Yehudi Tingo Farine, un jeune Guyanais double champion de France en 2016 en cross court et sur 800 m, souffrant de troubles du spectre de l’autisme, paraît abandonné en rase campagne par les pouvoirs publics.
Il est pourtant, en tant qu’athlète, sur la liste du ministère des sports comme espoir de la fédération française du sport adapté.
Sans structure de prise en charge, déscolarisé, désocialisé, ce jeune homme est dans une situation intolérable selon son père.
Après quelques réticences, notre collaborateur qui a donné un point presse sur le sujet mardi devant l’ARS a accepté d’ouvrir le livre de cette histoire.
Pour quelle raison Yehudi a-t-il a été hospitalisé ?
Souffrant de troubles du spectre autistique (TSA), Yehudi peut avoir du mal à maîtriser certaines émotions voire certaines angoisses. En ce moment, il pouvait être calme voire souriant 23h30 sur 24 puis il y a une demi-heure où tout peut basculer. Il semble ruminer une idée fixe qui a souvent un rapport avec ce souvenir d’un élève voire de plusieurs élèves « l’embêtant », selon ses termes, au collège ou lycée. Je ne sais pas si c’est pour chasser ces idées ou trouver un apaisement, mais, à ce moment-là, il part, ces tous derniers temps, en courant, pieds nus. C’est quelque chose qui est arrivé pour la première fois de sa vie le 17 décembre 2015, jour où lui a été annoncé le diagnostic de manière un peu abrupt par le psychiatre qui l’a évalué : » Tu es autiste mais ça ne veut pas dire que tu n’est pas intelligent ». Ce jour là, quelques heures plus tard, il avait été repéré courant pieds nus près du quartier Maya à Matoury par les gendarmes qui l’avaient interpellé sans ménagement, plaqué au sol et menotté. Plus tard, j’étais allé voir une ostéopathe pour lui. Elle en a conclu qu’il avait le dos en vrac qu’il avait clairement les symptômes d’une personne qu’on a écrasée au sol. Depuis en règle générale mais pas toujours, s’ils sont avisés de sa singularité, les gendarmes parlementent avec lui, le maintiennent debout, lui donnent à boire. Ca fonctionne très bien. Il est tombé sur quelques gendarmes supers sur ce point. Désormais, au bout de 20 à 30 minutes de course ou de marche il commence à être apaisé et retrouve progressivement ses esprits. Dans les premières minutes de cette fuite, il ne peut pas se calmer. Fin mars, c’esr quelque chose qu’il ne faisait plus depuis plusieurs mois réussissant à aller prendre une douche à la place. C’est revenu au moment des barrages routiers qui n’en finissaient plus et l’oppressaient. A ce moment là, il se met en danger : la semaine derrière il a couru à plusieurs reprises sur la deux fois deux voies entre le rond point Balata et celui de la crique Fouillée voire celui des Maringouins. Samedi , il a été arrêté un peu brutalement par les gendarmes -dont un avait sorti sa mitraillette- qui l’ont plaqué au sol face contre le bitume alors qu’il ne courait que depuis 5 minutes donc était toujours en état de crise. Certes, à la sortie du rond point Balata, il prenait la bretelle de la RN1 en sens inverse. Mercredi dernier c’est une dame qui s’est révélée être une infirmière libérale qui l’avait suivi et à réussi à parlementer avec lui. Samedi dernier, c’était la 4ème course pieds nus en 5 jours (contre zéro entre début janvier et avril). Ses plantes de pied étaient blessées par ces courses successives sur le sol brûlant, un petit morceau de caillou s’était même incrusté dans la plante d’un pied a-t-on vu aux urgences samedi. Le psychiatre du CMP (centre médico-psychologique) qui le suit une fois tous les deux mois environ a décidé de le placer en observation au pôle psychiatrique pour le protéger provisoirement selon lui estimant qu’il risquait un accident. Mais on ne m’a pas tout dit au moment de cette décision. Au pôle psychiatrique quand j’y ai accompagné mon fils on s’est excusé de ne pas avoir d’espace approprié aux autistes. C’est un peu la Cour des miracles. Si la salle dédiée au personnel est climatisée, ce n’est pas le cas des chambres des patients. Dans la chambre de mon fils, pas d’oreiller, pas de climatisation ni de ventilateurs, interdit m’y a-t-on dit. En revanche, dans sa chambre, il y a des tiges métalliques de 10 cm non protégées par le moindre caoutchouc pour fermer les stores des fenêtres en partie cassés d’ailleurs. On dirait presque une mèche de perçeuse. Ca me paraît plus dangereux qu’un ventilateur. Il y a les mêmes tiges dans la salle commune. L’eau de son lavabo coule directement sur le sol de son coin toilettes/salles de bain, le tuyau d’évacuation n’a pas de fond (!). Je l’ai signalé mardi midi. Mercredi après-midi, l’eau du lavabo s’écoulait toujours directement sur le sol. Mercredi, il y avait un nouvel épisode : plusieurs patients, dont Yehudi, étaient patraques : sans doute l’alimentation servie m’a dit le personnel qui me semble gentil et rassurant. Une infirmière m’a dit : » votre fils est agréable, jamais dans l’opposition. Avec ses petits rituels : sa radio, ses livres ». A ses côtés, des patients qui ont des accoutumances ont le droit de fumer six cigarettes par jour.
Depuis le diagnostic tardif des troubles du spectre de l’autisme dont souffre Yehudi, pouvez-vous décrire le parcours du combattant auprès des différentes structures ?
Les difficultés rencontrées sont en partie liées à ce diagnostic tardif en fait. C’est un peu une double peine. En primaire, en Français, Yehudi était au-dessus de la moyenne nationale dans les tests d’entrée en 6ème. Au collège jusqu’en fin de 3ème Yehudi a été considéré comme un bon élève avec tableaux d’honneur à la clef chaque année. Avec quasiment toute sa scolarité au collège dans une petite structure avec 12 ou 13 élèves par classe à Cacao, puis une fin d’année dans la meilleure classe de 3ème à Lise Ophion à Matoury quand c’était plus simple pour l’athlétisme. Ses résultats en athlétisme, discipline commencée en 2013, ont été immédiatement excellents. Plutôt sprinter au départ, il remporte la Corrida de la St-Sylvestre minimes à Cayenne sur 3 km sans entraînement particulier alors qu’il n’était pas encore licencié. En juin 2013, aux championnats de Guyane, il bat Loïc Prévot (premier athlète cadet français à être descendu sous les 47 secondes sur 400 m) sur 1000 m un peu à la surprise générale. Un mois avant sur 1000 m il n’arrivait pas à le suivre. 15 jours avant les championnats, il le battait. En juillet, il fait ses 2 premiers meetings en France, il y remporte 3 courses : deux 50 m et un 1000 m. En août il court en Belgique : il y remporte un 400 m et plusieurs 1000 m. Evidemment, un tel don a retardé le diagnostic de TSA. Surtout qu’un jour, à cette époque, il m’a posé cette question : » Papa, est-ce qu’on peut réussir dans la vie simplement avec un don ?. » Pourtant, rétrospectivement, des signes de TSA étaient déjà présents. Plus jeune, il ne regardait pas son interlocuteur dans les yeux, c’est un symptôme, cela a été mis sur le compte d’une timidité ou sur une attitude culturelle. En CP où il a appris à lire comme les autres, son institutrice a souhaité qu’il soit vu par une orthophoniste et un CMP (centre médico-psychologique) parce qu’il parlait peu ou pas. A l’époque, il a encore su donner le change. Au bout de 6 mois CMP et orthophoniste ont dit que ce n’était plus la peine qu’il soit suivi, que ça allait. Il avait alors juste commenté : » c’est dommage, il y avait des jeux ». Il ne participait pas non plus aux conversations de groupe mais faisait tout pour donner l’impression d’en être, se mettant à côté des gens qui parlaient par exemple. Paradoxalement, il aimait bien la compagnie des autres. Son langage se limitait souvent à une phrase pour exprimer un besoin. Il était très compétent sur un truc qui l’intéressait, le foot par exemple. Il pouvait aussi répéter ce que je disais, c’est encore un symptôme. En 6ème, son prof d’EPS me disait : « avec Yehudi, une consigne ça va, plusieurs c’est compliqué. » J’ai eu des doutes vers 2012/2013 où j’ai senti une sorte de rupture au début de l’adolescence. Il me disait que la violence était arrivée à Cacao. Et pour cause, le rectorat menaçant d’y fermer des classes, ce collège avait du se résoudre à accueillir certains élèves à lourd passif, exclus d’établissements du littoral. Ses crayons et son matériel disparaissaient régulièrement de sa trousse. J’ai vu aussi qu’il ne savait pas planifier ses révisions de Brevet en 3ème. Un brevet qu’il a obtenu. C’est aussi le moment où il a donc commencé l’athlétisme, un sport très exigeant. Son premier trimestre en seconde était bon, puis, quand la saison de compétition d’athlétisme a débuté, il faisait des siestes de 2 à 3 heures. Idem l’année de 1ère où, après un premier trimestre convenable, il était trop fatigué pour répondre aux exigences du Bac Français. Mais toujours pas de signalement en milieu scolaire. De plus, alors qu’il était au lycée, sa progression en athlétisme se poursuivait. Il était passé en 1mn 59 sur 800 m et à 52s sur 400 en dépit de problème de coordination des bras. Il s’était même qualifié aux Carifta Games. Il n’y avait eu que 4 jeunes athlètes guyanais ayant réalisé les minimas pour y être dont lui. Au retour des Carifta Games, où il avait passé 8 jours avec la sélection Guyane en avril 2015 son entraîneur m’a dit. « Ton fils est adorable mais il a besoin d’aide. Jusque là je pensais que ce n’était que de l’étourderie… ». L’été 2015 pour en avoir le coeur net, ai contacté le CRA (Centre de ressource de l’autisme) à Lille dans le Nord-Pas de Calais, région dont je suis originaire. Un psychologue de ce CRA m’a fait cette réponse affligeante, en ai conservé l’email : « Nous sommes (…) confrontés à une difficulté géographique car nous ne pouvons recevoir que les personnes résidant dans la région Nord Pas de Calais. Cela se justifie d’une part par notre liste d’attente déjà importante sur la région seule, et d’autre part par le fait que la facturation de nos actes n’est possible que pour les patients rattachés à la sécurité sociale de la région ». Ce second argument était un bobard. Lorsque je l’ai fait remarquer à ce psychologue, il m’a alors indiqué « dans tous les cas, puisqu’il a plus de 15 ans, l’attente pour votre fils sera de 2 ans ». Puis je me suis adressé à Lille au CRDTA (Centre de ressources des troubles de l’apprentissage), une entité qui n’existe pas en Guyane. On m’a demandé d’y déposer un dossier et on m’a dit qu’on le regarderait avec bienveillance puisque nous devions repartir en Guyane. Au bout d’un mois ne voyant rien venir, j’y suis retourné : et là, une secrétaire m’a sorti : » Ah bon, on ne vous a rien dit ? Comme votre fils a plus de 15 ans, il ne ressort plus d’un CRDTA ». Alors que j’avais donné son âge dès le départ. Enfin, dans le Nord, cet été-là, le médecin qui l’a connu enfant, ne voulait pas croire aux TSA mais voyait qu’il y avait quelque chose. Il a donc suivi la procédure pour écarter une éventuelle maladie organique évolutive comme une tumeur au cerveau. Il a fallu faire un scanner cérébral, une IRM cérébrale etc. Résultats normaux. Il a fallu aussi voir un neurologue. Yehudi en a raté la rentrée. Je passe sur la pédagogie de ce neurologue expérimenté revenu de tout qui a enregistré dans son dictaphone ses hypothèses les plus apocalyptiques devant mon fils qui en pleurait en silence dans la voiture après la consultation. J’ai sollicité, parallèlement, le Centre de ressource de l’autisme (CRA) de Guyane qui dépend de l’hôpital de Cayenne en vue de notre retour. Fin 2015, après une relance, le médecin du CRA m’a reçu mais il n’a jamais reçu mon fils et n’a donc pas daigner l’observer une seconde à ce jour. J’ai du me débrouiller pour le faire évaluer en libéral par un psychiatre formé à l’autisme. Il a conclu aux troubles du spectre de l’autisme (TSA) fin décembre 2015. Son diagnostic a été confirmé par une psychiatre qui a observé mon fils en unité en France presque 20 jours en 2016. Dès que le diagnostic a été rendu en décembre 2015, j’ai pris contact par e-mail avec l’inspecteur du rectorat de la Guyane en charge de ce type de singularité. Il m’a principalement suggéré d’aller « prospecter en France » car selon lui, sur le plan scolaire « rien n’est parfaitement adapté pour votre fils en Guyane ». Cette posture est inacceptable. La France venait alors d’être condamnée en juiillet 2015 pour ne pas prendre en charge les personnes autistes et pour les exiler en Belgique. Je pense que ça pourrait faire jurisprudence pour une personne guyanaise que l’on somme de s’exiler à 8 000 km. J’ai relancé depuis cet inspecteur du rectorat. Il n’a plus jamais répondu.
Quelles sont les caractéristiques d’une personne souffrant de troubles du spectre autistique (TSA) ?
Si on parle aujourd’hui de spectre de l’autisme, c’est que le spectre justement peut-être large et diversifié. Il y a tout de même des caractéristiques. Concernant mon fils, très jeune, il ne répondait pas toujours immédiatement à l’appel de son prénom s’il avait le dos tourné. Il avait ses quelques activités rituelles. Il prenait rarement l’initiative d’une conversation. Quand il était chez ses grands parents en France, il n’éprouvait jamais le besoin de m’appeler. Idem quand il est en Guyane, il n’éprouvera pas le besoin d’appeler ses grands-parents. Au lycée, à un moment donné, je lui disais, quand tu sors, tu m’appelles. Il m’appelait et raccrochait.
L’abstraction est difficile pour lui, c’est une autre caractéristique. Lors de son premier stage au sein du pôle espoirs de la fédération française du sport adapté qu’il avait intégré après son diagnostic, au cours d’une réunion, un cadre de la fédé a dit aux stagiaires : » il faut que vous ayez un projet sportif « . Ca l’avait perturbé : « c’est quoi leur bèt (créole guyanais), leur projet ? » m’avait-il ensuite demandé.
Les signes sont devenus plus apparents depuis que le diagnostic a été rendu comme si Yehudi avait tout fait pendant trop longtemps pour être comme les autres. Son orthophoniste (vue seulement depuis fin 2016) me disait récemment, » pourquoi, cela n’a-t-il pas été signalé avant car c’est flagrant, les écholalies par exemple ». Tout simplement parce ce n’était pas apparent, lui ai-je répondu. La femme d’un ami, assistante sociale, m’a néanmoins postérieurement appris avoir eu des doutes car elle avait remarqué que mon fils mangeait comme s’il n’avait pas la sensation de satiété. Ou encore un jour, il s’était baigné dans la piscine avec ses deux enfants. Et à la sortie, il avait enfilé les habits d’un de ses enfants âgé de 5 ans de moins que lui. Elle m’a dit plus tard : « c’était délicat de t’en parler ».
Quelles sont les actions que vous souhaitez engager ?
Parfois je me demande si je ne devrais pas commettre un délit pénal pour être hors service et pour obliger ces autorités qui adoptent des comportements de monstres froids à prendre le problème à bras le corps et à trouver une structure de prise en charge pour épauler et resocialiser mon fils.
Pour rester dans le domaine du droit, je me demande si un référé-liberté au tribunal administratif doit être tenté.
L’autisme étant une priorité de santé publique, deux libertés fondamentales me semblent bafouées : le droit à la continuité scolaire, le droit urgent à bénéficier d’une prise en charge par une structure. C’est ce que stipule un praticien dans un courrier sinon la santé va se dégrader selon lui
Suite à mon point presse devant l’ARS mardi, un avocat du barreau de la Guyane m’a appelé. Lui estime que l’attitude du rectorat voire des autorités pourrait être qualifiée de « discrimination par rapport au handicap », un fait grave. Il pense plutôt à un référé-injonction
J’ai lancé mercredi un dernier appel au bon sens à l’adresse autorités sanitaires par courrier. Car le mot « autisme » peut faire peur et vous enfermer dans un carcan.
Il ne me semble pas impérieux pour Yehudi que la structure soit ultra-perfectionnée et forcément uniquement dédiée à l’autisme puisque son parcours de vie (scolarisation, sport : football et athlétisme) l’a longtemps vu vivre avec des personnes diverses.
Donc une structure qui pourrait, ponctuellement dans la semaine -et de jour voire plusieurs demi-journées- l’accueillir cela existe en Guyane. Son intégration est juste une question de bonne ou de mauvaise volonté.
Je pense qu’il s’agit de bien comprendre qu’un accueil de la part d’une structure même adaptée à son cas théoriquement à 70% serait, en tous les cas, une solution mieux adaptée que l’absence actuelle d’accès à la moindre structure resocialisante.
Quelle est le procédure pour que votre fils ait de meilleurs soins et suivis ?
La procédure en vigueur a été suivie. Dès que mon fils a eu son diagnostic de TSA en décembre 2015, je suis allé à la MDPH (Maison des personnes handicapées) pour remplir un dossier. J’y avais été très bien reçu par deux personnes de cette structure qui m’ont en revanche mal orienté pour la rédaction du projet de vie, pan incontournable du dossier. On m’y avançait alors qu’il s’agissait d’un projet professionnel ou d’un projet scolaire. Or ce n’est pas ça. Là encore, j’ai du finir par consulte, un directeur de Sessad dans l’Hexagone, l’été dernier, qui m’a aidé à rédiger un projet de vie. En fait, ce sont les besoins d’accompagnement financiers et structurels. J’ai déposé le dossier mieux finalisé et enregistré complet à la rentrée de septembre. La MDPH a théoriquement 4 mois pour statuer. Après bien des courriers de ma part, j’ai eu une réunion avec la responsable du pôle pluridisciplinaire de la MDPH le 27 avril dernier. La MDPH a finalement inscrit Yehudi à la commission censée statuer le 24 mai. Je n’ai pas encore le résultat de la notification. Je veux une notifcation concrète. Une affectation pour mon fils. Si je ne suis pas d’accord, nous aurons un mois pour contester et ce sera encore du temps perdu. Je ne veux pas croire à ce scénario catastrophe.
En ce moment, ce qui m’inquiète c’est de constater la tendance qu’ont les psychiatres en France à surmédicaliser et à assomer pour que l’entourage soit tranquille. J’ai vu ce qu’on donne à mon fils, c’est sûr ce n’est pas dans la liste des produits dopants. Je l’ai vérifié avec le moteur de recherche de l’AFLD (Agence Française de lutte contre le dopage). C’est tout le contraire, ça assome et ça affaiblit le tonus musculaire.
Là, au bout deux jours au pôle psychiatrique, une psychiatre qui l’a vu pour la première fois de sa vie, sans avoir eu accès à son parcours médical, a décidé de modifier son traitement. On est mis devant le fait accompli. Je me méfie des apprenti-sorciers.
Surtout qu’en matière d’autisme, un consensus scientifique international a conclu à la prédominance du facteur neurologique.
Je persiste à penser qu’une resocialisation c’est mieux que des médicaments
Quelles ont été les réponses données ?
J’ai fait confiance à l’association Atipa Autisme qui m’avait fait miroiter un projet d’accompagnement deux ou trois demi-journées par semaine en Guyane en lien avec une psychologue travaillant avec des autistes et exerçant de l’Hexagone, dans l’hypothèse où Yehudi ferait des aller-retour au pôle espoirs de Reims pour des stages, ce qu’il n’a pu faire ces derniers mois (blessé à la cheville). Malheureusement, cet accompagnement censé être mis en oeuvre par l’association n’a jamais vu le jour
Le rectorat de Guyane, indifférent à mes sollicitations depuis de longs mois aurait le devoir de mettre en oeuvre de petites structures, des cours avec de petits effectifs, mieux adaptés
De son côté, fin 2016, l’ARS, à l’instar du rectorat un an auparavant, m’a suggéré de « prospecter en métropole » sachant que je ne peux prospecter nulle part tant que le sésame de la MDPH n’a pas été notifié. C’est un système d’entonnoir bête et bloquant. Pour faire une analogie, je me souviens d’un reportage d’investigation que j’avais fait en 2011 sur le projet agricole de Wayabo. C’est un projet dans lequel il était évidemment prévu l’électrification du secteur. Un ingénieur qui avait travaillé sur le projet à la Daf (Direction de l’Agriculture et de la forêt) me l’avait confirmé. Problème, au moment de le mettre en oeuvre, au ministère de l’agriculture, la ligne budgétaire de l’électrification était passée à la trappe. En toute mauvaise foi, l’administration n’a jamais voulu le reconnaître. Or, des citoyens avaient bâti leur projet en tenant compte de cette électrification promise. Un agriculteur s’est retrouvé à devoir adapter son système de poules pondeuses avec un groupe électrogène. Un ingénieur hongrois était venu avec sa famille pour un projet de tomates sous serre. Il m’a dit : » j’ai connu la bureaucratie de l’Union soviétique (…) en Guyane face à cette bureaucratie on a envie de sortir les couteaux ». Pour l’autisme, c’est un peu ça. Ce qui est exaspérant, c’est cette capacité qu’ont les gens détenteurs de leviers à faire semblant de faire. Ce jeudi en fin de journée à l’Eldorado à Cayenne est prévue une conférence ou une projection sur « la sexualité des personnes autistes ». Les 18 et 19 juin est prévu un… colloque sur l’autisme. Ce ne sont pas les priorités. C’est de l’affichage, de la poudre aux yeux, un écran de fumée. Il va falloir trouver un moyen d’empêcher tous ces gens de dormir et les convaincre de ne plus faire semblant.