atteste une lettre du député PS Gwendal Rouillard.

Ce même jour, les associations apprennent par voie de presse que le cabinet de Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès du ministère de la Santé, en charge des Personnes handicapées a annoncé « lors d’une rencontre de presse » que « le nouveau plan Autisme ne devrait pas voir le jour avant le début de l’année prochaine ». Marie-Arlette Carlotti confirme ce report et appelle à la concertation le 9 octobre devant le CESE.

Le 9 octobre 2012, le Conseil Economique Social et Environnemental adopte à l’unanimité un avis sur l’autisme : « l’approfondissement et la large diffusion des connaissances est une exigence première qui suppose de former les acteurs, de financer la recherche, de collecter des données relatives au nombre et aux besoins des personnes autistes ».

En réalité, cet avis est inutile, puisqu’il refuse de remplir sa mission d’évaluation du coût économique et social de l’autisme. Le rapporteur indique être dans l’incapacité de chiffrer le nombre de personnes autistes et le coût de l’autisme. En réalité, l’avis est entaché d’un profond conflit d’intérêt du fait du rôle direct de Christel Prado, présidente de l’UNAPEI, dans la gestion des institutions pour personnes handicapées. Pourtant, de nombreux orateurs saluent le fait que cet avis évite toute polémique.

En réaction, les députés PS Gwendal Rouillard et UMP Daniel Fasquelle expédient une lettre à leurs collègues indiquant : « Nous allons présenter une proposition de résolution sur les pratiques psychanalytiques en matière d’autisme et nous allons saisir les autorités compétentes (Inspection Générale des Finances, Cour des Comptes,…) sur le coût et le financement de l’autisme en France ». Ils mettent en avant les pressions : « Ces pratiques d’inspiration psychanalytique perdurent grâce à une forte mobilisation d’associations professionnelles, au premier lieu desquelles l’Ecole de la Cause Freudienne, dont l’envoi de ce livre à l’ensemble des parlementaires n’est qu’une manifestation parmi d’autres. »

Un malaise est perceptible dans la presse qui publie très peu sur le sujet. On observe également une passe d’armes sur la réalité de l’absence de chiffrage entre Danièle Langloys, Présidente d’Autisme France et Christel Prado, Présidente de l’UNAPEI.


Du blocage du Plan Autisme III aux huées

Le 15 octobre, Paul Matcho écrit à Laurent Chambaud pour se plaindre des actions menées par Autism Rights Watch à Caen, puis à Toulouse. Il accuse, à tort, Autisme France d’être responsable des actions de Caen. Il écrit : « Je souhaite au nom du Collectif des 39 vous alerter sur ces faits qui nous apparaissent intolérables sur le plan des échanges et débats sur les pratiques cliniques, faits qui relèves d’une sorte de terrorisme. » (dixit).

Ce même jour, Agnès Marie-Egyptienne, Secrétaire Générale du Comité Interministériel du Handicap (CIH), et Martine Pinville, député PS, désignée par le Gouvernement comme présidente du Conseil National de l’Autisme, chargé de l’élaboration du troisième plan autisme, organisent une réunion de concertation pour fixer le cadre de la concertation du plan Autisme III. Le plan autisme III est présenté autour de trois axes : la recherche, le développement de l’offre et la formation/sensibilisation. Le 19 octobre, le gouvernement confirme la désignation de Martine Pinville et les grands axes du plan prévu début 2013.

Danièle Langloys, Président d’Autisme France, demande à ce que les associations participent aux groupes de travail. La proposition est rejetée par le Gouvernement. Il préfère mettre en place, d’un côté des commissions d’experts qui devront émettre des propositions et de l’autre des groupes de concertation qui en débattront. En privé, les rumeurs circulent selon lesquelles Agnès Marie-Egyptienne aurait indiqué que les parents devraient être patients et qu’il n’y aurait pas d’argent pour financer le plan Autisme III. Le groupe d’expert « Recherche » se réunit les 13 et 15 novembre 2012, sans accord sur les propositions, qui restent vagues.

En parallèle, Autism Rights Watch rend le 11 novembre 2012 une position officielle sur la psychanalyse qui assimile les mouvements psychanalytiques français à des mouvements sectaires. Le 12 novembre 2012, ARW adresse à la MIVILUDES, organisme rattaché au Premier Ministre, des propositions pour lutter contre les dérives sectaires dans la santé et les universités à l’occasion d’un débat au Sénat sur les pratiques sectaires dans la santé.

Les tensions explosent au grand jour lors du Congrès d’Autisme France du 17 novembre 2012, qui doit marquer la clôture officielle de la Grande Cause Nationale. En introduction, Danièle Langloys y appelle les parents à « résister ». Ensuite, le discours de Mme Agnès-Marie Egyptienne, secrétaire Générale du Comité Interministériel du Handicap est hué par de nombreux parents. Mme Egyptienne doit alors interrompre son discours sous les quolibets. Certains parents, proche d’Autism Rights Watch, font parti des chahuteurs. ARW est la première organisation à faire officiellement état de l’incident.

Pourtant des tensions apparaissent au sein des associations. Par exemple, Mohammed Sajidi, Président de Vaincre l’Autisme, répond aussitôt à Danièle Langloys dans un billet intitulé « résister ou agir ? » : «VAINCRE L’AUTISME gère à ce jour 2 FuturoSchool, 1 à Paris et 1 à Toulouse, chacune de ces structures expérimentales et innovantes pour enfants et adolescents autistes pouvant accueillir 12 enfants. La perspective est de 60 FuturoSchool à l’horizon 2021 pour 720 enfants au total. […] Ma conviction et mon engagement c’est de résister et continuer d’agir en même temps jusqu’à atteindre nos objectifs et obtenir nos revendications ».

Pour sa part, ARW décide de tirer la sonnette d’alarme au niveau européen et de rappeler la France à ses obligations en matière d’inclusion en prenant part fin novembre au premier séminaire du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la ségrégation scolaire et périscolaire en Europe.

 

Conclusion : l’échec annoncé

La situation de l’autisme est aujourd’hui critique en France.

Les recommandations de la Haute Autorité de Santé sont extrêmement fragiles. Elles n’ont pas force de loi et font face à l’opposition d’un certain nombre d’organisations professionnelles de la pédopsychiatrie et de la psychanalyse.

Le Plan Autisme III est lui-même en grande difficulté. Les parents et leurs associations se sentent lésés. Les experts s’affrontent. L’Etat, qui n’a pas rempli les promesses du plan autisme II, est d’autant moins crédible qu’il refuse de s’attaquer aux problèmes de fond de la ségrégation éducative et de financer réellement le plan autisme III.

Les chances sont donc faibles de voir la France utiliser le plan Autisme III pour se mettre en conformité avec la résolution de 2004 du Conseil de l’Europe.

Autism Rights Watch soutiendra donc la nouvelle réclamation collective de l’association Vaincre l’Autisme, portée par l’Action Européenne des Handicapés (AEH), et déclarée recevable par le comité Européen des Droits Sociaux le 12 septembre 2012.

La France n’a toujours pas compris le message, pourtant clair, qui lui est envoyé depuis bientôt dix ans au niveau européen !

13 octobre 2012

article publié dans liberté.fr le 10 octobre 2012

” Nous voulons envoyer un message aux jeunes autistes”

 

Originaire de Saint-Lô, David Heurtevent, 33 ans, fait partie des dix membres fondateurs de l'ONG Autism Rights Wath. L'ONG souhaite faire évoluer les politiques sur l'autisme.

Publié le 10/10/2012 à 09:36 par muriellebouchard

 

 

 

 

 

 

 

Pouvez-vous dire quelques mots sur l’ONG ?
Avec Autism Rights Watch, nous voulons montrer la situation de l’autisme en France mais aussi dans les pays en général. L’objectif est d’établir des constats et des expertises. Nous essayons de proposer des changements. Les membres des autres ONG  dénoncent les choses telles qu’elles sont. Notre indépendance nous permet d’être libres dans notre ton et notre parole.

Quelle est la particularité d’Autism Rights Watch ?
Les membres fondateurs sont des personnes autistes. Le directeur de l’ONG est une personne autiste également, Alex Plank. L’intérêt est qu’il n’y ait pas de dérive hors de la cause. Des personnes nous considèrent comme fou. C’est la 1ere fois que cela se présente dans une ONG ou une association. Nous voulons envoyer un message aux jeunes autistes. Ces derniers doivent se prendre en main. Ils doivent être acteur, bien évidemment dans la limite de leur capacité à prendre une décision, avec le soutien de leurs parents.
Un grand nombre de parents en France sont dans l’assistanat. Ils ne cherchent pas à comprendre la situation. Je ne pense pas que cela soit le meilleur comportement à avoir.

Comment est née l’idée de créer cet organisme ?
L’ONG a été créée il y a un an suite à l’affaire de Sophie Robert et le documentaire qu’elle a réalisé sur l’autisme, Le mur. L’objectif est de faire un constat sur la situation d’inclusion scolaire et les droits qui ne sont pas respectés dans les faits pour les personnes autistes aussi bien aux États-Unis qu’en France. Depuis environ 10 ans, la France est très décriée au niveau international. Elle a un retard de près de 30 ans. Ce pays a d’ailleurs déjà été condamné par le Conseil européen. Depuis des plans autisme ont été mis en place mais ils sont vides. À peine 25% des objectifs ont été remplis. Il y a beaucoup d’annonces mais tellement peu d’action concrète. Il faut que cela change.

Comment intervenez-vous auprès du public ?
L’objectif est de sensibiliser l’opinion publique. Pour cela, nous menons des actions sur le terrain en essayant d’orienter les parents. Samedi 29 septembre, nous étions présents à Caen. Nous avons distribué des tracts pour dénoncer la non scolarisation de jeunes autistes.
Il ne s’agit pas de se substituer aux associations. Nous voulons être en rupture avec les gens et proposer des alternatives. Nous souhaitons que les autistes les plus capables puissent se prendre en main et fassent évoluer les choses. Nous agissons également auprès des professionnels. Nous ne dénonçons pas la psychiatrie. Elle a sa place et son utilité. Par contre, nous essayons de faire comprendre que la psychanalyse n’a pas sa place dans l’autisme.

Pourquoi l’ONG est-elle basée aux États-Unis ?
Le siège social de l’organisation est en Virginie. Cela pour différentes raisons. En France, il est très difficile d’être indépendant et de dénoncer le fonctionnement de l’État. Les lobbies verrouillent le système. Tout cela à cause des avantages financiers. Les associations reçoivent des subventions de l’État. Il est alors difficile de dénoncer le système dans ce cas-là. Nous avons également une vocation internationale. Nous voulons travailler avec un maximum de pays. Nous souhaitons travailler avec l’OMS basée à Washington. C’est également une question de fonds. Les actions philanthropiques sont beaucoup plus importantes aux États-Unis.

Propos recueillis par Nastasia Kalawski

11 octobre 2012

article publié dans l'express le 8 octobre 2012

 
La promotion des lacaniens à Grenoble : nous y étions !

 

La tournée de promotion des lacaniens en province…

L’Association de la Cause Freudienne a entrepris une tournée de promotion en province, sur le thème de l’autisme.

- Pourquoi une tournée ?

Le but apparent : démontrer que les psychanalystes font des choses merveilleuses pour les autistes, que la psychanalyse est éclairante et essentielle pour eux, etc… Le véritable but étant bien sur de garder la main-mise sur l’autisme, marché lucratif  très profitable au porte-monnaie de ces « professionnels ».

Plusieurs conférences-forums ont été organisés en province, dont un colloque le 29 septembre à Grenoble, « Quelque chose à dire », au Centre Départemental de Documentation Pédagogique (800€ la location de salle, c’est pas le collectif-Isère qui peut se payer ça ! ).

 

- Promotion et lobbying !

Définition du lobbying : Le lobbying est un ensemble d’actions d’influence et de pression menées par un lobby pour défendre ses intérêts face à des institutions ou individus pouvant prendre des décisions qui pourraient les affecter. Les actions de lobbying sont surtout menées à destinations des décideurs politiques.

Et voila ce qu’on peut lire sur leur site : 

« Signalons que chaque Député et chaque Sénateur a reçu un exemplaire de « Ecouter les autistes » de Jean-Claude Maleval récemment édité par Navarin. »

Alors ? Et je n’imagine même pas combien d’argent a été dépensé pour ces envois…

 

- Parmi les intervenants, Alexandre Stevens et Esthela Solano.

Ce sont deux des psychanalystes ayant attaqué en justice la réalisatrice Sophie Robert pour interdire le film dans lequel ils apparaissent tels qu’ils sont.

Esthela Solano s’est rendue célèbre pour s’être fait prendre en flagrant délit de mensonge. Dans un interview pour la revue « Le cercle psy », elle affirme n’avoir jamais tenu des propos pointant la responsabilité maternelle dans les causes de l’autisme. Une vidéo contredisant cette affirmation avait ensuite été révélée dans un article publié dans « L’Express ».

Je suis toujours étonnée que des personnes prises entrain de mentir ouvertement osent encore se montrer en public. Personnellement  si cela avait été mon cas, j’aurais eu honte, je me serais faite toute petite. Mais bon, elle est apparemment soutenue par ses homologues alors…

 

« Quelque chose à dire »… Nous aussi !

Vu le genre du colloque, nous avons voulu accueillir les participants, à notre manière… krkrkr ! (bruit du crocodile)

En guise de support visuel : des panneaux avec les articles du Cercle psy, de L’Express et du KOllectif du 07 janvier, sur la liste noire des formations sur l’autisme.

On avait aussi préparé des slogans très euh.. directs et explicites, pour que les passants percutent.

 

 

Jean Louis Racca.

 

Annie,maman très consciencieuse…

 

La face noire des psychanalystes…

 

Nous savions que de nombreux professionnels dans l’autisme viendraient. Donc, pour qu’ils n’entendent pas qu’un seul discours, nous leur avons distribué un tract informant des conclusions des recommandations de bonnes pratiques publiées par la Haute Autorité de Santé.

Ah oui, il n’y avait pas que nous à accueillir : deux crocodiles se joints à notre action et ont voulu rentrer. Mais, ayant oublié de s’inscrire,  ils sont restés à la porte, avec nous.

 

Des crocodiles venus de tous les marécages de France pour ce colloque !

Ambiance ? 

Hum… Malgré le froid et la pluie, ambiance plutôt chaude…

Bon non, c’est juste que les organisateurs gardaient bien l’entrée :  ils avaient fermés les portes du bâtiment bien à clef rien que pour nous, ne les rouvrant furtivement que pour laisser circuler les participants.

Je me sentais comme une mauvaise élève, punie… Puis, quand ils ont assemblé les tables, pour faire comme une barricade devant la porte, je me suis sentie comme euh… Un gangster ? Bon, c’était drôle en fait !

Pourtant, nous n’étions pas si nombreux ! Ou alors ils avaient peur des crocodiles, qui prenaient toute la place dans l’entrée ?

Voila quelques photos… On peut trouver toutes les photos sur cet album.

 

Là, la documenteuse, vite attrapez-là !

 

Stop à la forclusion !

 

Pause midi… 

Ça y est ils sortent, vite je prends le mégaphone ! Et j’assène quelques vérités, quelques comparaisons entre la France et les pays développés. Un jeune homme,  autiste, me relaie.

 

Clément, autiste, a aussi quelque chose à dire !

 

J’ai quand même pu parler à certains participants, professionnels, mais je sentais comme… Comme si j’étais  inférieure. De la condescendance…. Et surtout, aucune place au doute.

Je cache mon épée avant de…

 

Et l’après-midi ? 

L’ambiance était plus détendue… Histoire de me réchauffer, j’ai voulu faire un petit sketch interactif avec les participants, en m’inspirant de mon idole Geneviève Loison.

Je vous laisse découvrir !

21 septembre 2012

Teaser "théorie sexuelle" sous titrée en anglais de Sophie Robert

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13 septembre 2012

article publié dans le cercle psy le 12 septembre 2012

Jean-François Marmion
Article publié le 12/09/2012

Branle-bas de combat, Sophie Robert revient ! Après Le Mur qui s’attaquait, voici un an, à l’autisme vu par une certaine psychanalyse, un teaser présente quelques séquences annonçant un nouveau film à venir, La Théorie sexuelle. Le principe est le même : des psychanalystes exposent leur point de vue, mais cette fois sur la sexualité, la féminité, l’amour, et même la pédophilie. Les propos retenus pour les neuf minutes du teaser ne peuvent laisser indifférents, et laissent présager une nouvelle polémique retentissante... à supposer que le film se fasse. Car rappelons que la réalisatrice a été attaquée en justice par trois psychanalystes interviewés dans Le Mur, à savoir Esthela Solano-Suarez (que l'on retrouve dans le teaser), Eric Laurent et Alexandre Stevens, qui l'accusaient d'avoir manipulé leurs propos. La justice leur a donné raison en première instance. L'appel était prévu pour septembre mais serait repoussé pour début 2013. Le motif ? Les trois plaignants avaient également attaqué l'association Autistes sans frontières, diffuseur éphémère du Mur sur Internet. Le tribunal les avait déboutés, et même condamnés pour procédure abusive. Ils ont décidé de faire appel. La procédure s'en trouve retardée.

Le Mur et La Théorie sexuelle s’inscrivent dans une série projetée de longue date, intitulée désormais La Psychanalyse dévoilée, et non plus, comme c’était prévu lors de la réalisation des interviews, Voyage dans l'inconscient. En réalité, ni le titre, ni le format final de la série documentaire ne seraient définitifs. Et pour cause, il semble qu'aucun partenaire financier ne veuille plus prendre le risque de travailler avec la réalisatrice tant que sa situation ne sera pas éclaircie. D'où l'incertitude de la forme finale de la série. Les rushes sont là, issus des mêmes entretiens qui avaient servi de matériau au Mur. Mais Sophie Robert assure ne pas pouvoir finaliser La Théorie sexuelle ni les autres volets, faute de moyens.

Que Sophie Robert puisse travailler ou non, la controverse soulevée par Le Mur n'est pas terminée. Car pour corser l'affaire, on nous annonce encore un autre film sur la prise en charge psychanalytique de l'autisme. Signé par deux réalisateurs de Los Angeles, Alex Plank et Noah Trevino, Shameful (littéralement : Honteux) devrait sortir à l'automne. Et pour couronner le tout, côté psychanalyse aussi, on semble fourbir un documentaire...

11 septembre 2012

article publié dans l'express.fr le 10 septembre 2012

Psychanalyse : des théories sexuelles machistes et dangereuses

 

Un an après la diffusion de son film « Le mur ; la psychanalyse à l’épreuve de l’autisme » sur internet, la réalisatrice Sophie Robert révèle au grand public le teaser du 2ème volet de sa série sur la psychanalyse. Ce deuxième film sera consacré aux théories sexuelles.

On avait déjà eu un bel apercu de ces théories dans son premier film dédié à l’autisme avec des phrases choc, comme celle de la psychanalyste Jacquelines Schaeffer : l’inceste paternel ça fait pas tellement de dégats, ça rend juste les filles un peu débiles, mais l’inceste maternel, ça fait de la psychose.

Là et bien euh… Bon, il faut le voir !

 

Le phallus, toujours le phallus… Et les testicules alors ?

On a l’impression qu’avec les psychanalystes, tout tourne autour du phallus : « L’ordre phallique, machine phallique, loi phallique, femme phallique »…

Normal, le phallus est un organe protubérant, donc il a une signification symbolique de puissance, permettant l’acte sexuel, comme le dit le professeur d’université Jean-Michel Hirt, psychanalyste : Le phallus représente l’acte sexuel dans sa réalisation potentielle à savoir pour qu’il y ait acte sexuel il faut une érection donc un pénis dressé.

 

Le pilier des théories sexuelles psychanalytiques

 

Un peu de vocabulaire : femme phallique…

Dans ce teaser, Marie-Christine Laznik, docteure en psychologie et psychanalyste renommée, nous explique ce qu’est une femme phalliquement lourde : c’est une femme autonome financièrement, qui n’a besoin en rien d’un homme ; si elle est belle c’est pire parce que la beauté c’est phallique.

J’en conclue, avec l’évolution des mœurs, que les femmes aurait tendance à prendre du poids, phalliquement parlant…

Source : inconnue...

 

Le sexe de la femme ?  Un trou, non désirable.

Le phallus est un organe bien visible, contrairement au sexe féminin : en effet, selon le psychologue, sexologue et psychanalyste Guidino Gosselin, Le sexe (féminin) c’est un trou, c’est un vide donc c’est le seul organe qui n’a pas de signifiant propre. En effet, il  n’est pas visible, comme le souligne Jean-Michel Hirt : on ne représente pas le sexe féminin puisque de toutes façons il n’est pas visible.

Daccord, il n’est pas visible, enfin moi je le vois mon sexe hein… Au fait, est-ce qu’il est désirable ? Réponse de Jean-Michel Hirt : c’est d’abord ce que l’on voit que l’on désire. Et ce que l’on ne voit pas n’est pas vécu comme quelque chose de désirable.

Et bien, ce n’est pas l’impression que j’ai moi en parcourant certains sites et revues etc…

 

La sexualité, une perversion ?

C’est difficile de concevoir qu’une relation sexuelle saine entre un homme et une femme est possible, si on a la conviction que le sexe de la femme ne peut pas être désiré. Le désir sexuel n’est pas naturel, selon Gérard Pommier, psychanalyste… La sexualité est de l’ordre l’excès pour Jacquelines Schaeffer psychanalyste, formatrice à l’Hôpital St-Anne.

 

Théorie machiste

L’homme, avec son phallus, symbole de puissance associé à la virilité, le sera encore plus si sa partenaire féminine lui est soumise, comme le souligne Jacquelines Schaeffer : « Plus la femme sera soumise plus l’homme sera fort. Plus l’homme sera viril. »

Doit-on associer la force d’un homme à la domination qu’il exerce sur la femme ?

 

La femme n’existe pas.

À propos de femme, de féminin… La psychanalyste de renommée internationale Esthela Solano, affirme que la féminité c’est que du semblant. Et que si les femmes savent mettre en avant leurs atouts féminins, c’est pour masquer la femme qui n’existe pas selon E. Solano.

Mais oui, il n’y pas d’universel féminin, vu que le sexe de la femme c’est le vide, il n’existe pas. (Suis-je explicite ?)

La psychanalyste Claude Parchliniak l’explique peut-être mieux que moi ? Les femmes existent, mais pas LA femme [...] sauf dans la psychose. C’est à dire qu’elle existe quandelle passe hors-la-loi phallique, et cela produit un déchaînement qui conduit au pire.

 

Exemple d'une femme qui existe : Médée, assassinant ses enfants

 

 

La pédophilie, un acte d’amour ?

Ah oui j’ai oublié de parler dans ce teaser, de la façon dont le psychanalyste Guidino Gosselin justifie la pédophilie…

Le pédophile lui il veut être un bon père, c’est-à-dire un père non seulement qui aime l’enfant, qui fait preuve d’amour avec l’enfant mais qui veut aussi que l’enfant puisse jouir […] Il veut reconnaître le droit à la jouissance de l’enfant.[...] Il va tomber amoureux.

Et de la façon dont il décrit la relation éducateur-enfant :

On ne peut pas être un bon éducateur, excusez-moi, sans être quelque part, avoir un amour pour les enfants.

Un pédophilie est-il amoureux de l'enfant ?

 

 

Dire que les professionnels (psychologues, psychothérapeutes, sexologues,etc) d’orientation psychanalytique sont censés nous aider à résoudre nos problèmes psychologiques… Et qu’ils sont la majorité !

Bon, c’est logique, puisque les formations universitaires et professionnelles sont majoritairement axées sur l’approche psychanalytique du traitement des troubles psychologiques et mentaux.

 

Après avoir vu ce teaser, on peut se demander comment sont pris en charge les enfants victimes d’abus sexuels, les victimes d’inceste… Réponse au prochain article.

8 septembre 2012

La suite du MUR de Sophie Robert (la psychanalyse dévoilée) - 7 septembre 2012

La suite du MUR: découvrez le teaser de « La Théorie sexuelle »

 

Lire l’article en français | Read the post in english

La psychanalyse a connu son heure de gloire dans l’après guerre jusqu’aux années 90, à partir desquelles elle a amorcé un lent et inexorable déclin.
Aujourd’hui, la psychanalyse est devenue très marginale dans le monde, lorsqu’elle n’a pas complètement disparu, excepté dans deux pays: la France et l’Argentine.

En France, ses représentants restent ultra majoritaires dans les institutions psychiatriques, en psychologie, à l’hôpital et à l’université, et dans maintes professions paramédicales touchant à l’enfance. Or la psychanalyse est un cursus parallèle au cursus médical et scientifique. Il n’est validé par aucun diplôme d’État, aucune instance externe objective fondée sur les preuves et le bénéfice thérapeutique.

La psychanalyse est également très représentée dans les médias. Dans l’intelligentsia française, une personne sur quatre passe par le divan sans savoir le plus souvent quel est la formation de son thérapeute, ni sur quels postulats repose sa vision de la souffrance psychique.

Très peu de patients savent ce que pensent réellement les psychanalystes à qui ils livrent leur vie intime, parce que ceux-ci emploient vis-à-vis du profane un jargon abscons dont le sens est connu des seuls initiés. Ce double discours contribue à brouiller les cartes et entretenir maintes idées fausses sur ce qu’est ou n’est pas la psychanalyse.

C’est pour cette raison que j’ai entrepris de réaliser une série documentaire destinée au décodage de la théorie et de la pratique analytique, par la bouche des psychanalystes eux-mêmes: « LA PSYCHANALYSE DÉVOILÉE ».
Pour la première fois les psychanalystes s’y expriment sans fard, expliquant au profane le discours habituellement tenu entre seuls initiés.

Après « LE MUR » le prochain volet de cette série est consacré à « LA THÉORIE SEXUELLE »:

La psychanalyse se distingue de toutes les autres psychothérapies par la place prépondérante accordée à la sexualité – une vision très particulière de la sexualité, au contenu politiquement très incorrect. Comment les psychanalystes appréhendent-ils la sexualité aujourd’hui? Quel est, de leur point de vue, le rapport entre la sexualité et l’inconscient? Quel rôle joue la sexualité dans l’apparition des troubles psychiques?

5 septembre 2012

article publié dans l'express.fr le 5 septembre 2012

Quand un film délivre les parents… 

Le film « Le mur ; la psychanalyse à l’épreuve de l’autisme » a été mis en ligne sur le site de l’association « Autistes Sans Frontières » le 07 Septembre 2011.

Dans ce documentaire, 11 psychanalystes renommés dévoilent leurs vision de l’autisme, qui serait selon eux la conséquence d’une mauvaise relation maternelle. Le traitement : attendre que l’enfant ait le désir de sortir de lui-même du monde dans lequel il s’est réfugié.

Lors de la première projection à Paris le 07 Septembre, tous les parents venus y assister ont acclamé ce documentaire, déclarant reconnaître leur propre parcours.

La réalisatrice Sophie Robert a reçu immédiatement après des centaines de témoignages de parents la remerciant pour avoir su montrer ce qu’il se passait réellement en France au sujet de la prise en charge de l’autisme. Ce film les a libérés et encouragés à parler.

Quand on est  témoin de tout cela, quand on reçoit ces témoignages de détresse, peut-on faire comme si tout cela n’existait pas ? Peut-on tourner la tête de l’autre coté ?

 

Quand des professionnels n’assument pas leurs propos…

Sophie Robert n’a pas pu ignorer et continuer tranquillement sa carrière. De toute façon, c’était impossible, puisque elle a été attaquée en justice en Octobre 2011 par trois des psychanalystes du film. Sous prétexte de dénaturation de leurs propos, ils ont demandé à ce que ce film soit censuré. Les plaignants ont obtenu gain de cause, malgré la présence dans le dossier du juge d’une séquence vidéo qui démontre que ces propos non seulement n’ont pas été dénaturés, mais plutôt atténués.

Le film a été, contre toute justice, censuré, le 26 Janvier 2012. Vous pouvez cependant voir des extraits de ce film, sans les propos des plaignants ici.

Les parents, choqués par cette censure injuste, soutiennent très activement la diffusion de ce film, par exemple par diverses parodies et  actions, par une page de soutien facebook, un site web. Ils alertent les pays étrangers, qui se disent scandalisés par la situation française. Un article est même publié dans le International Herald Tribune. Les professionnels compétents rejoignent les parents, et créent un réseau.

 

Cliquez sur l'image pour comprendre ce que veut dire "maman crocodile"

Le buzz provoqué par ce film a joué beaucoup dans le fait que l’autisme est la Grande Cause Nationale cette année.

Il a également ouvert les yeux à plusieurs journalistes, qui avaient une image faussée de la prise en charge de l’autisme en France.

Pour la première fois les parents ont un réel espoir de changement.

 

Un témoignage classique d’une maman d’enfant autiste

Entre 2003 et 2006, mon fils a été suivi par le Centre Médico Psychologique (CMP) de R.

Des consultations obligatoires avaient lieu tous les mois, elles sont devenues des cauchemars très vite.

J’avais en face de moi quelqu’un qui écrivait tout ce que je disais. Certaines fois, je ne voyais que son crâne, d’autres fois j’avais l’impression d’être testée jusqu’à ce que je craque.

Il me répétait que nous n’étions « pas là pour nous entendre » plusieurs fois par rendez-vous. Il disait aussi que mon fils souffrait d’une psychose infantile. Je lui ai dit que, moi, je voyais de l’autisme à travers le comportement de mon garçon mais lui me disait « non, il s’agit d’une psychose infantile. De toute façon, tant qu’il n’a pas trois ans, il a une psychose infantile, et s’il est autiste il sera autiste sévère. »

Il m’a demandé quels rapports j’avais avec ma mère. Une fois que je lui ai dit les rapports que j’entretenais avec elle, il a commencé à me questionner et à me dire que j’avais un problème, que j’étais une maman malade. « Vous vous voyez ? » me disait il. Il me provoquait et ensuite me demandait si je me voyais.

Tous les rendez vous se ressemblaient : lancinants et douloureux.

J’ai commencé à me sentir mal, et à redouter les séances, à douter de moi, à me dire qu’effectivement, je n’étais pas une bonne mère… Chaque mois, il ne s’agissait que de moi. Son regard me fixait. Mon fils, lui, jouait seul sur le côté pendant que le pédopsychiatre me fermait toutes les portes.

Pendant ce suivi de 3 ans, j’ai dû faire face à ce pédopsychiatre, le dr D, qui passait le clair de son temps à me démontrer que quoi que je dise, quoi que je fasse, je ne serais pas entendue, mais bien plus encore je me suis sentie dévalorisée, non soutenue dans l’épreuve que je devais accepter et transformer. Je n’avais aucune issue, et j’ai même pensé au pire.

Grâce à une aide extérieure, un psychiatre, que j’ai été chercher, j’ai pu considérer que l’aide de ce psychanalyste et du CMP qu’il gérait, devenait poison.

Cette aide extérieure, m’a elle-même proposé d’écrire, à l’Ordre des Médecins pour signifier le mal que ce médecin ‘soignant’ me faisait.

Je me suis « enfuie » en mai 2006, laissant une lettre qui ne le remerciait en rien de son suivi.

J’étais terrifiée car j’avais peur qu’il me fasse enlever la garde de mon fils.

J’ai contacté une autre structure de la même ville où j’ai eu un accueil humain, enfin.

Aujourd’hui, mon fils va au collège, en milieu ordinaire, avec une Auxiliaire de Vie Scolaire, il est toujours suivi par la même structure, le diagnostic vient d’être posé : il est autiste de haut niveau sans retard mental.

J’espère que mon témoignage sera entendu.

18 août 2012

article publié sur le site de Vivre FM le 18 août 2012

"Shameful", la honte, le documentaire choc réalisé Alex Plank et Noah Trevino sur l'autisme en France

L’autisme en France à nouveau sous les projecteurs, mais américains cette fois-ci. A l’instar du « Mur » de Sophie Robert, « Shameful » relance le débat sur les conditions de traitement des autistes en France. Au programme ; images chocs et interviews de parents désespérés... En salle, cet automne.

Shameful, le documentaire choc sur l'autisme en France
Shameful, le documentaire choc sur l'autisme en France

C’est un bilan négatif sur le traitement de l'autisme en France que dressent les deux jeunes réalisateurs américains. Alex Plank et Noah Trevino n’en sont pas à leur coup d’essai dans la réalisation ; la trentaine tous les deux, ils ont déjà fait séparément des documentaires.

"Shameful", un documentaire choc

De celui-ci, seules quelques images ont été diffusées : des plans de Paris - des célèbres monuments à une rue lambda, tout en passant par le Pont des Arts - et des prises de vue sombres, presque moyenâgeuses. L’ensemble sur une musique lancinante.

 

Paris, sous un filtre sombre rappelant un passé malheureux

 

La bande annonce est présentée par une voix de femme, sur un mode narratif. C’est un extrait d’une interview, très poignante, entre les réalisateurs et la mère d’un enfant autiste. Un enfant qu’elle a perdu, confrontée au traitement de la  psychanalyse, au manque d’aide et de réponse des experts, « My son eventually commited suicide», dit-elle dans la bande annonce.

Wrongplanet.net

A l’inverse de Noah Trevino, qui traite pour la première fois de l'autisme dans ses films, Alex Plank n’en est pas à son coup d’essai. Wrong Planet est un site internet dont la thématique principale est l’autisme. Alex en est le fondateur, il est aussi l’un des experts américains sur l’autisme. Il est peut-être plus connu pour son travail sur WrongPlanet que pour ses films.

 

Alex Plank, l'un des deux réalisateurs et fondateur de Wrongplanet.netNoah Trevino, l'un des deux réalisateurs

Shameful, le résumé Les psychanalystes, en France, ont décidé que l’autisme est un maladie psychologique causée chez l’enfant par les choix sexuels de la mère. La France refuse de donner aux familles la moindre aide morale et financière. Les deux réalisateurs ont voyagé à travers notre pays, filmant de nombreuses familles qui se battent pour obtenir de l’aide pour leurs enfants autistes.

 

Shameful analyse les terribles situations auxquelles les familles se trouvent confrontées. En cause : le manque de soutien financier du gouvernement et la désinformation publique des experts français. Seule solution, de nombreux parents ont dû envoyer leur enfants en Belgique pour recevoir les soins adéquats.

 

Une étude estime à 80 % le taux d’enfants autistes, qui en France, n’ont pas l’autorisation d’aller à l’école. Le film sortira dans les salles françaises à l'automne 2012.

Arthur Didier

 
27 juin 2012

article publié sur le site d'Autisme Infantile le 18 juin 2012

Le frère de « l’autiste »!

Le frère de "l'autiste"!

Léonard, mon fils porteur d’autisme, a eu un petit frère quand il avait 8 ans:
Ismaël, qui va avoir 3 ans cet été.

Je parle rarement de lui ici, puisqu’a priori il n’est pas autiste, mais je me suis dis que je pouvais bien lui consacrer un article quand même, surtout que sa vie est pas mal conditionnée par l’autisme de son frère.

J’ai ’écrit « a priori » parce qu’à cet âge-là je ne savais pas encore pour Léo, et que maintenant je sais donc qu’on peut apprendre bien après la naissance de son enfant qu’il peut être différent (avant de savoir pour Léo, je ne savais pas; mais en fait, avant de savoir pour Léo, j’ignorais tout des différents handicaps).

Aujourd’hui, j’ai envie d’écrire un article sur ce petit garçon qui a forcément une vie différente puisqu’il a un frère différent, avec une prise en charge et une scolarité à l’extérieur, mais aussi à la maison.

Déjà, il faut savoir qu’Ismaël vit en résidence alternée (une semaine chez son père, une semaine chez moi avec son frère) depuis qu’il a 17 mois, et cela est en partie dû justement à l’autisme de son frère.

En effet, une psychologue a jugé bon, lors d’une expertise médico-psychologique demandée par le TGI, de préconiser une résidence alternée pour un enfant âgé alors de 9 mois, ainsi qu’un mode de garde en collectivité (je suis en congé parental) afin qu’il soit le moins possible en contact avec sa mère psychogène (moi), puisqu’elle a été capable de rendre son fils aîné autiste.

Dans l’expertise, c’est écrit comme ça:

« Il nous semble fondamental pour la construction psychique de ce jeune enfant, qu’un tiers puisse s’instaurer dans la relation mère-enfant. En effet, si le lien maternel est primordial pour les jeunes enfants, il convient également que la mère n’instaure pas une relation exclusive de toute puissance avec l’enfant. »
(…) « Dans ce contexte, nous préconisons pour l’enfant Ismaël, une résidence alternée d’une semaine chez son père et d’une semaine chez sa mère (…). L’admission dans un lieu d’accueil de la petite enfance nous parait également souhaitable ; ainsi Ismaël pourrait bénéficier d’un espace intermédiaire et stable qui pourrait faire le lien entre sa double vie. »

Je ne sais pas si je dois être parano ou pas, mais ce passage où l’on parle de stabilité dans un lieu d’accueil me parait quelque peu accusateur pour mon foyer: élèverai-je mes enfants dans l’instabilité?!

Bref, d’entrée de ce jeu, Ismaël se trouve « victime », je trouve, de l’autisme de son frère, mais heureusement il ne le vit pas trop mal!

Ismaël adore Léonard, c’est son héros. Il veut faire tout comme Léonard: aller à l’école bien sûr, mais aussi au SESSAD (gloups!), faire du théâtre, du judo, de la planche à voile, du ski comme Nonarrrr (c’est ainsi qu’Ismaël appelle son frère), et même porter des slips comme Nonarrrr! J’adore! Je suis vraiment heureuse (malgré le contexte) d’avoir pu créer une fratrie unie.

Pour Léonard, c’est peut être un peu plus compliqué: il a du mal à prêter ses affaires (ils n’ont pas la même chambre). Pour lui, qui a été fils unique pendant 8 ans, et qui tient à ses affaires (surtout à celles appartenants à de ses intérêts restreints) comme à des trésors, c’est un peu compliqué pour lui de voir tous ses Max et Lili rangés dans le désordre.

Léonard a 71 Max et Lili, et ils sont rangés sur son étagère par ordre. Il adore les Playmobils et ne supporte pas de perdre des épées, des chapeaux, des capes, alors il a peur et se met a hurler dès qu’Ismaël s’approche d’un peu trop près!

Seulement, grâce à son frère, Ismaël connaît aussi les 71 Max et Lili: il connaît les titres de tous ceux que nous avons à la maison, et peut donner le titre juste en voyant la couverture – et cela depuis qu’il a 2 ans! Il connaît également Tintin et tous les personnages de Tintin. Il connaît Astérix, Obélix, etc., et sait que ce sont des Gaulois. Il connaît Cléopâtre, César et l’espion de César. Il connaît Louis XIV (programme d’histoire de CM2), il sait qu’on l’appelait le Roi Soleil et qu’il habitait à Versailles.

Bref, Ismaël est certainement le petit garçon le plus cultivé de sa halte-garderie grâce à l’autisme de son frère!

Le 2 mai 2012, je suis allée avec mes deux garçons sur le Parvis de l’Hôtel de Ville de Paris, car c’était la journée de l’autisme. Ismaël a adoré « la fête de l’autisme » et demande régulièrement à y retourner!

Depuis que j’écris pour Autisme Infantile, et depuis la mobilisation soulevée par le film Le Mur de Sophie Robert, je connais plein de mamans crocos, et plein d’enfants autistes. Ismaël est complètement intégré dans ce « monde » d’enfants NT et atteints de TSA.

Une enseignante de VECV et l’éducatrice spécialisée du SESSAD interviennent à la maison, et durant ces moments-là nous devons laisser Léonard « travailler ». Ismaël adore ces dames qui viennent pour Léonard, il est ravi d’apporter le thé à l’enseignante, et fait de gros bisous à l’éducatrice (qui est très jeune et très jolie).

Notre emploi du temps est tributaire des interventions pour Léonard, mais j’essaie de faire en sorte de passer de bons moments avec lui, même quand nous sommes coincés à la maison parce que Léonard travaille.

Ismaël semble être un peu garçon heureux et épanoui (ce qui me semble miraculeux, vu le contexte et sa situation parentale). Il sera ouvert à la différence et ça ça me fait plaisir! Il sera un petit bonhomme tolérant, pour qui le handicap fait parti intégrante de la vie.

http://autismeinfantile.com/temoignages/muriel-et-leonard/le-frere-de-lautiste/?utm_source=feedburner&utm_medium=feed&utm_campaign=Feed%3A+AutismeInfantile+%28Autisme+Infantile%29

22 juin 2012

article publié dans l'express.fr le 21 juin 2012

Article sidérant dans le magazine Prima

Une éducatrice spécialisée, sidérée, m’a fait part d’un article dans la rubrique « psychoquotidien » du magazine Prima, Juin 2012.

Rubrique "psychoquotidien", Prima - Juin 2012

 

 

 

J’ai à mon tour été comme ça :

"C'est pas possible..."

Le voici, en couleur marron, avec mes commentaires. 

 

Halte à la guerre antipsy

« Psy », ça commence bien… Entre psychologue, psychothérapeute, psychiatre et psychanalyste, ça fait quatre statuts qui correspondent à cette abréviation. Je suppose ici que c’est « psychanalyste » puisque en France la psychanalyse est majoritairement imposée aux familles d’enfants autistes, qu’elles le veuillent ou non. (Il se trouve que beaucoup de parents n’en veulent pas, et c’est bien ce qui les gêne)

 

Le monde psy se mobilise contre la campagne de dénigrement lancée par des associations de parents d’enfants autistes désemparés.

« Dénigrement » : ce mot est-il bien choisi ? Il ne s’agit pas de médisance ou de diffamation mais de témoignages ; des centaines de témoignages de parents qui, grâce au film « Le mur » de Sophie Robert, n’ont plus peur de parler. Vous pouvez les lire un peu partout sur internet, y compris à l’intérieur du cercle des « psys », puisque la revue Le Cercle Psy y consacre une rubrique sur son site… Trahison ?

Au passage il n’y a pas que les associations de parents : la prise en charge à la française a été de nombreuses fois pointée du doigt au Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE), et la France a été condamnée par le conseil de l’Europe en 2004 pour défaut de prise en charge éducative.

« Désemparés » : cela laisse à penser que les parents sont perdus, ne savent plus quoi faire. Alors non, nous savons très bien ce que nous devons faire, nous savons où aller et où ne pas aller.

 

Le mystère de cette « maladie » n’a toujours pas été percé.

On n’est pas à une chasse aux trésors là !

« Maladie »… Combien de personnes autistes maudissent ce terme ? On n’attrape pas l’autisme comme on attrape la grippe, et on ne s’en défait pas comme d’un virus. On naît avec cette spécificité cognitive, cette façon particulière qu’a notre cerveau de fonctionner, qui entraîne des difficultés relationnelles, mais qui a aussi de très bons cotés.

L’ensemble de cette phrase laisse croire qu’on ne sait rien de l’autisme, malgré les recherches. C’est tout simplement faux. Les découvertes dans le domaine des neurosciences nous orientent très fortement sur les causes de l’autisme, comme le dit Frank Ramus dans Le Cercle Psy : « Pourquoi l’hypothèse neurodéveloppementale s’impose pour l’autisme. »

 

Quoi qu’on en dise, aucun gène spécifique n’a été découvert.

C’est vrai : on sait maintenant que plusieurs gènes sont impliqués, plus précisément ce sont des mutations de ces gènes qui sont impliquées.

Ce qui est vrai aussi c’est qu’après avoir lu cette phrase, les personnes vont probablement penser que rien n’a été découvert au niveau de la génétique.

 

Rappelons qu’à une époque pas si lointaine, les psys étaient les seuls à recevoir et écouter les autistes et leurs parents.

C’est vrai aussi. Et vus les résultats, les parents voudraient que les choses évoluent, est-ce trop demander ?

Quant aux termes « écouter » les parents, si seulement ils s’étaient arrêtés à ça… J’écris cela en pensant au rush dans lequel la psychanalyste Esthela Solano explique à Sophie Robert ce qu’elle pense des mamans d’enfant autistes.

 

Pour le bien des enfants concernés, disons « stop » à la haine et aux guerres de pouvoir.

C’est pour le bien de leurs enfants que les parents se battent, pour améliorer leur qualité de vie, pour qu’ils ne soient pas condamnés à errer dans une institution psychiatrique sous camisole chimique, aux soins des « psys » mentionnés dans cet article.

Ceci dit, je comprends qu’ils n’apprécient pas trop ce combat, étant donné qu’ils ont tout pouvoir en France, et qu’un pouvoir apparemment ne s’abandonne pas facilement.

http://blogs.lexpress.fr/the-autist/2012/06/21/article-siderant-dans-le-magazine-prima/

20 juin 2012

article publié dans le cercle psy le 20 juin 2012

Procès du Mur : bug de procédure pour Sophie Robert ?

Jean-François Marmion
Article publié le 20/06/2012
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Une saisie-attribution, procédure permettant à un huissier de justice de saisir une somme sur le compte bancaire d’un débiteur, a été lancée pour tenter de bloquer plus de 25 000 € sur le compte personnel de la réalisatrice du Mur, Sophie Robert. « Compte tenu du solde de votre compte, au jour de sa réception, cette saisie n’a entraîné le blocage d’aucune somme », explique la banque à Sophie Robert dans un courrier que nous avons pu nous procurer. Ce document mentionne que la saisie-attribution aurait été lancée par un cabinet d’huissiers « à la requête » d’Esthela Solano-Suarez et Eric Laurent, deux des trois psychanalystes qui ont porté plainte contre la réalisatrice et gagné en première instance. Etrangement, un tel acte de procédure civile n’est possible que sur titre exécutoire, c’est-à-dire suivant un acte juridique constatant la créance et autorisant un recouvrement forcé, alors même qu’un jugement en référé du 16 mai dernier dispensait Sophie Robert du paiement des dommages et intérêts à ses adversaires en l’attente du procès en appel. L'avocat de la réalisatrice a donc aussitôt demandé la levée de cette saisie.

Nous avons contacté Eric Laurent et Esthela Solano-Suarez pour recueillir leurs explications ou commentaires. Tous deux ont affirmé succinctement ne pas être au courant, Eric Laurent estimant qu’il doit s’agir « d’un bug dans la procédure », tandis qu’Esthela Solano-Suarez « confirme formellement » ne pas être à l’origine de cette saisie-attribution, invoquant « une erreur toute bête qui n'est pas de notre fait et ne relève pas non plus de l'action  de notre avocat. » Dans ce cas, d’où vient le dysfonctionnement ? Pourquoi cette somme, précisément 25 139,12 €, à la demande de deux plaignants et non des trois ? Le référé n'avait-il pas été communiqué aux huissiers ? Ceux-ci n’ont pas souhaité répondre à nos questions, secret professionnel oblige. Pour le moment, l’épisode reste donc confus.

Rappelons que dans le film Le Mur, Sophie Robert présentait des témoignages de psychanalystes semblant favorables à l’hypothèse selon laquelle une défaillance de l’amour maternel serait à l’origine de l’autisme. Estimant que leurs propos avaient été détournés, Esthela Solano-Suarez et Eric Laurent, ainsi qu’Alexandre Stevens, membres de l’Ecole de la Cause Freudienne, ont déposé plainte contre la réalisatrice en réclamant 290 000 €. En janvier 2012 ils ont obtenu sa condamnation, en première instance, à 19 000 € de dommages et intérêts, plus 15 000 € pour publication et frais de justice. Le jugement en référé du 16 mai dernier suspendait le versement de dommages et intérêts en attendant l’appel du procès en septembre, mais ne levait pas l’interdiction de la diffusion en l’état du documentaire controversé.

http://le-cercle-psy.scienceshumaines.com/proces-du-mur-bug-de-procedure-pour-sophie-robert_sh_29124

27 mai 2012

article publié dans Slate.fr le 26 mai 2012

Autisme: la psychanalyse touche-t-elle le fond?

La France reste un des rares pays résistant au discrédit scientifique de la psychanalyse. Un film, «Le Mur», a été interdit de diffusion. Une décision qui, paradoxalement, a permis de mettre en lumière les faiblesses de la thérapie.

- Freud en 1922 / photo pour le magazine LIFE -

Le 7 septembre 2011, le site de l’association Autistes sans frontières mettait en ligne un documentaire qu'elle a en partie produit. Un petit film de rien du tout, écrit et réalisé par Sophie Robert, premier volet d'une série voulant montrer la réalité de la psychanalyse au grand public. Dans Le Mur–la psychanalyse à l'épreuve de l'autisme, ce sont les interviews d'une dizaine de psychanalystes d'obédiences diverses, mais aussi de psychiatres et de pédiatres de formation psychanalytique, qui s'intercalent entre quelques scènes du quotidien de deux familles d'enfants autistes. Le propos du film est clair, porté par une voix off en ouverture:

«Depuis plus de 30 ans, la communauté scientifique internationale reconnaît l'autisme comme un trouble neurologique entraînant un handicap dans l'interaction sociale. En France, la psychiatrie, qui est très largement dominée par la psychanalyse, ignore résolument ces découvertes.»

Le 27 octobre, trois psychanalystes, Esthela Solano-Suarez, Eric Laurent et Alexandre Stevens, tous affiliés à la lacanienne Ecole de la cause freudienne, assignaient l'auteur et l'association en justice et prétendaient que le montage avait dénaturé leurs propos de façon malveillante. Ils exigeaient, entre autres, l'arrêt de l'exploitation et de la diffusion du film, sur quelque support que ce soit, ainsi que d'importants dommages et intérêts pour atteinte au droit à l'image, à la réputation et au droit moral.

Le 26 janvier 2012, le tribunal de grande instance de Lille, présidé par Elisabeth Polle-Sénaneuch, déjà célèbre pour l'affaire de la mariée non vierge, leur donnait partiellement raison.

Mais cette décision de justice «partisane», selon Sophie Robert, et qui est loin de faire l'unanimité chez tous les praticiens de la discipline, pourrait bien être l'ultime chant du cygne d'une approche «périmée» des troubles mentaux, selon les mots de Simon Baron-Cohen, l'un des plus éminents spécialistes actuels de l'autisme.

La psychanalyse représentée dans ce film –celle qui refuse obstinément de suivre les avancées de la science en général, et en particulier le consensus actuel pour qui l'autisme est un trouble neurobiologique à l'étiologie complexe et plurifactorielle, celle qui se révolte contre les protocoles d'évaluation en vigueur partout ailleurs et celle qui est aveugle à ses propres évolutions– pourra-t-elle survivre?

L'autisme, un concept changeant à l'étiologie complexe

En 1943, le pédopsychiatre américain Leo Kanner décrit des enfants qui «tous, en entrant dans [son] bureau, se dirigeaient directement vers les cubes ou les jouets sans porter la moindre attention aux personnes présentes dans la pièce (...) des personnes quasiment semblables pour eux au bureau, à la bibliothèque ou au meuble de rangement». Son étude «Autistic Disturbance of Affective Contact», portant sur 11 cas, identifie pour la première fois l’autisme comme un trouble à part entière. Un quart de siècle plus tôt, en 1911, le terme naissait sous la plume du psychiatre suisse Eugen Bleuler, qui identifiait l’autisme comme une forme de schizophrénie marquée par la claustration du sujet dans son monde intérieur, impénétrable et incommunicable.

Pour Kanner, l'autisme est un trouble affectif de la communication et de la relation qui n'affecte pas l'intelligence –les enfants qu’il étudie manifestent des capacités cognitives «exceptionnelles», en particulier sur le plan de la mémoire.

Selon lui, il s'agit d'un trouble inné dont les parents –bien souvent psychiatres ou psychologues eux-mêmes– ne pourraient être jugés responsables.

Il note cependant en 1952 que ce sont des êtres généralement froids et rigides, qui considèrent leurs enfants «comme des sortes de cobayes», ont «bien plus le souci de la performance que de la chaleur humaine et du plaisir d'être ensemble» et semblent garder leurs enfants dans «des réfrigérateurs qui ne décongèl[ent] jamais». Une image qu'il récusera en 1969, mais qui passera à la postérité du côté de la psychanalyse.

En 1944, Hans Asperger, pédiatre, publie ses observations (PDF) portant sur des enfants atteints de «psychopathie autistique», caractérisée par des «comportements bizarres» et des capacités intellectuelles pouvant aller «de la débilité au génie». Asperger est lui aussi convaincu d'une origine organique et héréditaire du trouble, et précise que les parents de ces enfants sont des êtres originaux possédant pour certains quelques traits autistiques. Il donnera son nom au célèbre «syndrome d'Asperger», désignant les autistes de haut-niveau, manifestant une forme très élaborée et très précoce du langage, sans pour autant le considérer comme un outil de communication sociale.

Durant ses premières années nosographiques, l'autisme était ainsi considéré comme un trouble n'affectant qu'un nombre relativement faible de personnes partageant un ensemble distinctif d'anormalités comportementales, en particulier d'importants retards dans l'acquisition du langage, des capacités cognitives en général réduites et une absence caractéristique de contacts sociaux.

Mais dans les années 1980, ce concept explose avec l'introduction du spectre autistique, qui montre que l'autisme concerne aussi des personnes qui parlent normalement ou ne souffrent pas de troubles dans l'apprentissage, mais qui ont néanmoins certaines difficultés à socialiser et à communiquer avec autrui.

Une personne sur 100

Aujourd'hui, l'une des classifications de référence, la classification internationale des maladies (CIM-10) publiée par l'Organisation mondiale de la santé, parle de «troubles envahissants du développement» (TED) et les définit comme «un groupe de troubles caractérisés par des altérations qualitatives des interactions sociales réciproques et des modalités de communication, ainsi que par un répertoire d’intérêts et d’activités restreint, stéréotypé et répétitif».

Ce sont des troubles malheureusement sexistes, vu qu'ils touchent en moyenne 4 hommes pour 1 femme, un sex-ratio qui monte à 8 contre 1 pour le syndrome d'Asperger –le syndrome de Rett étant lui, quasi exclusivement féminin. Leur héritabilité est aussi très importante, estimée aux alentours de 0,7, ce qui en fait aujourd'hui le trouble psychiatrique le plus génétique de tous, mais aussi l'un des plus génétiquement complexes: en 2008, on envisageait l'implication de pas moins de 76 loci, 26 gènes et 9 pics de liaison dans l'étiologie des troubles autistiques.

Mais d'autres pistes sont aussi explorées, dans une logique cumulative: l'âge du père au moment de la conception de l'enfant, certaines complications pré et périnatales, l'exposition in utero à des métaux lourds ou à des agents viraux comme la rubéole, et autres modifications épigénétiques.

Question prévalence, les dernières données épidémiologiques indiquent qu'au moins une personne sur 100 souffrirait d'une forme quelconque d'autisme, ce qui dépasse de loin les précédentes estimations.

Fin mars 2012, le CDC américain revoyait encore ces statistiques à la hausse, en faisant état d'1 enfant sur 88 touché par une forme autistique quelconque –des chiffres dépassant ceux du cancer, du sida, du diabète, de la trisomie 21, de l'infirmité motrice cérébrale, de la mucoviscidose et de la dystrophie musculaire combinés.

 Une augmentation diagnostique significative liée à la fois à de meilleures méthodes de détection, mais aussi au fait que l'autisme n'est plus envisagé comme un trouble à la définition formelle restrictive, mais comme un spectre pathologique qui se manifeste de manière très hétérogène selon les individus (PDF).

En effet, l'impact de l'autisme est extrêmement variable, certains autistes sont indépendants et peuvent vivre leur vie comme bon leur semble (en revendiquant même un droit à la «neurodiversité»), quand d'autres souffrent de difficultés médicales, éducatives et sociales substantielles qui dégradent considérablement leur qualité de vie.

Face à cette hétérogénéité, le consensus scientifique envisage désormais «des» autismes avec diverses trajectoires de développement et de multiples processus biologiques sous-jacents.

Pour la psychanalyse, l'autisme n'a rien de matériel

Mais, traditionnellement, la psychanalyse refuse d'envisager une telle base matérielle. Ainsi, en 1950, Bruno Bettelheim, psychanalyste et pédagogue, attribue-t-il l'autisme à une mauvaise relation de l'enfant à ses parents, et principalement à sa mère.

Survivant des camps de la mort (Dachau et Buchenwald), il compare le repli autistique à ce qu'il a vu chez certains déportés:

«Dans les camps de concentration allemands, écrit-il dans La forteresse vide (1967), je fus le témoin incrédule de la non-réaction de certains prisonniers aux expériences les plus cruelles. Je ne savais pas alors, et ne l’aurais pas cru, que j’observerais, chez des enfants, dans l’environnement thérapeutique le plus favorable, un semblable comportement engendré par ce que ces enfants avaient vécu dans le passé.»

Pour Bettelheim, s'appuyant sur les cas des petits Joe, Laurie et Marcia, un autiste est dans sa famille comme un déporté dans un camp: l'autisme n'a rien d'organique, il est «un état mental se développant en réaction au sentiment de vivre dans une situation extrême et entièrement sans espoir». Purement «réactif», il est fondamentalement causé par le souhait inconscient d'une «mère frigidaire» d'exterminer son enfant. Un enfant qui a intériorisé l'idée que le monde s'en porterait bien mieux s'il n'existait pas et qui choisit de s'enfermer dans une forteresse vide –un univers hermétique sans vie, sans lien et sans communication possible avec l'extérieur.

Fort de ce concept, Bettelheim crée à Chicago une «école orthogénique», qui se donne comme objectif de se substituer à l'environnement parental destructeur: «Si un milieu néfaste peut conduire à la destruction de la personnalité, explique-t-il, il doit être possible de [la] reconstruire grâce à un milieu particulièrement favorable.» En 1974, dans une série d'entretiens filmés par Daniel Karlin (et textuellement rassemblés un an plus tard dans Un autre regard sur la folie), Bettelheim affirme avoir guéri des dizaines d'enfants autistes.

Mais un autre son de cloche commence déjà à retentir. Au lendemain de la diffusion des films de Daniel Karlin (qui pense toujours qu'on n'a pas tellement avancé niveau «connaissance du cerveau» depuis), Pierre Debray-Ritzen, alors directeur du service de pédopsychiatrie à l’hôpital Necker Enfants-Malades (Paris), ne mâche pas ses mots dans les colonnes du Figaro:

«Je n’aurais sans doute pas réagi aussi sévèrement si la télévision n’avait pas accordé cinq heures (...) sans aucune contrepartie [au fondateur de l’école orthogénique], comme si Bettelheim représentait l’état actuel des connaissances en pédopsychiatrie, comme si l’on avait affaire à un Prix Nobel ou à une personnalité indiscutable. (...) Bettelheim prétend guérir les psychoses infantiles à 80% (…) Cette prétention est aussi monstrueuse que celle d’un médecin qui affirmerait avoir guéri des leucémies aiguës dans les mêmes proportions.»

De même, dès le début des années 1980, les familles de patients de Bettelheim et de ses disciples s'organisent et créent des associations, dénoncent ses pratiques d'isolement familial et en appellent à des prises en charge validées scientifiquement.

A sa mort, en 1990, la parole se libère davantage: d'anciens patients et collègues le décrivent comme un tyran ne supportant pas la contradiction, arrachant abusivement et autoritairement les enfants à leurs familles et... ayant inventé de toutes pièces les cas de guérison. En 1998, Richard Pollak –le frère d'un autiste «soigné» par Bettelheim, lance une bombe sous la forme d'une biographie très remarquée, The Creation of Dr. B: A Biography of Bruno Bettelheim (traduite en français en 2003 sous le titre Bettelheim ou la fabrication d'un mythe), qui dépeint le psychanalyste comme un pur escroc manipulateur, mythomane et despotique, ayant profité de puissants soutiens financiers et médiatiques pour réduire ses détracteurs au silence.

Aujourd'hui, à l'instar de Pierre Delion, beaucoup de psychanalystes estiment encore que Bettelheim est une «victime de l'histoire» et qu'il a réalisé un «travail de pionnier exemplaire».

Dans le film de Sophie Robert, s'ils ne mentionnent pas tous Bettelheim, d'autres s'en inspirent fortement en déclarant par exemple que, face à un autiste, il faut «faire sentir à l'enfant qu'il existe un autre qui n'est pas menaçant» (Bernard Golse), que «la mère a toujours un désir incestueux envers son enfant, qu'elle en ait conscience ou pas» (Yann Bogopolsky) ou encore qu'un «inceste paternel ne fait pas tellement de dégât, ça fait des filles un peu débiles, mais un inceste maternel, ça fait de la psychose, c'est-à-dire la folie» (Jacqueline Schaeffer).

La France résiste au discrédit scientifique de la psychanalyse

En ce début d'année, deux autres gros coups ont été portés à la psychanalyse pour sa prise en charge de l'autisme, labellisé grande cause nationale 2012. Le 20 janvier, le député UMP du Pas-de-Calais, Daniel Fasquelle, déposait une proposition de loi visant à «l’arrêt des pratiques psychanalytiques dans l’accompagnement des personnes autistes, la généralisation des méthodes éducatives et comportementales, et la réaffectation des financements existants à ces méthodes».

Le 8 mars, la Haute autorité de santé (HAS) et l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm) publiaient leurs recommandations de bonne pratique quant aux interventions éducatives et thérapeutiques concernant les enfants et les adolescents autistes. La psychanalyse y était officiellement désavouée, considérée comme «non-consensuelle», son niveau de preuve quant à son efficacité était jugé insuffisant et le packing, consistant à envelopper un autiste dans un linge humide et froid, puis de le réchauffer progressivement pour lui donner prétendument conscience de son environnement –une pratique que de nombreux spécialistes internationaux dénoncent comme barbare et ne reposant sur aucune donnée validée– y était formellement interdit, sauf à des fins de recherche.

Mais cela fait déjà longtemps que, partout dans le monde, le freudisme et ses épigones ont rejoint des horizons «non-consensuels», pour reprendre le vocable poli de l'HAS.

C'est même dans les années 1980, après le décès des plus «grands noms» de la psychanalyse (Wilfred Ruprecht Bion en 1979, Jacques Lacan et Heinz Kohut en 1981, Anna Freud en 1982) que la discipline a amorcé son déclin. Elle est poussée vers la sortie par l'émergence des neurosciences, la validation des thérapies cognitivo-comportementales et les «Freud Wars», le nom donné outre-Atlantique aux polémiques ayant suivi la publication de nombreux ouvrages et articles universitaires invalidant historiquement, philosophiquement et surtout scientifiquement l’acquis freudien.

En 2007, Patricia Cohen du New York Times revenait sur la postérité psychanalytique comme on se penche sur un cadavre dans un état de décomposition avancée: la majorité des tissus originaux ont disparu, dispersés et digérés au loin par des organismes étrangers. Ainsi, la psychanalyse, qu'elle comparait à la saignée par apposition de sangsues, pouvait-elle certes s'enorgueillir d'une grande influence culturelle, mais au niveau du cursus universitaire psychologique et psychiatrique, on lui avait depuis longtemps préféré l'arsenal «evidence-based» –fondé sur des faits, comme le sont aujourd'hui toutes les disciplines médicales, y compris celles voulant comprendre et soigner les troubles de l'esprit.

En France, pourtant, on traîne tellement la patte qu'on en vient à creuser des tranchées. En février 2004, l'Inserm publiait, sur la base de plus de 1.000 études publiées dans la littérature scientifique internationale, une expertise collective (PDF) portant sur l'efficacité de trois types de psychothérapies:

  • la psychanalyse (et les thérapies dites «dynamiques»)
  • la thérapie familiale
  • les TCC

Elle concluait à une efficacité inférieure de la psychanalyse par rapport aux autres approches. Mais après plus d'un an de ramdam médiatique et autres protestations diverses orchestrées par les associations de psychanalystes, Philippe Douste-Blazy, alors ministre de la Santé, désavouait publiquement ce rapport et en annonçait la suppression du site Internet de son ministère.

Résultat, avec l'Argentine, la France est aujourd'hui le seul pays au monde où la psychanalyse a encore ses quartiers dans le milieu médical et thérapeutique officiels: à l'heure actuelle, 80% des psychologues et psychiatres prenant leurs fonctions sont formés à la psychanalyse.

Certains étudiants en psychologie, comme me le confirmait une récente diplômée de l'Université Paris-7, refusent même sciemment d'assister aux cours où il est question de neurosciences, dénonçant des procédés «scientistes», «totalitaires» ou «réductionnistes»... sans aucune conséquence sur l'obtention de leur diplôme final ou leur pratique future.

Sarah Chiche, qui a ouvert son cabinet de psychanalyste l'an dernier et qui s'«intéresse aux neurosciences» déplore elle aussi ce décalage entre l'état des connaissances actuelles et l'état actuel de l'enseignement:

«Lorsque j’ai fait mon cursus de psychologie clinique à l’Université, j’ai été atterrée par certains cours où l’on nous expliquait le plus tranquillement du monde qu’un enfant peut devenir autiste s’il n’a pas été bien porté par sa mère, si sa tête n’a pas été bien soutenue –d’où les angoisses de tomber dans des trous sans fond, supposées fréquentes chez les personnes autistes. Et tout cela n’a pas eu lieu dans les années 1970, avant le développement de l’imagerie cérébrale, mais en 2009.»

Elle poursuit:

«Je suis devenue analyste, non pas pour passer mes week-ends en séminaires à gloser sur le malaise de l’individu contemporain, les ravages du néo-libéralisme ou le déclin du signifiant paternel dans les banlieues, mais pour soigner des gens: écouter ce que les gens disent avec leurs symptômes et comment cela se situe dans une trajectoire, et, à partir de là, les aider à ne plus faire de leurs souffrances, si difficiles soient-elles, une maladie. Ce qui m’intéresse dans mon métier, c’est la dimension thérapeutique. Et je peux vous assurer que la psychanalyse, ça marche. Mais si un patient se plaint de douleurs récurrentes au dos et que ça l’angoisse, au bout d’un temps, je n’hésiterai pas à l’envoyer consulter un médecin et je me garderai bien de lui dire “mais, mon cher, l’angoisse il faut savoir vivre avec, et si vous avez mal, c’est parce que vous en avez plein le dos”. Quand on prétend s’intéresser à la singularité du Sujet, la moindre des choses, c’est de ne pas se contenter de lire les publications de son petit cercle analytique germanopratin, mais de s’informer sur ce qui se dit à l’étranger et de lire de la littérature scientifique internationale.»

Un «bouc-émissaire», ou des praticiens qui refusent d'évoluer?

Du côté des psychanalystes opposés à Sophie Robert, là n'est pas la question. Le problème ne vient pas d'un retard théorique, ou même d'un simple écart épistémologique qui gratifierait la critique contenue dans son film d'une certaine pertinence, mais d'une hostilité plus diffuse et coriace. A l'instar d’Eric Laurent interrogé par la BBC, nombreux sont ceux pour qui la psychanalyse est devenue un «bouc-émissaire», victime de poussées marchandes et libérales, d'exigences de «rentabilité» et autres systèmes de pensée utilitaires où la science a tôt fait d'être appelée à la rescousse.

Mais cette façon de voir les choses ne cache-t-elle pas aussi des praticiens bloqués dans des schémas théoriques et thérapeutiques quelque peu désuets? Pour Sébastien Smirou, écrivain et psychanalyste, si Le Mur n'est pas un bon état des lieux de LA discipline «pour la simple et bonne raison qu’elle n’existe pas», le côté «militant» du documentaire lui confère une certaine force.

«Les façons de vivre ensemble se modifient en permanence, il ne faut pas croire que les symptômes des gens s’arrêtent à ce qu’on en sait ou que ce savoir serait figé une fois pour toutes. On se retrouve chaque jour face à des situations cliniques nouvelles pour lesquelles le petit Freud ou le petit Lacan illustrés servent tout juste à s’assurer qu’on a déjà su quelque chose de quelque chose... Demandez à Freud, à Lacan, ou à Winnicott comment ils s’y sont pris en consultation quand un gamin de 7 ou 8 ans leur a inspiré de la peur, mais réellement de la peur, parce qu’il venait d’envoyer d’autres adultes se faire recoudre aux urgences, par exemple, et qu’il menaçait de faire la même chose avec vous. Ils ne vous répondront pas parce que, de leur temps, ils n'en recevaient pas, voilà. Parlez-leur de vos obsessionnels et demandez-leur d’y retrouver le portrait de L’homme aux rats; ça ne marchera pas non plus. Et puis vous pouvez faire l’inverse: cherchez parmi vos patientes une hystérique dont le corps se tordrait jusqu’à faire un pont sur votre divan; vous risquez d’attendre longtemps.»

De même, selon un autre analyste d'obédience freudienne –ayant préféré rester anonyme, pour ne pas «brusquer» ses patients et ses collègues–, la plupart des psychanalystes «qui s’occupent aujourd'hui d’enfants autistes et de leurs familles ne se rendent pas compte que les gens à qui ils parlent ne sont plus du tout ceux pour qui les procédés et les prises en charge de années 1970 fonctionnaient. Ils voudraient que les patients aient les symptômes et le genre de souffrance auxquels ils sont habitués, ou bien qu’ils s’imaginent appartenir par essence à la “théorie psychanalytique”. Ils ne sont pas fondamentalement bêtes ou méchants d’ailleurs, ils sont juste déphasés».

Un film catalyseur

Ce «déphasage» n'est pas sans conséquence sur les patients et leur entourage, comme le dénoncent le documentaire de Sophie Robert et les nombreuses associations de parents autistes qui se battent au quotidien pour que leurs enfants soient convenablement pris en charge, c'est-à-dire soumis à des arsenaux éducatifs et thérapeutiques adaptés à leurs troubles et ayant fait leurs preuves (méthodes ABA et TEEACH, en particulier, qui «fonctionnent» en termes d'amélioration du quotient intellectuel, des compétences de communication et du langage sur environ 1 enfant sur 2), sans être retirés à leur famille, isolés scolairement, le tout sans aucune information sur l'avancée du traitement. 

Ainsi, dans le film, outre un Pierre Delion expliquant que le «résultat n'est pas une question psychanalytique», on voit aussi un Laurent Danon-Boileau, psychanalyste, mais aussi professeur de linguistique générale et d’acquisition du langage à Paris-5 et responsable d’équipe au sein du département du CNRS «acquisition et pathologie du langage de l’enfant», expliquer doctement que, face à un enfant autiste, il «pose [ses] fesses», attend «qu'il se passe quelque chose», oublie «que le temps presse pour lui apprendre le langage», se met dans une position où il n'a «ni mémoire ni attente» et abdique «l'idée d'une progression». Pour quelqu'un qui, de son propre aveu est «payé pour donner du soin», le conflit dans les termes est patent –un conflit qu'il gère par ailleurs très bien, vu qu'il s'agit du «fondement-même de la pratique psychanalytique».

Pour Sophie Robert, qui a l'énergie et la combativité des gens déçus –elle a passé près de vingt ans à étudier la psychanalyse «en anthropologue» et a même envisagé d'en faire son métier– attaquer judiciairement son film a été une «erreur monumentale» pour les psychanalystes.

«Ils ont donné une notoriété considérable à ce film qui ne serait jamais arrivé là s'ils m'avaient laissée tranquille, ils ont déjà perdu sur le plan de la réputation et ce sera encore plus le cas s'ils arrivent à soudoyer les juges en appel [1], car s'ils continuent à dire que j'ai dénaturé les propos des psychanalystes, alors que j'ai des heures de rushes qui disent le contraire, ça va se voir et se savoir.»

Mais plus loin que la simple querelle «intellectuelle», déjà portée par des ouvrages comme Le livre noir de la psychanalyse ou le plus médiocreCrépuscule d'une idole – L'affabulation freudienne, de Michel Onfray, le film de Sophie Robert n'est pas une critique externe et formelle des errements de la psychanalyse, qui serait, au pire, le discours un peu abscons d'individus un peu allumés.

En laissant les professionnels du secteur dérouler librement un jargon que peu de non-initiés connaissent, et en le confrontant avec une réalité de «terrain» –le quotidien de deux adolescents autistes–, le tout dans une mise en scène extrêmement sobre, elle montre les conséquences concrètes d'une théorie complètement coupée de la réalité et arrive à en documenter les dérives sectaires avec une force que peu d’initiatives «rationalistes» classiques ont pu égaler. En un mot, avec «le mur», c'est le «délire scientifique» (Lacan) de la psychanalyse qui est mis à nu, et son mysticisme délétère qui arrive enfin, en France, aux yeux et aux oreilles du grand public.

«Mon film a servi de catalyseur pour tous ceux qui dénoncent depuis très longtemps les dérives de la psychanalyse dans l'autisme, et les dérives sectaires de la psychanalyse en général, explique-t-elle. La différence, c'est que, dans mon film ce sont des psychanalystes qui parlent, et pas quelqu'un d'extérieur qui l'analyse et la critique, et cela change tout. Ils se sont tirés une balle dans le pied. Car cela a permis à des familles de se fédérer et de gagner la grande cause nationale, qui est une conséquence directe de mon film. Cela a généré une prise de conscience globale et beaucoup de décisions politiques ont été prises ou sont en cours de considération.»

Quand je l'ai appelée, le 20 février, Sophie Robert disait avoir conscience de «travailler pour l'histoire».

L'histoire lui donnera-t-elle raison? La  mort de la psychanalyse est-elle inévitable, elle qui, selon Pierre-Henri Castel est «intrinsèquement artificielle, contextuelle, historique, et périssable à tout moment»? Pour Sarah Chiche «il n'est pas du tout certain qu'on arrive à la sauver, du moins pas celle qui se donne à voir actuellement. Mais il est peut-être possible de la transformer. Cela demandera de la combativité, de la créativité, beaucoup de temps et, surtout, un peu de modestie»

Peggy Sastre


[1] Appel qui aura lieu en septembre ou octobre de cette année; en attendant, le tribunal de Douai a ordonné mi-mai la suspension des dommages et intérêts et des publications judiciaires, tout en maintenant l'interdiction de diffusion du film en l'état.

http://www.slate.fr/tribune/56681/autisme-psychanalyse-france-le-mur#retour1

24 mai 2012

article publié dans l'express.fr le 24 mai 2012

Quand la peur change de camp…

J’avoue avoir pris beaucoup de plaisir à sous titrer la vidéo dans laquelle Esthela Solano explique à Sophie Robert les raisons de l’autisme.

Pourquoi ?

Tout simplement parce que ce genre de propos on ne l’entend pas du tout en public. Mais en privé, entre les parents et le professionnel en qui ils ont naturellement confiance…En voici quelques extraits

« Pour soigner l’autiste, il faut d’abord soigner la mère »

« Les personnes autistes le sont parce que leur mère ne les a pas aimés ou parce qu’elle est dépressive »

« Madame, votre fils souffre d’insécurité affective »

« Lorsque l’on aura trouvé pourquoi charles vous en veut. Il sera guérit. »

« Si vous ne dites pas à votre enfant qu’il a le droit de grandir il ne le fera jamais! En l’allaitant ainsi à plus de deux ans il ne sait    pas qu’il a le droit de grandir !  »

 » Vous avez une mère qui était dépressive et qui a fini par se suicider
et votre enfant porte la tristesse que vous vous lui avez transmise »

…..

Il est temps, définitivement temps que ces professionnels soient mis à l’écart de toute prise en charge d’un enfant avec autisme.

Il est temps, définitivement temps que l’état arrête de les reconnaître, que la Sécurité Sociale arrête de les rembourser.

 

Le film « Le mur ; la psychanalyse à l’épreuve de l’autisme » a provoqué une onde de choc chez les milliers de parents, qui reconnaissaient dans les propos des psychanalystes interviewés ce qu’ils avaient entendu.

Ces psychanalystes, n’assumant pas ce qu’ils affirment, ont lancé une procédure judiciaire pour censurer le film, sous prétexte que leurs propos sont dénaturés… et bien, voila dans cette vidéo, Esthela Solano ne pourra pas se plaindre de cela.

Voir ces psychanalystes se dire victime d’associations de parents, victimes d’un complot des lobbies comportementalistes… Qui sont reellement les victimes ?

Quand des milliers d’enfants autistes sont laissés dans un coin, parce que  « Le meilleur moyen de l’aider est de respecter sa volonté de s’isoler ».

Quand ces enfants sont shootés aux neuroleptiques, car des troubles de comportements qui sont majoritairement des tentatives de communication se sont installés, suite à cette volonté d’attendre l’émergence du désir  ?

Quel parent sera surpris par les propos d’Esthela Solano ? Choqué oui, surpris… Non, c’est la routine.

Je me sens personnellement en colère… En colère parce que le système de santé Français cautionne ce genre de pratique. Parce que des générations d’enfants sont sacrifiées, des vies sont gâchées, dévastées, détruites. Parce que l’état Français n’a pas le courage de dire « non » à ce genre de professionnels qui ont tant de pouvoir sur eux.

Mais je suis aussi contente, car grâce à ce film, grâce au courage et à la volonté de sa réalisatrice Sophie Robert, les parents osent parler, témoigner. L’information n’a jamais aussi bien circulé parmi les parents, qui savent maintenant où ne pas aller, et où aller ( à l’étranger ! )

Et la peur change de camp, petit à petit…

http://blogs.lexpress.fr/the-autist/2012/05/24/quand-la-peur-change-de-camp/

24 mai 2012

article publié dans l'express.fr le 24 mai 2012

Quand une psychanalyste rend les mères responsables de l'autisme

Par Estelle Saget, publié le 24/05/2012 à 10:17, mis à jour à 10:58

 

L'Express s'est procuré une séquence inédite du tournage du documentaire polémique Le Mur. Une psychanalyste y pointe la responsabilité des mères dans l'autisme de leur enfant. 

Une séquence vidéo inédite, que L'Express s'est procuré (ci-dessous), éclaire sous un jour nouveau l'affaire du documentaire Le Mur, qui dénonce le traitement de l'autisme par la psychanalyse. Le tribunal de grande instance de Lille a condamné, le 26 janvier dernier, la documentariste Sophie Robert à d'importants dommages et intérêts pour avoir, au cours du montage de son film, "dénaturé le sens des propos effectivement tenus" par trois des psychanalystes interviewés. La réalisatrice a fait appel de la décision. Cette affaire s'inscrit dans un contexte plus global de remise en cause du rôle de la psychanalyse dans le suivi des enfants autistes. Cette approche, largement utilisée en France, a été désavouée le 8 mars par la Haute autorité de santé, qui a recommandé d'utiliser des méthodes alternatives, dites éducatives, pour traiter ce trouble précoce de la communication. 

 

Parmi les griefs qui sont faits à la psychanalyse: elle véhiculerait une explication erronée de l'autisme. Selon certains psychanalystes, ce trouble apparait en réaction à l'attitude inappropriée de la mère, qui se comporte de manière trop froide ou trop possessive vis-à-vis de son enfant. Or, il existe à présent un large consensus dans la communauté scientifique internationale pour considérer l'autisme comme un trouble d'origine neurobiologique, autrement dit le résultat d'un mauvais développement du cerveau. C'est l'un des sujets sur lesquels s'expriment les psychanalystes interviewés dans le documentaire, notamment Esthela Solano-Suarez, l'un des trois plaignants. 

La séquence que L'Express porte aujourd'hui à la connaissance du public est extraite de l'entretien de trois heures accordé à Sophie Robert par Esthela Solano-Suarez, le 5 novembre 2011, dans son cabinet parisien. Ce plan de sept minutes n'a pas été retenu au montage, mais il figure dans les rushes qui ont été saisis par la justice, désireuse de comparer les propos tenus par les interviewés avec les extraits qui ont été présentés dans le film. 

Selon Sophie Robert, il s'agit du moment où Esthela Solano-Suarez a demandé à faire une pause pour boire un verre d'eau. La psychanalyste a retiré son micro filaire, placé sous le col de sa robe, puis s'est déplacée dans la pièce, sortant du champ de la caméra, posée sur un pied face à son bureau. La conversation s'est poursuivie de manière plus informelle entre la documentariste et la psychanalyste, et a été enregistrée par le micro de la caméra. 

En voici les principaux extraits:

"Esthela Solano-Suarez: Sur ce point [NDLR: la responsabilité de la mère dans l'autisme de son enfant], il faut faire attention parce qu'au lieu de rendre service à la psychanalyse, on donne des arguments pour se faire attaquer. 

Sophie Robert: Vous pensez qu'il y a un trouble de la relation maternelle quand même à la base?  

ES: Mais oui, mais oui... 

SR: Mais comment est-ce qu'on peut expliquer que cette "non rencontre" puisse produire de l'autisme? 

ES: C'est comme un laisser tomber profond, irrémédiable, qui se produit dès le début. 

SR: La mère a laissé tomber l'enfant? 

ES: Un laissé tomber, quelque chose qui fait faillite au niveau de l'amour. 

SR: Au niveau de l'amour? 

ES: Au niveau de l'amour. [...] 

SR: Il n'y a pas des mères d'enfants autistes qui aiment sincèrement leur enfant? 

ES: Elles vont vous dire qu'elles adorent leurs enfants, mais vous pouvez vous apercevoir que l'enfant est en train de vous exprimer quelque chose et qu'elle est absolument absente, qu'elle n'entend pas... L'autisme de l'enfant, c'est une conséquence d'un certain autisme de la mère à l'égard de l'enfant. Je vais vous dire une chose, j'ai reçu une petite fille autiste, elle avait 9 ans, elle parlait pas, elle faisait des bruits horribles, des hurlements, aucune parole, aucune, et au bout d'un an, un an et demi de traitement, elle est au seuil de la porte, elle va partir avec sa maman, et alors elle se retourne, la petite fille, vers moi, elle me fait un geste et me dit 'au revoir Madame'. C'était un miracle. C'était la première parole de sa vie! La mère m'a dit 'vous avez entendu au revoir? PAS MOI!' Là il y a quand même quelque chose d'extraordinaire. 

SR: Elle était peut être jalouse? 

ES: Oui, oui, mais j'ai constaté aussi, mais je pourrai pas le dire devant la caméra, que lorsque les enfants commencent à parler, commencent à s'humaniser, c'est à ce moment là que les mères disent que ça va pas, que leur enfant devient insupportable, et qu'elles arrêtent. Il y a quelque chose d'insupportable du désir et de la demande de l'enfant. Elles peuvent supporter un enfant qui hurle toute la journée. On n'entend pas, on fait comme si on n'entendait pas. Et elles ne supportent pas un enfant qui dit 'je veux pas' ou 'je veux', c'est-à-dire un enfant qui se détermine comme étant un sujet en dehors d'elles. Différent d'elle-même. [...] 

SR: Et le père il ne peut pas aider? 

ES: Il y a des pères qui peuvent suppléer les carences maternelles, oui. C'est possible que ce soit le père qui assume la fonction de l'amour, la fonction du don, cette fonction essentielle, oui. C'est possible. [...] 

SR: C'est l'amour de la mère qui rend humain? 

ES: Mais oui, évidemment, mais oui. Mais quand on n'a pas reçu d'amour, on ne peut pas en donner." 

Dans cette séquence inédite, Esthela Solano-Suarez adopte une position beaucoup plus tranchée à propos de la responsabilité des mères dans l'autisme de leur enfant que dans les extraits qui ont été retenus au montage. Le document laisse ainsi entendre que, sur ce point précis, la pensée de l'interviewée n'a pas été caricaturée dans le film mais, au contraire, atténuée. Contacté par L'Express par téléphone, Esthela Solano-Suarez n'a pas souhaité faire de commentaire, compte-tenu de la tenue dans les prochains mois du procès en appel dans cette affaire. 

Cette séquence a été versée au dossier d'appel, selon l'avocat de la documentariste, Me Stefan Squillaci. On peut se demander pourquoi il n'a pas été retenu au montage, alors que les propos tenus sont particulièrement forts. Interrogée sur ce point, Sophie Robert avance des raisons techniques. "J'ai mis cette séquence de côté parce que dans celle-ci, Mme Solano-Suarez ne portait pas son micro filaire et que le son était moins bon que dans le reste de l'interview, affirme-t-elle. De plus elle avait quitté son fauteuil et n'apparaissait plus à l'image." 

D'autres documentaires, pourtant, ne s'embarrassent pas de problèmes d'esthétique quand il s'agit de transmettre des informations considérées comme essentielles. Pourquoi ne pas avoir conservé ce plan malgré tout, quitte à avertir de sa mauvaise qualité? "Les spectateurs n'ont pas été privés des informations qui apparaissent dans ce plan, car Mme Solano-Suarez développe la même idée, celle que les mères sont responsables de l'autisme de leur enfant, dans une autre séquence du Mur, explique Sophie Robert. D'ailleurs, d'autres psychanalystes soutiennent la même thèse ailleurs dans le film."  

Pour son avocat, Sophie Robert mène un combat légitime en dénonçant cette "vision dépassée" de l'autisme, car "les conséquences sont dramatiques pour les enfants autistes". "Puisque le thérapeute considère que la mère est toxique, il cherche à la séparer de son enfant, s'indigne-t-il. Quant au protocole de soins qui est proposé à la famille, il exclut les méthodes modernes qui visent à compenser le handicap de l'enfant en matière de communication, ce qui constitue pour lui une véritable perte de chance." Compte-tenu des différentes étapes à prévoir dans la procédure, l'affaire du Mur ne devrait pas être plaidée en appel avant l'automne. 

http://www.lexpress.fr/actualite/sciences/sante/quand-une-psychanaliste-rend-les-meres-responsables-de-l-autisme_1117934.html

19 mai 2012

article publié dans la Voix du Nord le 17 mai 2012

Le documentaire sur l'autisme toujours interdit La cour d'appel du Nord a statué sur le cas de Sophie Robert. La documentariste lilloise a réalisé Le Mur, qui critique la prise en charge des autistes par la psychanalyse. En janvier, elle avait été condamnée par le tribunal de Lille à verser 36 000 euros de dommages et intérêts à trois psychanalystes de renom qu'elle avait interviewés et dont la justice avait estimé qu'elle avait dénaturé les propos. Si la cour a suspendu le versement, le film reste interdit à la diffusion.

http://www.lavoixdunord.fr/Region/actualite/Secteur_Region/2012/05/17/article_24-heures.shtml

25 avril 2012

article publié sur le blog de Franck Ramus FRblog le 24 avril 2012

Lacan Quotidien, ou la psychanalyse à l'épreuve de l'autisme

 

Pour tous ceux qui pensaient que le documentaire "le Mur" était un odieux trucage, que les inepties qui y étaient proférées par certains psychanalystes sur l'autisme étaient le fruit de savants coupés-collés, il faut absolument lire ce texte annonçant les 42e Journées de l’Ecole de la Cause freudienne sur le thème "Autisme et psychanalyse".

Sophie Robert, tu peux aller te rhabiller. A quoi bon t'être échinée à interroger et filmer des psychanalystes pendant des dizaines d'heures, à quoi bon faire de malicieuses coupures et de pernicieux collages, alors qu'on peut retrouver tout ça en mieux en lisant simplement Lacan Quotidien?

Jean-Marie de Lacan, avoue-toi vaincu! Je te mets au défi d'arriver à parodier un texte qui est encore plus fort que la pire de tes satires!

Franck Ramus, remballe ta rationalité de pacotille! Les psychanalystes de la CIPPA, tu pouvais encore arriver à leur poser des questions. Mais les lacaniens de l'ECF, jamais tu ne pourras les atteindre avec tes arguments bassement matérialistes...

http://franck-ramus.blogspot.fr/2012/04/lacan-quotidien-ou-la-psychanalyse.html?spref=fb

14 avril 2012

article publié sur le site de l'AFIS (Association Française pour l'Information Scientifique)

Autisme et psychanalyse : une rhétorique d’esquive et de contradiction

par Nicolas Gauvrit

Depuis quelques mois, l’autisme et son traitement psychanalytique sont au cœur d’une polémique médiatique vive. Plusieurs événements, regroupant le procès puis la censure du film Le Mur de Sophie Robert, l’inauguration de l’année 2012 comme « année de l’autisme », les recommandations à venir de la HAS (Haute Autorité de la Santé) qui préconiserait l’abandon de l’approche psychanalytique, et l’implication du député Daniel Fasquelle, qui adopte une position similaire, ont participé à l’émergence de cette polémique.

Le philosophe Jean-François Rey publiait ainsi le 22 février 2012 dans les colonnes du Monde un plaidoyer touchant (« Autisme : c’est la psychiatrie qu’on attaque ») pour le maintien dans la psychiatrie d’une approche psychanalytique. Cet article est très représentatif de ceux qui circulent en ce moment, et illustre les lignes de défense prises par les psychanalystes et les artifices rhétoriques utilisés dans le débat en cours, dont quelques-uns nous semblent récurrents et contre lesquels il faut mettre en garde le lecteur. Si les tenants de la psychanalyse ont évidemment le droit d’exprimer et défendre leur point de vue, cela devrait se faire dans le respect de la rigueur et de la logique.

La victimisation apparaît d’abord sous des formes variées avec parfois des accents enfantins provoquant la pitié du lecteur. Ainsi, J.-F. Rey écrit-il par exemple que Pierre Delion « dont on ne dira jamais assez la gentillesse et l’esprit d’ouverture, est la victime d’une véritable persécution ». On se souvient également des titres d’Élisabeth Roudinesco dénonçant la « haine » de la psychanalyse. Il ne s’agit pas ici de prétendre que la psychanalyse n’est pas victime d’attaques, mais de rappeler que la remise en question académique est normale et fait partie du processus scientifique. Il n’y a pas lieu de s’en formaliser : nous devons, pour le bien des enfants avec autisme et de leurs parents, déterminer quelle méthode est la meilleure pour chacun. Le fait que les porteurs d’une méthode soient critiqués ne valide en rien leur théorie.

La psychanalyse a, de fait, largement reculé dans les universités françaises – mais beaucoup moins chez les praticiens. Elle a été la cible de critiques scientifiques importantes. La faiblesse de ses bases théoriques, l’absence de preuves d’efficacité, et désormais son incapacité à répondre à ces critiques, ont rendu intenable – et spécialement dans le cadre de l’autisme – la position purement psychanalytique. Aussi, les tenants de cette « cure » ont-ils adopté une position intermédiaire, et promeuvent désormais une approche intégrative, macédoine de thérapies baignant dans la sauce psychanalytique. Or, pas plus que la psychanalyse seule, cette intégration n’a fait la preuve d’une efficacité supérieure aux autres méthodes actuellement disponibles. Si cette position convainc, c’est uniquement parce que nous sommes tous sensibles à ce qu’on pourrait appeler le « sophisme du juste milieu », selon lequel la vérité est toujours à chercher à mi-chemin entre les opinions contradictoires, ce qui est souvent faux.

Les promoteurs d’une approche psychanalytique ont également recours, ces derniers temps, à l’esquive. Cette feinte consiste à détourner l’interlocuteur de la question primordiale – celle de l’efficacité des méthodes et du bien de l’enfant – en déplaçant le discours dans le champ affectif, celui de la culpabilité ou de « l’éthique ». Pour cela, ils s’appuient sur une représentation sociale caricaturale de la psychologie, qui oppose des psychanalystes profondément humains, et des cognitivistes prônant une approche chimique. La réalité est bien différente, et de nombreux « cognitivistes » voient dans les approches thérapeutiques fondées sur la science une alternative non seulement à la psychanalyse, mais aussi et surtout aux traitements par psychotropes. Pourtant, J.-F. Rey ressasse dans son article que l’abandon de la psychanalyse « assèche », déshumanise, et détruit l’éthique de la profession de psychothérapeute, allant jusqu’à prétendre que les méthodes éducatives, cognitives ou comportementales de l’autisme consistent à traiter tous les enfants de la même manière, selon un protocole indépendant de la singularité de la personne… oubliant ce que le code de déontologie des psychologues prévoit (on lit dans le préambule de la version de février 2012 : « La complexité des situations psychologiques s’oppose à l’application automatique de règles »).

Pour faire bonne figure, déplorant que le débat devienne une guerre d’opinions au lieu d’une controverse plus rationnelle, les défenseurs de la psychanalyse réclament souvent qu’il soit recentré sur les aspects scientifiques. Mais ces appels à un débat scientifique sont contredits par le déplacement du discours dans le champ émotionnel et l’attachement à l’idée que la psychanalyse est par essence non testable. C’est ainsi que dans son article J.-F. Rey réclame un retour au cadre scientifique, mais rappelle que le psychanalyste lacanien ne se réclame que de lui-même (et donc pas de la science). En maudissant le « scientisme » qu’il ne définit pas, il arrive en fait dans un seul mouvement à réclamer ce qu’il refuse.

Après un siècle d’utilisation, on attend toujours des éléments tangibles, des expériences reproductibles en faveur des théories et pratiques psychanalytiques. Au lieu de travailler à les produire, les tenants de cette approche dépensent beaucoup d’énergie pour esquiver une réflexion sur cette absence de validation, en postulant que la psychanalyse est inaccessible à l’investigation scientifique (une pure profession de foi). Si tel était le cas pourtant, la psychanalyse serait une philosophie, un récit. Le code de déontologie des psychologues, qui rappelle dans l’article 14 notamment que le psychologue doit utiliser des méthodes scientifiquement éprouvées, impose donc l’abandon de la psychanalyse, au moins dans tous les cas où une alternative efficace existe, et jusqu’à ce que la psychanalyse ait pu fournir des arguments solides en sa faveur.

http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1826

14 avril 2012

article publié sur le blog d'Igor Thiriez le 13 avril 2012

Un délire thérapeutique mais non évaluable ?

L’épreuve de réalité à laquelle sont confrontés les psychanalystes, depuis toujours disent-ils, les conduit dernièrement à adopter des positions défensives assez pathétiques. Le fameux clivage, qui leur permettait de délirer entre eux tout en délivrant d’inoffensives bonnes paroles au peuple, ne suffit plus à les immuniser contre les critiques légitimes qui leur sont adressées, effectivement depuis toujours…

Ces psychanalystes sont aujourd’hui contraints de rendre des comptes comme jamais auparavant, donc à une ouverture pour le moins périlleuse puisqu’il s’agit de laisser la population découvrir que la pratique psychanalytique est fondée sur des idées délirantes.

Le reportage de Sophie Robert constitue à ce jour la meilleure illustration de ce phénomène en offrant “de la bouche des psychanalystes eux-mêmes” le contenu brut de ce délire. Si ces psychanalystes ont su considérer ces propos comme inacceptables, ils n’ont pas su s’en attribuer la responsabilité et ont préféré faire condamner la réalisatrice.

Le dernier triste spectacle auquel ont pu assister les internautes consistait en l’interview d’un psychiatre du collectif des 39 dont les propos ont été enregistrés avant d’être retranscrits ici. Nous y retrouvons les postures habituelles des psychanalystes, le rejet violent des critiques, la victimisation, la désignation de persécuteurs suivie de leur diabolisation, et enfin une sorte d’autocongratulation associée à des diversions sous forme de revendications multiples et utopiques. L’incapacité ponctuelle de ce psychiatre à circonscrire le délire psychanalytique conjugué à l’absence de collaboration journalistique à ce niveau, aboutit à la présence de propos pour le moins fâcheux. À l’instar de ses confrères du MUR, le Dr Bokobza n’en assumera pas la responsabilité et accusera le journaliste de les avoir dénaturés. Son droit de réponse en est l’illustration.

Voici donc, sur la base des propos de ce psychiatre, une sorte de dénominateur commun des pensées psychanalytiques face à la critique :

1. Déni

a. Les parents ne sont pas insatisfaits, sauf une petite minorité

Ces opposants sont en réalité très minoritaires et extrêmement militants. Ils ne sont pas représentatifs de l’ensemble des parents autistes.

Les associations de parents qui récusent aujourd’hui notre approche, c’est vingt personnes qui passent leur vie sur Internet.

Selon moi, si les parents satisfaits de la psychanalyse ne s’expriment pas, c’est qu’ils ont honte.

b. Cette petite minorité est manipulée par le lobby des comportementalistes

Mais la véritable explication, c’est qu’ils sont manipulés par le lobby des comportementalistes. On leur fait croire que l’approche comportementale peut sauver leurs enfants…

c. Cette petite minorité relève de la paranoïa ou de l’hystérie

Ils font de l’envahissement paranoïaque. Ces gens-là ne se posent aucune question concernant leur enfant. Ils refusent, par exemple, qu’on leur demande s’ils l’ont vraiment désiré. Cette question n’est pas habile, je vous l’accorde, mais elle est incontournable.

d. Les critiques adressées aux psychanalystes ne sont pas fondées, sauf pour une petite minorité d’entre nous

Comme dans tous les métiers, il y a des bons et des mauvais psys.

Pourquoi ne vouloir s’appuyer que sur les pratiques inacceptables d’une très petite minorité de psychanalystes pour organiser une attaque d’envergure contre la psychanalyse?

e. Notre pratique n’est pas évaluable

Nous ne répondons pas à leurs critères d’évaluation donc, pour eux, nous ne sommes pas crédibles. Mais le principe d’évaluation à partir de normes est radicalement opposé à notre démarche! La relation avec le patient, on ne peut pas l’évaluer.

2. Victimisation

a. Pierre Delion : le martyr

Tous soutiennent notre collègue, le professeur Pierre Delion, modèle d’ouverture, d’humanité et d’intelligence, harcelé depuis des années et quelquefois menacé par des personnes qui ne veulent ou ne peuvent rien entendre de la complexité des situations singulières de chaque enfant qui souffre.

Et c’est lui qui est harcelé par les associations de parents.

b. Pauvres de nous

Actuellement une campagne d’une rare violence, appuyée sur des certitudes bien étranges, affirme que la psychanalyse n’aurait rien à voir, à faire, ou à dire concernant l’autisme.

c. Pauvres enfants, pauvres parents

Comment accepter de “divise ” un enfant de cette manière?

C’est tellement l’horreur absolue d’avoir un enfant autiste.

En réalité, il s’agit de méthodes extrêmement violentes, importées des Etats-Unis. Elles coûtent 30 000 euros par an et par enfant.

Ils refusent, par exemple, qu’on leur demande s’ils l’ont vraiment désiré. Cette question n’est pas habile, je vous l’accorde, mais elle est incontournable.

L’arrivée d’un enfant autiste bouleverse une famille. Cela renvoie les parents à leur histoire personnelle, à des choses extrêmement douloureuses. Cela touche à leur intimité, qu’ils n’ont pas envie de dévoiler.

Un déni de démocratie existe non pas quand des idées font l’objet de débat quelquefois vifs mais quand dans notre pays un trop de familles sont confrontées dramatiquement à la recherche d’une place pour leur enfant!

d. Pauvre culture

Pourquoi vouloir exclure du champ de la prise en charge des enfants autistes une théorisation qui depuis plus d’un siècle est devenu un fait de culture?

3. Persécution

a. Les comportementalistes = dresseurs normalistes = danger

Mais la véritable explication, c’est qu’ils sont manipulés par le lobby des comportementalistes. On leur fait croire que l’approche comportementale peut sauver leurs enfants…

En réalité, il s’agit de méthodes extrêmement violentes, importées des États-Unis. Elles coûtent 30 000 euros par an et par enfant. Il y a derrière tout ça un immense enjeu financier. Et même si elles marchent parfois, cela reste du dressage! C’est comme la peur du flic, certes efficace, mais à quel prix?

Les comportementalistes disent que la psychanalyse n’est pas scientifique, qu’il n’y a pas de preuve de son efficacité.

Mais je suis opposé aux normes à base de statistiques et de chiffres que les comportementalistes tentent d’imposer.

b. génétique = solution de facilité = eugénisme = fascisme = danger

C’est plus facile de dire à un parent “vous n’y êtes pour rien dans l’autisme de votre enfant, c’est génétique”. Ces professionnels jouent sur l’illusion. Je comprends très bien que ce soit plus reposant pour les parents. C’est tellement l’horreur absolue d’avoir un enfant autiste.

c. Haute autorité de santé = illusionnistes = dictateurs normatifs = danger

Aussi je soutiens que ceux qui, telle que la haute autorité de santé (HAS) veulent faire croire que certaines techniques, parce qu’elles seraient “les plus évaluables” doivent être utilisées seules, à l’exclusion de toutes les autres, sont des marchands d’illusion, à la solde d’une normativité bien inquiétante.

Ces équipes médico-éducatives refusent des diktats venant de l’extérieur qui tentent de formater leur travail en leur imposant des techniques assimilables à des “kit de bonne conduite”.

4. Glorification

a. Pas d’humanisme sans psychanalyse

C’est dans la relation avec l’enfant qu’il se passe quelque chose. Or cette relation n’est possible qu’avec la psychanalyse. Sans elle, on devient des machines, des techniciens de la santé.

Parce qu’elle propose une théorie (certes bien inachevée) du fonctionnement psychique humain et des enjeux relationnels qui en découlent, la psychanalyse est dans ce sens un formidable outil de travail.

b. Pas d’ouverture sans la psychanalyse

C’est l’universitaire le plus ouvert dans le domaine. Il fait pourtant de la recherche et prône une approche intégrative de toutes les disciplines.

c. Pas de remise en question de l’institution ni de soutien à l’entourage sans la psychanalyse

Soigner, en psychiatrie, demande une éthique du doute, une prise de risque.

En ce sens l’apport de l’outil psychanalytique est important si l’on veut aider des éducateurs ou des pédagogues à soutenir leur relation avec les enfants dont ils s’occupent, ou bien aider les parents qui le demandent à se dégager quelque peu de leur difficulté (détresse, angoisse, culpabilité) pour mieux pouvoir répondre aux besoins et désirs de leurs enfants. Il est aussi fort utile quand il s’agit de repérer dans une institution les mécanismes de rejet ou d’exclusion (ou de pitié) sécrétés par les difficultés de cette pratique qui demande d’entrer en négociation permanente avec soi, avec son intimité.

d. Les étrangers nous l’envient, la psychanalyse

La psychiatrie française, que le monde entier admire, ne doit pas être balayée par le moyen des critères d’évaluation.

e. Pour toutes ces raisons : la résistance s’impose

Nous allons rentrer en résistance, en continuant de défendre haut et fort ce que nous pensons.

Ce ne sont pas les psychanalystes qui vont entrer en résistance mais les milliers de personnes qui, travaillant en équipes pluridisciplinaires, accueillent, partagent accompagnent la souffrance des enfants et des parents, au quotidien, en permanence.

5. Diversion : le vrai problème, c’est le manque de moyens

Toutes ces polémiques permettent hélas d’éviter une question centrale: comment les équipes de soins et les parents peuvent ils s’unir pour exiger des pouvoirs publics des moyens supplémentaires en personnels et en institutions pour s’occuper des enfants autistes?

http://igorthiriez.wordpress.com/2012/04/13/un-delire-therapeutique-mais-non-evaluable/ 

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