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"Au bonheur d'Elise"
recherche
30 juillet 2017

Des chercheurs veulent aider les parents d’enfants autistes

article publié sur TVA Nouvelles.ca

Catherine Montambeault | Journal de Montréal

Photo de courtoisie

Injection de vitamines, analyses d’ADN, régimes farfelus: des chercheurs montréalais découragés de voir des proches d’autistes tenter toutes sortes de traitements douteux lancent une plateforme web pour distinguer le vrai du faux.

En apprenant que sa fille de 2 ans, Alice, était atteinte du trouble du spectre de l’autisme, Annick Langlois a entamé des recherches pour essayer de la «guérir».

«Après avoir lu le livre "L’autisme n’est pas irréversible!", d’Evelyne Claessens, j’étais convaincue que c’était possible de guérir l’autisme, alors que je sais maintenant que ce n’est pas le cas. J’ai cru ça pendant au moins quatre ans», a expliqué la maman de Lachute.

Charlatans

Selon l’état des recherches actuelles, l’autisme n’est pas une maladie. On ne peut donc pas parler de traitement ni de guérison. Pourtant, ce mythe persiste sur le web et dans certains ouvrages, tout comme le fait d’associer ce trouble neurodéveloppemental à la vaccination ou à la consommation de gluten.

C’est pour mettre fin à ces fausses croyances que la plateforme web Myelin sera mise en ligne dès octobre. Développée par des chercheurs de l’Université de Montréal et de Polytechnique, elle fournira des réponses aux questions posées en se basant sur la science.

Grande souffrance

«En effectuant mes stages en psychoéducation, j’ai constaté à quel point il y a une souffrance, pour les personnes autistes et leur entourage, de ne pas avoir accès à la bonne information», a dit Marc-Olivier Schüle, doctorant à l’École de psychoéducation de l’Université de Montréal.

Le chercheur explique qu’à peine 14 % de l’information scientifique est réellement utilisée et qu’il s’écoule en moyenne 17 ans entre la publication de résultats scientifiques et leur application.

Selon lui, plusieurs charlatans profitent de la vulnérabilité des personnes diagnostiquées et de leurs proches pour leur faire avaler toutes sortes de balivernes. C’est ce qui est arrivé à Annick Langlois, qui a souvent modifié l’alimentation de sa fille en se fiant au web.

«On a fait des régimes sans gluten, sans lactose, on lui a donné des vitamines... Je suis allée jusqu’à injecter de la vitamine B12 à ma fille», a-t-elle raconté.

Mme Langlois envoyait aussi régulièrement des cheveux et des échantillons d’urine de sa fille à des laboratoires américains, toujours dans l’espoir d’un traitement miracle.

Intelligence artificielle

Pour l’instant, Marc-Olivier Schüle et son équipe doivent extraire eux-mêmes l’information des documents qui sont publiés sur l’autisme et les insérer dans Myelin. L’intelligence artificielle peut ensuite se servir de ces données pour répondre aux questions des internautes.

Mais en fin de compte, le Montréalais souhaiterait que l’outil soit capable de réaliser cette opération par lui-même et devienne donc complètement autonome.

«On aimerait aussi étendre le projet à tout ce qui concerne la santé mentale, a-t-il indiqué. On voudrait d’abord inclure le trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH), puis l’anxiété, la dépression et tout le reste.»

Le choc rend les proches vulnérables

Le choc que vivent les parents en apprenant que leur enfant est autiste peut rendre la recherche d’informations véridiques encore plus complexe, fait valoir la Fédération québécoise de l’autisme.

«Les gens sont souvent dans un état émotif qui fait que ça peut être difficile de faire de bons choix et de distinguer les faits des simples croyances», a mentionné Jo-Ann Lauzon, la directrice générale de l’organisme.

«Nous, on travaille beaucoup à vulgariser l’information et à développer des outils, a-t-elle ajouté. Quand un parent nous appelle, on l’oriente vers les ressources de sa région, où il va pouvoir rencontrer des spécialistes et des familles qui vivent la même chose que lui.»

Même si son site web offre déjà de l’information fiable, la FQA soutient le projet Myelin, en soulignant qu’«il ne peut jamais y avoir trop d’aide».

Annick Langlois, maman d’une jeune fille autiste, confirme que des parents sont fragiles après le diagnostic.

«On essaie d’aller chercher tout ce qu’on peut pour aider nos enfants, a-t-elle souligné. Et souvent, dans notre désespoir, on a tendance à prendre tout ce qu’on peut trouver.»

Laissés à eux-mêmes

Les délais qui s’imposent avant d’accéder à des services peuvent aussi pousser les familles à s’informer sur le web, a dit Mélissa Boulanger, mère de deux garçons autistes de 9 et 12 ans.

«Quand on a eu le diagnostic de mon plus jeune fils, la neuropsychologue nous a dit d’aller au CLSC pour avoir des services, mais il y avait deux ans d’attente. On s’est donc retrouvés seuls, sans savoir vers quoi se tourner», a déploré la femme de Mascouche.

Sur le web, Mme Boulanger a rapidement constaté que les ressources crédibles sont rares, surtout en français. «On trouve beaucoup de sites de France, mais il faut faire attention parce que, là-bas, on est 50 ans en arrière quand on parle d’autisme», a-t-elle noté.

Mélissa Boulanger tient aussi à mettre les gens en garde contre les groupes de parents sur Facebook.

«C’est toujours intéressant de pouvoir discuter avec des parents comme nous, parce qu’on se sent moins seuls, mais il y a aussi des mauvaises informations qui circulent là-dessus», a-t-elle relevé.

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30 juillet 2017

Le mythe de "l’autisme léger ou sévère"

article publié dans le Huffington Post

Pour comprendre l'absurdité du mythe sur la sévérité de l'autisme, il faut connaître un peu l'histoire médicale de l'autisme puisqu'elle est à la base de celle-ci.

29/07/2017 07:00 CEST | Actualisé il y a 22 heures
Getty Images/iStockphoto
Le mythe de "l’autisme léger ou sévère"

L'idée que le continuum autistique serait trop grand et trop vaste est un sujet de discussion qui revient fréquemment dans le monde de l'autisme. On entend souvent qu'il y a trop de différences majeures entre les personnes autistes.

Nous avons tendance à catégoriser les autistes entre eux et à les étiqueter de "légers" ou de "sévères". On entend souvent que les autistes "sévères" n'ont rien en commun avec les autistes "légers". On compare les autistes Asperger et les autistes de Kanner en suggérant que les premiers ne seraient que très faiblement "atteints" et que les deuxièmes auraient un degré de "sévérité" si prononcé que l'espérance d'une vie "normale" est vouée à l'échec en leur présumant une intelligence et une autonomie limitative absolue.

Mais lorsque nous nous appelons autistes, de quoi parlons-nous?

Pour comprendre l'absurdité du mythe sur la sévérité de l'autisme, il faut connaître un peu l'histoire médicale de l'autisme puisqu'elle est à la base de celle-ci. Ainsi, ce texte se voudra une brève synthèse historique et factuelle servant de référence pour les textes suivants.

L'autisme fut découvert par deux chercheurs autour des années 1940 soit le Dr. Léo Kanner et le Dr. Hans Asperger. Ils avaient découvert que plusieurs personnes, ayant différents diagnostics neurologiques, avaient en commun les mêmes caractéristiques: des limites dans les interactions sociales et des intérêts spécifiques. Asperger apportait une nuance en spécifiant la faculté spécifique pour le vocabulaire et la communication verbale alors que Kanner parlait des facultés sensorielles et des comportements plus "stéréotypés" allant jusqu'à parler de l'autisme infantile. Fait important à souligner, dans aucun cas, la déficience intellectuelle n'était invoquée. Asperger allait même jusqu'à donner le sobriquet affectueux de "petit génie" à ces enfants. Étant les pères de l'autisme, leurs contributions se retrouvent dans le DSM-4, en vigueur de 1994 à 2013, sous l'étymologie du Trouble envahissant du développement (TED).

Dans le DSM-4, l'autisme est classifié sous le titre de TED et est subdivisé en plusieurs catégories: le trouble autistique (autisme classique ou Kanner), le syndrome d'Asperger, TED non spécifique, le Syndrome de Rett et le trouble désintégratif de l'enfance.

Ces catégories définissaient donc les autistes selon différents critères:

  1. des altérations au niveau des interactions sociales
  2. des altérations au niveau de la communication
  3. des intérêts restreints.

Le syndrome d'Asperger était un trouble autistique sans les altérations au niveau de la communication et sans retard dans le développement du langage.

Puisque ces deux catégories ne représentaient pas tous les cas possibles d'autistes, le TED non spécifique fut créé pour les personnes ne répondant pas aux critères du trouble de l'autisme, mais ayant des difficultés similaires.

Finalement, le Syndrome de Rett et le trouble désintégratif de l'enfance sont des maladies neurocognitives dégénératives c'est-à-dire que l'enfant a un développement typique jusqu'à un certain âge avant de régresser. C'est deux diagnostics ont été retirés du DSM-5 puisqu'ils n'ont rien en commun avec l'autisme sauf certaines manifestations subjectives et stéréotypées.

Le terme "léger" est aussi apparu pour qualifier le syndrome d'Asperger comparativement au trouble autistique classique puisque le syndrome d'Asperger n'a que deux critères comparativement à trois pour le trouble autistique

En somme, avec des critères subjectifs et des cas pratiques ne se retrouvant pas dans les trois catégories de l'autisme, les intervenants ont dû qualifier eux-mêmes les autistes. Ainsi est née l'appellation de "haut niveau" pour faire référence aux autistes n'ayant pas de déficience intellectuelle, mais ayant les critères du trouble autistique. Le terme "léger" est aussi apparu pour qualifier le syndrome d'Asperger comparativement au trouble autistique classique puisque le syndrome d'Asperger n'a que deux critères comparativement à trois pour le trouble autistique.

Cependant, comme les cas pratiques ne répondaient pas toujours à ces critères, le tout combiné aux nouvelles découvertes scientifiques, la catégorisation de l'autisme fut modifiée avec le DSM-5.

Le DSM-5 (2013 à aujourd'hui) regroupe les autistes (trouble autistique, syndrome Asperger et TED non spécifique) sous l'appellation du Trouble du spectre de l'autisme (TSA).

Ainsi, les chercheurs reconnaissent que les catégories du DSM-4 sont en fait, une seule condition médicale avec différents niveaux pour les deux critères du diagnostic: la communication et les interactions sociales et les comportements, activités et intérêts restreints ou répétitifs. Fait à noter, les altérations pour la communication sont maintenant universelles à tous les autistes (Asperger inclus). Ainsi, selon la sévérité qualitative des altérations aux critères et les besoins de support et d'accommodement, les autistes sont classés comme de "bas (fortement altéré ou grand besoin) à haut niveau (faiblement altéré ou faible besoin)" pour chaque critère. Un autiste peut donc avoir toutes les combinaisons possibles de bas et de haut niveau allant de la correspondance pour les deux critères ou de bas niveaux pour un critère et de haut niveau pour l'autre. Ainsi, cette représentation sur un spectre et personnalisée pour chaque autiste permet à la théorie de respecter la pratique.

Finalement, le Dr. Laurent Mottron a émis une hypothèse que le spectre de l'autisme serait composé de trois catégories d'autisme: syndromique, prototypique et Asperger. Cette hypothèse est le fruit, entre autres, de plusieurs recherches basées sur des tests objectifs et quantifiables.

Ce n'est pas l'autisme qui est à la source du soutien considérable dont ils ont besoin, mais bien leur syndrome spécifique combiné à leur déficience intellectuelle

Les autistes syndromiques représentent environ 15% des diagnostics d'autisme. Ces "autistes" sont qualifiés de cas lourds. Cependant, il ne s'agit pas d'autisme à proprement parler: leur fonctionnement cognitif diffère de celui de l'autisme prototypique. Ce n'est pas l'autisme qui est à la source du soutien considérable dont ils ont besoin, mais bien leur syndrome spécifique combiné à leur déficience intellectuelle.

L'autisme prototypique représente environ 70% des diagnostics. Celui-ci représente l'autisme non verbal ou avec un retard de l'utilisation du langage pour communiquer et axé sur la perception et le sensoriel.

Finalement, les Asperger, environ 15% des diagnostics, sont les autistes décrits par Asperger, c'est-à-dire des autistes ayant une capacité surdéveloppée pour le vocabulaire et la langue et des difficultés dans la coordination ou la motricité.

Pour l'autisme prototypique ou l'Asperger, c'est le développement du cerveau et l'utilisation des différentes zones du cerveau qui influenceraient la socialisation et la communication, les intérêts spécifiques ainsi que les pics de performances de chaque catégorie.

En conclusion, l'autisme, jusqu'à tout récemment avec le Dr Mottron et son équipe, a été évalué sur des critères subjectifs et qualitatifs, par des non-autistes avec des concepts et des théories non-autistes pour qualifier les autistes. En somme, c'est comme si vous demandiez à une personne voyante d'évaluer la "non-voyance" sur les capacités d'une personne non voyante à marcher, à sauter ou à avoir un contact visuel lors d'une discussion. Cette situation a créé des dérives importantes et préjudiciables pour les autismes et celles-ci seront le sujet de la seconde partie.

Un texte co-écrit avec Mathieu Giroux.

Sources:

http://social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_josef_schovanec.pdf

NeuroTribes. The legacy of autisme and the future of neurodiversity, Steve Silberman, (Penguin books 2016)

L'intervention précoce pour enfants autistes. Nouveaux principes pour soutenir une autre intelligence, Laurent Mottron, (Mardaga, 2016)

Sur le spectre-volume 1, Magazine du groupe de recherche en neurosciences de l'autisme de Montréal, 2016,http://www.autismresearchgroupmontreal.ca/SurLeSpectre/Sur_le_spectre_no_1_2016-04.pdf

Ce billet est également publié sur Le HuffPost Québec.

29 juillet 2017

Autisme : l’hérédité responsable pour une large part

article publié dans parents

28/07/2017

60 % des cas d’autisme peuvent s’expliquer par les gènes, et non par la vaccination des enfants comme le pensent la centaine de familles qui intentent un procès contre quatre laboratoires pharmaceutiques.

Autisme : l’hérédité responsable pour une large part

L’autisme touche 1 % de la population française. Il se caractérise par un déficit de communication avec les autres, par des comportements, des intérêts et des activités restreints mais également répétitifs.

Des troubles récurrents dans une même famille

Le risque de souffrir d’autisme pour un enfant est 3 fois plus élevé s’il a un demi-frère ou une demi-sœur qui est atteint. L’augmentation du risque est 10 fois plus élevé si c’est un frère ou une sœur et 150 fois plus élevé lorsqu’il s’agit de jumeaux.

 

Des facteurs environnementaux

Une infection contractée, par la mère, durant sa grossesse peut également augmenter le risque d’autisme. Il s’agit, par exemple, de la rubéole, du cytomégalovirus. L’exposition à des toxiques (organophosphates, pollution atmosphérique…) ou à certains médicaments (thalidomide, acide valproïque…) doit, elle aussi, être prise en compte.
Mais, à ce jour, aucune étude scientifique n’a montré le lien entre autisme et vaccination. Quant à cette dernière, elle reste indispensable, une jeune fille de 16 ans venant de mourir des complications d’une rougeole à Marseille.

28 juillet 2017

Handicap : les chantiers prioritaires de Sophie Cluzel

article publié dans la gazette des communes

Publié le 27/07/2017 • Par Catherine Maisonneuve • dans : France

handicap

Flickr/ cc by WayTru

Autisme, rentrée scolaire et revalorisation de l'Allocation adulte handicapé, Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées a présenté ses trois chantiers prioritaires à la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale. Elle a profité de l'occasion pour annoncer que le comité interministériel du handicap serait réuni à la fin du mois de septembre.

Sophie Cluzel, secrétaire d’Etat aux personnes handicapées a été auditionnée par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale le 25 juillet.

Elle a annoncé la réunion du Comité interministériel du handicap dès fin septembre « pour alimenter et acter les feuilles de route » des différents ministres et « pour pouvoir dérouler sur la quinquennat les objectifs que nous avons en commun ». Ce comité est, rappelons-le, « chargé de définir, coordonner et évaluer les politiques conduites par l’Etat en direction des personnes handicapées ». Le dernier s’est tenu le 2 décembre 2016.

« Mon action aura une boussole, a déclaré la ministre : partir des besoins individuels des personnes en situation de handicap pour bâtir des solutions collectives, en décloisonnant et simplifiant ». Elle a aussi parlé d’un « fil rouge » : s’appuyer sur l’expertise des personnes handicapées elles-mêmes.

Un quatrième Plan Autisme

A son agenda immédiat, trois dossiers urgents : le 4e Plan Autisme, la rentrée scolaire, et la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés (AAH). La préparation du 4e plan autisme a été lancée le 6 juillet à l’Elysée. « On ne part pas de rien, mais la France a beaucoup de retard » a souligné la secrétaire d’Etat. La concertation, pilotée par un comité national, « partira du terrain » et se déroulera jusqu’à la fin de l’année avec cinq axes de travail  :

  • la prise en charge précoce et l’inclusion scolaire
  • l’inclusion sociale des adultes
  • l’appui aux familles
  • la recherche
  • la formation des professionnels et l’accompagnement au changement

Vers une amélioration de la scolarité des élèves handicapés

Sophie Cluzel a mis en place un comité de pilotage avec son collègue de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, pour résoudre les problèmes rencontrés par les élèves handicapés : manque de places dans les dispositifs collectifs et surtout d’auxiliaires de vie scolaire, un grand classique « qui embolise » chaque rentrée scolaire. 40 à 45% des élèves handicapés ont besoin d’être accompagnés mais « beaucoup sont à l’école sans accompagnants, un sujet qui inquiète les parents ». Les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ont été mobilisées ainsi que Pôle emploi « pour recruter les emplois aidés en temps et en heure ».

S’il s’agit de parer au plus pressé, la secrétaire d’Etat compte aussi ouvrir le chantier de la professionnalisation de cet accompagnement : statut, pérennisation de l’emploi… « Il est temps de tout remettre à plat » juge Sophie Cluzel pour éviter aux enfants les ruptures d’accompagnement d’une année sur l’autre, et les « frontières » entre école et vie quotidienne et en particulier les loisirs. Leur accueil en centres de loisirs est d’ailleurs «  une grande préoccupation des collectivités locales », constate l’ancienne responsable associative…

Et la revalorisation de l’AAH ?

« La promesse du Président est réaffirmée dans ma feuille de route » a-t-elle déclaré aux députés. Aujourd’hui l’AAH est à 810 euros mensuels, « un montant en-dessous du seuil de pauvreté »,  et « notre engagement est de la porter à 900 euros ». Mais la secrétaire d’Etat n’a toutefois pas été en mesure de préciser un calendrier. Il y a quelques semaines, elle avait pourtant déclaré que le président de la République avait « donné consigne au ministre en charge des Comptes publics  de faire en sorte qu’il y ait une traduction « concrète, massive » de cet engagement dès le projet de loi de finances 2018 ».

Lors de son discours de politique générale le 4 juillet devant l’Assemblée nationale, le Premier ministre avait d’ailleurs évoqué une revalorisation « dès 2018 ». Les associations attendent donc avec impatience. L’AAH est perçue par un million de personnes handicapées majoritairement sans emploi et le seuil de pauvreté est de 1000 euros environ.

Sophie Cluzel compte ouvrir rapidement d’autres chantiers pour développer l’emploi des personnes en situation de handicap, favoriser l’accès à la santé, au logement, aux transports et à la ville mais aussi à la culture, aux sports, aux loisirs … La ministre a déclaré attendre beaucoup aussi du changement du système d’information commun des MDPH pour avoir « une vraie visibilité sur la politique du handicap ».

Enfin  « transformer l’offre médico-sociale » sera un enjeu majeur. Pour la secrétaire d’Etat, il faut arrêter « de raisonner en termes de places, pour le faire en terme de parcours possible : la « Réponse accompagnée pour tous » est un levier important, notamment pour trouver des solutions pour les personnes qui n’en ont pas».

Focus

La Réponse accompagnée pour tous à cinq mois de la généralisation

Afin de permettre à tous les enfants et adultes handicapés de bénéficier d’un accompagnement adapté, la démarche « Réponse accompagnée pour tous » a été mise en œuvre à la suite du rapport « Zéro sans solution » de Denis Piveteau. Il s’agit de

  • passer d’une logique de place à une logique de réponse coordonnée
  • apporter une réponse à toutes les situations, même les plus complexes
  • recentrer le rôle des MDPH sur l’accompagnement avec la mise en place d’un dispositif d’orientation permanent et la formalisation de « plans d’ccompagnement globaux » -PAG

Dès fin 2015, 24 départements se sont portés volontaires pour expérimenter la réponse accompagnée pour tous.

La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) a publié le 24 juillet un rapport « de capitalisation » issu de leur expérience et qui se veut aussi un guide pour tous les départements.

Il en ressort qu’un lien étroit a pu être noué avec les professionnels et les structures qui accompagnent la personne handicapée permettant aux MDPH engagées de mieux anticiper les blocages ou les ruptures de parcours et de proposer des réponses « modulaires ». Dans ertains cas, ce lien a été formalisé par une convention territoriale (agence régionale de santé, département, MDPH, Éducation nationale, CPAM, CAF…) en matière de partage des données, d’amélioration de la planification de la réponse, d’organisation des réponses aux situations d’urgence, de meilleure coordination des ressources, ou bien encore en matière d’accompagnement de l’évolution des pratiques.

En 2017, 66 autres départements ont rejoint les 24 pionniers. C’est donc, en tout, 90 départements qui ont choisi d’anticiper la date limite de généralisation du dispositif fixée au 1er janvier 2018.

26 juillet 2017

Autisme : un nouveau marqueur pour mesurer la gravité des troubles

Autisme

Les troubles autistiques font partie d'un spectre large en fonction de la gravité des symptômes. Des chercheurs ont découvert qu'un test cérébral permettrait de distinguer ces variabilités dans le cerveau.

Des chercheurs de l'université de Californie à Los Angeles aux Etats-Unis ont découvert que les enfants atteints d'autisme ont une différence dans les tests cérébraux par rapport aux autres enfants. Plus spécifiquement, c'est la fréquence du pic d'ondes alpha, des ondes qui traversent le cerveau, qui a intéressé les scientifiques. Plus elle est basse, plus le quotient intellectuel (QI) non-verbal est faible.

Cette découverte pourrait aider à distinguer les enfants atteints de troubles du spectre autistique des autres enfants, mais aussi d'établir des variabilités dans les fonctions cognitives à l'intérieur de ce spectre très vaste.

Un lien entre les ondes du cerveau et la sévérité des troubles

Les troubles du spectre autistique affectent un enfant sur 68 aux Etats-Unis et se traduisent par des symptômes comme le manque d'interactions sociales, la répétition de gestes, ou des troubles du comportement. Certains enfants atteints ont des capacités de raisonnement, de mémoire, d'attention et de langage dans la moyenne ou au-dessus, tandis que d'autres ont de réelles déficiences. Les chercheurs ont donc travaillé sur l'origine de ces disparités.

Ils ont fait passer un électroencéphalogramme (EEG) à 97 enfants âgés de 2 à 11 ans, dont 59 étaient diagnostiqués autistes. Les participants étaient installés dans une pièce au calme, dans la pénombre, dans un état éveillé et relaxé. Grâce à des électrodes posées sur le crâne, l'EEG a mesuré différents aspects de l'activité cérébrale, dont la fréquence du pic d'ondes alpha. Celle-ci a été mise en relation avec l'âge de l'enfant, et le QI verbal et non-verbal. Les scientifiques concluent que les ondes alpha sont directement liées au QI non-verbal, ce qui traduirait un lien entre le fonctionnement du cerveau et la sévérité de l'atteinte autistique. Ces ondes pourraient donc être utilisées dans le futur comme biomarqueur pour vérifier si un traitement contre l'autisme restaure les ondes alpha au bon niveau, et donc améliore les troubles.

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26 juillet 2017

Dans l’autisme, le rôle de l’hérédité est prépondérant

25 juillet 2017, 22:22 CEST

Une mère tenant la main de son fils autiste. Dans certains pays, le port d'un bracelet est recommandé pour que ces enfants puissent recevoir de l'aide en cas de problème. Zahraa Saleh/Shutterstock

Plusieurs dizaines de familles mettent en accusation la vaccination dans l’autisme de leurs enfants. Elles ont décidé de déposer plainte contre quatre laboratoires pharmaceutiques, comme annoncé le 24 juillet dans Le Parisien.

Leur action laisse entendre qu’il pourrait exister un lien de cause à effet entre les vaccins de la petite enfance et la survenue d’un trouble du spectre de l’autisme (TSA). Celui-ci se caractérise par des déficits persistants dans la communication sociale et les interactions sociales, et par des comportements, intérêts et activités restreints et répétitifs. De nombreuses études scientifiques ont été consacrées aux causes de l’autisme à travers le monde. Or elles n’apportent aucun élément permettant d’incriminer les vaccins.

Par contre, ces travaux permettent de mesurer le poids des différents facteurs ayant une responsabilité avérée, à ce jour, dans l’apparition du trouble. Certains sont liés à l’environnement, au sens large. Il peut s’agir aussi bien de l’environnement biochimique dès le stade du foetus, par exemple la composition du liquide amniotique, que de l’environnement social, par exemple l’éducation reçue pendant l’enfance. Cependant, l’hérédité et plus largement les gènes restent le facteur prépondérant, expliquant au moins 60 % de l’autisme.

La composante génétique, connue depuis longtemps

L’autisme touche environ 1 % de la population. Il est la conséquence d’un ensemble de facteurs, variables selon les individus. Si beaucoup de ces facteurs restent ignorés ou controversés, la composante génétique, elle, est connue depuis longtemps. Et de nouvelles études, rendues possibles par le décryptage du génome humain, sont venues préciser le rôle des gènes dans ce trouble.

Les chercheurs parlent « d’héritabilité », désignant ainsi la part du trouble liée à la génétique. Une héritabilité de 50 %, par exemple, signifie que les prédispositions génétiques joueront à 50 % dans l’autisme d’un individu, d’autres facteurs liés à l’environnement dans lequel il évolue venant compléter ce déclencheur. Parmi les facteurs génétiques qui participent à cette héritabilité, certains sont hérités des parents, alors que d’autres sont des mutations survenues seulement chez l’enfant porteur du trouble.

Historiquement, les premiers indices du facteur héréditaire dans l’autisme sont venus de l’observation d’une récurrence accrue de ce trouble chez les apparentés à une personne autiste. La probabilité d’être autiste est en effet multipliée par 3 chez les demi-frères et sœurs, par 10 chez les frères et sœurs, par 150 chez les jumeaux monozygotes, également appelés vrais jumeaux.

Des travaux menés sur des vrais et faux jumeaux

Par la suite, des études de jumeaux ont comparé la concordance du diagnostic d’autisme entre jumeaux monozygotes (génétiquement identiques) et jumeaux dizygotes (génétiquement similaires à 50 %, également appelés faux jumeaux). Ces travaux ont fourni les premières estimations de l’héritabilité de l’autisme.

Dans les années 1980-1990, les études convergeaient vers une héritabilité de 90 % pour l’autisme, c’est-à-dire une grande prédominance des facteurs génétiques. Néanmoins, ces études étaient basées sur des nombres relativement faibles de paires de jumeaux, la combinaison de l’autisme et de la gémellité étant nécessairement un évènement rare. De ce fait, l’estimation de 90 % était assortie de larges marges d’erreur.

En 2011, une étude californienne a jeté le trouble en annonçant une héritabilité de 35 % pour l’autisme, et donc une prédominance (65 %) de facteurs environnementaux. Certains commentateurs ont crié victoire un peu vite, soit pour ressusciter les hypothèses psychanalytiques incriminant le comportement des parents, soit pour dénoncer des facteurs environnementaux dans la supposée « épidémie » d’autisme. En fait, cette étude était elle aussi basée sur un faible nombre de jumeaux (90 paires) et entachée de larges marges d’erreur.

Les enseignements de deux études suédoises

Dès l’année suivante, une étude suédoise basée sur 11 500 jumeaux dont 100 avec autisme annonçait une héritabilité de 59 %. En 2014, une nouvelle étude basée sur les 2 millions d’enfants suédois nés entre 1982 et 2006 (dont 14 500 avec TSA), et analysant tous les liens de parenté plutôt que la seule gémellité, a donné une héritabilité de 50 %.

En 2015, une étude britannique basée sur 6 400 jumeaux dont 200 avec TSA a fourni des estimations d’héritabilité variant de 56 % à 95 %, selon la méthode diagnostique retenue. Dans cette étude, l’héritabilité de l’autisme était de 56 % selon l’ADI-R (un instrument diagnostique basé sur un entretien avec les parents), 76 % selon l’ADOS (un instrument diagnostique basé sur une observation de l’enfant), et de 95 % selon une méthode diagnostique compilant les données de l’ADI, de l’ADOS et de deux autres échelles de symptômes autistiques. Enfin, une récente méta-analyse de toutes les études de jumeaux estime l’héritabilité de l’autisme dans une fourchette comprise entre 64 et 91 %.

On voit à travers ces différentes études qu’il n’y a pas nécessairement de valeur vraie et définitive de l’héritabilité. Celle-ci dépend inévitablement de la manière de définir le trouble, et de la population étudiée. C’est-à-dire à la fois de l’ensemble des génomes que porte cette population et de l’ensemble des facteurs environnementaux auxquels elle est exposée. Mais globalement, toutes ces études convergent vers l’idée que les facteurs génétiques expliquent au minimum 50 % de l’autisme.

La révolution du séquençage du génome humain

Depuis les années 2000, l’estimation des facteurs génétiques dans l’autisme a été totalement révolutionnée, comme pour d’autres troubles ou maladies, par les progrès de la génétique moléculaire et par le séquençage du génome humain. Il est maintenant possible, non seulement de se demander si des facteurs génétiques sont impliqués, et dans quelle proportion, mais aussi d’identifier directement des gènes dont des variations sont impliquées dans la susceptibilité à l’autisme.

C’est ainsi que l’équipe du généticien Thomas Bourgeron à l’Institut Pasteur a identifié toute une série de gènes dont des mutations sont impliquées dans l’autisme. Par exemple, cette équipe a pu détecter une mutation du gène Shank3 chez le fils autiste du comédien Laurent Savard, comme il le raconte dans son livre Gabin sans limites (éditions Payot). Néanmoins, de telles mutations sont très rares, et ne sont détectées que chez une minorité de personnes avec TSA.

Pour les autres personnes, on pense que ce sont des combinaisons de variations génétiques fréquentes qui constituent la susceptibilité génétique à l’autisme. Cette hypothèse a été récemment mise à l’épreuve d’études consistant à sonder plusieurs centaines de milliers de polymorphismes (c’est-à-dire de lettres variant dans la séquence d’ADN) dans le génome de personnes porteuses ou pas de TSA. Ces études permettent de quantifier la part de la susceptibilité à l’autisme qui est directement explicable par l’ensemble de ces polymorphismes. Les études récentes convergent vers une estimation de 50 % d'héritabilité attribuable aux variations génétiques à la fois fréquentes et héritées des parents.

Part de la susceptibilité aux troubles du spectre autistique (TSA) expliquée par des variations génétiques fréquentes héritées des parents, rares héritées, rares survenues chez l’enfant seulement, et par des variations génétiques non additives. La part de susceptibilité inexpliquée par ces facteurs est constituée de facteurs génétiques non mesurés et de facteurs non génétiques. Franck Ramus

Comme l’indique la figure ci-dessus, une dizaine de pourcents supplémentaires de la susceptibilité aux TSA sont expliqués par des mutations rares, soit héritées des parents, soit survenues chez l’enfant seulement (de novo), et par des interactions entre différentes variations génétiques (variations dites non additives). Il reste 41 % de la susceptibilité à l’autisme inexpliqués par les facteurs génétiques mesurés dans ces études, incluant donc à la fois des facteurs génétiques non encore identifiés et des facteurs environnementaux.

Ce genre d’études complète donc les études de jumeaux et d’apparentés, qui avaient été critiquées pour de plus ou moins bonnes raisons, en fournissant cette fois des estimations de l’héritabilité mesurée directement au niveau moléculaire. Les deux types d’estimation donnent des résultats cohérents, aux alentours de 60 %.

Infections de la mère pendant la grossesse, prématurité

Il est utile de revenir sur que l’on appelle les facteurs environnementaux, recensés à travers une revue exhaustive de la littérature scientifique publiée au mois de mars par une équipe américaine. Le terme englobe en fait tous les facteurs non génétiques, c’est-à-dire non seulement l’environnement affectif, familial et social auquel on pense spontanément, mais aussi tous les facteurs biologiques qui peuvent affecter le développement cérébral et cognitif de l’enfant. Cela inclut notamment les facteurs prénataux (infections et expositions à des toxiques dans l’utérus de la mère) et périnataux (prématurité, manque d’oxygène ou hémorragie cérébrale à la naissance), qui ont une importance particulière dans l’autisme.

Par exemple, une étude toute récente réalisée sur des dossiers médicaux en Norvège a montré un lien entre la survenue de fièvre chez la mère durant la grossesse, et l’augmentation du risque de ce trouble neurodéveloppemental chez l’enfant. Les chercheurs s’interrogent donc à nouveau sur le rôle des infections prénatales : on savait déjà que l’exposition prénatale aux virus de la rubéole et du cytomégalovirus augmentaient la susceptibilité à l’autisme, mais d’autres virus ou bactéries à l’origine de ces fièvres restent sans doute à identifier.

D’autres facteurs environnementaux qui augmentent de manière prouvée la susceptibilité à l’autisme incluent l’exposition prénatale à la thalidomide (un médicament qui fut utilisé notamment comme anti-nauséux chez la femme enceinte), à l’acide valproïque (dont la fameuse dépakine, un anti-épileptique dont les conséquences néfastes sur le fœtus sont maintenant bien démontrées), ou encore la prématurité, l’obésité ou le diabète maternel.

Parmi les hypothèses récentes figurent l’exposition prénatale aux antidépresseurs administrés à la femme enceinte, l’exposition prénatale aux organophosphates (pesticides), l’exposition à la pollution atmosphérique, ou encore les perturbateurs endocriniens. Pour ces différentes hypothèses, des données publiées récemment suggèrent qu’il pourrait y avoir un lien, mais toutes les études ne concordent pas. Ces résultats demandent donc à être plus largement confirmés par des études indépendantes avant d’être définitivement validés.

L’implication controversée des perturbateurs endocriniens

Le rôle éventuel des perturbateurs endocriniens, par exemple, a été examiné dans deux cohortes d’enfants suivis depuis la gestation. Sur les deux études, une seule a suggéré un lien. Cette question a également été analysée dans trois études comparant des enfants autistes avec des enfants non autistes. Sur les trois, deux ont suggéré un lien. Toutes ces études portent sur des effectifs faibles et présentent diverses limites. L’étude ayant la meilleure qualité méthodologique et le plus grand effectif ne trouve aucun lien entre l’exposition aux perturbateurs endocriniens et les symptômes autistiques. C’est dire que les résultats actuels sont loin d’être clairs.

Sur la base de ces études, on constate que, même s’il y avait un lien de causalité entre l’exposition aux perturbateurs endocriniens et l’autisme, celui-ci ne pourrait être que faible et sans portée sanitaire majeure. Par exemple, une augmentation de 20 % du risque d’autisme, si elle était avérée, ferait passer ce risque de 1 % par naissance à 1,2 %. Une telle augmentation ne serait pas négligeable, mais ne justifierait pas de paniquer.

Par ailleurs, divers facteurs environnementaux qui ont pu être évoqués n’ont jamais pu être prouvés ou ont même été réfutés. Cela inclut notamment les hypothèses psychanalytiques concernant l’attitude des parents, la dépression maternelle, le gluten, la caséine, les infections microbiennes, et bien d’autres, parmi lesquels les vaccins.

La recherche des causes de l’autisme n’est évidemment pas achevée. Il est fort possible que d’autres causes soient identifiées dans le futur, ou que de nouvelles données conduisent à réévaluer le rôle de certains facteurs connus.


Cet article est une version actualisée d’un post du blog de Franck Ramus, Ramus méninges.

25 juillet 2017

Autisme: "Le danger n'est pas le vaccin, mais l'absence de vaccination"

article publié dans l'Express
Par , publié le 25/07/2017 à 15:15 , mis à jour à 16:35

Selon l'Organisation mondiale de la santé, il n'y a pas de relation causale entre vaccinations et autisme. (Photo d'illustration: vaccination d'un nourrisson)

Selon l'Organisation mondiale de la santé, il n'y a pas de relation causale entre vaccinations et autisme. (Photo d'illustration: vaccination d'un nourrisson)

REUTERS/Ina Fassbender

Des familles persuadées que l'autisme de leurs enfants a été causé par la vaccination lanceront une action de groupe en septembre. Toutes les études disent pourtant le contraire.

"On ne doit pas mettre de sels d'aluminium ou de mercure dans le système sanguin des bébés. Ils ont une immunité encore fragile, cela peut avoir de lourdes conséquences sur leur développement neurologique," s'insurge Martine Ferguson-André, présidente de l'association Autisme et Vaccinations et ex-directrice générale de la Fondation Autisme.  

Cette mère de famille soupçonne le vaccin que son fils a reçu bébé d'être à l'origine de ses troubles autistiques. Elle envisage à présent de lancer une action de groupe -la seconde en France après celle du scandale de la Dépakine- conjointement à une centaine d'autres familles, afin de poursuivre plusieurs laboratoires pharmaceutiques. "Nous demandons réparation et justice pour nos enfants. Il faut une reconnaissance symbolique, pour que cette épidémie s'arrête," martèle la militante. 

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Convaincus par la légitimité de leur combat, ces parents en espèrent une issue positive. Pourtant, rien n'est moins sûr. Malgré la multitude d'études réalisées à ce sujet, aucun lien de cause à effet n'a été établi entre autisme et vaccin.  

"Mon fils a développé des troubles autistiques après un vaccin"

"Les études à ce sujet manquent en France. Nous ne connaissons pas tous les effets des adjuvants contenus dans les vaccins," note l'avocate Me Marie-Odile Bertalla-Geffroy, potentielle conseillère dans ce dossier, qui reste prudente sur cette procédure juridique qui n'a pas encore été lancée. 

Mais pour Martine Ferguson-André, la causalité est évidente. Elle estime que l'expérience de son fils le démontre. Vacciné à Pentacoq (coqueluche, hépatite B, diphtérie, tétanos et poliomyélite, retiré du marché en 2005 avant d'être remplacé) et au ROR (rougeole, oreillons, rubéole) à l'âge de 10 mois, Tom a mal réagit. "Deux heures après l'injection, j'ai découvert mon fils en train de mourir sur le sol de la cuisine. Il n'arrivait plus à respirer correctement, sa température est montée à 41,5°C", raconte sa mère. 

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A l'hôpital, les médecins annoncent une épiglottite aiguë (forme rare et grave de laryngite) et une encéphalite (inflammation du cerveau), nécessitant une courte hospitalisation. Mais de retour à la maison, le nourrisson n'est plus comme avant. "Tom n'avait plus de contact oculaire et avait développé des stéréotypies envahissantes [reproduction des mêmes mots, sons ou gestes]. Il hurlait en permanence et tombait tout le temps malade." Des symptômes que Martine Ferguson-André impute au thimérosal (retiré par précaution des vaccins en 2000), dont le mercure contenu pourrait avoir des conséquences sur le développement neurologique de l'enfant. 

"Aucun lien", selon les études menées ces 15 dernières années

Franck Ramus, directeur de recherches au CNRS et professeur attaché à l'École normale supérieure, nuance. "Nous connaissons les effets du mercure sur le développement neurologique, mais sous la forme contenue dans les vaccins, le mercure n'est pas biologiquement disponible," indique-t-il. 

L'Académie de médecine française et l'Organisation mondiale de la santé rejettent également la relation causale entre vaccinations et autisme en s'appuyant sur une étude danoise faite à partir de l'analyse de 400 000 enfants sur une période de 30 ans (1971-2000). "L'analyse n'a pas montré d'augmentation de l'incidence de l'autisme pendant la période où des vaccins contenant du thimérosal étaient utilisés," indique l'auteur du rapport de l'académie de médecine, Luc Hessel. 

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Quant à la dangerosité du ROR, qui ne contient pas cette substance, même constat: "Pas de preuves d'une implication de ce vaccin dans la survenue de TED [troubles envahissants du développement]," indiquait en 2010 la Haute autorité de la Santé. Fait confirmé par une étude sur 95 727 enfants vaccinés, menée par l'association médicale américaine (AMA) en 2015 qui ne montre "aucun lien entre le vaccin ROR et le développement de troubles autistiques", mais une autre conséquence: "Ces croyances ont conduit à une baisse du taux de vaccination". 

Une augmentation de la prévalence?

"Là est le véritable danger", selon Catherine Barthémy, pédiatre et psychiatre: "Il y a une collusion entre les observations, les recherches et la campagne de vaccination", note la docteure. "Nous ne pouvons pas prendre le risque de ne pas protéger les enfants de maladies graves à cause de cas isolés dont nous ne parvenons même pas à dénombrer la quantité." 

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Un argument revient pourtant régulièrement dans le débat: l'augmentation indéniable du nombre de personnes diagnostiquées autistes. Entre 1975 et 2010, la prévalence est passée de 1 sur 5000 à 1 sur 68. Des chiffres largement réutilisés pour soutenir les travaux du chercheur britannique Andrew Wakefiels, premier à évoquer une causalité entre vaccination ROR et autisme en 1998 -avant d'être condamné pour fraude scientifique et radié de l'ordre des médecins pour avoir manipulé ses données. 

Franck Ramus remet ces taux en perspective: "Il n'y a pas d'augmentation réelle de personnes concernées, seulement une augmentation du nombre de diagnostics," tranche-t-il. "Dans les nouvelles définitions de l'autisme, les critères d'inclusion sont plus larges. De plus, les spécialistes ont une détection plus fine que par le passé," rappelle Catherine Barthémy qui évoque également un "facteur de confusion".  

"Une pathologique du développement prénatal"

En effet, certaines formes d'autisme apparaissent dans la première ou la deuxième année de vie, soit au moment où est fait le vaccin ROR. "Elles arrivent de manière différée. On parle alors de régression autistique. Mais ça ne veut pas dire que les troubles autistiques n'étaient déjà présents à la naissance." 

La pédiatre n'exclut pas non plus "la possibilité d'un facteur extérieur" -comme les perturbateurs endocriniens- pouvant faire augmenter cette prévalence. Mais, dans ce cas, "il serait question de l'influence des substances pendant la croissance foetale", comme la Dépakine, puisque "l'autisme est une pathologie du développement prénatal". 

L'issue de cette action de groupe est-elle pliée avant même d'avoir commencé? Le professeur Franck Ramus ne peut l'assurer. "Cette procédure risque de déplacer un débat scientifique et médical sur un terrain juridique." Le risque, selon lui, est qu'une décision "absurde" en découle. "Nous n'avons pas de preuves, comme pour le Mediator. Il peut donc en ressortir une décision de justice qui conforte les plaignants malgré l'absence de cause à effet." 

7 juillet 2017

Plan Autisme : l'engagement de Brigitte et Emmanuel Macron

Paris Match| Publié le 06/07/2017 à 17h21|Mis à jour le 06/07/2017 à 17h22

Brigitte et Emmanuel Macron ont rencontré un groupe de jeunes autistes pour leur faire visiter le palais de l'Elysée.

La concertation préalable à la mise en place du 4e plan autisme a été lancée jeudi à l'Elysée, avec comme objectif à fin 2017 de déterminer des mesures pour mieux diagnostiquer et prendre en charge les personnes atteintes de ce trouble neuro-développemental et accompagner les familles. Pendant six mois, entre juillet et décembre, des "réunions préparatoires" vont être organisées "dans toute la France", a-t-il été annoncé lors d'une conférence de lancement, en présence d'une cinquantaine de représentants d'associations ainsi que de membres de gouvernement.

Cette concertation doit faire participer les familles, les collectivités territoriales. Elle doit aussi repérer les actions à mettre en place. Pour ce faire, cinq groupes de travail vont être constitués autour des thèmes de la scolarité et la formation professionnelle, l'insertion dans la société et le monde du travail, la recherche, les familles, et l'accompagnement au changement, a précisé l'Elysée.

Le troisième plan autisme avait été doté de 205 millions d'euros pour la période 2013-2017. Dans un rapport d'évaluation de ce plan, l'inspection générale des Affaires sociales (Igas) et l'inspection générale de l'Education nationale (Igen) avaient relevé "des avancées" mais également des lacunes concernant la prise en charge des adultes atteints de ce trouble, et l'accompagnement des familles.

"L'autisme est une question majeure qu'il nous faut mieux comprendre, mieux diagnostiquer, mieux accompagner", a déclaré en ouverture la secrétaire d'Etat en charge des Personnes handicapées, Sophie Cluzel. Devant l'impatience, voire le désespoir de familles, les associations demandent au gouvernement de "prendre la mesure de l'urgence" en matière de recherche, d'accompagnement vers l'emploi et la scolarité ou encore de création de places dans des structures spécialisées pour éviter des départs forcés en Belgique.

Un nouveau-né sur 100 serait concerné

"Il y a un trop grand retard dans le champ de l'accompagnement et de la prise en charge", a convenu la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn. Elle a défini comme "axes prioritaires": le repérage le plus précoce possible, le renforcement de la qualité des interventions au sein des établissements et des hôpitaux de jour, et la formation des professionnels.

Avant un discours de clôture en fin de journée, le président Emmanuel Macron a rencontré avec son épouse Brigitte un groupe de jeunes autistes pour leur faire visiter le palais du chef de l'Etat. Quelque 650.000 enfants et adultes seraient atteints de troubles du spectre de l'autisme (TSA) en France, selon les associations. Un nouveau-né sur 100 serait concerné.

6 juillet 2017

4ème plan autisme : la concertation engagée à l'Elysée

article publié sur handicap.fr

Résumé : A l'Elysée, le 6 juillet 2017, Emmanuel Macron reçoit les institutions et associations du champ de l'autisme pour définir les priorités du 4ème plan autisme.

Par , le 06-07-2017

C'est l'Elysée que le chef de l'État a choisi pour lancer la concertation autour du 4e plan autisme, le 6 juillet 2017 dans l'après-midi. La séance vient de débuter. Devant l'impatience, voire le désespoir de familles, les associations (une cinquantaine sont présentes) demandent au gouvernement de "prendre la mesure de l'urgence" en matière de  recherche, d'accompagnement vers l'emploi et de scolarité ou encore de création de places dans des structures spécialisées pour éviter des départs forcés en Belgique.

14h30. 4 ministres au RV

Sophie Cluzel (secrétaire d'Etat en charge du handicap) prend la parole. "L'autisme est une question majeure qu'il nous faut mieux comprendre, mieux diagnostiquer, mieux accompagner".

Frédérique Vidal (ministre de l'Enseignement supérieur), Jean-Michel Blanquer (ministre de l'Education nationale) et Agnès Buzyn (ministre de la Santé) sont également présents, réunis en formation interministérielle. Les ministres de l'emploi, la culture et le sport sont représentés.

Jean-Michel Blanquer déclare que son ministère veut faire de l'accueil des élèves autistes une priorité. Pour mener à bien cette politique, il considère que l'interministérialité est la "clé de l'efficacité". Il y a, pour lui une évidence : "l'école de la République doit accueillir tous les enfants. Lorsque la situation ne le permet pas, une réponse doit aider les familles à trouver une organisation adaptée". Il reconnait être "au milieu du gué" et dit "connaître les inquiétudes des familles à cause de procédures lourdes et complexes". Il promet, en 2017, 112 unités d'enseignement en maternelle pour les enfants autistes. Selon lui, 50 % d'entre eux poursuivront en primaire. Il assure également que la formation des AESH sera amélirorée et que le dépistage précoce sera fait le plus tôt possible, dès la maternelle grâce à un suivi médical des enfants au sein de l'école. En 2017, 280 000 élèves en situation de handicap sont scolarisés en France, dont 29 326 avec des troubles autistiques (soit plus 30% depuis la fin des années 2000).

Agnès Buzyn dit vouloir partir des besoins individuels et regretter "un trop grand retard dans le champ de l'acompagnement des personnes autistes". Ce 4eme plan aura 4 axes prioritaires : développer le repérage, renforcer la qualité des interventions au sein des établissements et hopitaux, renforcer l'inclusion sociale et professionnelle et l'acompagnement des familles et des proches.

Frédérique Vidal assure que le champ de la recherche sera mobilisé dans le domaine du diagnostic, du traitement, de la prise en charge avec, notamment, l'appui de la robotique. Elle souhaite mettre en place une plateforme collaborative pour diffuser la recherche à tous les lieux de diagnostic, en soutien des familles. Elle souhaite par ailleurs développer la pédo-psychiatrie dans ce domaine et encourager la formation initiale et continue aux spécificités de l'autisme pour tous les pros de l'accompagnement.

15h15. Josef Schovanec s'exprime au nom des adultes autistes

ll rend hommage à Ségolène Neuville, ex-secrétaire d'Etat au handicap,  qui a "osé l'impensable, faire travailler une personne autiste". Josef Schovanec a en effet rédigé un rapport en 2017 sur l'emploi des personnes avec autisme, regrettant qu'aucun media ne l'ait interrogé à ce sujet au moment de sa sortie. Il déplore que ses amis autistes soient au chômage car négligés par le monde du travail. ll regrette que la France se soit concentrée sur les enfants et adolescents en oubliant qu'ils deviendraient un jour adultes. Il lutte pour que l'expertise des personnes autistes soit reconnue.

15h45 Le robot NAO fait son entrée dans la salle

Ce petit humanoïde de 58 centimètres est équipé de deux caméras et de nombreux capteurs qui enregistrent les réactions des enfants. Produit par une société française, Aldebaran Robotics, il a été testé dès 2014 auprès d'enfants autistes. Il entame un dialogue avec Sophie Cluzel exliquant tout le bénéfice qu'il leur apporte via des conversations en direct et des jeux.

16h Le détail sur la concertation du 4ème plan

Les réunions pour préparer ce plan auront lieu entre juillet et décembre 2017 et devront donner lieu à des propositions concrètes. Cinq groupes de travail seront mis en place : scolarité et formation professionnelle, insertion dans la société et dans le monde du travail, recherche et nouveauté, famille et, enfin, aide au changement.  Cette concertation doit faire participer les familles, les collectivités territoriales. Elle doit aussi repérer les actions à mettre en place. Le troisième plan autisme avait été doté de 205 millions d'euros pour la période 2013-2017.

16h Goûter avec des enfants autistes à l'Elysée

Avant son discours de clôture en fin de journée, le président Emmanuel Macron rencontre avec son épouse Brigitte un groupe de jeunes autistes  pour leur faire visiter le palais du chef de l'Etat.

16h30 Cri de colère de Danièle Langloys

La présidente d'Autisme France lance un cri d'alarme : "Comment peut-on construire un 4ème plan autisme sans rendre ses enfants à Rachel ?". Largement applaudie par la salle, elle fait allusion à cette maman de trois enfants autistes qui lui sont arrachés depuis deux ans. Elle accuse certains départements de "perversité et d'incompétence" qui continuent de mettre le trouble autistique sur le dos des mamans. Elle se veut la porte-parole de la "détresse et de l'épuisement des familles". Pour elle, deux autres axes majeurs pour ce futur plan : simplifier le parcours "cauchemardesque" des parents dans les MDPH et proposer une véritable aide aux familles, notamment via de la guidance à domicile, des relais en cas d'épuisement. Elle lance un "appel au secours au Gouvernement" et espère le soutien massif de la Nation.

17h Le président prend la parole

Arrivant à la conclusion des débats, le chef de l'Etat dit avoir beaucoup appris avec les jeunes avec lesquels il a passé un peu de temps en compagnie de son épouse Brigitte. Il dit se "méfier des plans qui sont trop souvent homogènes. La vingtaine de jeunes avec qui j'étais suffit à montrer qu'il n'y a aucune homogénéité. Et donc les réponses sont multiples". Et de saluer le travail global réalisé par l'ensemble des acteurs et l'intérêt du caractère interministériel de ce chantier, les ministres présents ayant déjà intégré dans leur action cette dimension. Il est interrompu par le jeune Thomas qui ne tient plus en place, et s'adressant avec le sourire à ses éducateurs : "Je crois que vous avez échoué à le mettre sous une contrainte". Avant d'ajouter : "Et c'est sans doute très bien ainsi".

Les 6 prochains mois seront donc consacrés à l'analyse de cette approche transversale, "partant plutôt du bas qu'un plan dicté d'en haut" selon le chef de l'Etat, en proposant des "familles de solutions". C'est, selon lui, la "plus-value de ce 4ème plan", en articulant convenablement le médico-social et non médico-social et sans oublier les adultes qui "peuvent se retrouver plongés dans la violence d'un monde qui n'est pas fait pour eux." Et de conclure : "les sociétés contemporaines ont ce défi à relever, et c'est plutôt un défi de civilisation. Et c'est dans cette maison que cela doit se faire", même s'il se dit conscient que ces problèmes ne seront pas réglés en un jour. Le chef de l'Etat affirme qu'il sera présent, sur le terrain, "pas pour de grandes annonces" mais pour des "situations concrètes" et, cela, "autant de fois que cela sera nécessaire". 

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Sur Handicap.fr

24 juin 2017

Autisme : la sérotonine améliorerait les relations sociales

 

La sérotonine aide les relations sociales
La sérotonine aide les relations sociales

Les difficultés relationnelles rencontrées par les personnes souffrant d'autisme seraient liées à des anomalies concernant la production et la circulation de la sérotonine dans le cerveau.

En France, 650 000 personnes souffrent de troubles du spectre autistique (TSA). Les garçons sont, en moyenne, 3 fois plus concernés que les filles ; l'autisme frappe environ 1 naissance sur 100 dans l'Hexagone. Les troubles du spectre autistiques se caractérisent en particulier par des interactions sociales déficientes : l'enfant atteint d'autisme semble indifférent à tout contact social, ne répond pas aux signes d'affection, a des difficultés avec le langage parlé...

Des chercheurs du Riken Brain Science Institute (au Japon) viennent peut-être de découvrir l'origine de ces difficultés sociales : celles-ci seraient liés à un défaut de la production et de la circulation de la sérotonine dans le cerveau.

Pour en arriver à cette conclusion, les scientifiques japonais ont travaillé avec des souris souffrant de troubles du spectre autistique. « Nous avons découvert que ces souris présentaient des taux de sérotonine anormalement faibles dans certaines régions cérébrales par rapport aux souris-témoins : or, ce neurotransmetteur participe notamment à la régulation des émotions, ce qui pourrait expliquer certaines anomalies de comportement. »

3 semaines de traitement avec des ISRS

Les chercheurs ont alors réalisé une expérience sur des souris souffrant de troubles du spectre autistique : durant 3 semaines après leur naissance, ils leur ont administré un inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine (ISRS), un médicament psychotrope dont le rôle est justement d'augmenter le taux de sérotonine. Les ISRS sont fréquemment prescrits en cas de dépression ou d'anxiété.

Résultat ? Au terme de l'expérience, les chercheurs ont constaté que les souris traitées à l'ISRS avaient moins de difficultés sociales qu'avant l'administration de leur traitement - ce paramètre a été contrôlé en les libérant dans une cage pleine de souris inconnues. « Bien entendu, cette découverte ne peut pas encore être généralisée aux êtres humains, précisent les chercheurs qui ont publié leurs travaux dans la revue spécialisée Science Advances. En revanche, cela ouvrira peut-être la voie à de nouveaux traitements pour les personnes souffrant de TSA. »

Source

24 juin 2017

AUTISME : Pourquoi le contact visuel est difficile

Scientific Reports

Les prédispositions des bébés pour le contact humain et l'interaction, notamment par le regard ou la parole sont très réduites chez les enfants diagnostiqués avec troubles du spectre autistique (TSA). Les chercheurs du Massachusetts Massachusetts General Hospital explorent ici pourquoi les personnes autistes évitent le contact visuel. Leurs études d'imagerie révèlent une sur-activation des structures du cerveau sous-corticales en réponse au regard direct. Une sur-activation qui peut être douloureuse.


Cette difficulté à regarder les autres dans les yeux, caractéristique des personnes autistes est l’un des signes diagnostiques des TSA, notamment via la technique de
l’eye-tracking, qui permet, dès 6 mois, d’identifier les nourrissons à risque élevé d’autisme. Cette difficulté à regarder droit dans les yeux a généralement été interprétée comme un signe d'indifférence sociale et personnelle, cependant ces personnes autistes suggèrent parfois qu’il en est autrement. Certains patients autistes déclarent que regarder droit dans les yeux est désagréable, stressant et décrivent même parfois une sensation de brûlure. Ces plaintes suggèrent une cause neurologique que cette équipe du Massachusetts a cherché à identifier. L’équipe met en effet en lumière les mécanismes du cerveau impliqués dans ce comportement.

Les résultats démontrent que, contrairement à l’idée reçue, ce manque apparent d’interaction visuelle chez les personnes atteintes d'autisme n'est pas associé à un manque d’intérêt, explique le Dr Nouchine Hadjikhani, auteur principal de l’étude : « Au contraire, nos résultats montrent que ce comportement est un moyen de limiter une excitation excessive désagréable voire douloureuse résultant de la sur-activation d’une zone spécifique du cerveau ». Via IRMf, les chercheurs mesurent ici les différences d'activation du système subcortical de participants autistes vs témoins, lorsqu’ils voient ou regardent des visages, soit librement, soit avec la contrainte de fixer la région oculaire. Alors que l'activation des zones subcorticales est similaire pour les deux groupes en cas de visualisation libre, une sur-activation est observée chez les participants autistes contraints de fixer la région oculaire. Cette constatation est plus marquée avec des visages effrayants mais des effets similaires sont observés lors de la visualisation de visages heureux, en colère ou neutres.

L'hypothèse d'un déséquilibre entre les réseaux de signalisation excitatrice et inhibitrice du cerveau : les scientifiques reprennent en effet l’hypothèse d’un déséquilibre entre le système excitateur (neurotransmetteurs qui stimulent le cerveau), inhibiteur (neurotransmetteurs qui apaisent et régulent). Ils évoquent différentes causes génétiques et environnementales à même de renforcer la signalisation excitatrice dans les circuits sous-corticaux impliqués dans la perception du visage, ce qui entraînerait une réaction anormale au contact des yeux, une aversion au regard direct et, par conséquent, un développement anormal du cerveau social.

La clé réside dans le système subcortical du cerveau, responsable de l'orientation naturelle vers les visages, observée dès la naissance, chez les nouveau-nés et cruciale pour la perception de l'émotion, plus tard dans la vie. En révélant ce mécanisme sous-jacent à l'évitement du regard, l'étude suggère aussi une nouvelle voie thérapeutique pour rétablir le contact visuel : une approche impliquant une habituation lente au contact avec les yeux qui permettrait peu à peu aux personnes autistes de surmonter cette réaction excessive et de parvenir à mieux gérer les contacts visuels à long terme pour, finalement, un meilleur développement du cerveau social.

Source: Scientific Reports 09 June 2017 doi:10.1038/s41598-017-03378-5 Look me in the eyes: constraining gaze in the eye-region provokes abnormally high subcortical activation in autism

13 juin 2017

Percée dans le dépistage de l'autisme

article publié dans LA PRESSE.ca

Publié le 12 juin 2017 à 10h55 | Mis à jour le 12 juin 2017 à 10h55

Un diagnostic d'autisme avant l'âge de 6 mois... (Photo Pascal Ratthé, Archives Le Soleil)

Un diagnostic d'autisme avant l'âge de 6 mois est pratiquement impossible puisque « les évaluations comportementales ne sont pas possibles pour les bébés plus jeunes », explique Alan Evans, biophysicien à l'Institut neurologique de Montréal.

Photo Pascal Ratthé, Archives Le Soleil

Une étude américaine à laquelle participe un chercheur montréalais a réussi à prédire le risque d'autisme dès 6 mois à partir d'une analyse par imagerie médicale du cerveau du bébé. Cette approche ne fonctionne pour le moment que pour les enfants à haut risque, dont l'un des frères ou soeurs a déjà un diagnostic d'autisme.

« On ne peut pas, pour le moment, utiliser cette technique pour faire un diagnostic, mais en la combinant à des évaluations béhaviorales comme le regard du bébé, on pourra abaisser l'âge moyen du diagnostic, qui est présentement de 2 à 3 ans », explique Alan Evans, biophysicien à l'Institut neurologique de Montréal, affilié à l'Université McGill, qui est l'un des coauteurs de l'étude publiée hier dans la revue Science Translational Medicine. « Si on établit le diagnostic plus tôt, on peut intervenir plus tôt, et ç'a un impact énorme sur l'évolution du trouble. Beaucoup de connexions dans le cerveau apparaissent dans les premières années. »

Quand peut-on imaginer que le diagnostic soit possible à l'âge de 1 an ? « On ne peut pas être précis comme ça, dit M. Evans. Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'il est peu probable qu'on puisse faire un diagnostic avant l'âge de 6 mois, parce que les évaluations comportementales ne sont pas possibles pour les bébés plus jeunes. »

Pense-t-il voir un diagnostic à 6 mois avant sa retraite ? « Oui, certainement », affirme le chercheur dans la soixantaine. « La technologie et les techniques d'analyse des données font des pas de géant. »

Pourra-t-on aussi utiliser ces tests pour la population générale, qui a un risque d'autisme beaucoup moins élevé ? « On pense que ça sera possible », dit M. Evans.

L'étude, qui suit depuis l'âge de 3 mois 500 enfants dont un frère ou une soeur a un diagnostic d'autisme, regroupe une dizaine d'hôpitaux américains. « Environ 15 % de l'échantillon aura aussi un diagnostic d'autisme, alors on parle de 75 à 100 cas, ça donne une bonne puissance statistique », précise M. Evans. Les tests d'imagerie médicale sont faits au départ, puis à 6 mois, 1 an, 2 ans et 3 ans. Deux autres études ont été publiées déjà sur les données de l'Étude sur l'imagerie du cerveau des bébés (IBIS, selon l'acronyme anglais), dont une a aussi fait un lien entre l'imagerie à 6 mois et le diagnostic d'autisme plus tard.

***

Leader mondial de l'autisme

Alan Evans participe à l'étude IBIS parce que l'Institut neurologique est reconnu aux États-Unis pour sa capacité d'analyse et de stockage des données dans ce domaine. « On fait de l'analyse du cerveau depuis 30 ans », dit M. Evans, qui est à l'institut depuis 1984. Un autre projet placera le Québec au premier plan de la recherche sur l'autisme, selon lui. « Le Consortium sur la transformation des soins aux autistes va regrouper 1000 familles québécoises dont l'un des membres est atteint, précise M. Evans. Ça sera une cohorte unique au monde. » Outre l'homogénéité génétique de certaines régions du Québec, le suivi à long terme de cohortes est plus facile ici parce que les Québécois sont moins susceptibles de déménager à l'extérieur de la province que les autres Canadiens ou les Américains, selon M. Evans. « C'est comme l'Islande, qui s'est établie en leader de la recherche génétique. »

7 juin 2017

La théorie de l'esprit autistique

(Cet article n'est que le fruit d'une réflexion commune et le but n'est pas de généraliser ni de nous exprimer à ce sujet au nom de toute la communauté autiste.)

En psychologie cognitive, l'on définit la théorie de l'esprit par la faculté d'attribuer à autrui un état mental. Par exemple : déduire ses intentions, ce qu'il peut penser ou non, ce qu'il est susceptible de savoir ou non.

Derrière les mots « théories de l’esprit » ou « empathie», simples en apparences, nous mettons des notions en réalités plus complexes et pluriels. La théorie de l’esprit est une notion initialement issue de la primatologie (Premack et Woodruff, 1978), mais son intérêt dans la compréhension des TSA a été rapidement perçu par Simon Baron-Cohen (1985) lequel a conçu de nombreux tests basés sur cette théorie, servant à détecter l'autisme (l'AQ, l'EQ, le Test des Faux Pas, le tests des émotions faciales, c'est lui ^^).

Pour information, il existe à ce jour deux hypothèses subdivisées en deux sous- hypothèses décrivant la formation et le fonctionnement de la théorie de l'esprit. On distingue :

A) La théorie de la théorie (la théorie de l'esprit est le fruit d'apprentissage et d’expérience empiriques.)

  1. Modèle de l’apprentissage (essai/erreur dans un processus expérimental proto- scientifique)
  2. Modèle de la théorie modulable (théories formulées et modulées pour extraire des « lois » de fonctionnements sociaux)

B) La théorie de la simulation (système de correction mutuel des émotions)

  1.  Modèle analogique (analogie instinctive avec ses propres expériences)
  2. Modèle de l’imitation (imitation des réactions des autres)

N'oublions pas également de mentionner que l'empathie est une notion double constituée de l'empathie affective (ressentir l'émotion de l'autre de façon primaire par « contagion ». Par exemple : se sentir triste/bouleversé intérieurement lorsque l'on voit quelqu'un pleurer ou avoir mal) et de l'empathie cognitive (attribuer un état à autrui, se projeter à sa place, interpréter les expressions faciales...) C'est cette dernière, et seulement cette dernière, qui n'est autre qu'un synonyme de la théorie de l'esprit, qui serait déficitaire chez nous, les autistes.

A l’évidence, ces processus potentiels ne s’excluent pas les uns les autres, mais peuvent fonctionner, et interagir. Nous évoquerons plus tard les zones du cerveau qui les sous-tendent, mais il faut se souvenir que les liens de causalité ne sont pas facilement identifiables : en effet, a-t-on un bon odorat parce qu’on a une zone olfactive très développée ou un zone olfactive très développée parce qu’on a un bon odorat ?

Au sujet de la théorie de l'esprit, nous avons longuement réfléchi à ce sujet, et en sommes arrivés à ce questionnement :

«Comment peut on deviner l'état mental d'une personne dont le fonctionnement, l'agencement neuronal est qualitativement radicalement différent ? »

Et de ce fait : « Les neurotypiques ne manqueraient-ils pas de « théorie de l'esprit autistique » lorsqu'ils sont incapables de comprendre les réactions des personnes autistes, prenant pour base leurs propres réactions, leur propre ressenti ? »

Propulsés à notre place tels quels, selon leurs références, en tant qu'être de spécificité sociale, peut-être se sentiraient-ils dans un état de grande détresse, prisonniers de l'autisme. Or, nous sentons-nous TOUS ainsi en tant qu'autistes ? Pas nécessairement. En fait, nous fonctionnons ainsi, tout simplement. Différemment. Parce que, tout comme ils ignorent "ce que cela fait d'être autiste", nous ignorons majoritairement "ce que ça fait d'être neurotypique".

Nous pensons que la théorie de l'esprit dépend de la structure mentale de la personne à qui l'on s'adresse. Les autistes, entre eux, bien souvent, se comprennent, se retrouvent, voire... se reconnaissent. "Oh je compatis, tu dois te sentir complètement épuisé ! Courage !" ai-je souvent entendu de la part d'individus supposés manquer et d'empathie cognitive, l'autre nom de la théorie de l'esprit, de par leur condition d'autiste. Or, n'est-ce pas là un manifeste de la théorie de l'esprit, selon sa définition ?

Les neurotypiques qui cernent le mieux les autistes, sont ceux qui évoluent à leurs côtés. Dans leur métier, dans leur famille. Ils se rapprochent de leur vision des choses, ils ont appris à leurs côtés. Cela ne signifie pas que c'est naturel pour eux de "penser autiste". L'on pourrait dire que leur acquisition de la "théorie de l'esprit autistique" est qualitativement différente et sans doute régie par une intellectualisation permanente. Ils ont peut être appris lors de séminaires par exemple que la personne autiste avait des particularités sensorielles. Mais comme ils n'en feront jamais l'expérience, ils n'auront qu'une notion théorique de ce phénomène.

Il en va de même pour les autistes dans une société régie par des non-autistes. Beaucoup d'entre nous avons appris à l'usage, de façon consciente, que telle réaction signifiait ceci, que tel événement engendrait telle réaction. Sans doute parce que nous mêmes, ne manifestons pas nos émotions de la même manière, n'avons pas le même cheminement de pensée à la base. Sans doute parce que nos codes sont différents aussi. En effet, il nous est souvent dit: "Tu dis que tu n'es pas <tel caractère/telle émotion> pourtant, c'est ce que tu renvoies, alors change d'attitude !". Il n'y a rien de plus frustrant et de plus incompréhensible, voire blessant que cette phrase pour une personne autiste.

Nous nous sommes donc rendu compte que notre base, notre répertoire de réactions, d'intentionnalités, ne s'appliquait pas aux personnes non-autistes. Et que l'inverse était vrai aussi.

Les neurotypiques ne parlent-ils pas du "monde de l'autisme", pour le différencier du leur ?

L'on attribue souvent à la personne autiste des émotions, des intentions, des réactions qui ne sont pas les siennes. A titre d'exemple :

  • –  L'on attribue à notre mutisme et à notre fuite du regard de l'indifférence. Pourquoi ? Parce qu'un neurotypique qui réagirait ainsi ferait, LUI, montre d'indifférence. Sommes-nous pour autant indifférents ? 

  • –  L'on attribue aucun sens, aucune motivation ni aucun but à nos stéréotypies gestuelles. Pourquoi ? Parce que ces gestes n'ont pas de sens, qu'il soit social, langagier etc. d'un point de vue neurotypique... A quoi nous servent nos stéréotypies gestuelles ? Bien souvent à nous canaliser.

Le versant théorique de la théorie de l'esprit semble facilement transposable dans une pensée autistique : en effet, la plupart d’entre nous analysons et observons attentivement le comportement des autres afin d'en tirer des "règles", des "lois" des schémas de comportement. En revanche, cela relève d’un processus conscient et volontaire, intellectualisé, alors que cela nous semble être un processus inconscient et instinctif chez les neurotypiques, une capacité immédiate et spontanée à se projeter en lieu et place de la personne pour adopter, "imiter mentalement" ce qui semble être son point de vue. D'ailleurs, les psychanalystes appellent la théorie de l'esprit "mentalisation". Cette faculté se développe très tôt chez les neurotypiques (dès l'âge de 18 mois!!!) et se poursuit jusqu'à l'acquisition de l'aspect pragmatique du langage (les sous-entendus, l'implicite, le second degré...) normalement aux alentours de l'âge de... 7 ans (mais son acquisition débute bien plus précocement). À 7 ans, un enfant neurotypique est parfaitement conscient de la portée de ses paroles et maîtrise quasiment l'implicite, là ou l'enfant autiste n'a pas de filtre, du fait d'une différence qualitative de théorie de l'esprit, affectant la pragmatique du langage. Par exemple, il n'imagine pas que certaines de ses paroles puissent blesser l'autre. Non pas parce qu'il ne ressent rien à l'égard d'autrui, mais parce que d'une part, il a des difficultés à adopter son point de vue, qui est celui d'un neurotypique, d'autre part, pour lui, en toute logique, ses paroles n'étant pas blessantes, il ne voit pas pourquoi elles le seraient pour les autres. Quoi qu'il en soit, il n'y a pas d'intention de blesser autrui, car lorsqu'il sait que telle chose peut faire du mal, par essai/erreur, il ne le refait plus (voire, s'en veut énormément...) Ergo, il ne s'agit pas d'une absence d'empathie, mais d'un comportement « mal ajusté » par « erreur de mentalisation », liée à un mode de pensée différent, erreur interprétée par les NT comme une absence d'empathie, eux pour qui la mentalisation est devenue un réflexe, du « bon sens ».

Illustration : un enfant autiste va spontanément passer dans les rangs de la classe et corriger ses camarades en insistant lourdement et (en apparence) froidement sur les erreurs effectuées.

Pour l'enfant : c'est un simple fait, la vérité, et il n'y a rien de mal à le mentionner, surtout qu'il souligne et corrige les erreurs, donc de son point de vue, il se sert de ses capacités pour aider ses camarades....

Pour les camarades NT : « pour qui il se prend, lui ? », « ça ne se fait pas », c'est blessant et humiliant, d'autant plus que l'enfant est dans leur classe, donc un élève, tout comme eux. C'est pas à un élève de faire ça, c'est à l'instituteur. Ça ne viendrait à l'idée de personne parce que c'est « mal élevé ».

De façon générale, nous avons toujours été surpris du manque de recul de la plupart des gens quand ils sont confrontés à une autre personne qui fait ou dit quelque chose qui les dérange, s’énervant spontanément dans des certitudes sans s’interroger sur les raisons possibles de cet acte...

On constate une différence qualitative (mais non quantitative comme chez les personnes souffrants de TOC et de schizophrénie) dans le fonctionnement du cortex cingulaire antérieur, dont la zone dorsale est associée au fait de détecter les erreurs de prédictions et les conflits dans les réponses comportementales). Nous avons généralement du mal à prêter à l’autre des intentions ou des émotions précises, dès lors ce processus fonctionne de façon plus efficace entre autistes qu’avec des neurotypiques, qui eux sont, de plus, incapables de concevoir spontanément l’incompréhension des messages tacites chez l’autre. Les erreurs, en particulier, seront bien souvent considérées par eux comme délibérées et interprétées comme un comportement de provocation. Le fameux « tu le fais exprès ou quoi ? » ou encore, le « pour qui il se prend, lui ? » de l'exemple ci-dessus...

La théorie de l'esprit fonctionnerait donc mieux chez les autistes entre personnes autistes, car il est plus facile d'imaginer des expériences mentales lorsqu'elles sont proches des nôtres (ce qui est également valable pour les NT). Or les expériences mentales des autistes sont quelque peu différentes de celles des neurotypiques. En effet, ces particularités s’accompagnent souvent de co-morbidités comme les troubles anxieux, ou d’expériences sensitives particulières. Parmi ces différences de fonctionnement, l'on retrouve :

Sur le plan sensoriel :

- l'Hyper/hyposensibilité

Des différences significatives sont détectées dans le cortex pariétal inférieur des autistes (qui permet l’intégration des modalités sensorielles). En effet, nous pouvons présenter des hyper ou hyposensibilités, selon les cas, touchant un ou plusieurs sens.

Par exemple, en passant du temps ensemble, nous avons remarqué que nous réagissions souvent de concert aux mêmes stimuli sonores (mobylette sur-aiguë, nourrissons hurlant, tout cela saturant notre cerveau qui frise ou « coupe tout contact » avec l’extérieur). Nous n'avons pas eu besoin de verbaliser pour comprendre que nous avons tous deux été gênés par le même stimulus. Il semblerait que les neurotypiques, mêmes professionnels dans le domaine, n'en tiennent pas suffisamment compte dans l'aménagement des structures accueillant des personnes autistes et dans leur manière de concevoir l'autisme tout court, bien que cela tende à changer.

- La synesthésie

Cette expérience de « confusion » dans l’intégration des sens est peu connue des neurotypiques, mais semble plus fréquente chez les autistes, qui peuvent en avoir une vision commune et partager leurs expériences. (voir article à ce sujet) La synesthésie peut aussi expliquer une forme de sensibilité artistique et des liens entre objets qu'un NT qualifierait d'atypiques, d'inédits, d'originaux.

Sur les plans cognitif, émotionnel :


- La pensée en images et en schémas

Comme beaucoup d’autistes, nous pensons davantage en images et en systèmes qu’en mots, ce qui peut rendre les explications et les formulations que nous pouvons faire plus difficiles lorsqu'elles sont destinées à ceux qui ont une pensée plus sémantique. Cela peut parfois engendrer des quiproquo ou de notre part une insatisfaction de la façon dont on a verbalisé notre pensée. « Non, ce n'est pas exactement ce que je voulais dire... » est une réaction que nous avons souvent et qui est relativement frustrante.

- L'interprétation des expressions faciales

Le visage des neurotypiques est très mobile, exprimant un grand nombre d’émotions dans un temps réduit, toutes complexes et longues à analyser pour nous.

La persistance et le nombre d’informations exprimées par le visage d’un autiste est plus raisonnable, donc plus « lisible » entre nous.

D’autre part, Le lobe temporal inférieur, moins actif chez les autistes, permet l’interprétation des regards. Chez nous, l’information ne passe donc pas nécessairement par le regard mais par d’autres voies.

- l'imitation, la motricité et les fameux neurones miroirs

Le cortex pré-moteur abrite des neurones miroir, surnommés abusivement « neurones de l’empathie », qui permettent de s’identifier aux autres (« system of the same »). Si des différences dans l’activité de cette zone entre autistes et neurotypiques ont été observées, les neurones miroirs en tant que « neurones de l'empathie » ont été exclus de l’étiologie de l’autisme (arrêtez donc de nous dire que nous n’avons pas d’empathie ^^). Ces différences s’expliquent sans doute parce que cette zone est aussi associée à la planification et à l’organisation des mouvements. Or la psychomotricité fine est souvent moins performante chez les autistes. C’est peut-être lié à une moindre capacité dans le domaine de l'imitation et du traitement des gestes, ce qui expliquerait que beaucoup d'Asperger aient des traits dyspraxiques et que l'évaluation motrice soit un critère additionnel de diagnostic.

L’imitation motrice n’est effectivement pas très marquée chez nous. Par exemple, nous nous sommes toujours sentis ridicules, voire carrément bloqués en essayant d’imiter les gestes en cours de sport.

Tout ceci suggère la construction d’une théorie de l'esprit qualitativement différente chez les autistes plutôt qu’un déficit quantitatif. C'est ce qui nous emmène à parler de « théorie de l’esprit autistique ».

Et plus encore, tout ceci suggère qu'autistes et neurotypiques DOIVENT se fréquenter et s'inclure mutuellement au quotidien, afin d'apprendre à se connaître et de développer leurs « théories de l'esprit » respectives ;)

 

5 juin 2017

Les avantages insoupçonnés d’être un parent autiste

Être parent lorsque l’on est autiste peut sembler incroyablement difficile. Cependant une génération de parents atteints de ce trouble démontre qu’il y a des avantages, même quand l’enfant n’est pas lui-même concerné. Un article de Spectrum News.

Traduction de The unexpected plus of parenting with autism

Il est presque 20 heures et il règne un joyeux bazar dans la maison de Kirsten Hurley située à West Cork en Irlande. Elle a promis à ses enfants, Alex, 9 ans, et Isla, 4 ans, qu’ils auraient du chocolat s'ils ne lui traînaient pas dans les pattes pendant qu’elle parlerait à une journaliste sur Skype.

Mais ce pot-de-vin n’a pas l’air d’avoir l’effet escompté, du moins avec Isla qui grimpe sur le dos de sa mère et fait des acrobaties par-dessus ses épaules, en pouffant de rire, toute fière d’elle.

« C’est quelque chose qui me rend dingue » dit Hurley. Cette stimulation sensorielle incessante et intense qui est inévitable lorsque l’on est parent, le fait que l’enfant vous agrippe, vous grimpe dessus ou le fait de l’entendre répéter sans cesse « Maman, Maman, Maman, Maman, Maman », c’est quelque chose qu’elle a du mal à gérer car elle a une forme légère d’autisme connue sous le nom de syndrome d’Asperger.

Hurley a reçu son diagnostic de syndrome d’Asperger à 23 ans, alors que son fils avait environ 14 mois. Alex a reçu son diagnostic d’autisme environ un an après (aux Etats-Unis, le syndrome d’Asperger a été intégré dans la catégorie des troubles du spectre autistique en 2013 mais en Irlande et ailleurs cela reste un diagnostic distinct).

D’une certaine façon, le fait qu’ils soient tous les deux concernés a rendu l’éducation de son fils plus facile pour Hurley. « Alex m’a toujours semblé très logique » dit-elle. Isla, au contraire, n’est a priori pas autiste et son comportement d’enfant d’âge préscolaire typique est souvent déconcertant pour sa mère. Hurley trouve qu’elle a un besoin excessif d’attention et peut faire des choses telles que refuser un verre de jus d’orange alors qu’elle l’a demandé. « En fait, ces choses qu’elle fait et que je trouve complètement anormales parce qu’Alex ne les a pas faites sont en fait des choses typiques d’enfants » dit Hurley en riant.

Hurley gère les nombreuses complications dues au fait d’être parent autiste avec lucidité et une dose d’humour salutaire. Mais parfois, elle a été mal comprise lorsqu’elle demandait de l’aide. Un jour, Hurley a dit qu’elle avait le syndrome d’Asperger au nouveau thérapeute qu’elle consultait. Le thérapeute lui a alors demandé si elle aimait ses enfants, « Ce qui ne m’a pas beaucoup aidée » dit-elle. « Les gens ont ce genre d’idées reçues sur les autistes, cette idée qu’ils ne ressentiraient pas d’émotions. »

 

Gillan et Lizzie Drew, avec leur fille Izzie © Spectrum News Gillan et Lizzie Drew, avec leur fille Izzie © Spectrum News

Hurley n’est pas une exception contrairement à ce que l’on pourrait penser : un nombre conséquent de personnes diagnostiquées autistes élèvent des enfants. Plus de 300 mères autistes ont participé à une étude en ligne, ce qui laisse penser qu’il y a probablement des milliers de parents diagnostiqués autistes dans le monde, et sans doute des centaines de milliers voire des millions de parents sans diagnostics. Les groupes Facebook, les plate-formes de messagerie et les commentaires sur les blogs où les parents comparent leur vécu et partagent leur stratégies face aux problèmes en sont une preuve supplémentaire. Leurs récits montrent que l’autisme peut poser problème quand on devient parent car, non content de devoir gérer la surcharge sensorielle, ces parents qui ont eux-mêmes des difficultés avec les interactions sociales ont par exemple du mal à aider leurs enfants à apprendre les habiletés sociales. Cependant, les autistes peuvent avoir des compétences parentales précieuses, en particulier pour un enfant qui est lui-même sur le spectre.

Pourtant, à en croire la littérature scientifique, ces parents n’existent pas. Ce n’est que depuis peu, lorsque les scientifiques se sont intéressés à l’étude des adultes autistes, qu’ils ont commencé à se poser des questions sur ce type de parents. « Je pense qu’aujourd’hui, au 21e siècle, nous admettons que les personnes autistes sont parfaitement capables de participer à tous les aspects de la vie et qu’ils l’ont fait de façon quasi invisible jusqu’à maintenant, y compris en ce qui concerne la parentalité », dit Simon Baron-Cohen, directeur du Autism Research Center à l’université de Cambridge au Royaume-Uni.

Le manque actuel de recherches aboutit à ce que, non seulement ces parents manquent de soutien, mais aussi à ce que notre société ne soit pas préparée à cette vague croissante de personnes diagnostiquées autistes qui ont grandi et envisagent d’avoir des enfants. Sans l’information et le soutien nécessaires, ces jeunes gens peuvent conclure que devenir parent n’est pas une option pour eux. « Cela me fend le cœur de dire cela, mais ce sont des propos que l’on m’a tenus : ‘Est-ce que le fait d’être autiste ou Asperger veut dire que je ne devrais pas avoir d’enfant ?’ », dit Matthew Lerner, professeur adjoint de psychologie, psychiatrie et pédiatrie à l’université de Stony Brooks à New York. L’expérience de Hurley et les nombreux autres parents précurseurs de la parentalité avec autisme devrait calmer cette inquiétude en apportant de l’espoir.

De possibles parents

L’idée qu’une personne autiste pouvait devenir parent a longtemps été considérée comme impossible. Quand Edward Ritvo a proposé un article sur le sujet au Journal of Autism and Developmental Disorders en 1988, il l’a intitulé « Onze parents potentiellement autistes ». Il dit que sans ce bémol, il est quasiment certain que l’article n’aurait jamais été publié.

« Cet article a été rejeté huit fois par huit des principaux journaux de médecine et de psychiatrie », dit Ritvo, aujourd’hui professeur émérite de psychiatrie à l’université de Californie, Los Angeles. « Personne n’y croyait. Personne ne voulait croire que les parents étaient autistes, que des autistes pouvaient grandir, se marier et avoir des enfants. »

À l’époque, l’autisme était vu comme un trouble grave, généralement associé à une déficience intellectuelle, et la recherche s’intéressait quasi-exclusivement aux enfants autistes. Cependant les parents qui figuraient dans cette courte étude avaient des caractéristiques qu’on considère aujourd’hui comme typiques de l’autisme : comportements répétitifs tels que flapping et balancements d’avant en arrière, rituels particuliers tels qu’arriver très exactement 30 minutes en retard à chaque rendez-vous, désintérêt pour les interactions sociales, absence de contact visuel.

Les autres publications de Ritvo et son équipe ont démontré qu’il n’était pas anormal pour des personnes sur le spectre d’avoir des enfants: une étude de 1994 portait sur 14 personnes autistes qui avaient, à eux tous, 54 enfants. La plupart étaient les parents d’enfants que l’équipe de Ritvo avait vus en consultation. Ritvo et ses collègues s’étaient intéressés à ces parents car ils voulaient démontrer que l’autisme est un état physiologique d’origine héréditaire et non le résultat d’un trauma psychologique, comme on le pensait majoritairement dans les années 1960 et 1970.

Ces observations ont permis de lancer l’étude des gènes de l’autisme tandis que les vies de ces parents n’ont plus été étudiées. Aujourd’hui, on ne sait toujours pas quelle proportion d’adultes autistes a des enfants, quelle proportion de ces enfants sera elle-même autiste, ou s’il est fréquent pour un enfant autiste d’avoir un parent sur le spectre. Et ces questions pourtant élémentaires n’abordent même pas les conditions de vie des parents autistes : leurs combats pour être parents, les forces qu’ils investissent pour élever leur enfant, la façon dont leurs espoirs et leurs peurs évoluent au fur et à mesure que leur enfant grandit.

Concrètement, la seule étude empirique sur le vécu de parents autistes est une étude en ligne conduite par l’équipe de Baron-Cohen, portant sur 325 mères diagnostiquées autistes à travers le monde. Les données non-publiées compilent les réponses à 89 questions conçues en collaboration avec des femmes autistes. Ces questions incluent des sujets tels que la grossesse et l’accouchement, l’expérience sociale de la maternité ainsi que les forces et faiblesses des parents autistes.

Les mères autistes de cette étude font état de davantage de dépressions prénatales et postnatales comparées au groupe de 91 femmes neurotypiques élevant au moins un enfant autiste. Elles se sentent plus isolées et jugées par les autres ; elles sont nombreuses à dire que personne ne les aident et qu’elles se sentent souvent incapables de gérer l’éducation d’un enfant.

Pour certains parents, la stigmatisation et les préjugés sur l’autisme peuvent avoir des conséquences dramatiques. Damon Matthew Wise Âû et sa femme ont été témoins du fait que les parents autistes sont plus facilement victimes d’une surveillance accrue de la part des services sociaux. Wise Âû est un pionnier du mouvement d’auto-défense des personnes Asperger, il vit à Shannon, Ireland. Sa femme, Karen, est elle aussi autiste, tout comme leurs trois enfants qui souffrent d’ailleurs de maladies chroniques telles que des intolérances alimentaires, de l’insomnie et des problèmes de peau.

À la naissance de leur plus jeune enfant en 2003, Wise Âû et sa femme ont eu recours de façon ponctuelle aux services de répit, ou accueil temporaire pour enfants, dans des familles d’accueil pour quelques heures ou un weekend. Au milieu de l’année 2009, encouragés par les travailleurs sociaux, ils laissaient leurs deux plus jeunes enfants passer quelques jours par semaine hors du domicile familial. Mais début 2010, le couple a appris que les services sociaux avaient entamé des démarches pour placer leurs trois enfants à temps plein de façon permanente. Selon Wise Âû, l’administration n’a jamais donné le moindre motif légal pour ce projet. Il dit que cet incident est révélateur des préjugés des services sociaux qui considèrent que les personnes autistes ne sont pas de bons parents. En mai 2010, les services sociaux ont finalement abandonné les démarches.

L’aîné de Wise Âû a reçu son diagnostic de syndrome d’Asperger alors qu’il allait fêter ses 16 ans, bien que ses parents aient suspecté qu’il était autiste un peu avant ses 2 ans. Les médecins et les travailleurs sociaux « pensaient que nous étions à l’origine de ses traits autistiques car il les apprenait en nous observant » se souvient Wise Âû. Les médecins ont suggéré que le couple voulait que leur fils soit autiste, comme s’ils avaient le syndrome de Münchhausen par procuration, un trouble psychiatrique dans lequel les personnes atteintes simulent des symptômes de maladies chez leurs enfants pour attirer l’attention sur eux-mêmes.

Le couple s’est aussi senti exclu des groupes de soutien pour parents élevant des enfants autistes. Dans ces groupes, ils ont souvent été confrontés à l’idée qu’être autiste est un drame ou un trouble que l’on doit soigner. « Nous avons été exclus et montrés du doigt parce que nous étions des parents autistes d’enfants autistes » dit Wise Âû. (Ils ont créé leur propre groupe de soutien sur Facebook dans lequel on combat les discours qui parlent de guérison.)

Logistique et émotion

Les parents autistes peuvent être confrontés à des difficultés pratiques liées à leur pathologie. Par exemple, beaucoup de personnes autistes ont des soucis avec les fonctions exécutives, cet ensemble de processus mentaux complexes qui nous permet de prévoir et réaliser nos activités quotidiennes. Ils ont aussi tendance à être profondément absorbés par ce qu’ils font, au détriment d’autres priorités. Hurley explique qu’en ce qui la concerne, cela a compliqué le fait de répondre aux exigences logistiques liées à l’éducation de ses enfants, tels que les amener à l’heure à l’école ou les laver et les nourrir. Quand ses enfants étaient plus jeunes, elle rédigeait des listes dans lesquelles elle détaillait les étapes pour l’aider à accomplir les tâches quotidiennes : Préparer le biberon. Préparer le repas. Donner son biberon et son repas à mon enfant.Mettre la vaisselle dans le lave-vaisselle. Nettoyer la table. Vérifier qu’il n’y a pas trop de miettes par terre. M’assurer que mon enfant est propre.

Certains parents autistes trouvent que des tâches telles que les réunions parents/professeurs sont épuisantes car les interactions sociales exigent des efforts cognitifs et émotionnels importants de leur part. D’autres ont des problèmes de traitement des informations auditives qui compliquent la communication verbale. La façon de faire assez directe, fréquente chez les personnes autistes, peut aussi amener ces parents à blesser leur interlocuteur même si ce n’est pas leur intention. Dans l’étude de Baron-Cohen, plus de 60 % des mères sur le spectre rapportaient qu’elles avaient du mal à communiquer avec les enseignants, les médecins et autres professionnels au sujet de leur enfant et que ces entretiens étaient source d’anxiété.

La partie émotionnelle de la parentalité peut aussi poser problème aux personnes autistes. Cependant, loin d’être insensibles ou indifférents comme le suggèrent les stéréotypes sur l’autisme, ces parents sont souvent parfaitement conscients des émotions de leurs enfants mais ont du mal à les aider. « Cela me peine et me blesse vraiment de ne parfois pas pouvoir les aider quand ils ne sont pas bien », dit Kimberley, une femme vivant en Caroline du Nord avec sa fille de 10 ans et son fils de 13 ans. « J’ai tendance à être submergée par les émotions intenses de mon fils de 13 ans et je suis moins apte à les gérer et à m’en remettre. » (Kimberley nous a demandé de ne pas utiliser son nom de famille).

Hurley pressent qu’elle devra affronter les mêmes difficultés quand ses enfants grandiront. « Quand Alex était plus jeune et qu’il était vraiment peiné par quelque chose, je lui racontais des blagues de pets », dit-elle. Mais elle a conscience que cette technique ne marchera pas éternellement. « Quand on a 14 ans et qu’on fait face à de vrais problèmes par rapport à son corps, les relations ou ce genre de choses, ce n’est pas en vous racontant des blagues de pets que votre mère va vous aider à les régler », ajoute-t-elle. Son mari et elle ont prévu que c’est lui qui gérera ce genre de questions, mais elle aimerait avoir davantage de conseils sur la façon de faire.

Cette idée qu’une mère doit être le parent-ressource au quotidien fait peser une charge supplémentaire sur les mères autistes. Les jeunes mères qui n’aiment pas spécialement papoter en groupe peuvent se retrouver sans soutien. Ces femmes peuvent se sentir obligées d’organiser des après-midi de jeux à la maison ou des sorties de groupe qui vont les exténuer, et les exigences constantes liées à la parentalité peuvent aussi les empêcher d’avoir les moments de solitude dont elles ont besoin pour recharger leurs batteries. « Il est bien plus facile pour les pères de battre en retraite, je pense, de s’éclipser dans leur atelier ou leur hangar ou tout autre lieu qui leur sert de tanière », dit Rochelle Johnson, femme autiste qui vit près de Melbourne en Australie et a trois filles dont deux autistes.

Mais les pères autistes sont eux aussi confrontés à la pression, dit Johnson qui a revendiqué sa transsexualité l’an dernier. « Les hommes autistes sont souvent vraiment inflexibles en ce qui concerne la façon dont on devrait ou ne devrait pas faire les choses, et je pense que cela peut être pris pour une façon très autoritaire d’élever ses enfants », dit-elle. D’après elle, si ces pères semblent stricts, ce n’est pas parce qu’ils veulent soumettre leurs enfants à leur volonté, mais parce qu’ils cherchent la sécurité que leur apportent les habitudes et les rituels.

Si la société avait davantage conscience de ces difficultés, on pourrait trouver des solutions simples. Par exemple, il serait plus facile pour les parents autistes de prendre les rendez-vous médicaux en ligne plutôt que par téléphone, ou de discuter avec les enseignants par émail plutôt qu’en face à face. D’autres parents pourraient bénéficier d’aide pour établir des routines domestiques lorsque leurs enfants sont en bas âge. Pourtant, quand Baron-Cohen et son équipe ont analysé les données de l’étude, ils ont constaté que 80 % des mères autistes du Royaume-Uni disaient ne pas avoir reçu d’aide de la part de l’école, des médecins ou des services sociaux, même lorsqu’elles l’avaient demandée.

Ça reste en famille

En dépit des difficultés qu’ils doivent affronter, beaucoup de parents autistes déclarent qu’avoir eu des enfants les a aidés à vivre avec leur condition ; certains disent même que leur autisme leur a permis d’être de meilleurs parents que ce qu’ils auraient été autrement.

Avoir des enfants peut protéger de l’isolement qui touche tant d’adultes autistes. « J’ai remarqué que beaucoup des gens que je rencontre sont vraiment très seuls, des adultes qui ont été diagnostiqués et n’ont pas de partenaires ou de familles », dit Hurley. « Je détesterais être seule tout le temps. ». Les enfants lui donnent accès à un milieu social qu’elle trouve bien plus accueillant que celui des adultes. « J’adore traîner avec des enfants », dit-elle. « J’aime l’énergie qu’ils dégagent et le fait que les conversations sont bien plus faciles qu’avec les adultes avec lesquels il faut faire bien plus attention à ce que l’on dit et à la façon dont on le dit ».

Le fait d’avoir des enfants a aidé Kimberley à surmonter son besoin envahissant de routine et de monotonie. « C’est la capacité à accepter que je peux avoir planifié toute ma journée et qu’une grosse diarrhée peut remettre en cause mes projets, ou que je vais dire qu’on va faire les courses à 10 heures, mais que cela n’arrivera pas » dit-elle. « Lorsque je n’avais pas d’enfants, je n’aurais jamais supporté ça. ».

D’un autre côté, certains de ces traits autistiques peuvent être un avantage lorsque l’on est parent. Kimberley dit que son besoin de cadres et d’organisation a, d’une certaine façon, été bénéfique pour ses enfants. « Je m’occupe de tout, que ce soit les leçons de tennis, les rendez-vous médicaux, les colonies de vacances, les cours qu’ils suivent, ou s’assurer qu’ils sont confrontés à de nouvelles idées, activités et expériences, c’est moi qui gère », dit-elle. « Je supervise tout.”. En fait, sa nature méthodique et obstinée explique sans doute pourquoi Kimberley a choisi d’être mère célibataire et d’adopter son premier enfant. (Elle s’est ensuite mariée et a adopté un second enfant avec son mari.) « C’est tellement Aspie », dit-elle en riant. « À partir du moment où j’ai décidé d’adopter, j’étais en mode pitt bull ; j’ai trouvé toutes les informations possibles et imaginables sur le sujet. »

Aucune étude scientifique n’a cherché à savoir si le fait d’être autiste offre des avantages quand on est parent, mais les médecins trouvent cette idée valable. « Mon expérience clinique me prouve que certains parents autistes sont des parents formidables », dit Baron-Cohen. « Ce type d’approche obsessionnelle qui caractérise l’autisme dans plusieurs domaines peut se révéler très positive quand on élève un enfant ».

L’avantage le plus évident est sans doute lorsque des parents autistes ont un fils ou une fille autiste. « En tant que parent autiste, je me trouve dans une position unique qui me permet d’avoir conscience de leurs difficultés, de ce qu’ils pensent et ressentent », dit Johnson. Johnson se souvient que quand sa fille aînée avait environ 8 ans, elle se faisait gronder à l’école car elle mettait sa tête sur le sol lorsque les élèves s’asseyaient par terre. En fait, sa fille « écoutait » l’enseignante de la classe voisine grâce aux vibrations.

Johnson avait instinctivement compris la situation. « D’un côté, en tant que parent, on a tendance à dire ‘Tu dois écouter en classe’ », dit Johnson. « Mais d’un autre côté, on a vraiment de l’empathie, car c’est complètement logique même si cela semble insensé. ». Johnson se souvient que, lorsqu’elle était elle-même enfant, elle faisait des choses insolites comme se sentir obligée de faire une action le même nombre de fois avec sa main gauche et droite.

Les parents autistes peuvent transmettre ce qu’ils ont appris à leurs enfants; ils peuvent aussi créer des liens avec leurs enfants en se basant sur leurs difficultés communes. Alex, le fils d’Hurley, a souvent ce qu’elle appelle des « attaques dépressives », de courts accès d’extrême tristesse qui ne sont pas nécessairement déclenchées par un événement précis mais viennent de son sentiment général d’être dépassé. Alex, garçon taciturne avec de grands yeux marrons et des tâches de rousseurs, a beaucoup de difficulté à verbaliser ce qu’il ressent. « Comment je me sens, j’ai vraiment du mal à expliquer comment je me sens », dit-il. Mais il dit que sa mère le comprend. Hurley se souvient avoir ressenti la même chose enfant et encore aujourd’hui de temps en temps. Pour gérer, elle se pose et se rappelle que ce sentiment est temporaire. Elle aide Alex à faire de même, en le soutenant sans le pousser à lui donner une raison qui explique sa tristesse.

La prochaine vague

Jusqu’aux années 1990, la majorité des personnes diagnostiquées autistes était atteinte d’une forme sévère du trouble et avait peu de chances d’avoir des enfants. Mais la prise de conscience accrue de l’autisme, ainsi que l’élargissement des critères de diagnostic, ont conduit à une vague croissante de personnes diagnostiquées avec une forme plus légère du trouble, et par conséquent davantage de parents et futurs parents autistes.

Un nombre croissant de personnes sont diagnostiquées à l’âge adulte, y compris des personnes qui ont déjà des enfants. « Bien souvent, c’est le diagnostic de l’enfant qui pousse les parents à se questionner et chercher à avoir un diagnostic tardif pour eux-mêmes », dit Susan White, co-directrice de la Virginia Tech Autism Clinic à Blacksburg en Virginie.

De nos jours, la plupart des parents autistes sont dans cette situation : ils reçoivent un diagnostic après avoir eu des enfants et en partie à cause de leurs enfants. Dans le futur, la majorité d’entre eux sauront qu’ils sont autistes avant de devenir parents. Ils risquent de se retrouver confrontés à de nouvelles difficultés : qu’on remette en question leur capacité à élever des enfants, par exemple, ou qu’ils soient troublés si leur enfant est concerné ou pas par l’autisme.

« Je n’ai jamais voulu être père », dit Gillan Drew qui vit dans un petit village du sud de l’Angleterre avec sa femme, Lizzie, elle aussi autiste, et leur fille qui aura bientôt 2 ans. « Je ne voulais pas transmettre mon autisme ou ma dépression ». Drew ne savait pas qu’il était autiste avant l’âge de 28 ans, mais il l’a appris avant de rencontrer son épouse et de décider de devenir père (son livre pour adultes récemment diagnostiqués autistes est sorti en mars et il a aussi un blog, Aspie Daddy). Sa femme, qui était à l’époque sa petite amie, voulait vraiment avoir un enfant, et finalement Drew a changé d’avis. « C’était quelque chose d’un peu spirituel », dit-il. « Je m’inquiétais et pensais que je n’en étais pas capable, mais si en fait j’en étais capable ? Est-ce que je ne laissais pas les éventuels facteurs de risque m’empêcher de profiter de la meilleure chose que j’avais faite ? »

Pour l’instant, leur fille Izzie ne montre pas de signes d’autisme, ce qui est un soulagement, dit-il, « parce que je sais à quel point c’est dur ». Mais c’est tout de même une source d’inquiétude pour sa femme. « Elle a très peur qu’Izzie la dépasse au niveau des compétences sociales lorsqu’elle grandira », dit Drew. C’est fascinant pour lui d’observer sa fille alors qu’elle apprend à partager, à communiquer ses envies et besoins, et même faire s’affronter ses parents. C’est une seconde chance pour lui d’apprendre les compétences sociales, mais aussi une expérience douloureuse qui met en lumière ses propres difficultés sociales. À la garderie, « elle y va, et elle apprend, et pendant qu’elle apprend, je reste en retrait et j’apprends en la regardant », dit-il. « Mais elle est bien meilleure que moi parce que c’est naturel pour elle. »

Drew a pleinement conscience de sa condition de parent autiste et s’assure de façon constante qu’il donne à sa fille tout ce dont elle a besoin. Avant la naissance d’Izzie, il a lu de nombreux récits d’adultes reprochant à leurs parents, qu’ils supposaient autistes, leur enfance compliquée. Les parents décrits dans la plupart de ces récits n’ont jamais reçu de diagnostic et aucune étude scientifique n’a évalué les conséquences d’avoir un parent autiste. Pourtant, il était inquiet. Il pense que son propre père était probablement autiste. Il se souvient qu’il aurait aimé que son père le félicite mais qu’au lieu de cela, celui-ci critiquait les dessins qu’il ramenait de l’école maternelle : « Tu aurais du mettre les yeux par là, et le nez est mal fait ».

Le fait que son enfant puisse vivre la même chose lui donnait des sueurs froides, alors Drew a décidé de modifier son comportement dans certains domaines. Par exemple, il se force à assister aux événements pour enfants, même si les couleurs vives et les sons forts lui semblent insurmontables. Il réprime son envie de grimacer lorsque sa fille a les mains couvertes de compote de pommes ou de porridge, parce qu’il ne veut pas lui transmettre son aversion pour les bouillies et les textures pâteuses. Et il s’extasie devant la moindre création artistique de sa fille. Le paradoxe, c’est que la conscience d’avoir un trouble qui complique sa capacité à exprimer son affection a littéralement transformé le moindre de ses actes en une expression d’amour.

Le vécu de Drew l’a convaincu que les personnes autistes ont besoin de conseils sur des sujets que les cours d’éducation parentale classiques et les manuels pour bébés n’abordent pas. « J’ai passé tellement de temps à chercher comment l’embrasser ou la câliner que je me suis rendu compte l’autre jour que je ne lui ai jamais dit que je l’aimais », dit-il. « Et je me suis dit, ‘C’est bizarre parce que c’est quelque chose qu’on devrait dire naturellement, mais je n’ai jamais prononcé ces mots. Alors maintenant, je fais un effort conscient pour dire ‘Je t’aime’. »

Malheureusement, ce genre d’aide est difficile à obtenir. Parce qu’il était autiste et son épouse aussi, le gouvernement a missionné une assistante sociale pour évaluer la famille lorsqu’elle est tombé enceinte. Cependant, quand elle a constaté qu’il n’y avait pas de risque de négligence ou de maltraitance pour le bébé, elle a mis fin à l’enquête. Lorsque le couple a demandé une aide plus soutenue aux travailleurs sociaux qui les suivaient, alors qu’ils aident sur des sujets tels que l’emploi ou les finances, ils ont répondu que les conseils parentaux ne relevaient pas de leurs compétences.

 

Des parents comme les Drew peuvent être uen source de conseil pour d'autres parents autistes © Spectrum News
Des parents comme les Drew peuvent être une source de conseil pour d'autres parents autistes © Spectrum News

En fait, les gens comme Drew sont finalement les plus à même d’aider les chercheurs à compiler les conseils ciblés que ces parents recherchent. « Je pense que nous devrions commencer par identifier les cas de réussite et trouver ce qui a marché », dit White. Chaque parent a des talents et faiblesses qui lui sont propres. Mais, à cause des caractéristiques de leur diagnostic (et sans doute à cause de la tendance à ruminer qui en fait partie), beaucoup de parents autistes passent un temps conséquent à réfléchir à des choses que d’autres considèrent comme allant de soi, que ce soient les détails pratiques concernant l’organisation d’une journée avec un nourrisson ou un enfant en bas âge, ou des questions plus profondes telles que la façon de démontrer leur amour ou s’occuper de leur enfant d’une façon qui correspond à ses besoins. « Je réfléchis beaucoup plus à mon rôle de parent que la plupart des gens que je connais », dit Hurley.

Certains chercheurs insistent pour que l’on s’intéresse aux besoins de ces parents, une première étape avant de leur proposer des solutions. Baron-Cohen envisage de suivre 40 mères autistes et leurs bébés de la grossesse jusqu’à leurs 2 ans. Son équipe s’intéressera au développement de ces bébés car ils ont un risque accru d’être autistes, mais interrogera aussi les mères sur leur vécu. « Notre travail consistera principalement à écouter le point de vue de ces femmes autistes », dit Baron-Cohen. Par exemple, est-ce que les femmes autistes se sentent capables de faire part de leurs besoins pendant les rendez-vous prénataux ? Trouvent-elles les groupes de soutien pour jeunes mères utiles ? « Nous devons les écouter et comprendre leur vécu », dit-il.

Malgré les hauts et les bas, le fait d’être parent est une source de joie pour Hurley et donne un sens à sa vie. « C’est une maison de fous, mais j’aime ça », dit-elle. Pendant la session Skype de ce soir, sa frustration est empreinte de tendresse. Elle prend Isla pour la mettre sur ses genoux et l’entoure de ses bras. « Tu veux un câlin ? Ça t’aiderait à te calmer ?” dit-elle en serrant fort Isla dans ses bras alors qu’elle se penche vers son ordinateur portable pour reprendre la conversation. Plus tard, lorsqu’Isla s’agite de nouveau, Hurley appelle Alex qui fait sortir sa petite sœur de la pièce afin que sa mère puisse discuter tranquillement.

Je sais que mes enfants passeront à côté de certaines choses parce que je suis Asperger. Mais j’essaie de compenser », dit Hurley. Par exemple, elle élève ses enfants dans une atmosphère d’acceptation de l’autisme, ce qui n’était pas le cas lorsqu’elle était elle-même enfant. Pour Alex en particulier : « Je pense que le fait qu’il ait été élevé dans un foyer où on parlait de façon ouverte et positive de l’autisme portera ses fruits dans sa vie future », dit-elle.

Bien qu’Isla soit trop jeune pour laisser sa mère tranquille ne serait-ce que le temps d’un appel téléphonique, Hurley pense déjà au jour où elle sera grand-mère. Ses beaux-parents gardent souvent les enfants chez eux pour une nuit, et elle espère pouvoir faire de même avec ses propres petits-enfants un jour. Et quand elle parle de ce rêve, elle ne fait pas de différence entre ses enfants : la parentalité est une option pour Alex comme pour Isla.

Merci à Isabelle Besnier-Pachot pour la traduction.

31 mai 2017

Les hallucinations sont anormalement courantes chez les adultes avec autisme

article publié sur le forum ASPERANSA

Hallucinations unusually common in adults with autism
https://spectrumnews.org/news/hallucina ... ts-autism/
par Elizabeth Milne, The Conversation
le 24 mai 2017
traduction py

Avez-vous jamais entendu un son quand rien dans votre environnement ne l’explique ? Ou peut-être avez-vous ressenti la proximité d’une personne quand vous êtes seul ? Certaines personnes ont connu ces perceptions de nombreuses fois. D’autres, quasiment jamais. Quelques troubles mentaux, comme la schizophrénie, peuvent les provoquer. Mais les perceptions inhabituelles se manifestent aussi chez des personnes sans trouble mental. Une nouvelle observation de mon groupe de recherche suggère que les adultes avec autisme sont particulièrement propices à ces sortes d’expériences.

Dans notre étude, nous avons présenté à des adultes avec ou sans autisme une liste de perceptions inhabituelles et leur avons demandé d’indiquer celles qu’ils avaient rencontrées. Les adultes avec autisme ont signalé trois fois plus d’occurrences que les personnes typiques. Par exemple, nous avons constaté que 63% des adultes avec autisme ont répondu oui à cette question : « Avez-vous jamais ressenti que quelqu’un vous touchait, quand en vous retournant vous ne voyiez personne ? », contre seulement 7% des adultes typiques. De la même façon, 47% des adultes dans le spectre ont répondu oui à la question : « Avez-vous jamais vu des formes, des lumières ou des couleurs quand manifestement rien n’est présent ? », contre 14% des adultes typiques.

Jusqu’à ce jour, les scientifiques ne savaient pas que les expériences de type hallucinatoire se présentent dans l’autisme, bien que nous sachions depuis longtemps que l’autisme est associé à une ouïe et une vue plus sensibles.

Toutefois, une perception hallucinatoire inhabituelle est différente d’une sensibilité à des stimuli particuliers. Quelques items de notre questionnaire concernaient les changements d’intensité de stimulation, que nous aurions pu présumer plus présents dans l’autisme. Mais d’autres questions concernaient des perceptions étranges ou déformées. Par exemple : « Avez-vous jamais ressenti des sensations inhabituelles de brûlure ou d’autres sensations étranges dans ou sur votre corps ? » ou « Avez-vous jamais entendu vos propres pensées dîtes à voix haute, de telle façon qu’une personne proche aurait pu les entendre ? » Trois fois plus d’adultes avec autisme ont répondu oui à ces deux questions, indiquant que nos résultats ne reflètent pas uniquement une perception sensorielle plus sensible.
Des niveaux différents de certains éléments chimiques dans le cerveau (les neuro-transmetteurs) pourraient expliquer ces perceptions inhabituelles plus fréquentes. Les migraines, par exemple, sont souvent précédées par des hallucinations, comme voir des lumières ou des formes non présentes. De la même façon, l’épilepsie peut être associée à des perceptions étranges.

La migraine et l’épilepsie ont été reliées à des modifications dans les niveaux du neuro-transmetteur GABA. Dans le cerveau, quelques neuro-transmetteurs ont un rôle excitant et stimulent l’activité neuronale, alors que d’autres ont un rôle inhibiteur et réduisent cette activité. GABA est un neuro-transmetteur inhibiteur. Des niveaux de GABA moins élevés peuvent en conséquence mener à une hyperactivité du cerveau, provoquant à la fois des perturbations visuelles et des crises. Des niveaux modifiés de GABA ont aussi été impliqués dans l’autisme.

Pas de responsable unique

Toutefois, le lien entre une perception inhabituelle et l’autisme pourrait ne pas provenir uniquement de différences innées dans la chimie du cerveau. Des travaux récents suggèrent que les expériences négatives, comme d’avoir été harcelé ou isolé socialement, peuvent mener à des hallucinations.

Malheureusement, de nombreuses personnes dans le spectre souffrent d’isolation sociale et de harcèlement. Ces événements négatifs peuvent contribuer au développement de perceptions inhabituelles. Un article récent de The Conversation a décrit la façon dont les personnes exposées à la discrimination, comme les immigrés, connaissent aussi plus de sentiments hallucinatoires et paranoïaques que les personnes non discriminées. Des processus similaires pourraient être impliqués dans l’autisme.

Outre l’observation que les expériences de perception inhabituelles sont plus fréquentes dans l’autisme, nous avons constaté que ces expériences sont bien plus douloureuses. Il est important de prendre en considération ce qui peut être fait pour soulager cette souffrance. À commencer par la compréhension et l’acceptation.

Si une personne avec autisme connait ces situations, savoir qu’elles sont assez courantes chez les autres personnes avec autisme peut aider à réduire leurs inquiétudes à ce sujet. Les médecins pourraient ne pas toujours penser à poser des questions sur des perceptions inhabituelles aux personnes avec autisme, mais notre recherche suggère que cela peut être un domaine important à aborder dans la clinique, de façon à ce que des méthodes puissent être établies pour une assistance quand cela arrive.

L’importance du développement d’une meilleure compréhension de l’autisme par le grand public est peut-être plus importante encore. De plus en plus de personnes sont diagnostiquées d’un autisme, dont un nombre croissant de personnes n’ayant pas reçu de diagnostic avant l’âge adulte. Souvent, il suffit de petites modifications pour aider les personnes avec autisme à s’insérer dans la société. Ces petits pas peuvent être importants pour réduire l’isolement social.
Si l’isolement et le harcèlement contribuent au développement de perceptions inhabituelles dans l’autisme, la réduction de la souffrance causée par ces perceptions est un des nombreux avantages qu’apporterait une société dans laquelle l’autisme serait mieux reconnu et compris.

Elizabeth Milne est chargée d’enseignement en neurosciences cognitives et directrice du Sheffield Autism Research Lab de l’université de Sheffield, au Royaume Uni.
Cet article a été initialement publié par The Conversation. Il a été légèrement modifié pour être adapté au style de Spectrum.

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père d'une fille SA de 34 ans
31 mai 2017

L’épilepsie, star d’un film mêlant art et science

article publié dans Le Figaro

Par  Mathilde Chasseriaud Mis à jour le 26/05/2017 à 17:11
Publié le 26/05/2017 à 17:11

cerveau article le figaro épilepsie

L’ex-chanteuse du groupe Lilicub, Catherine Diran, réalise un film sur l’épilepsie. Une autofiction pour sensibiliser le public à cette maladie et balayer les idées fausses.

«J’ai choisi de ne pas avoir une vie de plante». Voici les mots qu’emploie Catherine Diran pour décrire sa vie personnelle et professionnelle. Vingt ans après son fameux «Voyage en Italie» avec Benoît Carré en 1996, c’est en tant que co-réalisatrice qu’elle est aujourd’hui plongée dans le film TROUBLE , Un visage sur l’épilepsie.

Pendant son enfance, Catherine Diran souffre d’absences, dont elle ne se souvient pas. Elle a aussi des comportements que l’on pourrait qualifier «d’étranges». Lors d’un rendez-vous avec un neurologue, celui-ci annonce à la mère de Catherine que sa fille est atteinte d’épilepsie. Mais elle décidera de ne pas lui en parler, pour la protéger. Ne faisant pas de crises convulsives, le diagnostic restera «caché» et Catherine Diran ne découvrira son épilepsie qu’à 18 ans, suite à un changement de spécialiste.

Le médecin est alors formel: la jeune femme doit avoir un quotidien sans stress, le plus calme possible. Une vie qui semblait donc toute tracée... mais que Catherine Diran a choisi de ne pas suivre. Elle apprend à vivre avec l’épilepsie mais ne peut s’empêcher de remarquer que beaucoup d’idées fausses circulent et que cette maladie inquiète, fait peur. Le temps d’un docu-fiction, Catherine Diran décide de revenir sur sa maladie, sa découverte, et de montrer que l’on peut aussi vivre pleinement avec, en intégrant le risque à chaque instant.

Un film et des rencontres

C’est en 2015, à la Fédération française de recherche contre l’épilepsie (FFRE), que Catherine Diran rencontre Antoine Depaulis, directeur d’une équipe de recherche à l’Institut des neurosciences de Grenoble (GIN) travaillant sur les circuits neuronaux épileptiques. Très impliqué dans la diffusion et le partage des sciences, le scientifique est de suite emballé par le projet de Catherine Diran. L’aventure commence.

Le scénario du film alternera scènes et passages narratifs. Catherine Diran veut faire de l’épilepsie le thème central de son film, mais elle a choisi de ne la faire apparaître que par petites touches, au gré d’indices semés tout au long du film. Des chercheurs apparaîtront également, définissant la maladie et évoquant sa stigmatisation dans la société.

«Le film est avant tout une fiction», insiste Catherine Diran, «car on peut dire beaucoup de choses à travers ce genre ; des choses graves, terrifiantes mais aussi amusantes. Cela permet d’aborder l’épilepsie d’une autre façon. On a aussi opté pour un ton doux-amer parfois teinté de comédie pour justement que les gens ne ressortent pas pétrifiés mais avec la pêche.»

L’épilepsie, une maladie taboue menant à la discrimination

Touchant environ 1% de la population française selon l’OMS, l’épilepsie reste encore associée à des images fausses. «On entend toujours dire que le premier truc en cas de crise, c’est de tenir la langue, alors que c’est faux. Quand on dit épilepsie, on voit une personne par terre, tremblante, bavant à souhait» déplore Catherine Diran, «or moi par exemple, j’avais parfois plutôt des absences, notamment quand j’étais petite». Elle raconte que lors d’une crise qu’elle eut dans un aéroport, les voyageurs autour d’elle la pensaient «être en manque». «Drogués», «différents», «fous», «bizarres»: voici certains qualificatifs attribués aux personnes épileptiques. Une enquête de la FFRE parue en octobre 2016 révèle même que «près d’un Français sur deux conseillerait aux personnes épileptiques de surtout cacher leur état».

Il était donc urgent de montrer ce qu’est vraiment l’épilepsie pour empêcher ces amalgames de circuler plus longtemps. Dans le film, deux neurologues, Philippe Kahane (CHU de Grenoble) et Vincent Navarro (Institut du cerveau et de la moelle épinière - ICM), ainsi qu’Antoine Depaulis, parlent de la réalité de la maladie, la définissent et montrent où en est la recherche. «L’épilepsie n’est pas une maladie psychiatrique» explique Antoine Depaulis, «mais une affection neurologique. Le cerveau est prédisposé à générer des crises dues à une altération fonctionnelle d’une certaine population de neurones. Il existe plus d’une cinquantaine de formes d’épilepsies. Elles sont caractérisées par des crises différentes qui ne sont pas toujours des convulsions. Le sujet souffre aussi dans certains cas de troubles cognitifs ou émotionnels entre les crises».

Une sortie prévue pour la fin d’année 2017

Peu après la publication du projet sur le site de crowdfunding KissKissBankBank, Catherine Diran a reçu beaucoup de messages de personnes épileptiques, de familles, de parents heureux qu’un film sur l’épilepsie soit réalisé. Sur la page du projet, on peut lire des commentaires tels que celui-ci: «Merci pour cette initiative qui permettra de parler de cette “maladie” qui est ancestrale et pourtant si mal connue... et surtout de briser certains “tabous”!».

Le tournage de TROUBLE, Un visage sur l’épilepsie débutera en septembre et se déroulera à Grenoble, Paris et Valence. Le film devrait être diffusé vers la fin de l’année, grâce à un organisme associatif, l’ACID (Association du cinéma indépendant pour sa diffusion). Différentes associations de patients, dont la Fondation CURE (USA) ainsi que des centres de recherche (GIN, ICM) assureront quant à eux la promotion.

30 mai 2017

Autisme et déficience intellectuelle : une communication neuronale altérée

article publié dans La Dépêche

Publié le 29/05/2017 à 12:11, Mis à jour le 29/05/2017 à 14:12

Neurologie

Autisme et déficience intellectuelle : une communication neuronale altérée

Autisme et déficience intellectuelle : une communication neuronale altérée

 

Bien que différents, l’autisme et la déficience intellectuelle sont des maladies psychiatriques présentant quelques points en commun. En plus de trouver leur origine dans des mutations génétiques, ces deux troubles neuro-développementaux seraient caractérisés par un dysfonctionnement des synapses. Des zones cérébrales essentielles aux capacités de mémoire et d’apprentissage.

Selon des chercheurs français*, déficience intellectuelle (DI) seraient caractérisés par une même anomalie mentale : le dysfonctionnement des synapses. Cette zone de connexion joue un rôle capital dans les processus de mémorisation et d’apprentissage. Et plus généralement dans le passage de l’influx nerveux. Chez les patients diagnostiqués, l’altération de cette communication neuronale se traduit dans l’autisme par « des incapacités à établir des interactions sociales et à communiquer et des troubles du comportement ». Et par des difficultés de compréhension, de mémoire et d’apprentissage concernant la déficience intellectuelle.

Une maladie des synapses

Pour creuser l’origine génétique de ce dysfonctionnement des synapses, l’équipe s’est penchée sur le gène PTCHD1, localisé sur le chromosome X. « Les mutations identifiées chez des garçons atteints d’autisme et de DI entraînent la perte d’expression de ce gène PTCHD1 », pourtant impliqué dans le fonctionnement des synapses. La preuve, chez un modèle murin n’exprimant plus ce gène, « des défauts importants de mémoire et des symptômes significatifs d’hyperactivité » ont été rapportés. Des modifications des synapses ont par ailleurs été repérées au niveau des réseaux neuronaux excitateurs, « particulièrement dans une région au centre du cerveau ». Appelée hippocampe, cette dernière « joue un rôle majeur dans les processus cognitifs, notamment la mémoire et la formation de faux souvenirs ».

La mise au jour de cette « maladie des synapses », et plus précisément la meilleure compréhension « des mécanismes à l’origine de ces troubles neuro-développementaux (…) est essentielle pour améliorer les stratégies thérapeutiques ».

*Frédéric Laumonnier (Unité 930 « imagerie et cerveau » Inserm/Université de Tours) et Yann Hérault de l’Institut génétique et de biologie moléculaire et cellulaire (Inserm/CNRS/Université de Strasbourg)

DestinationSante

30 mai 2017

Mères en détresse

Les mamans d'enfants ayant un trouble du spectre de l'autisme ont besoin de meilleures ressources.

18 Septembre 2015 à 13H27

Photo: iStock

Aux États-Unis, un enfant sur 68 reçoit un diagnostic de trouble du spectre de l'autisme (TSA). «Presque tout le monde a désormais un ami, une voisine, un neveu ou un élève touchés de près ou de loin par cette problématique», note Catherine Des Rivières-Pigeon, professeure au Département de sociologie. «Ce n'est plus un trouble rare: c'est le diagnostic le plus fréquent chez les enfants d'âge scolaire au Québec», précise la chercheuse, qui mène depuis quelques années des recherches sur la réalité des familles dont un enfant a reçu un diagnostic de TSA.

Lors d'un colloque présenté dans le cadre du Congrès international des recherches féministes dans la francophonie, qui avait lieu à l'UQAM en août dernier, Catherine Des Rivières-Pigeon a présenté quelques résultats de recherche à propos de la santé des mères d'enfants ayant un TSA. Son verdict est sans appel: ces mères ne vont pas bien du tout. Détresse psychologique, dépression et problèmes de santé physique affectent plusieurs d'entre elles. «Selon nos résultats, 41 % des mères d'enfants autistes vivent de la détresse psychologique et 25 % estiment leur état de santé comme étant moyen ou mauvais, précise la chercheuse. C'est particulièrement alarmant, car ce sont des mères jeunes qui doivent être en forme pour s'occuper de leur enfant.»

Menées avec le soutien financier du CRSH auprès de 180 familles d'enfants de deux à cinq ans ayant un TSA, les recherches de la professeure indiquent que 50 % des mères quittent leur emploi ou diminuent de façon importante leurs heures de travail pour prendre soin de leur enfant. «Cela a des répercussions financières sur la famille, qui s'appauvrit et qui vit un stress financier supplémentaire», explique-t-elle.

Il existe des services d'aide pour ces familles, dont l'intervention comportementale intensive (ICI), le programme de référence en la matière. «Il y a toutefois des listes d'attente, à la fois pour obtenir un diagnostic de TSA et pour accéder à l'ICI», souligne Catherine Des Rivières-Pigeon. Certaines familles se tournent vers le privé, mais les coûts sont astronomiques et les problèmes financiers qui en découlent s'ajoutent à la détresse des mères.

En bout de piste, les services offerts pour aider les familles s'avèrent souvent inadéquats. «Une grande partie du travail effectué par les mères consiste à se battre contre les personnes censées les aider, déplore la chercheuse. Je caricature un peu, mais les mères dépensent beaucoup de temps et d'énergie à expliquer les besoins de leur enfant au service de garde, à l'école ou aux différents intervenants.»

Une expertise en solo

Catherine Des Rivières-PigeonPhoto: Émilie Tournevache

Catherine Des Rivières-Pigeon a mené une autre recherche, qualitative cette fois, auprès de 15 familles avec un enfant autiste. Cette recherche a été financée par l'Office des personnes handicapées du Québec (OPHQ). Son équipe a fourni aux familles un iPod Touch afin que chaque parent documente – en photos, vidéos ou pistes audio – toutes les tâches effectuées pendant une semaine pour prendre soin de son enfant, incluant par exemple les recherches Internet pour solutionner des problèmes ou les appels téléphoniques auprès de différents intervenants. Des entrevues individuelles avant et après cette collecte de données, réalisée séparément avec le père et la mère, ont permis de dégager certains constats qui renforcent les données obtenues lors de l'enquête quantitative précédente. «Ce qui ressort le plus, c'est qu'il faut une expertise particulière pour s'occuper d'un enfant autiste et que ce sont les mères qui ont développé cette expertise», affirme la professeure.

Plusieurs enfants autistes ont une routine rigide et des exigences particulières, qui doivent être respectées sous peine de déclencher une crise. «Cela explique pourquoi la mère peut difficilement laisser son enfant à des gens qui ne le connaissent pas autant qu'elle», note la chercheuse, et cela, même s'il s'agit d'un intervenant spécialisé d'un service de répit. «Une mère nous a confié qu'utiliser ce type de service na valait pas la peine, car son enfant était tellement bouleversé au retour qu'il lui avait fallu une semaine pour revenir à la "normale"», raconte-t-elle.

Cela met en lumière la nature complexe du TSA et le défi de former des intervenants adéquats. «Il ne suffit pas d'avoir une formation générale en autisme. Il faut que l'intervenant travaille auprès de l'enfant pendant longtemps afin d'ajuster ses connaissances aux exigences et aux façons de fonctionner de cet enfant-là.» Ayant acquis par la force des choses cette expertise, les mères se retrouvent à former tout le monde, y compris les intervenants, précise la chercheuse. «Il faut faire en sorte que cette expertise ne soit pas acquise uniquement par les mères, dit-elle. Nous nous pencherons là-dessus dans nos travaux à venir.»

Et les pères ?

Les couples qui ont participé à la recherche vivaient ensemble. Quel rôle le père joue-t-il dans cette dynamique? «Souvent, il travaille plus que les hommes de son âge pour compenser la perte de salaire de sa conjointe. Il passe donc moins de temps avec l'enfant… et fait partie des personnes que la mère doit former, même s'il vit sous le même toit que son enfant. Ces pères font plus de tâches dans la maison que les pères d'enfants sans TSA, mais c'est néanmoins la mère qui porte le fardeau», précise la professeure.

Des recommandations à venir

À moins d'un revirement de situation spectaculaire, peu d'indicateurs portent la professeure à croire que ces femmes pourront remonter la pente. «Les difficultés et le stress chroniques sont dommageables à long terme, explique-t-elle. Or, plusieurs de ces mères s'occuperont de leur enfant pendant toute leur vie en raison du TSA. Il est impératif qu'on leur vienne en aide car elles font un travail social incroyable à l'heure actuelle.»

Les recommandations qui seront émises à la suite de cette étude qualitative seront élaborées de concert avec l'OPHQ. Quelques pistes semblent déjà se dégager du côté de l'accessibilité matérielle et financière aux différents services de soutien. «Ce n'est pas une question de faire plus, mais de faire mieux, et surtout de faire mieux en fonction des besoins particuliers de chaque enfant. Il n'y a pas de modèle unique d'intervention», conclut Catherine Des Rivières-Pigeon, qui a publié l'an dernier avec la diplômée Isabelle Courcy Autisme et TSA. Quelles réalités pour les parents au Québec? (Presses de l'Université du Québec).

27 mai 2017

La suramine, une approche antipurinergique inédite dans l'autisme

Dr Irène Drogou

  • Autisme

    By Dr Irène Drogou

La suramine, une molécule développée il y a 100 ans dans la maladie du sommeil, pourrait être utile dans les troubles du spectre autistique (TSA), selon une petite étude américaine randomisée, publiée dans « Annals of Clinical and Translational Neurology », et réalisée chez 10 garçons âgés de 5 à 14 ans.

L'étude SAT1 dirigée par le Dr Robert Naviaux de l'université de Californie montre que les symptômes de base du TSA (langage, interactions sociales, comportements stéréotypés) sont améliorés 6 semaines après une injection unique de suramine à faible dose par rapport au groupe placebo. Le score diagnostique ADOS-2 était significativement amélioré de 1,6 point.

Une évaluation subjective recueillie auprès des parents a révélé que les enfants traités faisaient des progrès sur le langage et le comportement, avec deux des cinq enfants ayant dit les premières phrases de leur vie 1 à 2 semaines après l'injection. Ce qui n'était pas le cas dans le groupe des enfants non traités. Par ailleurs, les parents rapportaient une amélioration des symptômes les 3 premières semaines, puis une détérioration sur les 3 semaines suivantes avec retour à l'état de base. Aucun effet secondaire grave n'a été observé.

Un relargage extracellulaire d'ATP

L'équipe du Dr Naviaux défend une approche métabolique reposant sur l'idée qu'il existe une réponse cellulaire au danger (cell danger response, CDR) anormale au cours de la maladie. La mitochondrie et son stress oxydatif seraient à l'origine d'un relargage anormal de purines et de pyrimidines, telles que l'ATP. Or si l'ATP est une source d'énergie à l'intérieur de la cellule, écrivent les auteurs, l'ATP extracellulaire est un puissant immunomodulateur.

Les chercheurs ont fait le choix de la suramine comme antipurinergique : il s'agit de l'une de ses propriétés les mieux connues. Même si la molécule est inscrite sur la liste de l'OMS des médicaments essentiels, la suramine pose des problèmes de tolérance à hautes doses. Après des résultats concluants dans deux modèles murins pour un traitement à faible dose sur une durée prolongée (4 mois), l'équipe présente des données préliminaires de toxicité rassurantes dans cette indication chez l'homme.

Ce petit essai lance l'approche antipurinergique. Pour la fondation « N of One : Autism research Foundation », l'un des financeurs de cette étude, tous philanthropiques, les percées les plus prometteuses dans l'autisme sont à attendre au-delà de la génétique sur laquelle beaucoup d'efforts de recherche se sont focalisés jusque-là. « La généralisation de ces résultats n'est pas connue », concluent les auteurs avec prudence en appelant à des essais plus larges testant la suramine à faibles doses sur plusieurs mois.

Source : Lequotidiendumedecin.fr
24 mai 2017

Découverte de 40 gènes impliqués dans l'intelligence

Une vaste étude portant sur plus de 78.000 individus a permis de découvrir 40 gènes associés à l'intelligence. Une avancée majeure vers la compréhension des bases génétiques du quotient intellectuel.

Découverte de 40 gènes impliqués dans l'intelligence

Il pourrait exister 800 à 1.200 gènes impliqués dans l'intelligence.

© FERNANDO DA CUNHA / BSIP / AFP

Quarante nouveaux gènes associés à l'intelligence ont été identifiés, révèle une étude publiée le 22 mai 2017 dans Nature Genetics. Un pas de plus vers la compréhension des fondements génétiques du quotient intellectuel (QI). "Pour la première fois, nous détectons un nombre important de gènes qui prennent part à l'intelligence", a expliqué à l'AFP Danielle Posthuma de l'université libre d'Amsterdam aux Pays-Bas et coauteur de l'étude.

"À l'heure actuelle, on mesure bien mieux l'intelligence avec un test sur papier qu'en regardant nos gènes"

De précédents travaux avaient permis de mettre en évidence 12 variations génétiques associées à l'intelligence. Cette nouvelle étude, la plus vaste menée jusqu'à maintenant sur le sujet, se base sur plus de 78.000 individus de souche européenne, adultes et enfants. Étudiant le lien entre leur génome et leurs résultats à des tests d´intelligence, Danielle Posthuma et ses collègues ont cette fois débusqué 52 gènes associés au QI dont 40 jusqu'ici inconnus. La plupart de ces gènes ont une fonction dans le cerveau et plus particulièrement dans la régulation du développement cellulaire.

TESTS QI. Dans cette étude, "l'intelligence" des participants a été mesurée grâce à différents tests QI, mais ces derniers restent très discutés et ne peuvent prétendre à l'universalité. De plus, comme le rappelle Danielle Posthuma, les gènes ne déterminent pas tout dans l'intelligence, et de nombreux facteurs environnementaux entrent en jeu.

"Ces résultats fournissent pour la première fois des indices clairs sur les mécanismes biologiques sous-jacents de l'intelligence", a déclaré Danielle Posthuma. L'étude a également montré que les variations de ces gènes étaient également en lien avec d'autres traits, tels que la réussite scolaire, la maladie d'Alzheimer, la schizophrénie, les symptômes dépressifs, la taille ou encore l'autisme. Par exemple, "une variante associée à une augmentation de l'intelligence est également associée à un risque accru du trouble du spectre autistique", explique Danielle Posthuma. Une autre peut être reliée à une diminution de l'indice de masse corporelle ou encore une autre à un risque réduit de schizophrénie.

Mais le travail est loin d'être terminé. D'autres études, encore plus vastes, seront nécessaires pour identifier la totalité des gènes qui prennent part à l'intelligence car la famille pourrait être nombreuse. Selon la chercheuse, ces gènes pourraient être 800 à 1.200. "À l'heure actuelle, on mesure bien mieux l'intelligence avec un test sur papier qu'en regardant nos gènes", s'amuse Danielle Posthuma.

LL avec AFP

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