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"Au bonheur d'Elise"
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19 décembre 2014

La pollution et le cerveau humain : un très grand débat doit s'ouvrir !

Vendredi, 19/12/2014 - 00:00
La Pollution et le cerveau humain : un grand débat doit s’ouvrir !

 

En 2005, une solide étude épidémiologique britannique dirigée par le Professeur George Knox (Université de Birmingham) et publiée dans la revue médicale britannique « Journal of Epidemiology and Community Health », avait fait grand bruit, en établissant un lien de causalité entre le risque de cancer chez l'enfant et le niveau d’exposition à la pollution atmosphérique environnante (Voir Journal of Epidemiology & Community Health).

En analysant et en recoupant les lieux de résidence de plus de 12 000 enfants décédés de leucémie ou de cancer entre 1953 et 1980 en Grande-Bretagne, ces recherches avaient montré que les enfants vivant à moins d'un kilomètre d'une source importante de pollution (gares routières, centres de transports, hôpitaux,) avaient un risque accru de mourir d'un cancer. Ce risque pouvait être multiplié par 12 pour les enfants qui avaient durablement vécu à moins de 500 mètres d’un lieu de fortes émissions de certains composés organiques volatils (COV) issus des carburants.

Une étude publiée en septembre 2004 dans la revue Occupational and Environmental Medicine et réalisée par des chercheurs de l'INSERM dans quatre villes françaises (Nancy, Lille, Lyon et Paris) émettait déjà l'hypothèse que vivre près d'un garage ou une station-service pourrait quadrupler le risque de leucémie infantile.

Depuis ces études, les recherches se sont accumulées partout dans le monde et finalement le Centre International de Recherche sur le Cancer de Lyon a fini par reconnaître officiellement en octobre 2013 (Voir IARC) que la pollution de l'air constituait un facteur cancérigène intrinsèque.

Mais il y a quelques jours, ce débat grandissant sur l’impact de l’environnement en matière de santé a pris une nouvelle dimension avec la publication d’une vaste étude américaine conduite par des chercheurs de l’Université Columbia, qui montre que les enfants exposés in utero à des niveaux élevés de deux phtalates présenteraient en moyenne un quotient intellectuel (QI) inférieur de plus de six points à celui d’enfants moins exposés (Voir PLOS One).

Les phtalates sont des composants présents dans de nombreux produits courants : objets en PVC, textiles imperméables, cuirs synthétiques, rouges à lèvres, shampooings. Bien que ces substances soient en partie interdites en Europe comme aux Etats-Unis, elles demeurent présentes dans certains dispositifs médicaux et il faudra attendre juillet 2015 pour que la France devienne le premier pays à interdire le matériel contenant des phtalates dans les services de néonatalogie, pédiatrie et les maternités.

L’étude américaine a porté sur 328 femmes dont l’urine a été analysée au cours du troisième trimestre de grossesse pour y mesurer la concentration de quatre phtalates. Les tests de QI ont été réalisés auprès de leurs enfants à l’âge de sept ans. Les chercheurs ont découvert que, pour le premier quartile des enfants dont les taux de DnBP et DiBP étaient les plus élevés, le QI était respectivement de 6,6 et 7,6 points inférieur à celui du quartile des enfants dont la mère présentait la concentration la plus basse de ces deux phtalates. Selon Robin Whyatt, qui a dirigé l’étude, « L’ampleur de ces différences de QI est troublante. Une baisse de six ou sept points pourrait avoir des conséquences substantielles sur la réussite scolaire et le potentiel professionnel de ces enfants. »

Cette étude vient relancer un débat bien plus vaste et complexe qui est celui de l’impact à long terme de certaines substances chimiques présentes dans notre environnement, non seulement sur notre santé physique mais également sur le fonctionnement de notre cerveau, nos capacités cognitives et les risques de troubles mentaux et psychiatriques.

A cet égard, l’exemple que représente la très forte progression de l’incidence de l’autisme dans le monde représente un véritable défi pour la communauté scientifique. En effet, selon les dernières données publiées par le Centre Américain de contrôle et de Prévention des Maladies (CDC), l’autisme concernerait à présent un enfant sur 68 aux Etats-Unis, soit une augmentation de l’incidence de 30 % en seulement deux ans. Cette incidence globale des troubles autistiques aurait doublé depuis 10 ans et aurait été multipliée par plus de 20 depuis 30 ans, sans qu’il soit possible de fournir une explication scientifique satisfaisante à cette fulgurante progression.

La Haute autorité médicale américaine souligne par ailleurs que d’autres troubles neuro-comportementaux ont également progressé fortement aux Etats-Unis au cours de ces dernières années. Par exemple, le taux d’enfants souffrant d’hyperactivité et de troubles de l’attention est passé de 7,8 % des enfants entre 4 et 17 ans en 2003 à 11 % en 2011. Le CDC précise que globalement, un enfant américain sur six est à présent affecté par un trouble du développement ou une pathologie psychiatrique.

Selon la chercheuse Barbara Demeneix, directrice du département Régulations, développement et diversité moléculaire du Muséum national d’histoire naturelle (MNHN), cette progression anormalement rapide de l’incidence des troubles neurocomportementaux serait essentiellement due à une exposition prolongée de la population générale à certaines pollutions chimiques diffuses.

Cette scientifique souligne, non sans arguments, que l’augmentation très forte de la fréquence de l’autisme est très difficilement imputable à la seule génétique et aux progrès en matière de diagnostic et ne peut être expliquée qu’en intégrant les effets des facteurs environnementaux. Barbara Demeneix souligne d’ailleurs qu’il est peu probable que l’augmentation de fréquence de l’autisme relève d’un biais de mesure car le niveau d’incidence en fonction du sexe reste constant et les garçons sont toujours cinq fois plus touchés que les filles.

Selon cette scientifique, l’augmentation forte et globale de l’incidence des troubles du développement pourrait être liée aux effets néfastes de plusieurs molécules de synthèse capables de modifier le fonctionnement de la glande thyroïde et de perturber les hormones thyroïdiennes qui jouent un rôle important dans l’expression des gènes à l’origine de certaines structures cérébrales comme l’hippocampe. Certaines de ces substances, et notamment certains composés chlorés, certaines dioxines, le bisphénol A, certains perfluorés et certains solvants pourraient altérer le comportement ou les capacités cognitives des enfants exposés in utero, ou aux premiers âges de la vie. 

L’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE), en charge d’établir les protocoles de test des substances chimiques mises sur le marché, prend très au sérieux ce nouveau défi de santé publique et vient de se prononcer pour le développement urgent de nouveaux tests capables de mieux identifier les molécules interférant avec la thyroïde.

Cette question est d’autant plus importante qu’elle ne concerne pas seulement un possible déclin du niveau intellectuel pour les prochaines générations mais touche également à la santé globale. « Les épidémiologistes remarquent depuis longtemps que les personnes qui ont un quotient intellectuel élevé vivent plus longtemps, même lorsqu’on corrige des effets liés à la classe sociale », précise à cet égard Barbara Demeneix. 

Rappelons qu’au cours de ces dernières années, plusieurs études (dont nous nous sommes fait l’écho dans notre lettre) ont montré de manière convergente le rôle probable de la pollution en matière de troubles du développement. En décembre 2012, une étude publiée dans la revue de référence « Archives of General Psychiatry » avait déjà montré que l’exposition in utero à la pollution de la circulation multiplie le risque d’autisme par 2 et, et par 3 durant la première année de vie de l’enfant. Dans ce travail, l’équipe du professeur Volk a travaillé sur 279 enfants atteints d'autisme et 245 enfants-témoins, indemnes de ce trouble. En analysant les lieux de résidence des mères et de leurs enfants, les chercheurs sont parvenus à estimer l’exposition à la pollution pour chaque trimestre de la grossesse et pendant la première année de vie. Ce travail a montré que les enfants qui avaient vécu dans un environnement plus exposé à la pollution atmosphérique liée à la circulation, avaient sensiblement plus de risques de développer un trouble autistique.

En 2013, une autre équipe de recherche américaine, de la faculté de santé publique d' Harvard, a également travaillé sur les liens possibles entre l'exposition à la pollution et le risque d'autisme. Ces chercheurs ont analysé des données médicales concernant 116 000 femmes suivies pendant plus de 20 ans. Ils ont également passé au crible la qualité de l’air et son évolution dans différents lieux des naissances, tout en intégrant dans leur étude d'autres facteurs environnementaux, comme le tabagisme et le niveau socioprofessionnel des parents (Voir Environmental Health Perspectives).

Ce travail publié en août 2013 a finalement montré que dans les zones plus polluées, le risque de développer des troubles autistiques était multiplié par deux par rapport aux lieux de vie les moins exposés à la pollution. Il semblerait, selon ces travaux, qu'une exposition prolongée à une trop forte concentration de particules fines, notamment émises par les véhicules diesel ou la combustion de bois, pourrait avoir des effets irréversibles sur le développement des fonctions cérébrales des enfants. 

Une autre étude américaine publiée en octobre 2014 montre également que les enfants atteints de troubles autistiques sont plus susceptibles que les autres d'avoir été exposés à certains polluants atmosphériques pendant la grossesse et pendant leurs deux premières années de vie (Voir MNT).

Dans ce travail, Evelyn Talbott de l'Université de Pittsburgh a étudié 217 familles dont les enfants étaient atteints d’autisme. Elle a comparé leur exposition et celles de deux populations tests à plus de 30 polluants connus pour causer des perturbations endocriniennes ou des problèmes de développement neurologique. Résultat : les enfants qui avaient été exposés à des niveaux plus élevés de chrome et de styrène (utilisés dans la fabrication des plastiques et également issus de la combustion de l'essence des voitures) étaient 1,4 à 2 fois plus susceptibles que les autres de souffrir d’autisme.

S’agissant à présent de l’impact global de la pollution sur la santé, l'Inserm a réalisé, sur plus de trois millions d'enfants suivis pendant 20 ans, un remarquable travail de recherche qui a montré que l'exposition à une forte pollution altérait le système immunitaire des fœtus pendant la grossesse de la mère (Voir EHP).

Publiée en 2009, cette étude menée sur 280 femmes enceintes indique que leur exposition aux polluants atmosphériques, notamment ceux issus de la combustion (trafic routier, chauffage), pourrait nuire à la croissance du fœtus. Cette étude dirigée par Remy Slama était d’autant plus intéressante qu’elle a pu prendre en compte, grâce une méthodologie particulière, l’exposition des femmes à la pollution extérieure mais également intérieure.

Même en prenant en compte l’effet des facteurs déjà connus, cette étude a montré que l’exposition aux polluants de l’air est associée à une diminution du poids de l’enfant à la naissance ainsi qu’à une diminution de son périmètre crânien dès la fin du deuxième trimestre de grossesse.

La Commission européenne a lancé récemment une consultation publique sur les perturbateurs endocriniens, qui s’achèvera le 16 janvier 2015. L’objectif de cette campagne est de mieux prévenir les effets néfastes, à présent avérés, de ces perturbateurs endocriniens. La consultation européenne porte sur l’adoption de critères de définition de ces substances, que l’industrie souhaite très souples, alors que les associations espèrent qu’ils permettront leur interdiction définitive.

Cette pollution biochimique diffuse aurait également un coût économique considérable pour la collectivité : selon une étude, menée dans les pays scandinaves, le seul effet des perturbateurs endocriniens sur les troubles masculins de l’appareil reproductif s’élèveraient pour l’UE jusqu’à 1,2 milliard d’euros par année d’exposition. L’étude de HEAL estime pour sa part que le coût pour l’ensemble des maladies liées aux perturbateurs endocriniens s’élève à 31 milliards d’euros par an.

Bien sûr, il faut se garder de céder au catastrophisme ; il n’est pas envisageable d’interdire immédiatement la production et l’utilisation de la totalité des composants et substances chimiques qui pourraient, à un niveau ou à un autre, avoir un impact sur notre santé physique ou mentale. En effet, l’application d’un tel principe de précaution élargie conduirait à interdire préventivement plusieurs centaines, voire des milliers de substances dont certaines ne sont pas substituables à leurs usages dans l’état actuel de nos connaissances scientifiques et techniques. Le coût économique mais également social d’une telle interdiction élargie serait considérable et sans doute disproportionné par rapport aux objectifs de santé publique poursuivis.

Néanmoins, nous ne pouvons pas ne pas prendre en compte l’ensemble de ces travaux et études scientifiques récentes concernant l’impact néfaste sur notre santé de certains types de substances chimiques présents dans notre environnement. Il est donc absolument capital et urgent, comme le propose d’ailleurs l’OCDE et l’Union Européenne et comme le préconise également un nombre croissant de scientifiques, de développer et de mettre en place de nouveaux outils et de nouvelles procédures d’analyse biologique et chimique qui permettent de mieux évaluer les effets à long terme d’une exposition de longue durée à certains types de molécules chimiques, même lorsque cette exposition se fait à des niveaux très faibles qui étaient considérés jusqu’à présent comme inoffensifs.

Dans cet enjeu de santé publique tout à fait majeur, il est néanmoins très important de ne pas dresser les différents acteurs les uns contre les autres dans un affrontement stérile. Nous devons au contraire parvenir à instaurer des processus de coopération et de concertation raisonnables, évaluables et transparents sur le plan démocratique qui associent les industriels - dont l’intérêt bien compris est de pouvoir garantir aux consommateurs la qualité et l’innocuité de leurs produits - , la communauté scientifique, les associations et bien entendu des responsables politiques qui ont la responsabilité irremplaçable de définir le cadre législatif et réglementaire dans ce domaine.

C’est en construisant et en développant ce nouveau processus collectif de concertation, d’information et d’évaluation que notre société parviendra à concilier la nécessité du développement économique et technologique et les impératifs liés à la prévention médicale et à l’indispensable protection de notre santé et de notre qualité de vie.

René TRÉGOUËT

Sénateur Honoraire

Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

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17 décembre 2014

Le centre hospitalier Sainte-Marie participe à une étude sur l'autisme

Le centre hospitalier Sainte-Marie participe à une étude sur l'autisme

 

Les rotariens du club Mont Anis ont remis un matériel vidéo sophistiqué au centre hospitalier Sainte-Marie du Puy-en-Velay. Celui-ci doit permettre la participation à une étude d’envergure nationale, portant sur les troubles autistiques chez les jeunes enfants de 3 à 6 ans.

Le centre hospitalier Sainte-Marie du Puy-en-Velay, sur la proposition du Docteur Carine Fourny, participe à une étude dirigée par le CHU de Nantes, menée sur un peu plus de trois ans à compter de fin 2014. Intitulée "Évaluation clinique des pratiques intégratives en unités de soins infanto-juvéniles pour des enfants présentant un autisme typique ou atypique", cette étude permet aux petits patients hospitalisés, avec l’accord et la participation de leurs parents, de bénéficier de l’expertise d’un réseau de professionnels répartis sur une vingtaine d’établissements en France.

Le Rotary du Mont Anis offre le matériel au centre

Pendant une année, chaque enfant inclus dans cette étude bénéficie de prises en charge coordonnées. L’objectif est d’évaluer sa progression au moyen de tests réalisés selon un calendrier prédéfini. Ces tests seront filmés, afin d’être envoyés pour évaluation aux professionnels du réseau national. Ainsi, l’enfant ne passe le test qu’une seule fois, mais ce test est étudié par trois équipes différentes, de manière anonyme, dans un souci de neutralité. Cette recherche requérait donc l’achat de matériel vidéo (caméscope, DVD, cartes mémoire).
Pour les professionnels de l’équipe hospitalière, il s’agit aussi de participer à une recherche faisant intervenir de nombreux spécialistes de l’autisme infantile : médecins, paramédicaux et soignants. La formation professionnelle acquise par l’appropriation d’outils d’observation clinique renforce l’alliance avec les parents et permet une réflexion sur les pratiques actuelles.
Soucieux d’œuvrer pour le mieux-être des enfants hospitalisés, intéressés par les apports et le caractère innovant de cette étude, les membres du Rotary club Mont Anis ont souhaité participer en finançant le matériel vidéo. Cet engagement s’inscrit dans le cadre du programme d'actions sociales, humanitaires et caritatives du club.
Ce don participant à l’émulation née des échanges interprofessionnels laisse entrevoir, au sortir de l’étude, une élévation globale du niveau de compétences et de la qualité des prises en charge des enfants autistes.



16 décembre 2014

RECHERCHE : Etude de cas avec complément de vitamine D en Chine

article publié dans Autism Speaks

Mega-vitamin therapy of various types has long been of interest to the autism community. For more perspective, see
Complementary Approaches for Treating Autism
and
Can Supplements Relieve Autism Symptoms?

In their report, autism specialists at China’s First Hospital of Jilin University describe a toddler they diagnosed at 32 months with autism spectrum disorder (ASD).

They describe how the boy did not respond to his name or instructions and spoke only a few isolated words. He didn’t play with toys, but instead compulsively smelled objects and shredded paper. He ran in circles “endlessly” and suffered from tantrums that involved head banging.

Blood tests showed that the boy had borderline low blood levels of vitamin D (12.5 ng/mL). The doctors administered a monthly injection of vitamin D3 (150,000 IU) and prescribed a daily oral supplement (400 IU).

After two months, the boy’s vitamin D blood levels had risen to 81.2 ng/mL, and his parents were reporting clear improvements. The boy had stopped running in circles and banging his head. He was responding to his name, playing with toys and asking his parents to hold him in their arms. Re-evaluation with a diagnostic checklist likewise showed significant improvements in all areas of core autism symptoms.    

“It is important to note that this single case observation cannot be generalized to all patients with ASD,” the doctors write. “It is hoped that this case report will encourage researchers to conduct further long-term controlled clinical trials.”

11 décembre 2014

La pollution met en danger le cerveau

article publié dans Le Monde

Le Monde.fr | 10.12.2014 à 20h40 • Mis à jour le 11.12.2014 à 13h22 | Par

Des enfants exposés in utero à des niveaux élevés de deux phtalates présentent en moyenne un quotient intellectuel (QI) inférieur de plus de six points à celui d’enfants moins exposés. Cette conclusion préoccupante est le fruit d’une étude au long cours, conduite par des chercheurs de l’université Columbia (New York), et publiée mercredi 10 décembre dans la revue PLoS One

Les phtalates sont des plastifiants présents dans de nombreux produits courants – objets en PVC, textiles imperméables, cuirs synthétiques, mais aussi rouges à lèvres et à ongles, bombes de laque ou certains shampooings. Ils sont interdits dans les jouets, en Europe comme aux Etats-Unis, mais rien n’est fait pour éviter l’exposition des femmes enceintes.

L’étude a porté sur 328 New Yorkaises, dont l’urine a été analysée au cours du troisième trimestre de grossesse pour y mesurer la concentration en quatre phtalates. Les tests de QI ont été réalisés auprès de leurs enfants à l’âge de sept ans. Pour les 25 % de ceux nés de mères dont les taux de DnBP et DiBP étaient les plus élevés, le QI était respectivement de 6,6 et 7,6 points inférieur à celui du quart des enfants dont la mère montrait la concentration la plus basse de ces deux phtalates. L’étendue des concentrations n’avait rien d’inhabituel et se situait dans l’échelle de celles mesurées au niveau national par les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC).

Ampleur troublante

« L’ampleur de ces différences de QI est troublante, note Robin Whyatt, qui a dirigé l’étude. Une baisse de six ou sept points pourrait avoir des conséquences substantielles sur la réussite scolaire et le potentiel professionnel de ces enfants. »

Cette étude n’est que la dernière en date d’un corpus toujours plus vaste de travaux qui pointent l’impact sur le développement cérébral de différents polluants, au premier titre desquels figurent les perturbateurs endocriniens. La montée de l’incidence de l’autisme pourrait être l’un des symptômes de l’imprégnation de la population – notamment de l’enfant à naître – par ces produits chimiques.

De toutes les maladies non transmissibles, l’autisme est l’une de celles dont la fréquence augmente le plus rapidement. Si vite qu’il est même difficile d’y croire. En mars, les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) américains, l’équivalent de notre Institut de veille sanitaire (InVS), rendaient publiques les dernières estimations de la prévalence des troubles du spectre autistique chez les garçons et les filles de 8 ans aux Etats-Unis. Selon ces chiffres, un enfant sur 68 est désormais touché par cet ensemble de maladies du développement, regroupant l’autisme profond, les syndromes de Rett et d’Asperger, etc.

Augmentation quasi exponentielle

Le plus impressionnant n’est pas tant le chiffre lui-même, que la rapidité de son évolution : il est supérieur de 30 % à celui publié seulement deux ans auparavant (un enfant sur 88) par le même réseau de surveillance mis en place par les CDC, et a plus que doublé en moins d’une décennie. Au cours des vingt dernières années, les données américaines suggèrent une augmentation quasi-exponentielle de ces troubles, aujourd’hui diagnostiqués « vingt à trente fois plus » que dans les années 1970, selon le rapport des CDC. 40 % de ces enfants dépistés aux Etats-Unis présentent un quotient intellectuel (QI) inférieur à 70.

D’autres troubles neuro-comportementaux sont également en forte croissance ces dernières années. Outre-Atlantique, l’hyperactivité et les troubles de l’attention touchaient, selon les chiffres des CDC, 7,8 % des enfants entre 4 et 17 ans en 2003. Ce taux est passé à 9,5 % en 2007, puis à 11 % en 2011. Par comparaison, en France, leur fréquence est estimée entre 3,5 et 6 % pour les 6-12 ans.

 | Demeneix 2014 d'après Weintraub 2011 CDC

Aux Etats-Unis, un enfant sur six est concerné par un trouble du développement (troubles neuro-comportementaux, retard mental, handicaps moteurs, etc.).

Dans un ouvrage scientifique tout juste publié (Losing Our Minds. How Environmental Pollution Impairs Human Intelligence and Mental Health, Oxford University Press, 2014) Barbara Demeneix, directrice du département Régulations, développement et diversité moléculaire du Muséum national d’histoire naturelle (MNHN), soutient que cette augmentation rapide de la fréquence des troubles neurocomportementaux est, en grande partie, le résultat de l’exposition de la population générale à certaines pollutions chimiques diffuses – en particulier les femmes enceintes et les jeunes enfants.

Selon la biologiste, cette situation n’est, en outre, que la part émergée d’un problème plus vaste, celui de l’érosion des capacités cognitives des nouvelles générations sous l’effet d’expositions toujours plus nombreuses à des métaux lourds et à des substances chimiques de synthèse. Le sujet est, ces dernières années, au centre de nombreuses publications scientifiques. Philippe Grandjean, professeur de médecine environnementale (université Harvard, université du Danemark-Sud), l’une des figures de la discipline et auteur d’un livre sur le sujet (Only One Chance. How Environmental Pollution Impairs Brain Development — and How to Protect the Brains of the Next Generation, Oxford University Press, 2013), va jusqu’à évoquer une « fuite chimique des cerveaux ».

La thyroïde en cause

« L’augmentation de la fréquence de l’autisme que l’on mesure ces dernières années est telle qu’elle ne peut pas être attribuée à la génétique seule et ne peut être expliquée sans faire intervenir des facteurs environnementaux, dit Barbara Demeneix. De meilleurs diagnostics et une meilleure information des médecins et des familles permettent certainement d’expliquer une part de cette augmentation, mais en aucun cas la majorité. » Et ce d’autant plus que les critères diagnostiques utilisés par les CDC sont demeurés identiques entre 2000 et 2013. « En France et en Europe, il n’existe pas de suivi historique de la prévalence de ces troubles aussi précis qu’aux Etats-Unis, mais il est vraisemblable qu’on assiste aussi à une augmentation de leur incidence », ajoute Barbara Demeneix.

Autre argument fort suggérant que l’augmentation de fréquence de l’autisme ne relève pas d’un biais de mesure : le sexe-ratio est constant. Les garçons sont toujours cinq fois plus touchés que les filles. Or, si l’accroissement constaté était artéfactuel, une modification du sexe-ratio aurait de grandes chances d’être observée.

Comment expliquer une telle épidémie ? Pour la biologiste française, l’une des causes majeures est la prolifération de molécules de synthèse capables d’interférer avec le fonctionnement de la glande thyroïde. « Depuis de nombreuses années, mon travail consiste à comprendre comment un têtard devient une grenouille. Les molécules-clés de ce processus sont les hormones thyroïdiennes, qui jouent un rôle crucial dans les transformations lourdes du développement, explique Barbara Demeneix. En cherchant à comprendre comment ces hormones agissent dans la métamorphose du têtard, je me suis posé le même type de questions sur leur importance dans le développement du cerveau humain. »

Les hormones thyroïdiennes sont connues pour moduler l’expression des gènes pilotant la formation de structures cérébrales complexes comme l’hippocampe ou le cortex cérébelleux. « Nous savons avec certitude que l’hormone thyroïde joue un rôle pivot dans le développement du cerveau, précise le biologiste Thomas Zoeller, professeur à l’université du Massachusetts à Amherst et spécialiste du système thyroïdien. D’ailleurs, la fonction thyroïdienne est contrôlée sur chaque bébé né dans les pays développés et la plupart des pays en développement, ce qui montre le niveau de certitude que nous avons dans ce fait. Pourtant, malgré le fait que de nombreuses substances chimiques ayant un impact documenté sur la thyroïde soient en circulation, les autorités sanitaires ne font pas toujours le lien avec l’augmentation des troubles neurocomportementaux. »

Dans Losing Our Minds, Barbara Demeneix montre que la plupart des substances connues pour leur effet sur le développement du cerveau interfèrent bel et bien avec le système thyroïdien. Ces molécules ne sont pas toutes suspectées d’augmenter les risques d’autisme, mais toutes sont susceptibles d’altérer le comportement ou les capacités cognitives des enfants exposés in utero, ou aux premiers âges de la vie. C’est le cas des PCB (composés chlorés jadis utilisés comme isolants électriques, lubrifiants, etc.), de certaines dioxines (issues des processus de combustion), de l’omniprésent bisphénol A, des PBDE (composés bromés utilisés comme ignifuges dans l’électronique et les mousses des canapés), des perfluorés (utilisés comme surfactants), des pesticides organophosphorés, de certains solvants, etc.

« Le travail de Barbara Demeneix est très important, estime la biologiste Ana Soto, professeur à l’université Tufts à Boston (Etats-Unis) et titulaire de la chaire Blaise Pascal 2013-2014 de l’Ecole normale supérieure. Elle a conduit un travail bibliographique considérable et c’est la première fois que l’ensemble des connaissances sont rassemblées pour mettre en évidence que tous ces perturbateurs endocriniens, mais aussi des métaux lourds comme le mercure, sont capables de perturber le fonctionnement du système thyroïdien par une multitude de processus. »

Substances très nombreuses

Les composés bromés peuvent inhiber l’absorption d’iode par la thyroïde qui, du coup, produit moins d’hormones. Les molécules chlorées peuvent en perturber la distribution dans les tissus. Le mercure, lui, peut inhiber l’action des enzymes qui potentialisent ces mêmes hormones… Lorsqu’une femme enceinte est exposée à ces substances, son fœtus l’est également et, explique Barbara Demeneix, « le risque est important que la genèse de son cerveau ne se fasse pas de manière optimale ». Pour limiter au mieux les effets de ces substances, la biologiste insiste sur la nécessité d’un apport d’iode conséquent – absent du sel de mer – aux femmes enceintes, garant de leur bon fonctionnement thyroïdien.

Le problème est que les substances susceptibles de perturber ces processus sont très nombreuses. « Les chimistes manipulent des phénols auxquels ils ajoutent des halogènes comme le brome, le chlore ou le fluor, explique Barbara Demeneix. Or les hormones thyroïdiennes sont composées d’iode, qui est aussi un halogène. Le résultat est que nous avons mis en circulation des myriades de substances de synthèse qui ressemblent fort aux hormones thyroïdiennes. »

Les scientifiques engagés dans la recherche sur la perturbation endocrinienne estiment en général que les tests mis en œuvre pour détecter et réglementer les substances mimant les hormones humaines sont insuffisants. D’autant plus que les effets produits sur les capacités cognitives sont globalement discrets. « Si le thalidomide [médicament retiré dans les années 1960] avait causé une perte de 10 points de quotient intellectuel au lieu des malformations visibles des membres [des enfants exposés in utero via leur mère], il serait probablement encore sur le marché », se plaisait à dire David Rall, ancien directeur de l’Institut national des sciences de la santé environnementale américain (NIEHS).

L’érosion du quotient intellectuel de même que les troubles neurocomportementaux comme l’hyperactivité et les troubles de l’attention ou l’autisme « sont le talon d’Achille du système de régulation, souligne le biologiste Thomas Zoeller. Ce sont des troubles complexes, hétérogènes et aucun biomarqueur caractéristique ne peut être identifié. Du coup, il y a beaucoup de débats sur la “réalité” de l’augmentation de leur incidence. Ce genre de discussions ne décide pas les agences de régulation à être pro-actives, en dépit du fait que l’incidence des troubles du spectre autistique augmente si rapidement que nous devrions tous en être inquiets. »

 | Demeneix 2014 d'après Weiss 2009.

L’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE), l’organisme intergouvernemental chargé d’établir les protocoles de test des substances chimiques mises sur le marché, a cependant appelé, fin octobre, au développement de nouveaux tests susceptibles de mieux cribler les molécules interférant avec la thyroïde. Et ce, avec « une très haute priorité ».

L’affaire ne concerne pas uniquement l’intelligence des prochaines générations mais leur santé au sens large. « Les épidémiologistes remarquent depuis longtemps que les gens qui ont un quotient intellectuel élevé vivent plus longtemps, et ce même lorsqu’on corrige des effets liés à la classe sociale, dit Barbara Demeneix. Or selon la théorie de l’origine développementale des maladies, notre santé dépend en partie de la manière dont nos tissus se sont développés au cours de notre vie intra-utérine. Les facultés cognitives pourraient ainsi être une sorte de marqueur des expositions in utero et pendant la petite enfance à des agents chimiques : avoir été peu exposé signifierait un quotient intellectuel élevé et, du même coup, une plus faible susceptibilité aux maladies non transmissibles. »



8 décembre 2014

Une piste pour soigner l'hypersensibilité des autistes

article publié dans Pour la science

Des biologistes ont identifié la cause de l’hypersensibilité sensorielle qui touche un grand nombre d’autistes et réussi à la corriger chez la souris.

Guillaume Jacquemont

De nombreux autistes réagissent de façon excessive aux stimulus sensoriels,

De nombreux autistes réagissent de façon excessive aux stimulus sensoriels, qui peuvent leur être douloureux.

© milaphotos/Shutterstock.com
© Isabelle Férézou, Guillaume Bony, Andréas Frick

L'hypersensibilité des autistes serait dû à une hyperexcitabilité de leurs aires cérébrales sensorielles. Ces dernières aires s’activent bien plus chez une souris modèle du syndrome de l'X fragile (une forme d'autisme) (à droite) que chez une une souris normale (à gauche), quand on leur touche la moustache.

© Isabelle Férézou, Guillaume Bony, Andréas Frick

Avez-vous déjà été ébloui par des néons de supermarché au point que cela en devienne douloureux ? Le simple fait de porter des vêtements est-il désagréable ? De nombreux autistes sont victimes d’une hypersensibilité sensorielle, susceptible de toucher tous les sens. L’équipe d’Andréas Frick, à l’Inserm, a découvert les mécanismes cérébraux en cause et réussi à résoudre le problème chez la souris.

Les troubles du spectre autistique touchent plus de 650 000 personnes en France, dont 150 000 enfants. Ils se manifestent par divers symptômes, notamment un manque de sociabilité, des difficultés à communiquer et des comportements répétitifs. Près de 90 % des personnes touchées souffrent aussi un défaut de traitement de l’information sensorielle, entraînant une hypersensibilité ou au contraire un manque de sensibilité, voire les deux. Ce défaut peut toucher n’importe quel sens – voire tous à la fois — et se révéler très handicapant au quotidien.

Les chercheurs se sont intéressés à l’un des troubles du spectre autistique, le syndrome du X fragile. Ce trouble est dû à une mutation génétique et entraîne une déficience intellectuelle – c’en est d’ailleurs la première cause héréditaire.

Les biologistes ont travaillé sur des souris qui présentaient les symptômes et la mutation génétique caractéristiques du syndrome de l’X fragile. Ils ont d’abord testé leur réponse à une stimulation tactile (toucher la moustache ou la patte) pendant qu’ils mesuraient l’activité électrique de leur cerveau. Les neurones du cortex somatosensoriel des souris, qui traite les informations tactiles, se sont révélés être hyperexcitables, c’est-à-dire qu’ils s’activent plus souvent et émettaient plus d’influx nerveux que ceux de souris normales. C’est ce qui conduirait à une réponse excessive aux stimulus sensoriels. Cette hyperexcitabilité avait déjà été constatée pour d’autres types de stimulus, notamment auditifs.

Les chercheurs ont ensuite cherché à comprendre pourquoi. Le syndrome de l’X fragile est causé par la mutation du gène codant une protéine nommée FMRP. On savait que cette protéine interagit avec de nombreuses molécules et qu’elle est liée à la plasticité cérébrale, mais des études récentes ont montré qu’elle régule aussi l’activité de certains canaux ioniques. Or ces canaux intégrés aux membranes cellulaires, qui s’ouvrent et se ferment pour réguler les flux d’ions dans la cellule, sont un élément clef de l’activité électrique des neurones. La mutation du gène de la protéine FMRP pourrait-elle en rendre certains dysfonctionnels ?

C’est ce qu’ont vérifié A. Frick et ses collègues. Ils ont identifié deux types de canaux ioniques dont l’activité était perturbée, ce qui conduisait à l’hyperexcitabilité des neurones. En administrant aux souris une substance pharmacologique qui cible certains de ces canaux, les biologistes ont réussi à leur rendre une activité normale et à atténuer l’hypersensibilité des animaux. C’est donc une piste sérieuse pour un nouveau médicament, même si divers paramètres restent à améliorer – notamment la durée pendant laquelle la molécule est efficace. En outre, certains résultats préliminaires suggèrent qu’agir sur ces canaux ioniques pourrait aussi améliorer d’autres symptômes de l’autisme, tels que les déficiences sociales.

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3 décembre 2014

La plasticité du cerveau est au coeur des recherches visant à mieux intervenir auprès des autistes

 

La capacité à traiter certains types d'information de façon accrue, observée chez bon nombre d'autistes, résulterait d'un processus de plasticité du cerveau qui les mène à privilégier le contenu qui les intéresse au détriment des données à caractère social.

En fait, cette fonction surdéveloppée du cerveau des autistes serait en compétition avec les ressources cérébrales requises pour la socialisation, ralentissant le développement des relations sociales.

C'est la piste qui se dégage des plus récents travaux du Dr Laurent Mottron et de ses collègues, qui ont élaboré un tout nouveau modèle de compréhension du trouble du spectre de l'autisme (TSA) sur la base d'études antérieurement publiées en génétique, imagerie cérébrale et cognition de l'autisme.

Appelé «déclencheur-seuil-cible», le modèle créé par l'équipe multiuniversitaire qu'a constituée Laurent Mottron stipule que l'autisme résulterait d'une «réaction du cerveau à un facteur génétique, essentiellement des mutations. Chez les personnes dont le seuil de déclenchement d'une réaction plastique est moindre que dans la population en général, ces mutations engendreraient une réaction plastique du cerveau qui ciblerait certaines fonctions, surtout non sociales.»

Un parallèle avec les aveugles et les sourds

La plasticité cérébrale est la capacité du cerveau à s'adapter et à se remodeler dans certaines circonstances. C'est elle qui permet, par exemple, aux gens aveugles depuis la naissance de développer une ouïe plus aiguë.

Et, selon Laurent Mottron, les aptitudes supérieures de certaines personnes atteintes d'un TSA, dans les domaines du langage et de la perception, présentent des ressemblances frappantes avec celles des individus privés d'un sens depuis leur naissance.

En effet, les études en cognition et en imagerie cérébrale révèlent que les régions perceptives du cerveau des autistes ont une activité plus vive, des connexions plus nombreuses ainsi que des modifications structurales (cortex plus épais dans ces régions).

C'est donc la différence entre l'information ciblée par ces processus cérébraux et celle qui ne l'est pas qui expliquerait les forces et les faiblesses de chaque autiste.

«Les troubles de la parole et la mésadaptation sociale de certains jeunes enfants autistes ne sont peut-être pas le résultat d'un dysfonctionnement initial des mécanismes cérébraux liés à ces fonctions, mais plutôt d'une négligence précoce de ces domaines par l'enfant», avance le médecin et chercheur, qui est aussi professeur au Département de psychiatrie de l'UdeM.

Un modèle pour «axer les interventions en bas âge»

Selon M. Mottron, le nouveau modèle devrait permettre d'«axer les interventions en bas âge sur le développement des forces cognitives particulières de l'enfant, au lieu de les concentrer uniquement sur les comportements manquants, ce qui constitue d'ailleurs une pratique qui pourrait bien lui faire manquer une occasion unique dans sa vie».

Aussi estime-t-il que l'intervention précoce auprès des enfants autistes devrait s'inspirer des méthodes utilisées chez les enfants souffrant de surdité congénitale, dont les facultés linguistiques se trouvent grandement améliorées par la familiarisation rapide avec le langage des signes.

«Les traitements devraient se consacrer à cibler et à exploiter les forces de l'enfant autiste, comme le langage écrit», insiste-t-il.

En somme, en montrant que les champs d'intérêt restreints mais fouillés des autistes résultent des processus de plasticité cérébrale, ce modèle laisse penser que ces surfonctionnements ont une valeur adaptative et qu'ils devraient être au cœur des techniques d'intervention pour l'autisme.

Une équipe de chercheurs prolifiques

Laurent Mottron dirige une équipe de chercheurs chevronnés rattachés à quatre universités et réunis au sein du laboratoire des neurosciences cognitives des troubles envahissants du développement, dont les locaux sont situés à l'Hôpital Rivière-des-Prairies.

Ses collègues et lui ont publié plus de 100 études sur l'autisme. On leur attribue, entre autres, la découverte de la notion de surfonctionnements perceptifs, qui sert désormais d'élément de référence dans le domaine de la recherche sur l'autisme.

Les thèmes qui intéressent les chercheurs de ce laboratoire sont variés, allant de la mesure de différents composants de la perception visuelle et de la perception auditive (surtout ceux qui “surfonctionnent”) à l'imagerie par résonance magnétique pour déterminer comment le cerveau autistique s'est réorganisé de manière plastique. Ils étudient également la génétique (les rapports gènes-comportements et gènes-intelligence, notamment) et travaillent à cibler les champs d'intérêt particuliers durant la petite enfance afin d'améliorer les interventions thérapeutiques.

Aussi titulaire de la Chaire Marcel et Rolande Gosselin en neurosciences de la cognition autistique, Laurent Mottron essaie maintenant de transposer les résultats de toutes ces recherches fondamentales en interventions. «Nous souhaitons faire en sorte que les surfonctionnements perceptifs deviennent une voie par laquelle il sera possible de transmettre de l'information et des principes d'éducation aux enfants autistes», conclut-il.

Martin LaSalle

26 novembre 2014

Autisme : Un espoir

article publié dans Sud Ouest

Publié le 24/11/2014 à 06h00 par

Une équipe bordelaise de l’Inserm a mis au jour une molécule qui pourrait limiter les troubles autistiques. Bientôt un médicament en essai clinique.

Autisme : un espoir

Andreas Frick, sa souris et l’équipe des chercheurs neuroscientifiques de l’Inserm Bordeaux du Neurocentre Magendie. © Photo

Photo Philippe Taris

ISABELLE CASTéra

i.castera@sudouest.fr

Une petite souris de labo, noire et vive, porte l'espoir de soigner des milliers d'enfants souffrant de troubles autistiques. La main qui la porte est celle d'Andreas Frick, chercheur neurologue qui dirige une équipe au sein d'une unité Inserm du Neurocentre Magendie à Bordeaux. Forte de résultats incroyablement encourageants sur l'autisme, l'équipe a bénéficié d'une publication dans la célèbre revue « Nature Neuroscience ». Saint-Graal des chercheurs.

Les troubles du spectre autistique touchent en Europe plus de 3 millions de personnes, dont près de 650 000 en France. Parmi ces patients, près de 90 % subissent des problèmes sensoriels, anomalies d'intégrations du toucher, de l'ouïe, de la vision, par exemple, qui induisent des comportements inappropriés, handicapants. Les patients vivent un rapport au monde ordinaire comme une expérience sensorielle agressive. Et deviennent agressifs.

« Il n'existe pas de traitement pharmacologique pour traiter ces symptômes, note Andreas Frick. Déjà, nous avons compris leur origine, il s'agit d'une anomalie dans le cerveau et ce dysfonctionnement concerne d'autres maladies neurodéveloppementales apparentées, comme le syndrome de l'X Fragile. »

Pour réguler l'excitabilité

Au cours de ses travaux de recherche, l'équipe d'Andreas Frick a montré que, dans le cas de souris porteuses du syndrome X Fragile, le néocortex dans le cerveau était hyperexcité en raison d'une altération de deux canaux ioniques. Après avoir observé les symptômes de ce dysfonctionnement comportemental et en avoir détecté les causes physiologiques, les chercheurs ont planché sur un éventuel traitement.

À partir du moment où l'on comprend le mécanisme d'une pathologie, on peut commencer à tenter de la soigner. « Nous avons utilisé une molécule pharmacologique, qui existe déjà, et qui mime le fonctionnement de l'un de ses canaux ioniques, défaillant sur les personnes malades. De fait, nous avons pu constater que l'hyperexcitabilité néocorticale ainsi que les anomalies de l'intégration neuronale ont pu être corrigées grâce à cette molécule. » Ceci chez la souris.

Mélanie Ginger et Guillaume Bony, tous deux neurobiologistes et membres de la même unité Inserm, précisent : « La molécule injectée chez la souris booste les canaux ioniques, qui sont des protéines à la surface des cellules, censées réguler l'excitabilité. Et du coup, les canaux font leur boulot. »

Gagner un temps précieux

La molécule pharmacologique injectée chez les souris porteuses du syndrome X Fragile était connue, parce qu'elle était, jusqu'alors, censée traiter des zones du cerveau touchées après un accident vasculaire cérébral. Mais elle venait de faire l'objet d'une étude clinique sur les AVC, abandonnée par manque d'efficacité.

« La bonne nouvelle, reprend Mélanie Ginger, c'est que l'étude a permis de révéler que cette molécule, qui nous intéresse au plus haut point, n'a pas d'effets indésirables. Du coup, les tests cliniques vont pouvoir démarrer très vite et nous avons gagné un temps précieux. » Ces découvertes présentent un nouvel espoir pour un traitement sur mesure des aspects sensoriels du syndrome de l'X Fragile et des troubles du spectre autistique. En particulier parce que ces traitements pourraient être appliqués à des patients adultes ou adolescents.

« Lorsqu'on pense à un traitement, on imagine toujours qu'il faut commencer dès le plus jeune âge, pour voir des effets positifs se produire, note Andreas Frick. En France, le diagnostic de l'autisme tombe en général autour de 6 ans. Et après ? Si cette molécule fait ses preuves, elle pourra être administrée et être efficace à n'importe quel âge de la vie du patient. »

À ce jour, il n'existe pas vraiment de traitement pour accompagner les personnes autistes.

21 novembre 2014

Autisme : le facteur génétique est une réalité

jeudi 20 novembre 2014, par Gwendal Rouillard.

J’ai visité le mercredi 19 novembre, avec Ségolène Neuville, secrétaire d’Etat aux Personnes handicapées et Daniel Fasquelle, notre co-président du groupe d’études sur l’Autisme, le laboratoire de Génétique Humaine et Fonctions Cognitives de l’Institut Pasteur à Paris. Ce fut une visite instructive et émouvante car nous avons découvert le lieu dans lequel ont été identifiées les mutations fonctionnelles de gènes impliqués dans l’Autisme en 2003, par Thomas Bourgeron, directeur de ce laboratoire.

Cette rencontre a aussi été l’occasion de d’échanger sur les travaux de grande ampleur menés à l’Institut. Des travaux pour comprendre l’Autisme et, pourquoi, il touche certaines familles plus que d’autres et, comment, ces gènes interviennent dans les interactions sociales et la communication entre individus. Etudes de cas, études des gènes de la filiation, c’est une tâche longue et extrêmement précise au quotidien et j’ai toute confiance en Thomas Bourgeron, ses collègues, ses équipes et l’Institut Pasteur pour mener à bien ces travaux et nous aider à comprendre, chaque jour un peu plus, cet handicap cognitif.

Je souhaite que les acteurs concernés par l’Autisme puissent prendre en compte le facteur génétique. C’est une réalité que plus personne ne peut nier. C’est le sens des recommandations de la HAS et de l’ANESM dont l’application déterminent l’avenir des personnes autistes et leurs familles.

12 novembre 2014

Autisme : comment éviter les sens interdits

article publié dans Le Point

Des travaux montrent que les sens sont perturbés chez les enfants souffrant de cette maladie, mais qu'une molécule peut inverser leur comportement.

En France, environ 650 000 personnes souffrent d'autisme ou de maladies apparentées.

En France, environ 650 000 personnes souffrent d'autisme ou de maladies apparentées. © Chris Dunn/AP / SIPA

Un mois après l'annonce, par le président de la République, du respect des engagements financiers pris dans le cadre du Plan autisme 2013/2017 (il prévoit de porter, d'ici à 2017, l'engagement financier supplémentaire à 205,5 millions d'euros par an), une autre bonne nouvelle vient d'être publiée par des chercheurs de l'Inserm. L'équipe dirigée par Andréas Frick, au sein de l'unité 862 Neurocentre Magendie, vient de parvenir à expliquer pourquoi les enfants souffrant de troubles du spectre autistique ont un comportement inapproprié et des réactions parfois violentes. Leurs travaux, publiés dans la revue Nature Neuroscience, ont été réalisés chez la souris. Et ils ouvrent la voie à un possible traitement de ce problème.

En préambule de leur étude, les auteurs rappellent que les troubles du spectre autistique (TSA) touchent plus de 3 millions de personnes dans l'union européenne dont environ 650 000 en France souffrent d'autisme ou de maladies apparentées. "Des estimations récentes du centre pour le contrôle des maladies (aux États-Unis) suggèrent qu'un enfant sur 68 est touché par cette maladie", précisent-ils. "Les TSA sont des troubles neuro-développementaux qui affectent les enfants de toutes origines ethniques et socio-économiques et sont caractérisés par un spectre de symptômes regroupant à la fois des difficultés pour les interactions sociales et la communication, et des comportements répétitifs stéréotypés."

Vers un traitement "sur mesure" ?

Les travaux montrent que, chez les personnes souffrant de ces troubles, les informations en provenance des différents sens - le toucher, l'ouïe, la vision - ou d'autres stimuli ne sont pas intégrées correctement dans le cerveau. Les auteurs expliquent, par exemple, que les simples lumières fluorescentes d'un supermarché peuvent être "une expérience sensorielle aversive", donc extrêmement désagréable. Ils ajoutent que ces altérations sont aussi fréquemment observées dans une maladie neuro-développementale apparentée, le syndrome de l'X fragile. Et ils ont montré chez des souris souffrant de ce syndrome de l'X fragile des anomalies dans la façon dont les informations sensorielles sont traitées par le néocortex (la couche externe des hémisphères cérébraux). Ce dernier est anormalement excité en réponse à des stimulations sensorielles tactiles. Fort heureusement, les chercheurs ont réussi à identifier le mécanisme expliquant cette réponse anormale.

En utilisant une molécule pharmacologique capable de mimer le mécanisme en jeu, ils sont parvenus à combattre cette "hyperexcitabilité néocorticale, ainsi que les anomalies de l'intégration neuronale", annonce le communiqué de l'Inserm. "De plus, ils ont été capables de corriger une conséquence comportementale notamment de l'hypersensibilité aux stimuli sensoriels (les souris saines n'ont pas été affectées par ce traitement)." Grâce à leurs découvertes, il sera peut-être bientôt possible de mettre au point un traitement "sur mesure" des aspects sensoriels du syndrome de l'X fragile et des troubles du spectre autistique. Ces futures thérapies pourraient être proposées aussi bien à des patients jeunes qu'adolescents, voire adultes.

11 novembre 2014

Une piste pour rétablir la bonne intégration des informations sensorielles chez les autistes

10.11.2014 - Communiqué INSERM

Chez les enfants autistes, les informations en provenance des 5 sens : du touché, de l’ouïe, de la vision, ou d’autres stimuli, ne sont pas intégrées correctement dans le cerveau, conduisant à un comportement inapproprié et à des réactions parfois violentes. Des chercheurs de l’Inserm dirigé par Andréas Frick au sein de l’Unité Inserm 862 « Neurocentre Magendie » viennent de comprendre pourquoi en étudiant un modèle de souris mimant la maladie. Ils ont même trouvé une molécule pouvant inverser ces effets et rétablir un comportement « normal » chez ces souris.
Ces résultats sont publiés dans la revue
Nature Neuroscience

cerveau c Fotolia

Les troubles du spectre autistique (TSA) touchent plus de 3 millions de personnes dans l’union européenne dont environ 650 000 en France. Des estimations récentes du Centre pour le contrôle des maladies (aux Etats-Unis) suggèrent qu’un enfant sur 68 est touché par cette maladie. Les TSA sont des troubles neuro-développementaux qui affectent les enfants de toutes origines ethniques et socio-économiques, et sont caractérisés par un spectre de symptômes regroupant à la fois des difficultés pour les interactions sociales et la communication, et des comportements répétitifs stéréotypés.

Un autre aspect fréquent des maladies neuro-développementales est le problème du traitement des informations sensorielles. Près de 90% des enfants avec des TSA sont touchés par différents types de problèmes sensoriels. Les anomalies d’intégration sensorielle proviennent du fait que les informations périphériques, que ce soit du touché, de l’ouïe, de la vision, ou d’autres stimuli, ne sont pas intégrées ou organisées correctement dans le cerveau, conduisant à un comportement inapproprié. De telles anomalies peuvent être extrêmement handicapantes au quotidien pour les personnes atteintes d’autisme et elles posent un défi aux parents et éducateurs. Par exemple, lors d’une sortie au supermarché, de simples lumières fluorescentes peuvent être une expérience sensorielle aversive. Malheureusement, les altérations de l’intégration sensorielle dans ces maladies et leurs traitements pharmacologiques sont peu étudiées, et ceci alors même que ces altérations sont également fréquemment observées dans une maladie neuro-développementale apparentée, à savoir le Syndrome de l’X Fragile.

Dans une étude publiée dans Nature Neuroscience, des chercheurs de l’Inserm (en collaboration avec des chercheurs du CNRS) ont montré que des souris Fragile X présentent des anomalies dans la façon dont les informations sensorielles sont traitées par le néocortex, qui est la partie du cerveau responsable entre autres de la perception sensorielle. Les chercheurs ont montré que le néocortex de ces souris est hyper-excité en réponse à des stimulations sensorielles tactiles. Ils ont ensuite effectué une variété de tests détaillés montrant que cette hyperexcitabilité néocorticale est reliée à la façon dont les neurones de cette région du cerveau intègrent les informations sensorielles. Avec cette étude, les chercheurs ont trouvé que la fonction de certains canaux ioniques (les molécules qui déterminent la façon dont les neurones traitent les signaux électriques) est altérée dans le compartiment dendritique (la structure qui intègre les informations et qui se comporte véritablement comme le « cerveau » des neurones).

En utilisant une molécule pharmacologique mimant le fonctionnement d’un de ces canaux, ils ont pu corriger cette hyperexcitabilité néocorticale ainsi que les anomalies de l’intégration neuronale.

De plus, ils ont aussi été capables de corriger une conséquence comportementale notamment de l’hypersensibilité aux stimuli sensoriels (les souris saines n’ont pas été affectées par ce traitement). Ces découvertes offrent un nouvel espoir pour un traitement sur mesure des aspects sensoriels du Syndrome de l’X Fragile et des troubles du spectre autistique, en particulier car ces traitements pourraient être appliqués à des patients adultes ou adolescents.

8 novembre 2014

Le pape François organise un congrès international sur l'autisme

article publié sur Vivre FM

Vendredi 07 Novembre 2014 - 18h11

Le pape François consacre la vingt-neuvième conférence internationale du Vatican à l’autisme. Durant trois jours, une cinquantaine de chercheurs, personnel soignant etc. vont débattre du « spectre de l’autisme » et des moyens pour y faire face. Que doit-on en attendre ?

En 2013, un enfant autiste était resté au coté de François pendant toute une cérémonie.
En 2013, un enfant autiste était resté au coté de François pendant toute une cérémonie.

Ce congrès mondial sur l’autisme sera organisé par le Vatican du 20 au 22 novembre prochain. Par cette manifestation, le Saint Siège prévoit de réunir différents spécialistes venus du monde entier autour du thème « l’autisme, maladie aux divers visages : engendrer l’espérance ». Le but annoncé est de promouvoir la solidarité et l’intégration des personnes atteintes de l’autisme. Ce sera pour l’Église l’occasion de faire passer le message selon lequel toute approche efficace de cette problématique passe par la compréhension et le respect de la dignité des personnes atteintes : « Il est nécessaire d’entreprendre le chemin de l’intégration dans la communauté, en brisant l’isolement et les barrières dressées par la maladie et le préjugé, en ressoudant les relations interpersonnelles... », explique Mgr. Sygmunt Zimoski, président du conseil pontifical pour les services de santé. Cette manifestation, du reste, entre dans la logique de l’action pontificale du pape François, orientée vers la défense des plus faibles.

L’autisme est un trouble envahissant du développement qui affecte les fonctions cérébrales et dure tout au long de la vie. On estime qu’une personne sur 150 en est aujourd’hui atteinte dans le monde. 

Rédaction

4 novembre 2014

La flore intestinale : un médicament d'avenir ?

Le microbiote intestinal (ou flore intestinale) est un ensemble important de milliards de bactéries dont la composition exacte, qui varie en fonction de l’individu et de l’âge, est difficile à déterminer avec précision du fait de sa complexité et l’insuffisance des méthodes actuelles existantes. Ce supra-organisme est en constante relation avec l’organisme hôte, de véritables dialogues s’installent entre les bactéries et les cellules, dialogues qui concernent notamment la production de mucus, la trophicité et le renouvellement de l’épithélium cellulaire, l’éducation et la stimulation du système immunitaire, le comportement via un axe maintenant bien reconnu « microbiote intestinal-cerveau », et aussi la régulation de la pression sanguine. On comprend dès lors qu’un déséquilibre, quelle qu’en soit la raison, puisse déréguler le système et provoquer potentiellement des pathologies. C’est ce qu’on observe dans les colites à Clostridium difficile, qui apparaissent après un traitement antibiotique. Des dysbioses ont également été décrites dans les maladies allergiques, les maladies inflammatoires de l’intestin (maladie de Crohn, rectocolite hémorragique), l’obésité, le syndrome métabolique, le diabète et les complications cardiovasculaires associées et même l’autisme. Le transfert du microbiote intestinal d’un sujet sain à un patient porteur d’une de ces maladies paraît une solution attractive à condition d’obtenir une preuve de l’efficacité de ce transfert ainsi qu’une balance bénéfice-risque favorable, laquelle dépend du receveur comme du donneur. Ce type de thérapeutique est connu depuis longtemps puisque le premier transfert publié pour traiter la colite pseudomembraneuse à C. difficile date de 1958 mais il était tombé en désuétude avec l’avènement des antibiotiques. Les derniers essais cliniques publiés ont montré l’innocuité du procédé avec aucun accident à déplorer. Son transfert du donneur au receveur vise, grâce au rééquilibrage de la biodiversité, à restaurer un dialogue rompu. Il apparaît ainsi être un médicament dont on pressent le potentiel dans nombre d’indications. Cependant le microbiote intestinal reste un ensemble d’éléments d’une grande complexité qui varie dans le temps et selon les sujets. Il reste donc à en déterminer le statut réglementaire et à en valider l’usage selon les indications, les modes de préparation et d’administration, afin d’écarter les risques (inhérents à sa production humaine) pour les patients bénéficiaires. Dr Christophe Bazin 30/10/2014
1 novembre 2014

Autisme : les espoirs que va permettre l'identification de 100 nouveaux gènes liés à la maladie

article publié dans Atlantico

Un trouble mieux cerné

Publié le 31 Octobre 2014
Selon une étude américaine publiée récemment, une centaine de gènes seraient impliqués dans les troubles autistiques, contre 9 comme nous le pensions jusqu'alors. Un résultat qui permet de mieux en comprendre les origines de la maladie et qui ravive l'espoir d'une thérapie.

Autisme : les espoirs que va permettre l’identification de 100 nouveaux gènes liés à la maladie

Le nombre de gènes directement impliqués dans le développement de l'autisme serait de 33. Crédit Reuters

Atlantico : Une récente étude publiée dans la revue scientifique Nature estime que le nombre de gènes directement impliqués dans le développement de l'autisme serait de 33, contre 9 identifiés jusqu'alors et plus d'une centaine de gènes pourraient être concernés. Au final combien de gènes peuvent directement ou indirectement être impliqué dans le développement de l'autisme ?

Pierre Roubertoux : Il me semble important premièrement de définir l'autisme. C'est le docteur Leo Kanner qui en 1943, travaillait comme a le premier décrit un ensemble de traits communs à des enfants, dont l'impossibilité d'attachement, caractéristique principale de l'autisme.

Dans les années 2010/2012, un changement s'est produit grâce au DSM (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux ndlr). L'échelle de diagnostic psychiatrique définit à partir de ce manuel l'autisme en deux caractéristiques :

- Un champ d'intérêt limité, des stéréotypies et des répétitions de mouvements et de paroles

- Une incapacité d'établir des relations sociales.

Associé au DSM, nous avons pu identifier une foultitude de maladie. Certains disent qu'il y aurait 300 gènes associés à l'autisme. Je dirais 120 bien qu'il soit probable que cela augmente.

On trouve aujourd'hui de nombreuses maladies rares -près d'une centaine- qui présentent ces deux caractéristiques autistiques. Ce qu'elles ont toutes en commun c'est une anomalie de la transmission synaptique.

Par ailleurs les gènes identifiés ne signifient pas que les personnes qui possèdent ces mutations vont être autistes. Cela signifie uniquement que les personnes qui ont ce gène présentent des risques d'autisme plus importants. L'avantage de cette définition du DSM est importante car il fait sauter les caractéristiques de l'autisme que l'on trouvait chez certains enfants et pas les autres : comme celle de déficit intellectuel. Cette affaire a aujourd'hui disparu.

Que sait-on aujourd'hui du lien entre l'autisme et la génétique ? Quels pourraient-être les autres facteurs responsables de l'autisme ?

L'autisme, je suis désolé pour certains psychiatres, mais pour les généticiens et pour la quasi majorité des psychiatres hors de France, c'est une maladie de la synapse et donc génétique ou épi-génétique. Il y a des facteurs d'environnement qui peuvent accentuer les facteurs génétiques : des facteurs chimiques, infectieux. Ce n'est pas la relation à la mère dont parlaient certaines disciplines !  Pendant 80 ans la psychiatrie psychanalytique n'est arrivée à rien.

Qu'est-ce que ces avancées génétiques permettent en termes de compréhension de ce trouble ? Cela pourra-t-il mener à une meilleure prise en charge ?

Si vous considérez des maladies très rares, la maladie de Joubert affecte une douzaine d'enfants en France. Dans cette maladie, dans ces 10 cas, trois ou 4 sont autistes. En traitant cette maladie, on espère pourvoir avancer sur l'autisme. On est passé de l'idée qu'il y a une entité "autiste", avec des caractéristiques homogènes, à l'idée qu'on est face à quelque chose de très hétérogène. En réalité ce sont des maladies très différentes les unes des autres, Et si on traite une maladie rare concernée par des traits autistiques, on avance sur les gènes responsables potentiellement responsables des caractéristiques autistiques. Et on les aura un par un ! Il y a une cinquantaine d'années nous pensions également que la myopathie était une seule et même maladie.

Pierre Roubertoux

 

Pierre Roubertoux est professeur de génétique et de neurosciences à Marseille. Il a créé et dirigé le laboratoire "Génétique, neurogénétique, comportement" du CNRS et a travaillé au laboratoire "Génomique fonctionnelle, comportements et pathologies" du CNRS, à Marseille. Il mène aujourd'hui ses recherches au sein du laboratoire de génétique médicale de l'Inserm.  Ses travaux sur la découverte de gènes liés à des comportements lui ont valu le prix Theodosius Dobzhansky, aux États-Unis.

Voir la bio en entier

30 octobre 2014

Autismes et psychanalyses - Evolution des pratiques recherches et articulations

Avant-propos : si par ouverture on entend récupération pour maintenir un système en place ... c'est en gros de cela qu'il s'agit.

Les familles demandent un système qui permette aux enfants d'avancer et aux adultes de continuer à progresser & maintenir les acquis.

50 ans de retard et en 2014 nous avons toujours des équipes qui dissertent et propagent les théories psychanalytiques alors même que la HAS (Haute Autorité de Santé) a pris clairement position sur le sujet

50 ans que les familles pateaugent comme leur enfants !

A mon sens une seule lecture est maintenant recommandée :

recommandations anesm

 

 

 

 

 

 

A qui s'adresse la Recommandation de l'ANESM ?

"Elle s’adresse principalement aux professionnels de santé et à ceux des établissements et services médico-sociaux en contact direct avec des enfants et adolescents ayant un trouble envahissant du développement, qui prennent des décisions concernant leur suivi et leur accompagnement." cf site du Gouvernement

Où sont les publications dans des revues internationales de ces brillants auteurs ?

Merci de m'éclairer sur ce dernier point

Jean-Jacques Dupuis

article publié sur handicap.fr

 Résumé : Evolution des pratiques, recherches et articulations


Par Marie Dominique Amy  Dans le contexte politique actuel, qui dénie au psychisme toute participation aux difficultés autistiques, les auteurs réunis par la CIPPA rendent compte de leur pratique clinique, institutionnelle et de leurs recherches auprès d'enfants autistes et de leur famille.

Cet ouvrage ne cherche pas pour autant à être exclusivement une « défense et illustration de la psychanalyse ». Au contraire, il se situe constamment dans une perspective d'ouverture et de jonction avec les disciplines cognitives et les recherches scientifiques qui sont à y associer. À l'orée des restrictions théorico-cliniques mises en perspective par le 3e plan autisme (2013/2017), il défend la richesse des complémentarités et des atouts que proposent, dans le respect d'un cadre consensuel, l'imagination, la créativité, le plaisir partagé et les vertus essentielles d'une observation fine et continue. S'inscrivant dans un partenariat constant avec les parents, il se désolidarise complètement d'une psychanalyse qui accuse ou met à distance toute articulation avec le milieu familial.

Les auteurs :

Co-Auteurs : Pascale AMBROISE - Anne BRUN - Graciela c. CRESPIN - Pierre DELION - Bruno GEPNER - Bernard GOLSE - Genevieve HAAG - Jacques HOCHMANN - Didier HOUZEL - Fabien JOLY - Marie-christine LAZNIK -Anne yvonne LENFANT - Chantal LHEUREUX-DAVIDSE - Lisa OUSS-RYNGAERT - Helene SUAREZ-LABAT - Monique THURIN - Jean-michel THURIN -

Sous la coordination de Marie Dominique Amy : psychologue clinicienne, psychanaliste, présidente de la CIPPA (Coordination Internationale de Psychotérapeutes Pyschalanystes et membres associés s'occupant de personnes avec autisme)

24 octobre 2014

AUTISME : Chrome, styrène, cyanure ... dans l'air, ils font monter le risque

article publié dans Santé Log

American Association for Aerosol Research

Le risque de troubles du spectre autistique (TSA) est à nouveau associé à l’exposition, in utero et dans les premières années de vie, à des niveaux plus élevés dans l'air de certaines substances toxiques, comme le chrome et le styrène. Ces résultats préliminaires d’une enquête menée à l'Université de Pittsburgh (Pennsylvanie), viennent d’être présentés à la 33è Conférence de l’American Association for Aerosol Research.

 

Alors que la prévalence des troubles du spectre autistique augmente de façon spectaculaire, ses causes, multiples, restent encore mal comprises. En particulier, peu d'études ont porté sur ses causes environnementales. Le Pr Evelyn Talbott, professeur d’épidémiologie à l’Université de Pittsburghont mené cette étude auprès de familles avec et sans TSA pour identifier ces liens entre l'augmentation des niveaux de chrome et de styrène et le risque de TSA.

 

La qualité de l'air fait donc partie des facteurs influents sur le risque, confirment les auteurs qui ont interrogé 217 familles d'enfants atteints de TSA et ont comparé les données d’exposition avec celles provenant de échantillons de familles avec enfants sans TSA nés au cours de la même période.

L'étude comportait ainsi 2 groupes de contrôle, qui ont permis une comparaison fine des toxiques de l'air à proximité des résidences des enfants avec et sans TSA. Cette comparaison a été réalisée sur la base de l’indice national d'évaluation des substances toxiques atmosphériques qui couvre au total plus de 30 polluants déjà connus pour entrainer des perturbations du système endocrinien ou des troubles du développement neurologique.

Sur la base de l'exposition de l'enfant à ces concentrations de polluants toxiques pendant la grossesse de la mère et les 2 premières années de vie, l’analyse constate que,

les enfants les plus fortement exposés au styrène et au chrome ont un risque multiplié de 1,4 (+40%) à 4 de TSA, après prise en compte de l'âge et du tabagisme maternel, l’ethnie et l'éducation.

d'autres composés toxiques apparaissent également associés à un risque accru, dont le cyanure, le chlorure de méthylène, le méthanol et l'arsenic, des composés fréquemment identifiés dans l’air combinés les uns avec les autres.

 

  • ·         Le styrène est utilisé dans la production de matières plastiques et de peintures, mais est également l'un des produits de la combustion de l'essence.
  • ·         Le chrome présent dans l'air est généralement un résidu de processus industriels ou un déchet de centrales électriques.
  • ·         Le cyanure, le chlorure de méthylène, le méthanol et l'arsenic peuvent également être trouvés dans les gaz d'échappement.

Ces résultats viennent s'ajouter au nombre croissant de preuves associant certaines expositions environnementales, comme la pollution de l'air, au risque de TSA.

 

Source: American Association for Aerosol Research viaUniversity of Pittsburgh Schools of the Health Sciences Association between air toxics and childhood autism

21 octobre 2014

Vidéo ADN : prévenir et guérir - extrait JT France 2 du 20 octobre 2014

Publié sur le site de France tv info

En dix ans, le coût pour analyser l’ADN a considérablement baissé. C’est une révolution car le génome peut renseigner sur beaucoup de maladies et changer des vies.

(France 2)

En Californie, un test complet du génome totalement inédit a pu changer la vie d’une fillette américaine. Pendant dix ans, aucun spécialiste n’a été capable d’expliquer l’état presque végétatif de Shelby. Sa maladie ne portait pas de nom mais l’empêchait de parler et de marcher.

"On a vu des médecins, des généticiens, mais la première fois qu’on a eu une réponse, c’est quand on a fait décoder son génome", explique Renée Valint, la mère de Shelby. Depuis, la jeune fille est passée de son fauteuil à une pratique régulière de la danse. Ce sont les analyses qui ont permis de trouver un traitement adapté à Shelby.

Un décodage intégral et précis


Cette nouvelle génération de test a vu le jour dans des laboratoires à San Diego en Californie. Elle permet un décodage intégral et précis du patrimoine génétique. Ce qui était encore inabordable il y a une décennie.

11 octobre 2014

Spectre de l'autisme, causes moléculaires communes - McGill University

article publié sur le site de LOCAMIN

11 10 2014

https://aoc.mcgill.ca/channels/fr/news/spectre-de-l%E2%80%99autisme-causes-moleculaires-communes-239436

La mise au jour de caractéristiques dans diverses anomalies génétiques liées à l’autisme pourrait mener à des démarches thérapeutiques semblables.

Les troubles du développement neural tels que la déficience intellectuelle et les troubles du spectre de l’autisme (TSA) peuvent avoir de profondes répercussions sur l’apprentissage et la mémoire, toute la vie durant. On ne sait cependant que peu de choses sur les voies moléculaires précises responsables de ces troubles.

Une équipe de chercheurs de l’Université McGill dirigée par le professeur de psychiatrie Carl Ernst a découvert que des mutations génétiques différentes, mais toutes responsables de TSA, ont des effets moléculaires semblables sur les cellules. Cette constatation permet de penser que des démarches thérapeutiques semblables pourraient être efficaces contre diverses affections allant du trouble convulsif à la déficience intellectuelle. Les découvertes des chercheurs seront publiées dans le numéro de novembre de l’American Journal of Human Genetics.

« Il est rare que les TSA soient liés à une mutation génétique en particulier, et c’est pourquoi la conception d’options de traitement est inefficace, de dire le professeur Ernst, qui est également chercheur au Centre de recherche de l’Institut Douglas. Un grand nombre de mutations génétiques ont été liées aux TSA, mais chacune de ces mutations est rare en soi. Quand les grandes voies communes à ces troubles seront pleinement définies, on pourra les cibler en vue de trouver des options de traitement applicables au plus grand nombre de patients possible.

Modélisation de l’autisme sur cellules souches humaines génétiquement modifiées Afin de vérifier la convergence de diverses formes de TSA, l’équipe du professeur Ernst a conçu deux modèles de syndromes génétiques liés à l’autisme sur cellules fœtales de cerveau humain. Ces modèles comportaient des mutations du gène TCF4 (codant pour un facteur de transcription ubiquitaire) responsable du syndrome de Pitt-Hopkins caractérisé par un retard mental et des troubles psychiatriques, et du gène EHMT1 (codant pour l’histone-méthyltransferase euchromatique 1) mis en cause dans le syndrome de Kleefstra. Environ 60 % des manifestations cliniques de ces deux syndromes sont les mêmes, dont les troubles du comportement, le retard mental et les anomalies faciales.

Retrouvez l’intégralité de l’article sur le lien suivant: https://aoc.mcgill.ca/channels/fr/news/spectre-de-l%E2%80%99autisme-causes-moleculaires-communes-239436

6 octobre 2014

L'autisme, une autre forme d'intelligence ?

article publié dans Les Echos

Yann Verdo / Journaliste | Le 06/10 à 06:00

Le haut degré de rigueur et de précision des autistes est un atout qui peut être apprécié dans certains secteurs d'activité, comme l'informatique. - Photo BSIP-AFP

Et si l'autisme n'était pas une déficience, mais une différence ? C'est ce que soutient un courant de pensée né aux Etats-Unis et encore méconnu en France : la « neurodiversité ».

Docteur honoris causa de l'université de Montréal, la chercheuse canadienne Michelle Dawson est une spécialiste mondialement reconnue de l'autisme. Ses dix années de recherche sur le sujet l'ont convaincue qu'il fallait complètement changer notre regard sur ce trouble du développement dont la prévalence ne cesse de s'accroître d'année en année (lire ci-dessous). Malgré leurs difficultés à interagir et à communiquer, malgré leurs comportements répétitifs, les autistes, affirme Michelle Dawson, ne sont pas des versions défectueuses de monsieur et madame Tout-le-Monde. Leur fonctionnement mental n'est pas déficient, mais différent. Et leur potentiel, bien trop souvent inexploité. Michelle Dawson est bien placée pour le savoir. Avant de rejoindre en 2004 le département de psychiatrie de l'université de Montréal à la demande de Laurent Mottron, ponte canadien de l'autisme qui avait su déceler chez elle des qualités exceptionnelles, elle travaillait comme simple employée des Postes canadiennes. Autiste elle-même, elle aurait pu végéter toute sa vie dans cette position subalterne.

Neurodiversité

L'approche qu'ont Laurent Mottron et Michelle Dawson de l'autisme s'inscrit dans un courant de pensée né aux Etats-Unis dans les années 1990, mais resté peu étudié par la communauté scientifique : la « neurodiversité ». Les promoteurs de ce concept bataillent pour que l'autisme ne soit plus défini par rapport au fonctionnement cognitif de la majorité - ces individus dits « normaux », qu'eux préfèrent appeler les « neurotypiques ». Cette comparaison, argumentent-ils, ne fait ressortir que les caractéristiques négatives de l'autisme, telles que le défaut de langage ou le caractère restreint des centres d'intérêt, et laisse dans l'ombre d'autres traits tout aussi caractéristiques, mais ceux-là positifs : les compétences et même les hypercompétences propres aux autistes, trop souvent ignorées. Pour les partisans de la neurodiversité, l'autisme constitue non pas une maladie mentale mais une autre forme de cognition humaine, une autre forme d'intelligence.

Une autre forme d'intelligence ? A première vue, cela paraît relativement facile à admettre s'agissant de ces autistes de haut niveau, aux dons parfois exceptionnels (calculateur prodige, polyglotte prodige…), que sont les porteurs du syndrome d'Asperger, à l'instar de l'Anglais Daniel Tammett, auteur du best-seller « Je suis né un jour bleu ». Mais les tenants de la neurodiversité vont beaucoup plus loin, en soulignant que ce concept s'applique à tous les autistes et tous les autismes. Même aux cas les plus sévères, lorsque l'enfant se révèle en grandissant incapable d'apprendre à parler et que les tests standards de quotient intellectuel font apparaître un score largement inférieur à 70, seuil en deçà duquel le sujet est considéré comme retardé intellectuellement.

La littérature scientifique sur l'autisme indique que, si l'on appliquait les tests standards de QI à l'ensemble des autistes, 75 % d'entre eux obtiendraient un score inférieur à ce seuil et seraient donc étiquetés « retardés mentaux ». Mais, pour Laurent Mottron et Michelle Dawson, ce résultat ne prouve qu'une chose : que ces tests standards, conçus par des neurotypiques pour des neurotypiques, ne sont pas adaptés aux autistes.

Les tests de QI courants, dérivés de l'échelle WAIS (« Wechsler adult intelligence scale »), font une large part à l'expression verbale, qui est la principale pierre d'achoppement à laquelle se heurtent les autistes. Mais il existe d'autres tests, plus adaptés. Comme la matrice de Raven, développée à l'origine par l'armée britannique pour recruter ses futurs pilotes de chasse sur la base de l'intelligence pure, c'est-à-dire en gommant le plus possible l'impact de l'environnement socioculturel. « En mesurant l'intelligence des autistes à l'aide de la matrice de Raven, qui ne fait pas appel à la parole ni à la culture générale, on obtient des scores bien plus proches de la moyenne de la population », indique la chercheuse en sciences cognitives et spécialiste de l'autisme Fabienne Cazalis.

Hyperperceptifs

Si l'imagerie a montré qu'il existait une base cérébrale à la spécificité de la cognition des autistes (lire ci-dessous), des expériences ont également été faites pour mieux caractériser ce fonctionnement particulier. « Les autistes sont des hyperperceptifs. Ils perçoivent dans leur environnement beaucoup plus de détails que nous, ce qui fait qu'ils sont continuellement assaillis par une masse d'informations sensorielles supérieure à celle que nous recevons et devons traiter », explique Fabienne Cazalis.

Cet afflux permanent, qui leur complique la vie au quotidien, développe leur capacité à traiter de l'information en situation de surcharge attentionnelle. Cela a été établi par l'Anglaise Nilli Lavie, de l'University College London. Ses expériences ont montré que, confrontés à un nombre croissant d'éléments à surveiller simultanément, les autistes arrivent à saturation moins vite que les neurotypiques. Un atout majeur dans le monde du travail !

Et ce n'est pas le seul. Les activités et centres d'intérêt restreints, stéréotypés et répétitifs des autistes ont un corollaire positif qui est leur haut degré de rigueur et de précision dans l'exécution. Ces deux qualités sont particulièrement appréciables dans certains secteurs d'activité, à commencer par l'informatique. Quelques grandes entreprises l'ont bien compris, comme SAP qui réserve depuis quelques années des postes d'informaticien à des autistes, quitte à aménager un peu leur environnement de travail. Mais ces exemples de discrimination positive sont encore trop rares.

Outre l'informatique, un autre secteur dans lequel le profil cognitif des autistes offre un potentiel intéressant est… la recherche. Le cas de Michelle Dawson en est l'illustration. Cette fois, plus que leur rigueur et leur précision, c'est une autre spécificité de la cognition des autistes qui entre principalement en jeu : leur facilité à détecter dans une grande masse de données des similarités, des régularités, ce que l'on appelle parfois des « patterns ». « Les autistes sont davantage capables que nous de repérer de telles similarités à différents niveaux d'analyse. Leur mode de raisonnement s'apparente un peu à la géométrie fractale, où une même structure se répète à différentes échelles », explique Fabienne Cazalis.

Mais, s'empresse d'ajouter la chercheuse, si ces atouts sont réels, attention toutefois à ne pas enjoliver le tableau : pour les autistes, surtout ceux dits de « bas niveau », qui n'ont pas réussi à acquérir le langage parlé (mais qui, très souvent, n'en savent pas moins lire et écrire), la vie reste un parcours semé d'embûches. « Ce n'est pas parce qu'on reconnaît aux autistes une intelligence différente et des compétences particulières qu'il faut cesser de considérer l'autisme comme un handicap, nécessitant prise en charge adaptée et aides financières. »

Yann Verdo
Un trouble de plus en plus répandu

Conséquence d'un meilleur diagnostic, mais sans doute aussi de facteurs environnementaux (tels que les pesticides ou les particules fines, qui augmentent le risque pour une femme enceinte d'avoir un enfant autiste), la proportion d'individus concernés par ce trouble du développement augmente régulièrement depuis vingt ans.
Aux Etats-Unis, selon les derniers chiffres des Centers for Disease Control, le taux de prévalence serait passé de 1 sur 150 en 2000 à 1 sur 68 en 2010.
Pour la France, la Haute Autorité de la santé retient le chiffre de 1 nouveau-né sur 150 concerné par l'autisme. Mais les spécialistes estiment ce taux largement sous-estimé.
En France, 80 % des enfants autistes ne sont pas scolarisés. En septembre dernier, ce sont plus de 4.000 enfants de 3 ans qui n'ont pas pu intégrer l'école maternelle.



13 septembre 2014

Un premier Salon de l'autisme

Marie-Ève Rompré Les deux co-fondatrices du Salon de l’autisme, Johanne Leduc (à gauche) et Sylvie Le Guerrier (à droite).

Le tout premier salon consacré à l’autisme aura lieu du 3 au 5 octobre au Cosmodôme de Laval. Il était temps que le monde qui gravite autour de l’autisme se rassemble, estime Johanne Leduc, mère de deux enfants autistes et co-fondatrice de l’événement.

Pourquoi avait-on besoin d’un salon de l’autisme?
Par expérience, je sais que les parents courent toujours à droite et à gauche pour trouver de l’information sur les services, les traitements, les professionnels de la santé et tout ce qui concerne le trouble de leur enfant. Là, on va avoir un endroit où tout le monde se rencontre et se rejoint pour parler de l’autisme. Les chercheurs, par exemple, vont pouvoir partager le résultat de leurs recherches et recruter des participants. J’aurais voulu qu’un tel salon existe, mais puisque ce n’était pas le cas, j’ai dû l’organiser moi-même avec ma collègue Sylvie Le Guerrier.

Quelles activités le salon va-t-il offrir?
Nous présenterons 33 conférences. Les sujets seront, par exemple, la sexualité chez les autistes, le stress parental et le rôle des applications pour iPads ciblant les autistes. Le samedi, tous les conférenciers sont des personnes autistes. Il y aura des ateliers et des conférences de thérapie par l’art, de la musique et une projection d’un documentaire. Aussi, 95 organismes et entreprises tiendront des kiosques d’information. Plusieurs camps de jour seront présents, tout comme des commissions scolaires, des cliniques de santé et des compagnies qui offrent des produits spécialisés.

18000

Il y aurait environ 18 000 cas d’autisme au Québec, dont 8000 à Montréal, selon Autisme Montréal.

Combien attendez-vous de personnes?
On espère recevoir la visite de 1000 personnes par jour. Environ 900 personnes se sont déjà inscrites pour les conférences et plusieurs hôtels des environs affichent presque complet. On a aussi énormément de bénévoles. Les enfants sont les bienvenus, mais il n’y aura pas beaucoup d’animation à leur attention. Un des deux parents pourrait aller au musée du Cosmodôme avec leur enfant pendant que l’autre assiste à des conférences.

11 septembre 2014

autisme : L'hormone oestrogène explique le sexe-ratio

cerveau

Molecular Autism

Pourquoi plus d'hommes sont atteints d’autisme? La réponse pourrait être dans l’hormone sexuelle œstrogène -qui contribue aussi à protéger les femmes de l’AVC. Cette étude de chercheurs de l'Université de Géorgie Regents sur le rôle de l'hormone féminine dans l'autisme, montre, en effet, que l’expression des récepteurs d'œstrogènes bêta est réduite de façon significative dans les cerveaux des patients autistes. Or ce récepteur joue également un rôle dans la motricité, le comportement, l'anxiété, la dépression, la mémoire et l'apprentissage...

 

5 fois plus d'hommes que de femmes autistes, c’est la constatation immédiate que fera chaque psychiatre clinicien, relève l’auteur de l’étude, le Dr Anilkumar Pillai, neuroscientifique au Medical College of Georgia.

 

La réponse à ce sexe-ratio pouvait donc avoir un lien avec l’estrogène, une hormone déjà connue pour protéger les femmes pré-ménopausées du risque d’AVC et de troubles cognitifs. D’autre part, de précédentes études avaient déjà lié des niveaux élevés de l'hormone mâle testostérone, au cours du développement précoce, au risque d'autisme. L'hypothèse de la testostérone est déjà là, cette étude a regardé la responsabilité de l’hormone œstrogène.

En analysant le tissu cérébral du cortex préfontal de cerveaux d’enfants décédés, avec et sans troubles du spectre autistique (TSA), les chercheurs constatent, chez les premiers, une diminution de 35% des niveaux de récepteur des œstrogènes bêta et une réduction de 38% d’une enzyme, l'aromatase, qui transforme la testostérone en œstrogènes. Des résultats qui suggèrent que les enfants atteints d'autisme n'ont pas un niveau d’expression suffisant des récepteurs bêta des œstrogènes pour bénéficier des effets neuro-protecteurs de l’hormone.

 

La recherche sur la piste des hormones sexuelles : Des études sur la souris sont déjà en cours pour évaluer les effets d’une réduction de l’expression de ces récepteurs de l'œstrogène ou, a contrario d’une augmentation de la fonction du récepteur. Alors que de précédentes études dont une publiée dans la revue Molecular Psychiatry par des scientifiques de l'Université de Cambridge ont montré que les enfants de sexe masculin qui développent l'autisme ont été exposés à des niveaux plus élevés d'hormones stéroïdes, dont la testostérone et la progestérone, d’autres études de suivi sont planifiées pour étudier l'expression des niveaux de récepteurs de la testostérone chez les enfants autistes vs en bonne santé.

 

Source: Molecular Autism via Eurekalert (AAAS) Estrogen receptor expression may help explain why more males have autism

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