Le temps, qui lui est compté à cause de son grave handicap, est au coeur du film "Michel Petrucciani", en salle mercredi et qui retrace la vie d'un musicien l'ayant brûlée jusqu'à son dernier souffle, une nuit d'hiver new-yorkaise en janvier 1999, quelques jours après son 36e anniversaire.
Le temps, qui lui est compté à cause de son grave handicap, est au coeur du film "Michel Petrucciani", en salle mercredi et qui retrace la vie d'un musicien l'ayant brûlée jusqu'à son dernier souffle, une nuit d'hiver new-yorkaise en janvier 1999, quelques jours après son 36e anniversaire.
La naissance à Orange, les os brisés par l'ostéogenèse imparfaite ou maladie des os de verre dont il est atteint, l'éveil musical précoce, l'immersion dans le monde du jazz en Californie, les années de vie frénétique à New York, le retour en France avec le statut de star.
..
A travers le récit chronologique, et grâce à un savant montage de nombreux témoignages actuels de personnes l'ayant côtoyé plus ou moins intimement (son père, son frère, son fils, son médecin, ses compagnes, des musiciens, producteurs, tourneurs, journalistes), d'images d'archives, d'extraits de conversations et interviews du pianiste, le réalisateur américain Michael Radford aborde les différentes facettes d'un personnage hors norme, qui a réussi à transcender son handicap.
Dès l'enfance, Michel, au sein d'une famille de musiciens semi-professionnels où l'on écoute que du jazz, montre d'étonnantes prédispositions pour la musique et de sidérantes capacités d'absorption. Tout va alors déjà très vite, sous la férule d'un père autoritaire et l'attention d'Anna, une mère aimante dont il est fait mystérieusement très peu mention dans le film: premier piano à six ans, premières impros à sept ans, premières jam sessions à neuf ans, premier concert à douze ans...
Lorsqu'il monte à Paris à l'âge de dix-sept ans, il est déjà plein d'assurance et d'insolence.
"Il était tellement sympathique, tellement drôle et tellement vivant, comme un cacou du Midi", dit de lui le batteur Aldo Romano, qui prend alors Michel sous son aile.
Puis c'est l'envol vers la Californie de celui qui "voulait être un jazzman et être au coeur du jazz", où ce phénomène apprivoise un monde à sa démesure, où cet homme charismatique au solide sens de l'humour séduit notamment les femmes, qui tiennent une place importante dans sa vie et dans le film.
A la fin de la période suivante de sa vie, à New York où de son propre aveu ce fêtard "brûle la chandelle par les deux bouts" et "se drogue beaucoup", la machine commence à s'essouffler.
Petrucciani y impose son époustouflante technique, devient le premier non-Américain du label Blue Note, mais cet homme fragile de 91 centimètres y paye un lourd tribut à ses excès.
Derrière l'humour, l'autodérision, le discours ultra-positif de quelqu'un ne se plaignant jamais, pointe une réelle souffrance: les os qui se brisent pendant les concerts, la naissance de son fils Alexandre, atteint du même mal que lui, dont le témoignage est l'un des moments les plus poignants du film.
"Beaucoup de gens de 80, 90 ans, n'ont rien fait d'autre que vivre longtemps, alors quelle importance qu'il ait fait le fou ou dépassé les bornes": cette phrase à la fin du film du contrebassiste Ron McClure pourrait servir d'épitaphe à Michel Petrucciani, qui "vivait tout à fond, à 150%".