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"Au bonheur d'Elise"
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24 août 2017

Respecter les droits de l'homme des personnes ayant des déficiences psychosociales ou intellectuelles ...

Le carnet des droits de l'homme

Respecter les droits de l'homme des personnes ayant des déficiences psychosociales ou intellectuelles : une obligation qui n’est pas encore pleinement comprise

Strasbourg 24/08/2017
Respecter les droits de l'homme des personnes ayant des déficiences psychosociales ou intellectuelles : une obligation qui n’est pas encore pleinement comprise

Les droits de l’homme des personnes handicapées figurent parmi les thèmes auxquels je me suis intéressé le plus souvent dans le cadre de mes visites dans les États membres. Les problèmes les plus fréquents que j’ai ainsi observés concernaient le droit de vivre dans la société et la désinstitutionalisation, le droit à la capacité juridique et le droit à une éducation inclusive. Une part considérable de mon travail en la matière a été consacrée aux droits des personnes présentant des déficiences psychosociales ou intellectuelles, qui forment un groupe social particulièrement vulnérable et marginalisé.

Dans tous ces domaines, la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (ci-après « la CDPH »), adoptée en 2006, est un instrument précieux car elle incarne le changement de paradigme qui doit intervenir en ce qui concerne les attitudes à l’égard des personnes handicapées et la conception du handicap, et sans lequel les droits de ces personnes ne peuvent pas être protégés efficacement. Ce changement de paradigme consiste à passer du modèle médical du handicap au modèle social, c'est-à-dire à ne plus considérer les personnes handicapées comme faisant l’objet de charité et de traitements médicaux, mais comme étant des sujets actifs, qui ont les mêmes droits que les autres personnes et sont capables de prendre leurs propres décisions et d’apporter leur contribution à la vie de la société.

Il est encourageant de constater que l’immense majorité des États membres du Conseil de l'Europe (tous, à l’exception de l’Irlande et de Monaco), ainsi que l’UE, ont ratifié la CDPH et que de nombreux États ont aussi ratifié son Protocole facultatif, qui établit un mécanisme permettant la présentation de communications par des particuliers (ou groupes de particuliers) qui s’estiment victimes de violations de la Convention. Toutefois, après avoir examiné ces questions sur le terrain pendant cinq ans, je suis convaincu que nombre d’États membres du Conseil de l'Europe sont encore loin d’avoir intégré le changement de paradigme auquel ils ont souscrit en ratifiant la CDPH. Dans l’ensemble, dans tous les domaines susmentionnés, leur priorité a en effet été d’ajuster les systèmes existants, qui sont fondamentalement incompatibles avec la CDPH, au lieu de les refondre entièrement. Nos sociétés semblent toujours considérer que certaines personnes sont mieux en institution ou qu’elles ont des déficiences qui les empêchent tout simplement de faire des choix qui ont des répercussions sur leur vie ou de bénéficier d’une éducation décente, avec leurs pairs non handicapés. C’est cette attitude que nous devons faire changer pour que puisse s’opérer la transformation nécessaire.

Le droit de vivre dans la société et la désinstitutionalisation

L’article 19 de la CDPH précise que toutes les personnes handicapées ont le droit de « vivre dans la société, avec la même liberté de choix que les autres personnes » et impose aux États l’obligation de faciliter aux personnes handicapées la pleine jouissance de ce droit ainsi que leur pleine intégration et participation à la société.

Les institutions spéciales pour personnes handicapées sont les symboles de la violation la plus grave de ce droit : elles créent des environnements où les risques de négligence, de violence et d’abus sont élevés, comme je l’ai souligné dans le cadre de mon travail concernant la Bulgarie et la Roumanie ; de plus, elles cachent les personnes handicapées au reste de la population, ce qui a pour effet de renforcer les préjugés de la société contre ces personnes. J’ai appelé régulièrement les États membres du Conseil de l'Europe à cesser de placer des personnes en institution et à établir des programmes de transition, qui permettent de passer progressivement des institutions à des dispositifs fondés sur des services de proximité. Cependant, de grands établissements, dont les pensionnaires vivent à l’écart de la société, restent en service un peu partout en Europe. Certains pays européens continuent de rénover des institutions, voire d’en construire de nouvelles, parfois même avec l’aide de fonds structurels de l’Union européenne ; ce serait le cas en Bulgarie, en Hongrie, en Lituanie et en Roumanie. Les efforts de désinstitutionalisation peuvent aussi être interrompus ou remis en cause par des mesures d’austérité, comme cela a été observé en Espagne, où les coupes budgétaires ont considérablement entravé la prestation de services de proximité.

Même si de modestes progrès ont été enregistrés dans certains pays en matière de développement de services de proximité, le processus de désinstitutionalisation est extrêmement lent et connaît de nombreux revers. Une tendance inquiétante que j’ai observée à cet égard est le remplacement de grandes institutions par des structures plus petites, dont j’ai rendu compte dans mes rapports sur la Bulgarie, le Danemark et la Hongrie. Ces structures offrent parfois des conditions de vie matérielles d’un niveau élevé, mais elles ne permettent pas à leurs pensionnaires de prendre leur vie en mains ni d’avoir de véritables contacts avec d’autres personnes et le monde extérieur, comme l’exige l’article 19 de la CDPH.

Capacité juridique

Les régimes de capacité juridique déterminent la possibilité d’avoir la maîtrise de sa propre vie, notion qui est au cœur même de la CDPH. Nombre de personnes sont privées de leur capacité juridique en raison d’une déficience intellectuelle ou psychosociale, et sont donc privées de leur droit fondamental de prendre des décisions. C’est un domaine où l’actuel manque de progrès s’explique dans une large mesure par des résistances psychologiques, celles des responsables politiques, mais aussi des professions juridiques et médicales.

Lors de mes visites dans les pays européens, j’ai constaté que beaucoup, dont le Danemark, la Hongrie et la Roumanie, étaient dotés de lois prévoyant la prise de décisions par des tiers, y compris des régimes de tutelle complète, qui privent entièrement la personne concernée de la liberté de prendre des décisions sur tous les aspects importants de sa vie : par exemple, le droit de fonder une famille (mariage et droits parentaux), le droit à l’intégrité personnelle (qui englobe la question du consentement à un traitement médical), les aspects contractuels et le droit au travail. À cet égard, il est particulièrement préoccupant de noter que, dans certains pays, les personnes soumises à un régime de tutelle complète sont automatiquement privées de leur droit de vote, au mépris manifeste de la CDPH, mais aussi de la recommandation de 2011 du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe sur la participation des personnes handicapées à la vie politique et publique.

En outre, les procédures limitant la capacité juridique ne sont pas souvent assorties de garanties appropriées et, lorsque ces garanties sont prévues, elles ne sont pas appliquées. Par exemple, le droit d’être entendu avant d’être placé sous tutelle peut ne pas être prévu par certaines lois nationales ou ne pas être respecté en pratique. De manière analogue, certains systèmes ne comprennent pas de contrôles juridictionnels automatiques et périodiques de la décision de priver une personne de sa capacité juridique, ou sont dépourvus de protections suffisantes contre les conflits entre les intérêts de la personne sous tutelle et ceux de son tuteur et contre une influence indue ou une exploitation de la part du tuteur.

J’ai salué la dynamique à l’œuvre dans certains pays, dont l’Autriche et la Finlande, où ont été lancés des projets pilotes prometteurs sur l’aide à la prise de décisions. Par ailleurs, la République tchèque et la Lettonie comptent parmi les premiers pays à avoir aboli la tutelle complète. Quant à la Lituanie, elle a supprimé la possibilité de déclarer une personne « incapable » dans tous les domaines de la vie. Cependant, notre objectif ultime doit être de supprimer tous les systèmes de prise de décisions par des tiers, dans tous les États membres, et de les remplacer par des dispositifs d’aide à la prise de décisions, qui respectent l’autonomie de la personne, sa volonté et ses préférences, et qui soient accessibles à toutes les personnes handicapées, comme l’indique clairement l’article 12 de la CDPH.

Placement et traitement involontaires

Une autre question sensible et problématique, qui est étroitement liée au droit à la capacité juridique et au droit de vivre dans la société, est celle du placement involontaire, du traitement coercitif et du recours à des moyens de contention en psychiatrie. Lors de mes visites dans les États membres, j’ai pu observer des pratiques discutables, telles que le grand nombre d’hospitalisations sous contrainte en France ou le problème persistant du recours à la coercition en Norvège.

Ce sombre tableau est le résultat de l’application du principe selon lequel le placement involontaire des personnes ayant des problèmes de santé mentale est nécessaire et inévitable, compte tenu du danger que ces personnes représentent pour elles-mêmes et pour autrui. J’ai souligné à maintes reprises qu’il faudrait au contraire commencer par se demander comment éviter la coercition et comment aider au mieux la personne concernée à faire des choix en matière de soins. Pourtant, les États se sont davantage attachés à concevoir des garanties et des contrôles juridictionnels, qui souvent ne fonctionnent pas dans la pratique (par exemple, en Roumanie, j’ai constaté que, malgré les garanties prévues, les intéressés étaient privés d’un accès effectif à un contrôle juridictionnel et ne pouvaient pas exercer leur droit à être entendus en personne). C’est pourquoi j’ai émis un avis négatif sur le projet, actuellement à l’étude au Conseil de l'Europe, d’élaborer un instrument juridique (sous la forme d’un protocole additionnel à la Convention d’Oviedo) qui viserait à protéger les droits de l'homme et la dignité des « personnes atteintes de troubles mentaux » à l’égard du placement et du traitement involontaires, en examinant l’efficacité des garanties juridiques applicables.

Le fait d’utiliser l’existence d’un handicap pour justifier un internement involontaire équivaut à une privation de liberté arbitraire, mais constitue aussi une discrimination fondée sur le handicap. Cette pratique est contraire à l’article 14, paragraphe 1(b), de la CDPH, selon lequel « en aucun cas l’existence d’un handicap ne justifie une privation de liberté », et à l’article 25 (d), qui établit le droit, pour les personnes handicapées, de jouir du meilleur état de santé possible, sans discrimination et sur la base d’un consentement libre et éclairé.

Par ailleurs, j’ai pris note avec satisfaction de plusieurs bonnes pratiques, qui montrent que des solutions non coercitives existent. Par exemple, la méthode finlandaise de l’« Open Dialogue », qui est appliquée en situation de crise et associe le patient psychotique à toutes les décisions concernant son traitement, donne apparemment de très bons résultats. J’invite les États membres à s’inspirer de ces exemples concluants et à réformer leurs systèmes de soins de santé mentale dans le but de réduire de manière drastique les pratiques coercitives en psychiatrie et de les éliminer progressivement. Le placement sans consentement dans une structure fermée – y compris un foyer social – ne peut être qu’une mesure de dernier recours, applicable uniquement en cas d’urgence vitale. La décision de placement doit toujours reposer sur des critères objectifs et non discriminatoires, qui ne visent pas spécifiquement les personnes handicapées.

Éducation inclusive

L’éducation des personnes handicapées est un autre domaine dans lequel les États membres sont loin de satisfaire aux exigences de l’article 24 de la CDPH, qui leur impose de veiller à ce que le système éducatif pourvoie à l’insertion scolaire à tous les niveaux.

L’éducation séparée est contraire au droit des enfants handicapés à une éducation de qualité, sur la base de l’égalité des chances, car elle se caractérise souvent par des objectifs moins ambitieux, un enseignement médiocre et de mauvaises conditions matérielles. En outre, elle renforce et entérine la marginalisation des enfants handicapés aux étapes ultérieures de leur vie, notamment lors de leur entrée sur le marché de l’emploi (dans la mesure où l’éducation spécialisée ne permet généralement pas aux élèves d’obtenir un diplôme à la fin de leurs études). De plus, l’éducation séparée prive les enfants non handicapés, les enseignants et les autres membres de la collectivité d’une occasion de découvrir la richesse de la diversité humaine et de développer des compétences sociales essentielles.

En examinant la situation dans les États membres, j’ai constaté que l’éducation séparée restait souvent la norme. Ainsi, en Belgique et en République tchèque, de nombreux enfants handicapés fréquentent encore des structures spécialisées et ne parviennent que rarement à intégrer ensuite un établissement d’enseignement ordinaire. De manière analogue, en France, près de 80 % des enfants autistes sont exclus du système éducatif ordinaire, ce qui a valu à la France d’être reconnue coupable à plusieurs reprises de violations de la Charte sociale européenne par le Comité européen des droits sociaux, dans le cadre de la procédure de réclamations collectives. Même dans des pays comme l’Espagne, qui ont atteint un niveau d’inclusion élevé, les mesures d’austérité ont entraîné la suppression d’aides personnalisées. D’autres pays semblent prêts à s’accommoder d’une certaine ségrégation et désignent des formes d’éducation séparée sous des termes plus acceptables (par exemple, « éducation appropriée » aux Pays-Bas), quand ils ne vont pas jusqu’à les qualifier d’éducation inclusive (la Roumanie est ainsi dotée de « centres d’éducation inclusive »). Interrogées sur ces manquements, les autorités éducatives font souvent valoir qu’elles ne disposent pas des ressources nécessaires pour assurer l’accessibilité ou proposer des aides personnalisées. Pourtant, le manque de ressources ne saurait justifier que des enfants handicapés doivent suivre un enseignement séparé ou de moindre qualité.

La voie à suivre

Ainsi que le montrent les exemples ci-dessus, les États membres du Conseil de l'Europe n’ont pas encore pleinement intégré le changement de paradigme exigé par la CDPH. Or, faute de ce changement, même des politiques conçues avec les meilleures intentions finiront par reproduire les schémas d’isolement au lieu de favoriser l’autonomie de vie. Les États membres devraient faire preuve d’initiative et commencer à repenser les systèmes qui sont fondamentalement contraires à la CDPH, au lieu d’essayer de les adapter. Ils devraient s’employer davantage à réformer leur législation pour éliminer les pratiques incompatibles avec la CDPH, en s’appuyant sur des plans d’action complets et dotés de budgets suffisants. Enfin et surtout, les responsables politiques devrait respecter le principe selon lequel « Rien ne se fera pour nous sans nous », qui résume l’esprit de la CDPH, et donc veiller à ce que les personnes handicapées soient étroitement associées à l’élaboration des politiques qui influencent profondément leur vie.

Nils Muižnieks

Liste de ressources :

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24 août 2017

A quoi sert le Plan Autisme 4 (partie 1) ?

Le 6 Juillet 2017 a été solennellement lancé le Plan Autisme 4. Cet événement, venant à la suite d’une campagne électorale porteuse de beaucoup de promesses et d’optimisme pour les personnes handicapées, paraît être une raison supplémentaire d’espérer. Le Plan Autisme 4 doit prendre la suite du Plan Autisme 3, qui couvrait la période 2013-2017. Celui-ci a été évalué par l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) dans un rapport paru en mai 2017[1]. L’IGAS rappelle que ce 3e Plan Autisme a été construit sur la base des recommandations de bonnes pratiques publiées par la Haute Autorité de Santé en 2012, mais que ces recommandations « demeurent contestées dans certains établissements sanitaires et médico-sociaux, et parfois mal appliquées », d’où un bilan «  hétérogène  » dans lequel les rapporteurs pointent les faiblesses persistantes. Parmi celles-ci, on note principalement :

  • un pilotage qui peine à prioriser les mesures en l’absence de données épidémiologiques et qui peine également à agir hors du secteur médico-social ;
  • une insuffisance persistante de la scolarisation pour les enfants ;
  • un retard abyssal dans la prise en charge des adultes et une méconnaissance de leurs besoins ;
  • un retard également profond dans la rénovation des formations des professionnels amenés à travailler avec des personnes autistes : la mise en œuvre des recommandations de bonnes pratiques publiées en 2012 par la Haute Autorité de Santé (HAS) n’est toujours pas à l’ordre du jour pour la majorité des organismes.

L’IGAS clôt son rapport par une liste de 48 recommandations qui témoignent de la nécessité d’un nouveau Plan Autisme, car les besoins des personnes autistes, comme les obstacles, demeurent immenses. Les familles concernées par l’autisme, retrouvant effectivement dans cette liste les difficultés auxquelles elles sont confrontées quotidiennement depuis des années, attendent à présent des pouvoirs publics que le nouveau Plan Autisme agisse de façon efficace pour améliorer la situation. Cependant, les premiers préparatifs de ce nouveau plan s’accompagnent de signaux inquiétants quant à son futur contenu.

L’apaisement, le retour par la fenêtre de la psychanalyse ?

On se souvient de François Hollande qui avait annoncé, le 19 mai 2016 lors de la Conférence Nationale du Handicap, la mise en place d'un quatrième Plan Autisme, et que ce plan serait « celui de l’apaisement et du rassemblement. Parce que nous devons avoir toutes les réponses et les réponses les plus adaptées, sans préjugés et sans volonté d’imposer une solution plutôt qu’une autre  »[2]. Cette dernière phrase, apparemment consensuelle, reprend les termes de groupes qui soutiennent, en autisme, la psychanalyse, ainsi que d’autres méthodes non recommandées (les 3i, le packing, etc). On peut lire par exemple dans le texte publié le 9 Mai 2017 sur le site de l’association RAAHP (Rassemblement pour une Approche des Autismes Humaniste et Plurielle) : « Pour apaiser les conflits, il conviendrait que le gouvernement garantisse sa place à chacun des courants. »[3] François Hollande souhaitait-il se plier à cette revendication dans un but électoral ? Les associations de défense de la psychanalyse les ont très bien accueillis ces propos[4] ! Dans le refus d’ « imposer une solution plutôt qu’une autre », les familles elles, ont lu un renoncement. Oubliée la volonté politique d’imposer aux professionnels médicaux, para-médicaux et sociaux, d’utiliser en matière d’autisme des méthodes fondées sur les preuves et évaluées par la science ? Les familles ne peuvent et ne pourront pas l'accepter.

Les résultats des élections présidentielles, accompagnés par le discours volontariste et engagé du nouveau Président de la République, leur ont donné l'espoir que le nouveau gouvernement fera passer les intérêts des personnes autistes, l'intérêt général, avant les intérêts des corporations d’obédience psychanalytique et mettra en œuvre des mesures concrètes rapidement.

Or le premier constat est décevant : il n’en est rien.

En effet, le Plan Autisme 4 commence par « une intense concertation qui se déroulera à la fois dans les territoires et au travers de groupes de travail nationaux jusqu’en fin d’année 2017 »[5]. On se demande pourquoi le gouvernement éprouve le besoin d’encore six mois de « concertation intense » : pour savoir ce qu’il faut faire ? On le sait déjà. En effet les instances publiques ont sur la table :

  • les points du Plan Autisme 3 qui n’ont pas pu être mis en œuvre alors que leur nécessité et leur urgence n’ont pas diminué ;
  • les 48 recommandations détaillées du rapport de l’IGAS ;
  • les recommandations proposées en matière de recherche, par la Commission Scientifique Internationale préparatoire au Plan Autisme 4 qui s’est tenue à Paris les 15 Mars et 3 Avril 2017.

On s’étonne donc de ce délai supplémentaire, même si on peut comprendre que la mise en place d’actions concrètes nécessite une co-construction avec tous les acteurs concernés, notamment pour faire le lien entre la politique définie au niveau national et les agents de sa mise en œuvre au niveau des territoires.

En revanche, on comprendrait très difficilement que le pilotage de certains groupes de travail au niveau national soit confié à des défenseurs avérés de la psychanalyse appliquée à l’autisme. Comment le pilotage du plan 4 peut-il espérer que des militants défendant encore aujourd'hui des interventions n'ayant en 40 ans jamais pu documenter leur efficacité, puissent être une présence constructive dans des commissions censées produire un consensus ? Faut-il rappeler :

  • l’avis n° 102 du Conseil Consultatif National d’Ethique en 2007, qui constatait « l'impasse à laquelle cette théorie [psychanalytique] a pu conduire en matière d’accompagnement, de traitement et d’insertion sociale » ?[6]
  • les recommandations de la Haute Autorité de Santé concernant les interventions éducatives et thérapeutiques chez l’enfant et l’adolescent, qui classaient les interventions psychanalytiques comme « non consensuelles » car non validées scientifiquement ?
  •  le compte-rendu de la commission scientifique internationale qui s’est tenue en avril 2017, les propos de Jonathan Green : « Je crois que nous sommes d’accord pour dire qu’il n’existe pas de preuve, nulle part dans le monde, qui soutienne le recours à la psychanalyse pour l’autisme. Nous fondons ce commentaire sur deux bases. D’une part, il n’existe aucun rapport ou étude de l’efficacité d’une telle intervention. D’autre part, la théorie sous-jacente à l’utilisation de la psychanalyse, c’est-à-dire comprendre l’autisme – c’est la base de l’intervention –, est fausse du point de vue scientifique. La méthode de traitement n’est donc pas valable dans ce cas-là, et il n’y a pas de preuve pour la soutenir. Je crois que nous avons, parmi les experts, un accord sur ce point. »[7]
  • le quotidien des familles qui découvrent que leur enfant est autiste et qui sont confrontées, chaque semaine, chaque jour, en France, en 2017, à des refus de diagnostic (« lui mettre une étiquette ne va pas l’aider »), à des diagnostics faux (« dysharmonie psychotique »), à des prises en charge inefficaces, contraires aux recommandations, dans les établissements publics de santé (rapport de l’IGAS : « une proportion importante d’HJ [hôpitaux de jour] s’oppose à l’application des RBP [recommandations de bonnes pratiques] et ne montre aucune volonté de modifier ses pratiques »), à la nécessité de payer des prises en charge conformes auprès de professionnels libéraux, à des placements abusifs sur la foi de propos ignorants de l’autisme (affaire Rachel) ?

Madame la Ministre Sophie Cluzel a justement réaffirmé devant la Commission des Affaires Sociales qu’il « ne faut pas déroger aux recommandations de bonne pratique »[8]. Les familles ne pourront accepter que des psychanalystes, qui ne cessent de refuser ces mêmes recommandations, coordonnent l'élaboration de la future politique de l’autisme en France. Comment sinon demander la confiance des usagers dans l’action politique en matière d’autisme ? Il est hors de question de remettre les enfants, leurs familles et les adultes touchés par l’autisme à leurs bourreaux, qui continuent à nuire encore à tant de personnes concernées par l’autisme, alors que l'état de la science internationale condamne explicitement leur prétendues « pratiques ».

 

D’autre part, la concertation du Plan Autisme 4 prévoit la représentation d’associations d’usagers concernés par l’autisme. Nous souhaitons que cette consultation ne soit pas purement cosmétique. En effet, les associations, confrontées chaque jour aux difficultés concrètes des personnes autistes, sont porteuses d’une expertise réelle et solide.

La mission de l’IGAS sur le Plan Autisme 3 a mis en lumière de très nombreux dysfonctionnements. Encore n’a-t-elle pas consulté les « usagers », pourtant représentés par de nombreuses associations compétentes sur le sujet. Elle aurait pu être informée encore d'autres points de blocage, qui sont responsables de la détresse quotidienne de nombreuses personnes. Par exemple, le refus de la CNSA de revoir le guide d’évaluation des besoins des personnes handicapées (GEVA) pour l’adapter à l’autisme. Autre exemple, le refus de la Direction Générale de la Cohésion Sociale de revoir le guide-barême utilisé par les MDPH. Ainsi, le déficit de capacités sociales n’étant pas un critère permettant la reconnaissance d’un handicap, alors qu’il est à la base du diagnostic, de jeunes adultes se retrouvent dans une grande précarité, dans l’impossibilité de travailler, mais se voyant refuser l’accès à l’AAH et aux aides qui peuvent en découler pour le logement. On souhaite que la consultation des usagers soit le moyen d’une réelle prise en compte de leurs besoins, et non pas seulement l’alibi d’un projet écrit sans eux.

Par ailleurs, les associations qui aident les personnes autistes sont aussi porteuses des projets pour leur défense. Lors de la concertation nous voulons être représentés par les associations compétentes, militant pour le progrès des droits des personnes autistes et pour des prises en charge fondées sur les preuves scientifiques, et non par les exceptionnels tenants de la dogmatique pseudo « liberté de choix » en autisme. L’action politique consiste à faire preuve de discernement et de courage pour faire ensuite des choix pertinents. Les choix constatés nourriront, ou non, un rétablissement de la confiance entre le politique et la majorité de la société civile. 

 

 
24 août 2017

Être mère d’un enfant autiste

22 août 2017
Par Blog : Des mots libres

Qui suis-je aujourd’hui ? Au-delà d’être mère ? Qui suis-je d’autre ? À consolider les bords de mon enfant fragile, ais-je perdu de vue celle que j’étais ? ou à l’inverse ai-je investi mon identité dans ses moindres recoins ?



Qui suis-je aujourd’hui ? Au-delà d’être mère ? Qui suis-je d’autre ?
À consolider les bords de mon enfant fragile, ais-je perdu de vue celle que j’étais ? ou à l’inverse ai-je investi mon identité dans ses moindres recoins ?

Je refuse de perdre du temps à faire des suppositions sur ce qu’aurait été ma vie si mon dernier né n’avait pas été autiste. Quel intérêt ?
Pour être honnête, musicienne n’était pas le reflet de ma personnalité  mais plutôt une voie facile dans laquelle j’avais su me faire un nom sans vraiment payer de ma personne. Je n’y étais pas entière et ça ne me satisfaisait pas. Prendre la décision de mettre un terme à ma carrière n’a absolument pas été douloureux, mais à l’inverse, libérateur.

Mais je ne peux pas nier que toutes les décisions qui ont été prises depuis la naissance de Théo, ou tout au moins depuis l’émergence de son autisme l’ont été en fonction de lui. Il est ma priorité. Quel que soit le sujet abordé, rien n’est construit dans ma vie sans que soit soupesé les effets que cela aura sur sa vie à lui.
Je ne sais pas si c’est une bonne chose, oui ou non, probablement les deux.

Jusqu’à ses 9 ans, j’ai passé 24h sur 24 à ses côtés.
9 années durant, je l’ai tenu en dehors d’un système qui ne m’inspirait pas confiance… Pour finalement admettre que ce n’était pas une vie. Ni pour lui, ni pour moi.
Il devait entrer dans ce monde dans lequel non seulement il avait toute sa place mais également un rôle à tenir et je devais pour ma part reprendre le cours de ma vie.
Cet à-côté qui m’avait permis de le protéger le temps nécessaire devenait dès lors une excuse pour ne plus avoir à me confronter à une société qui m’avait déçue et qui avait fini par me faire peur.
On me parlait de courage mais ce n’était que lâcheté.

Alors j’ai ouvert la porte.
J’ai changé de région avec lui afin qu’il puisse intégrer une école spécialisée. Du moment où il y a eu des personnes qualifiées pour prendre le relais, j’ai eu plus de temps pour moi. Pour autant, je n’ai pas repris ma vie là où elle s’était arrêtée. Ça ne m’intéressait plus.
Ce que Théo avait changé en moi était trop important. Trop impératif.
Ma connaissance de l’autisme et ce que cela a chamboulé dans ma perception du monde, du système, de la société, de la politique… était trop fondamental.
C’est devenu mon chemin, ma responsabilité et cela s’est imposé à moi avec une telle clarté qu’il n’a jamais été question d’en faire l’impasse : Aider Théo, ce n’était pas juste le soutenir dans son quotidien, ni même dans son avenir, c’était également participer à faire évoluer la société dans laquelle il allait devoir trouver sa place.

Je n’ai jamais considéré que l’autisme de Théo était une chose à faire disparaître, ou même à contourner, mais bel et bien une particularité légitime, à comprendre et à soutenir. Une particularité à aimer et au minimum à respecter.
A ce propos, je ne suis pas partisane d’employer cette expression très prisée depuis quelque temps : « personne avec autisme ». Ce qui suggère que la personne et l’autisme sont divisibles, sous-entendant par la même occasion que si nous parvenions à mettre l’autisme à mal, nous retrouverions une personne entière, et pourquoi pas, guérie ?
Je réfute cette posture avec la dernière énergie.
L’autisme n’est pas une maladie mais une manière d’être au monde, plus ou moins handicapante. Cette façon d’être participe à la construction de la personne, en son entier, et ce, depuis son enfance. Vouloir transformer cette particularité, c’est nier la personne.

Aujourd’hui mon fils a 13 ans. Ses progrès sont tout simplement considérables, pour autant, il est toujours autiste. Ce n’est pas que cela le définisse ! Mais cela fait partie de lui.
Mon inquiétude a changé de nature. Elle ne se focalise plus sur son intériorité, mais sur sa capacité à la protéger de l’agression extérieure et à la mêler au reste du monde avec harmonie et sérénité.
Hyper sensible depuis toujours, il a appris à gérer l’intrusion permanente du bruit, des odeurs et des divers contacts physiques, tant et si bien qu’il est aujourd’hui aisé d’oublier qu’il en souffre.
Sa manière d’interpréter le monde est atypique, ce qui lui demande énormément d’efforts afin de comprendre les autres et de se faire comprendre d’eux.
Son courage est invisible, il passe inaperçu. Il est même fort à parier que certains pourraient lui reprocher les quelques fois où c’est trop dur pour lui, en niant les centaines de fois où il est parvenu à surmonter ses difficultés et ses douleurs.
Comment le protéger de cela ? Comment faire évoluer mon rôle à ses côtés ? Comment, dans un même mouvement, l’aider à trouver sa place au monde en le laissant s’envoler vers sa propre vie, et continuer de le protéger autant que possible du poids toujours plus envahissant de la norme établie ?
La seule réponse qui me satisfait c’est l’enseignement bien sûr. Lui enseigner, à lui, et aux autres de la même manière que je me suis enseignée au fil des années à ses côtés.

Mais où suis-je alors ?
Je cherche en moi. Je me pose des questions, analyse avec franchise l’état des lieux.
Mon couple n’a pas tenu le choc et le père de Théo a abandonné son rôle depuis longtemps. Mes grands enfants vivent leurs vies aux 4 coins de la France. J’ai laissé là mon métier il y a bien des années et quitté ma région d’origine pour m’installer dans le sud de la France avec Théo afin qu’il intègre son école. Je n’ai pas encore réussi à réellement faire ma place dans cette région que je chéris pourtant. Peu d’amis sur place, pas de travail, toujours célibataire bien sûr…
Si je m’arrêtais à cette liste non exhaustive, je serais inquiète. Le bilan semble lourd en ce qui me concerne, et probablement irréversible sur bien des points.
Mais ce serait malhonnête de s’arrêter à cela, car en regard de cette liste, il y a tout ce qui s’est installé de plus profond, de plus subtile, de plus fondamental à mes yeux.
Une richesse intérieure indescriptible, une conscience accrue, une posture plus courageuse, un engagement plus important, en un mot, ce sentiment sans prix d’être à ma place.
Pas seulement en tant que mère, ni même en tant que femme ! Mais en tant que citoyenne du monde.

Aussi, aux chers amis, qui me conseillent tendrement de penser à moi, de faire attention de ne pas me perdre… je voudrais les rassurer.
Je ne me suis pas perdue en Théo. Je me suis trouvée.
Voilà qui je suis.
Mère, femme et citoyenne. Indivisible.

22 août 2017

Brigitte Macron, sainte patronne des personnes handicapées

article publié dans Faireface

Brigitte Macron, sainte patronne des personnes handicapées
Brigitte Macron sera « amenée à soutenir les initiatives publiques ou privées qui permettent à la société française d’être plus inclusive face aux différences. » © Présidence de la République
Publié le 22 août 2017

L’Élysée vient de rendre publique la charte clarifiant le rôle de Brigitte Macron. Parmi ses missions de « patronage », la “première dame” se voit confier le handicap.

Brigitte Macron aura ses bonnes œuvres. Parmi lesquelles, le handicap. Voilà ce que les citoyens ironiques ne manqueront pas d’interpréter en lisant la charte de transparence relative au statut du conjoint du chef de l’État. Ce document a été rendu public lundi 21 août par l’Élysée. Il « a vocation à clarifier et à rendre publique la mission » de la “première dame”.

« Un lien continu d’écoute et de relations. »

Le conjoint, précise la charte en préambule, exerce traditionnellement un « rôle de patronage ». Un terme désuet renvoyant aux organisations de bienfaisance qui apportaient de l’aide aux personnes démunies.

Traduction en langage moderne : « Madame Brigitte Macron » sera, entre autres, « chargée de maintenir un lien continu d’écoute et de relations avec les acteurs de la société civile dans les domaines du handicap ». Mais aussi de l’éducation, de la santé, de la culture, de la protection de l’enfance ou encore de l’égalité homme-femme.

Soutenir les initiatives pour une société inclusive

Une longue liste en tête de laquelle le handicap ne figure sans doute pas par hasard. Comme il n’est pas anodin que la charte fasse référence à l’inclusion, chère aux associations de personnes handicapées. « À ce titre, elle est amenée à soutenir les initiatives publiques ou privées qui permettent à la société française d’être plus inclusive face aux différences. »

Brigitte Macron au service de la priorité du quinquennat

Les âmes plus bienveillantes souligneront simplement que cette mission s’inscrit dans « la ligne des priorités fixées par le président de la République », comme le précise d’ailleurs le texte de l’Élysée. Emmanuel Macron et son gouvernement ont en effet plusieurs fois assuré vouloir faire du handicap « une priorité du quinquennat ».

En juin, Brigitte Macron a visité les locaux d’une entreprise fabricant des vêtements pour les personnes handicapées. © Constant & Zoé

Des enfants autistes à l’Élysée

Brigitte Macron s’est d’ailleurs rendue, en juin, dans les locaux de Constant & Zoé, une entreprise fabricant des vêtements pour des clients handicapés. Et elle a fait visiter l’Élysée à des enfants autistes lors du lancement de la concertation autour du quatrième plan autisme, début juillet. Des bonnes œuvres de la première dame en attendant les bonnes décisions du Premier ministre. Franck Seuret

21 août 2017

Manche : elle ne peut pas se faire hospitaliser car personne ne veut prendre en charge sa fille autiste

article publié sur France bleu

Par Katia Lautrou, France Bleu Cotentin et France Bleu lundi 21 août 2017 à 9:53

"Débrouillez-vous !" Voilà ce que l'on a répondu à Ghislaine Rodriguez maman d'une adolescente autiste "Débrouillez-vous !" Voilà ce que l'on a répondu à Ghislaine Rodriguez maman d'une adolescente autiste © Radio France - Katia Lautrou

Il y a quelques temps, suite à un grave problème de santé, Ghislaine Rodriguez a dû être hospitalisée. Comme elle en a le droit, elle a alors appelé différents organismes pour prendre en charge Laura. Mais tous ont refusé. Et ce ne sera pas la dernière fois.

C'est le cri de colère et de douleur d'une maman. Ghislaine Rodriguez habite Tourlaville. Cette mère célibataire de 49 ans s'occupe seule au quotidien de sa fille Laura, 17 ans, autiste sévère. Il y a quelques temps suite à un grave problème de santé Ghislaine a dû être hospitalisée. Comme elle en a le droit, elle a alors appelé différents organismes pour prendre en charge Laura le temps de son hospitalisation. Mais tous ont refusé.

En dernier recours, elle a dû, faire appel à ses parents octogénaires pour garder Laura, "ce qui est extrêmement dur pour eux, Laura n'est pas facile". Et si aujourd'hui, Ghislaine pousse un coup de gueule et médiatise son histoire c'est parce que la situation s'est à nouveau présentée : "Il y a 15 jours j'ai eu un grave accident de voiture et là aussi j'ai appelé différents organismes pour enfants handicapés l'un d'entre eux m'a répondu : débrouillez vous avec votre problème. J'ai une nouvelle fois dû faire appel à mes parents. Je ne comprends pas, nos enfants ont besoin de prise en charge, je sais que je ne suis pas toute seule dans ce cas là. C'est très difficile".

Elle n'a pas frappé à la bonne porte"

Christelle Prado est directrice adjointe à la cohésion sociale au département de la Manche : "Déjà il ne faut pas rester seule et contacter un travailleur social soit que l'on connaît déjà, soit en CCAS ou en centre médical social, lui prendra ensuite contact avec la Maison Départementale des Personnes Handicapées qui elle, prendra le relais. C'est notre devoir. Ghislaine Rodriguez n'a malheureusement pas frappé à la bonne porte, la personne qui lui a répondu n'avait sans doute pas les moyens d'accueillir sa fille mais ce n'est pas une excuse".

Pour des renseignements sur l'autisme dans la Manche, contacter la Maison Départementale des Personnes Handicapées ou l'association assautisme.

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21 août 2017

Une charte de transparence sur le rôle de Brigitte Macron

article publié sur handicap.fr

Résumé : Nouveau statut juridique pour Mme Macron ? L'Élysée publie, le 21 août 2017, la charte de transparence relative au statut du conjoint de chef de l'État.La 1ère dame sera entre autres chargée de maintenir un lien d'écoute dans le domaine du handicap

Par , le 21-08-2017

L'Elysée publie, le 21 août 2017 sur son site, la « charte de transparence relative au statut du conjoint de Chef de l'Etat », qui précise le rôle, les thèmes d'actions et les moyens attribués à Brigitte Macron. « Il ne s'agit pas d'un statut juridique mais d'un engagement, qui ne vaut que pour Brigitte Macron et pour la durée du mandat d'Emmanuel Macron, et qui ne sera pas contraignant pour ses successeurs ni leurs conjoints », a précisé à l'AFP l'entourage de la Première dame.

Création d'un statut juridique

C'est la première fois dans l'histoire de la Ve République qu'un texte établit noir sur blanc le rôle et les moyens du conjoint présidentiel, jusqu'ici informels et souvent opaques. Ce texte a été établi « par la présidence, avec l'aval de Brigitte et Emmanuel Macron », ajoute la même source. Il répond en partie à la promesse de campagne d'Emmanuel Macron de mettre fin à « une hypocrisie française » en créant un statut juridique pour le conjoint du président. Mais il ne va pas jusqu'à une loi ou un décret, après qu'une pétition cet été contre un statut officiel a recueilli plus de 300 000 signatures.

Prendre part à des actions nationales

La charte lui reconnaît principalement un « rôle de représentation » aux côtés du président, en particulier lors des réunions internationales, et lui fixe également un rôle de « supervision » des réceptions à l'Elysée. Elle peut aussi « prendre part à des actions nationales et internationales, mises en place avec d'autres conjoints de chefs d'Etat, notamment pour lutter contre le changement climatique ou encore les violences faites aux femmes et aux enfants ». De plus, elle « répond aux sollicitations » et « soutient, par son parrainage ou sa présence, des manifestations à caractère caritatif, culturel ou social ou qui participent au rayonnement international de la France ».

Lien d'écoute avec le handicap

« Madame Brigitte Macron sera également chargée de maintenir un lien continu d'écoute et de relations avec les acteurs de la société civile dans les domaines du handicap, de l'éducation, de la santé, de la culture, de la protection de l'enfance ou encore de l'égalité homme-femme », précise le gouvernement. Le président pourra en outre la charger de « missions de réflexion et de propositions » qui seront rendues publiques, tout comme son agenda. Sur ses moyens, comme annoncé, elle s'appuiera sur deux conseillers présidentiels mis à sa disposition et d'un secrétariat. Elle ne bénéficie d'aucune rémunération ni de frais de représentation ou budget propre, les moyens pour sa fonction étant pris sur le budget de la présidence.

© Handicap.fr

 

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21 août 2017

Rentrée 2017 : votre enfant aura-t-il son AVS ?

logo toupi carréarticle publié sur le site de Toupi Tous pour l'Inclusion !

Vous avez une notification de la MDPH qui prévoit l’accompagnement de votre enfant par une AVS ? N’hésitez pas à vous renseigner dès aujourd’hui auprès des services du rectorat pour vous assurer que l’AVS sera présente.

Si l’AVS n’est pas présente à la rentrée, soyez réactif : votre réactivité montre à l’administration votre détermination.

Petit rappel des démarches utiles :

  • D’abord, contactez l’enseignant référent, et/ou la coordinatrice AVS de votre secteur. Il se peut que le contrat soit en cours de signature, et que l’AVS arrive rapidement.
  • Contactez également la cellule Aide Handicap Ecole (0810 55 55 00), du ministère de l’Education Nationale. Celle-ci peut, dans certains cas, apporter son aide en contactant le rectorat par exemple.
  • Si ces contacts n’aboutissent pas, contactez l’inspecteur ASH
  • Mettez en demeure l’inspection académique : l’Education Nationale a en effet une obligation de résultat concernant l’octroi des AVS aux élèves handicapés. Voici des modèles de courrier de mise en demeure à adresser au DASEN (Inspecteur d’Académie) :
    • mise en demeure en cas d’absence totale d’AVS-i ou d’AVS-m
    • mise en demeure en cas d’absence partielle d’AVS-i (absence sur une partie du temps notifié)

Attention : ces modèles sont à adapter selon votre situation (AVS individuelle ou mutualisée, notamment), et votre département de résidence. Si vous avez des difficultés à trouver les coordonnées de votre DASEN, n’hésitez pas à nous contacter.

Si malgré toutes ces démarches, l’AVS est toujours absente, il est possible de saisir le tribunal administratif. Même si la saisine du tribunal peut se faire sans avocat, nous vous recommandons, dans la mesure du possible, de faire appel à un avocat. Vérifiez avec votre assureur si vous avez souscrit un contrat de protection juridique.

Pour saisir le tribunal, il y a deux cas selon votre situation.

 

Cas n°1 : Votre enfant n’est pas en âge de la scolarisation obligatoire (moins de 6 ans ou plus de 16 ans) ou bien il est scolarisé malgré l’absence d’AVS

Il faut envoyer une mise en demeure (voir plus haut) et le DASEN a théoriquement deux mois pour vous répondre. Vous pouvez alors saisir le tribunal via un référé suspension. La procédure pour saisir le tribunal est décrite ici. Veillez à indiquer la mention référé sur l’enveloppe.

Attention : pour que votre recours soit recevable, il faut faire deux requêtes en même temps dont voici des modèles :

 

Cas n°2 : Votre enfant est en âge de la scolarisation obligatoire (6-16 ans) et il ne peut être scolarisé du fait de l’absence d’AVS

Vous pouvez lancer une procédure de référé-liberté immédiatement (sans délai dès la constatation de l’absence de l’AVS). L’audience se tiendra dans les 48 heures qui suivront le dépôt de votre requête.

Vous trouverez ici un modèle de requête en référé liberté. Veillez à indiquer la mention référé sur l’enveloppe.

Nos modèles de référés font référence à certaines pièces jointes que voici et qu’il est important de joindre à votre requête :

  • pièce 5 : communiqué de la Conférence Nationale du Handicap
  • pièce 6 : extrait du communiqué de rentrée 2016 du Ministère de l’Education Nationale
  • pièce 7 : extrait du communiqué de rentrée 2015 du Ministère de l’Education Nationale
  • pièce 8 : extrait du communiqué de rentrée 2014 du Ministère de l’Education Nationale
  • pièce 9 : communiqué de la FNASEPH
  • pièce 10 : revue de presse

Pour toute question relative à un problème d’AVS à la rentrée, n’hésitez pas à nous contacter.

20 août 2017

Yonne – Autiste Asperger, Anthony peut continuer ses études grâce à la générosité d'une Dijonnaise

article publié sur France 3 Régions

La famille d'Anthony a réussi à trouver une famille d'accueil à Dijon, ce dimanche 20 août, après plusieurs mois de recherche. / © France 3 BourgogneLa famille d'Anthony a réussi à trouver une famille d'accueil à Dijon, ce dimanche 20 août, après plusieurs mois de recherche. / © France 3 Bourgogne

Par France 3 BourgognePublié le 20/08/2017 à 18:26

Des larmes de joie pour une nouvelle inattendue. Une famille d'accueil dijonnaise vient enfin de proposer son aide pour héberger Anthony dès la rentrée.

"C'est une femme qui vient de me téléphoner. On a pris rendez-vous. Je suis très émue, c'est génial", raconte Angélique Doudet, mère d'Anthony.

Un soulagement aussi pour Anthony : "Je suis content pour ma mère parce qu'elle s'est battu comme une lionne."

Plusieurs mois de combat ont été nécessaires pour qu'Anthony puisse poursuivre ses études à 200 kilomètres de là.

A 19 ans, il est autiste Asperger. Même s'il n'a pas de déficience intellectuelle, son handicap nécessite un accompagnement en dehors de l'école. Sauf que pour cette famille, les recherches de logement ont été un casse-tête.

"Dans les structures spécifiques pour les personnes handicapées, il n'est pas assez handicapé. Pour les structures dites classiques, pour les enfants normaux, il l'est trop. Je demande que des grandes villes comme Dijon, des villes universitaires, il y ait un foyer pour des étudiants handicapés", explique la mère du jeune homme.

Dans les structures spécifiques pour les personnes handicapées, il n'est pas assez handicapé. Pour les structures dites classiques, pour les enfants normaux, il l'est trop.


Heureusement, grâce à une famille d'accueil, Anthony pourra donc poursuivre son BTS en tourisme. Une nouvelle étape franchie pour ce jeune homme qui s'est toujours surpassé. Brevet des collèges et baccalauréat en poche, il se bat pour pouvoir intégrer le marché du travail.

"Ce n'est pas parce que l'on a un handicap que l'on a pas le droit de faire comme tout le monde. Ce n'est pas parce que tu as un handicap que tu ne peux pas être dans la société", dénonce Anthony Doudet.

Et de poursuivre : "Je me suis battu parce que de mon handicap, j'en ai fait une force. Parce que je suis bon en langue, je sais très bien parler anglais."

De mon handicap, j'en ai fait une force.


Anthony, un jeune adulte courageux, qui reconnait volontiers qu'il n'en serait pas là aujourd'hui, sans le soutien de son entourage.

 
Yonne – Autiste Asperger, Anthony peut continuer ses études grâce à la générosité d'une Dijonnaise

19 août 2017

Coup de frein des contrats aidés : menace sur la rentrée ?

article publié sur handicap.fr

Résumé : Le coup de frein sur les contrats aidés annoncé par le gouvernement menace-t-il la rentrée des élèves handicapés ? Il promet une exception pour l'Education nationale. Pour certains, le compte n'est pourtant pas bon !

Par , le 18-08-2017

Sophie Cluzel, secrétaire d'État en charge du handicap, affirmait, le 26 juillet 2017, dans une interview accordée au journal La Croix, qu'il y aura, à la rentrée de septembre, le "nombre de contrats suffisants pour accompagner les enfants en situation de handicap", en assurant que les emplois d'AVS seraient "modernisés, professionnalisés et pérennisés".

Un gel presque total

Pourtant, peu de temps après, une autre annonce, celle de Muriel Pénicaud, ministre du Travail, sème la pagaille : le coup de frein sur les contrats aidés. "Il convient impérativement et sans dérogation de suspendre toutes les prescriptions pour les CIE et pour les CAE", écrit un adjoint au directeur régional d'Ile-de-France de Pôle emploi, dans un courriel adressé le 10 août aux directeurs territoriaux de sa région, à qui il demande une "stricte application de ces mesures". Une solution radicale qui ne concerne évidemment pas uniquement l'Ile-de-France. Pour les contrats uniques d'insertion (CIE) du secteur marchand, il est ainsi "demandé de stopper les prescriptions" ; en d'autres termes, plus aucun contrat à destination des entreprises ne sera accepté. Pour les contrats d'accompagnement dans l'emploi (CAE), secteur non-marchand, "les priorités arrêtées portent strictement sur l'outre-mer, l'Education nationale, le secteur sanitaire et social".

Abus du gouvernement précédent

Mais si les contingents de contrats aidés sont en baisse, ils ne sont pas totalement asséchés. Le gouvernement prévoit environ 110 000 nouveaux contrats au deuxième semestre, pour un total de 293 000 sur l'année. Un chiffre nettement inférieur aux 459 000 contrats signés en 2016. La ministre a justifié cette baisse massive par "une sous-budgétisation et une surconsommation" par la majorité précédente. Le budget pour 2017 prévoyait en effet 280 000 nouveaux contrats aidés mais le gouvernement précédent en avait "abusé", programmant les deux tiers au seul premier semestre. Une rallonge de 13 000 contrats aidés supplémentaires avait été annoncée mi-juillet.

Exception Education nationale

L'Education nationale bénéficiera donc de près de la moitié des 110 000 contrats encore disponibles au budget 2017. Son "enveloppe" allouée afin d'assurer la rentrée et, précise le ministère du Travail, "l'accompagnement des enfants handicapés", est fixée à 50 000 contrats pour le second semestre. 20 000 de moins tout de même qu'au second semestre 2016 ! Une exception qui n'a pas eu pour effet de rassurer totalement les parties concernées, redoutant, mathématiquement, une réduction des effectifs déjà insuffisants. En premier lieu, les maires de France ; leur association (AMF) a donc adressé une lettre à la ministre du Travail. Inquiétude partagée par l'Association des paralysés de France sur un dossier de rentrée toujours "brûlant" en matière de scolarisation des élèves handicapés.

Coûteux et pas efficaces ?

Mais c'est aussi l'emploi des personnes handicapées qui pourrait être menacé ; rappelons que les contrats aidés sont réservés aux publics les plus éloignés du marché du travail (demandeurs d'emploi de longue durée, jeunes en grande difficulté, personnes en situation de handicap…), pour lesquels l'embauche et l'accompagnement sont encadrés et appuyés financièrement par l'Etat. Le secteur associatif recourt ainsi fréquemment à ce type de contrat. La Cour des comptes juge néanmoins ces dispositifs "coûteux" et "pas efficaces dans la lutte contre le chômage". Des solutions d'appoint qui ne permettent pas de traiter un problème de fond ?

Handicap, public prioritaire

L'APF (Association des paralysés de France) ne l'entend pas de cette oreille et nuance : "Bien sûr, cela ne débouche pas immédiatement sur l'emploi mais cela reste un levier très important pour les personnes handicapées". L'Agefiph (fonds pour l'emploi des personnes handicapées dans le privé) estime que 20 % des contrats aidés concernent ce public dans le secteur non-marchand et, en moyenne, 12 % sur les deux secteurs. L'APF redoute donc que les bénéficiaires en situation de handicap ne soient percutés de plein fouet.

Investir dans la formation

Le gouvernement dit préférer "investir dans la formation et dans le développement des compétences". C'est l'objet du grand plan d'investissement "compétences" promis à l'automne, deuxième texte phare après la réforme du travail. Quinze milliards d'euros devraient être consacrés à la formation professionnelle, sur cinq ans.

© Franck Thomasse/Fotolia

 

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19 août 2017

Mères autistes : « Je me suis occupée de mes enfants d’une toute autre manière »

article publié sur le site de l'Association Francophone de Femmes Autistes - AFFA

Entretien de 4 mères autistes anglophonesAmelia Hill pour The gardian, 15 avril 2017

Traduction par Aspipistrelle (membre de l'AFFA) de l'article original : « Mothers with autism: 'I mothered my children in a very different way' »

 

Les femmes autistes sont deux fois moins susceptibles de se faire diagnostiquer que les hommes. Amelia Hill s'est entretenue avec quatre femmes qui ont pris conscience de leur propre autisme après avoir fait des recherches sur le comportement de leurs propres enfants.

 

Être autiste quand on est une femme n'est pas facile : voilà seulement deux ou trois ans que les professionnels commencent à reconnaître que cette condition n'est pas exclusivement masculine. Plus difficile encore est d'être mère autiste et encore pire, être autiste et mère d'enfants autistes.

Les experts conçoivent qu'il existe aujourd'hui une population de mères autistes non diagnostiquées. Souvent, ces femmes ne s'identifient autistes qu'après avoir effectué des recherches sur les symptômes que présentent leurs propres enfants.

On pense qu'environ 1/5 des autistes ont reçu leur diagnostic à l'âge adulte bien qu'il n'existe aucune statistique à l'échelle nationale à ce sujet. Les femmes sont plus susceptibles de passer à travers le radar du diagnostic: une étude réalisée par la National Autistic Society  a conclu que deux fois plus de femmes que d'hommes restaient sans diagnostic (10 % contre 5 %).

Une fois diagnostiquées, les mères autistes cachent souvent leur diagnostic de peur que les services sociaux ne leur retirent la garde de leurs enfants du fait des préjugés sur les traits autistiques qui peuvent être perçus comme un danger pour l'enfant.

« Leur propre autisme, souvent non diagnostiqué, agace les professionnels et elles peuvent se voir accusées de causer ou d'inventer les symptômes de leurs enfants », témoigne le Dr Judith Gould, consultante principale et ancienne directrice du  Lorna Wing Center for Autism  qui a développé les premiers tests diagnostiques adaptés aux femmes et qui forment les médecins sur la reconnaissance des femmes autistes adultes.

 

Laura James

Mariée avec quatre enfants de 19 à 26 ans dont deux neuroatypiques et deux neurotypiques, Laura James est l'auteure de Odd Girl Out, le premier mémoire écrit par une femme britannique autiste à être publié par une maison d'édition non spécialisée. Elle a reçu son diagnostic l'année dernière.

« J'ai élevé mes enfants à ma façon, bien loin de celle des mères neurotypiques. Pour commencer, je ne les ai jamais grondés. Ça ne me paraissait pas logique. S'ils font quelque chose que vous n'aimez pas, c'est parce que vous avez une idée préconçue de la façon dont les enfants doivent être, se comporter ou avoir l'air. C'est illogique. Si, d'un autre côté, ils se mettent en danger, alors je trouve plus efficace de m'asseoir et d'en discuter avec eux. »

Laura James nous raconte qu'un de ses enfants a toujours eu d'excellents résultats scolaires alors qu'un autre n'était pas très bon élève.

« Je suis aussi fière de l'un que de l'autre car je veux que mes enfants soient satisfaits, heureux  et se sentent en sécurité. Pour moi, les résultats scolaires ne sont pas synonymes de cela. J'aime éperdument mes enfants et je ferais n'importe quoi pour eux mais je crois que je ne comprends pas les débats houleux autour de la parentalité. Je ne partage pas tout simplement pas cet intérêt que les parents neurotypiques semblent avoir.

C'est peut-être à cause de ce manque d'intérêt que j'ai des relations avec mes enfants très différentes de celles qu'entretiennent la plupart des parents : ils aiment passer du temps avec moi et m'envoient des messages comme ils le font avec leurs amis et ils savent qu'ils n'ont rien à me cacher car je ne serai jamais en colère contre eux. S'ils avaient des problèmes je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour les aider, il serait donc illogique de se mettre en colère ou de les punir ».

 

Nicola

Nicola a 39 ans, diagnostiquée à 34 après avoir lue des informations concernant l'autisme au féminin alors qu'elle faisait des recherches sur les symptômes de son fils. Son fils Andrew a été diagnostiqué à l'âge de deux ans et Nicola, six mois plus tard. Cependant, cela a pris quatre ans, pour que sa fille Marion, âgée aujourd'hui de huit ans, reçoive le sien (les noms des enfants ont été modifiés).

« Mes enfants sont heureux et s'en sortent à l'école. Ce sont bien des critères qui montrent que je suis une bonne mère, non? Seulement, à cause de mon autisme, je vis dans la peur. La société pense que les mères autistes représentent avant tout des dangers pour leur enfant. Je suis terrifiée à l'idée que les services sociaux me retirent mes enfants.

Je ne m'inquiète pas de savoir si je suis une bonne mère ou non. Je sais que je le suis. Je sais aussi que mon autisme m'aide à être une bonne mère : les autistes ont des obsessions et la mienne est de m'assurer que je fais tout ce qui est en mon pouvoir pour leur donner ce dont ils ont besoin, pour les aimer, me battre pour eux et les accompagner pour qu'ils deviennent des adultes en bonne santé et heureux.

Quand mon mari et moi avons décidé d'avoir des enfants, je savais que je n'avais aucune idée de comment être mère, ma propre enfance ayant été malheureuse. Donc, j'ai fait une tonne de recherches. C'est comme cela que j'ai découvert que les enfants ont besoin d'être cajolés, qu'ils ont besoin d'affection et que, même si je n'entre pas facilement en contact tactile (je rêve de vivre dans un monde sans contact physique), je m'assure que les besoins physiques de mes enfants soient remplis. Mon fils adore recevoir des câlins, ce que je lui procure bien que je trouve cela limite intolérable.

Avoir une mère autiste a permis à mes enfants autistes de grandir dans un environnement unique sans pression et sans stress que des parents neurotypiques n'auraient pas su leur offrir. Mes parents m'ont forcé à être 'normale' et à me conformer. Ils me forçaient à me sociabiliser, à manger normalement, à me comporter normalement. Ce fut terrible : j'ai grandi dans la peur et le traumatisme.

Avant d'avoir nos diagnostics d'autisme, c'est tout naturellement, que j'ai donné à mes enfants une éducation adaptée aux personnes autistes quand je sentais que c'était ce dont ils avaient besoin. Je ne trouvais pas cela bizarre. Et dieu merci, je l'ai fait : cela signifie que mes enfants n'ont jamais été stressés à cause de leur autisme.

Je ne suis pas sûre que j'aurais pu être une aussi bonne mère avec des enfants non-autistes. Je trouve cela carrément normal que ma fille s'amuse à trier ses élastiques et qu'elle fasse en plus des recherches sur l'ordinateur sur ces mêmes élastiques. C'est comme ça que je joue et je peux le faire pendant des heures. Mais quand mon beau-fils veut que je joue avec lui aux dinosaures, je suis complètement à l'ouest ».

 

Melanie Mahjenta

Melanie Mahjenta a été accusée par des pédiatres et les services sociaux en 2015 d'une forme rare d'abus infantile : le syndrome de Münchhausen par procuration alors qu'elle se battait pour obtenir un diagnostic d'autisme pour sa fille de trois ans, Rosie.

« Le diagnostic d'autisme lui a été refusé en 2013 malgré les résultats de l'évaluation clinique qui la plaçait bien sur le spectre autistique », témoigne Melanie. « Je pense que l'équipe a rejeté les résultats de l'évaluation à cause de leur méconnaissance concernant la manifestations des traits autistiques en particulier, chez les filles. Ils m'ont refusé un second avis ce qui est illégal et m'ont accusé de fabriquer les symptômes de Rosie ».

De plus, l'équipe est passée à côté de mon propre autisme alors que je leur ai dit que je pensais être sur le spectre. Ils auraient du reconnaître mon comportement typique, même si je conçois que cela peut être difficile, qui était celui d'un parent autiste. Au lieu de cela, ils ont organisé une safeguarding meeting (réunion visant à protéger la santé des personnes) en 2014 pour discuter de savoir si je n'exagérais pas les symptômes de Rosie, ce qui a eu pour directe conséquence d'alerter les services sociaux et de considérer Rosie comme enfant en danger, une décision prise sans aucune vérification.

Quand Rosie a été considérée comme enfant en danger, mes amis m'ont conseillée d'arrêter de me battre pour son diagnostic. Mais je ne pouvais pas arrêter : être autiste, c'est ne pas tolérer l'injustice.

Je comprends que mon autisme me rend difficile à prendre du recul. En effet, je ne sais pas lâcher l'affaire quand je suis convaincue d'avoir raison. Je n'arrive pas toujours à regarder les gens dans les yeux, ce qui donne l'impression que j'ai une personnalité évitante. Les personnes autistes peuvent être hyperfocalisées. Cependant, ils ont pris mon opiniâtreté pour un signe d'instabilité.

Mais bien que ces traits soient difficiles à gérer pour les gens, mon autisme a finalement été une bonne chose. Peut-être qu'une personne neurotypique aurait accordé au docteur du crédit et aurait abandonné. Ou alors ils auraient cessé le combat de peur de perdre leur enfant. Mais moi, je me suis battue et grâce à cela, Rosie a finalement obtenu son diagnostic d'autisme ce qui a permis d'obtenir des aides. De plus, une médiateur a reconnu tous mes arguments et nous a même dédommagés ».

 

Carly Jones

Carly Jones a 35 ans. Elle est divorcée et mère de 3 filles Chloe, Honey et Cherish agées respectivement de 18, 14 et 9 ans.

« Chloe est neurotypique. Honey a été diagnostiquée Asperger à 6 ans en 2008 et Cherish a été diagnostiquée autiste deux ans plus tard à l'âge de deux ans. J'ai été moi-même diagnostiquée 4 ans après soit à l'âge de 32 ans en 2014

Ne pas savoir ce qui "clochait" chez moi avant l'âge de 32 ans a été catastrophique de bien des façons. Ne pas avoir connaissance de mon autisme a eu pour conséquence que je n'arrivais pas à gérer l'école. Je suis tombée enceinte à 15 ans, j'ai été victime d'abus, je suis tombée sous le contrôle de certaines personnes et avais de mauvaises fréquentations.

Mais, une partie de moi est soulagée que je n'ai pas eu connaissance de mon autisme avant d'avoir des enfants. Je ne sais pas si j'aurais été assez courageuse pour en avoir si j'avais su que j'étais autiste. J'aurais sûrement pris trop de précautions et penser que je ne pourrais pas être une bonne mère.

Il y a tant de préjugés sur les mères autistes que je me considère chanceuse d'avoir échappé à l'interrogatoire des services sociaux. C'est une crainte permanente chez les mères autistes. Je ne dévoile mon autisme que lorsque cela peut servir à obtenir de l'aide pour mes filles. Je le fais car qu'est ce qui va se passer quand mes filles voudront devenir mère à leur tour ? Quels obstacles, empêchements, déchirements auront-elles à faire face si les mères autistes d'aujourd'hui ne se battent pas pour montrer aux autres qu'elles peuvent réussir dans la sphère familiale ?

Le besoin d'accompagnement dont une fille autiste a besoin pour socialiser est grand. Du fait que je sois autiste, je le comprends, et je passe le temps qu'il faut pour les aider avant de sortir, pour travailler toutes les scénarii sociaux et apprendre à réagir en fonction. De plus, nous travaillons à des stratégies pour la gestion des imprévus. Une mère neurotypique ne le comprend pas forcément, et elle pense pas automatiquement à le préparer mentalement avant une sortie.

Parce que j'ai été victime d'abus moi-même, je sais au combien il est courant pour les personnes autistes d'être terriblement abusées. J'ai du trouver des moyens pour aider mes filles à prendre conscience de leur propre vulnérabilité sans qu'elles ne le perçoivent comme un déficit, une faiblesse. Je sais aussi de par ma propre expérience que les autistes taisent les abus dont ils ont été victimes parce qu'ils présupposent que chacun est déjà au courant. Je dois sans cesse me rappeler d'insister auprès de mes filles afin qu'elles mes racontent tout ce qui peut paraître important dans leur journée afin de le garder en sécurité et qu'elles soient heureuses ».

19 août 2017

Personnes handicapées et vie autonome : Rêve ou réalité inaccessible en France ?

Blog : https://www.confortdusage.info

Il ne suffit pas pour les dirigeants d’être doués de la conscience des systèmes, il leur faut faire preuve de sagesse stratégique. Nous ne le répéterons jamais assez l’approche de la complexité implique de globaliser et contextualiser le réel en fonction d’une finalité pour pouvoir passer de la réflexion à l’action.

« La sagesse a comme ligne de force la compréhension » – Edgar Morin

Entretiens avec Stéphane FORGERON

 

Ce qui est paradoxal dans certains pays développés comme la France, c’est que les personnes handicapées aient davantage à se battre que les personnes non handicapées. Face à une mosaïque d’intérêts divergents, à une fragmentation qui s’oppose à l’enrichissement des différences et qui mettent à mal l’universalité des Droits de l’Homme bousculée par le primat de l’économie, beaucoup finissent par baisser les bras.  Au moins trois raisons à cela : des dispositifs d’accompagnement vers une société inclusive inexistants sinon dans la phraséologie, la non-représentation des personnes handicapées par les personnes handicapées, et le poids hégémonique du secteur dit gestionnaire en monopole de représentation vis-à-vis des pouvoirs publics.

QUESTION – Stéphane FORGERON, en France, sans qu’elles soient impliquées dans une concertation les concernant et souvent contre leur volonté de très nombreuses personnes handicapées sont orientées vers des institutions. Ces dernières s’apparentent davantage à des lieux de privation de liberté qu’à des lieux de vie. Comment expliquer cela ?

Stéphane FORGERON – La réponse est pour le moins complexe, car il serait nécessaire d’énumérer toute une série de croyances et de pratiques infondées sur les personnes handicapées, de comprendre les politiques du handicap mises en place depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, et aussi et surtout d’analyser les intérêts particuliers et rapports des acteurs institutionnels (État, associations, élus locaux, financeurs).

Q. : … cette « série de croyances et de pratiques infondées » ?  Dîtes-nous en plus s’il vous plaît.

S. F.- Empêcher une personne de vivre une vie autonome, c’est la priver de tous ses droits ! La croyance la plus destructrice est probablement celle qui consiste à décréter qu’une personne handicapée ne peut être scolarisée en milieu ordinaire, ne peut travailler en milieu ordinaire, ne peut, ne peut…

Q. : … Cette situation semble perdurer ? Qui y trouve intérêt ? 

S.F.- Sûrement pas la personne handicapée elle-même. Cette croyance est surtout entretenue par des personnes présentées comme des « professionnels du handicap », salariés d’établissements financés par l’État, au sein d’associations reconnues à la fois comme gestionnaires d’établissements et représentantes des personnes handicapées.

Q. : C’est quand même grave ! Et contradictoire. Placer en « situation de handicap » des personnes handicapées peut donc leur être imputable ?

S. F.- Effectivement. Mais en premier lieu le combat primordial des personnes handicapées est de se convaincre qu’elles peuvent elles-mêmes se fixer des objectifs, bâtir des projets personnels et professionnels et les réussir.

Beaucoup y pensent, mais peu le mènent, malheureusement.

C’est en fait bien plus facile à dire qu’à faire en raison du poids des représentations, –organisation de la société, d’orientations administratives imposées par les MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées) dans des établissements loin de toute vie en société,– les empêchant de vivre avec les autres, comme les autres.

Q. : Revenons à ces gestionnaires. Cherchent-ils une solution pour le mieux-être des personnes handicapées ou creusent-ils une ornière bien éloignée d’une culture de l’ouverture sur un partage et de l’association vers un même but

S. F.- Partage… association vers un même but… on en est bien loin tant il est difficile de lutter contre des adultes sans handicap, de remettre en cause des vérités absolues assénées par des associations gestionnaires dont l’intérêt de défendre leurs établissements prévaut sur la défense des droits des usagers accueillis.

Les « professionnels du handicap » ne veulent pas ou peinent à reconnaître que la majorité des personnes handicapées « passées » par les associations gestionnaires sont conditionnées pour vivre dans une dépendance permanente, éloignées des citoyens non handicapés, dans un modèle d’enfermement et de surprotection. Nous sommes dans la justification de l’existence de ces établissements à tous les stades de la vie. De ce fait, les personnes lourdement handicapées ne peuvent prendre confiance en elles, apprendre à être autonomes ou encore exprimer leurs choix de vie. Au fil des années, elles se transforment en des êtres passifs, incapables de prendre les décisions élémentaires qui les concernent.

Toute leur vie est organisée pour leur « bien » dit-on…

VISION SYSTÉMIQUE OU REGARD DES PROBLÈMES DANS LEUR MATÉRIALITÉ ? 

Q. : On cite souvent comme novateurs les pays anglo-saxons et scandinaves ? Y trouve t’on une vision différente de fraternité génératrice d’action ?

S. F.- Je vais répondre par un exemple inspiré de cet excellent article de Yanous : c’est celui de Gisèle qui, sans aidant personnel, ne peut bénéficier d’une vie autonome. Une maigre retraite ne lui permet pas d’assumer les dépenses liées à son besoin d’un auxiliaire de vie toute la journée. Deux choix se présentaient à elle :

  • La solution « made in France » ? le placement en institution pour vivre et passer sa retraite dans son pays.
  • Pour profiter de sa retraite et vivre en toute autonomie, Gisèle personne lourdement handicapée qui a passé toute sa vie professionnelle en France a opté pour la Suède. Elle explique comment elle a « retrouvé une joie de vivre en décidant de s’y installer, loin de sa famille et de ses amis, mais dans un environnement humain et un confort matériel sur mesure. »

Aspirant à une vie digne, Gisèle n’a eu d’autre choix que de quitter la France pour élire domicile en Suède, pays souvent cité en exemple. La législation suédoise a pour finalité « d’encourager l’égalité des conditions de vie et la pleine participation à la vie de la société, […] Le but doit être de donner à la personne handicapée la possibilité de vivre comme les autres, […] basée sur le respect du droit du choix de vie et sur l’intégrité ».

Q.- Plus précisément, comment sont encadrées les activités des personnes handicapées dans d’autres pays ?

S.F.- Ailleurs, particulièrement dans les pays scandinaves et anglo-saxons, des activités sont organisées par petits groupes de personnes lourdement handicapées. Elles sont menées en toute indépendance avec la volonté de changer leur condition de citoyens de seconde zone. Ces pratiques ont permis de développer une nouvelle vision sur la façon d’aborder les problèmes liés aux personnes handicapées.

Dès les années 1970 aux USA, les personnes handicapées sont parties du principe que ces réunions (ex. la pair-émulation) devaient être obligatoirement organisées en dehors des établissements gérés par des « professionnels du handicap ».

Q.- Il semble exister deux façons de considérer le handicap ?

S. F.- Oui, il y a le modèle médical du handicap –également appelé modèle individuel du handicap dans les pays anglo-saxons, et de réhabilitation en Espagne– qui maintient un contrôle sur les personnes handicapées, à travers les institutions spécialisées créées à cet effet. Considérés comme des patients, les prestations y sont avant tout assurées par du personnel médical et para-médical (offre de soins par des infirmiers, de rééducation et d’aide à domicile). Elles ne sont aucunement élaborées pour garantir une vie inclusive.

Puis, il y a les partisans du modèle social du handicap, pour qui la personne handicapée est un consommateur actif, libre et capable de réaliser des activités au sein de la cité. La personne ne dépend plus du système traditionnel des associations gestionnaires.

Q.- Les associations gestionnaires semblent décriées. Vous pouvez nous en dire plus ?

S. F.- Ces associations gestionnaires d’établissements ont en fait, grandement contribué à un enfermement des réponses dans une logique de réadaptation et à orienter les textes législatifs et les pratiques dans cette direction. A l’inverse, dans les autres pays mentionnés qui ont cherché des réponses au sein de la cité, des avancées concrètes ont été réalisées. Cela s’est fait à l’écoute et en collaboration avec des associations militantes –qui défendent les droits des personnes handicapées– et ne gèrent pas d’établissements.

Q.- Mais, alors quel est leur intérêt ? Comment représentent-elles les personnes handicapées ? Des intérêts divergents ne convergent-ils pas en faveur de l’immobilisme ?

S. F.- Il y a assurément un conflit d’intérêts que peut résumer la réponse à cette question : « comment « lever le poing » un jour pour revendiquer le respect des droits et « tendre la main » le lendemain ? Il ne faudrait pas que le même interlocuteur oublie la subvention qui permet d’assurer la pérennité du service rendu par la structure gérée par l’association.

L’approche par le financement à la place, dans des centres fermés pour la plupart, a été privilégiée en France. Il s’agit d’un moyen pernicieux de contrôler les associations gestionnaires, reconnues en même temps par l’état français comme représentantes des personnes handicapées. Désormais, ces associations ne peuvent vivre sans de tels financements publics. Au fil des décennies, ces associations sont devenues dépendantes de l’état, et ont perdu toute forme de militantisme, c’est-à-dire leur ADN, leur raison d’être au moment de leur création.

N’oublions pas non plus que cette façade « levons le poing » attire les adhérents.

Q.- Des exemples ?

S. F.- Dans le champ du handicap psychique, des GEM (groupes d’entraide mutuelle) ont été créés en France, sur la base du modèle des centres pour la vie autonome à l’étranger (ex. Japon, Irlande, USA, Canada, Suède, Norvège). Or, ce dispositif très léger et peu coûteux pour les finances publiques, ayant fait ses preuves par la pair-émulation pour répondre à de nombreux besoins de personnes est parfois dévoyé par le secteur médico-social. On voit, en effet, des associations gestionnaires reprennent ce système voulant par tous les moyens conserver la maîtrise sur la vie des personnes handicapées. En d’autres termes, il s’agit d’un dévoiement de fonds et d’objectifs.

Q.- Les associations gestionnaires rejettent elles le modèle social du handicap ?

On peut le dire elles ne connaissent pas voir n’ont aucun désir d’approcher le modèle social qui est de nature à remettre en cause le modèle médical, devenu leur levier d’action. Elles sont bien sûr d’accord sur le principe d’une société inclusive, bien évidemment organisée au sein de leurs établissements ou sous leur contrôle. N’oublions pas que leur enjeu est ailleurs : continuer à percevoir toujours plus de dotations, ce qui passe par la nécessité de création de nouvelles places.

A contrario une vie autonome améliore de façon substantielle la vision sociale de la dépendance. Les personnes qui vivent de façon autonome brisent beaucoup de barrières psychologiques, contribuant grandement à faciliter l’inclusion sociétale de personnes handicapées pour les générations à venir.

Q.- D’autres pays suivent cette approche française ?

S. F.- Entre les années 1970-2000, toutes les institutions –au sens des établissements français– ont été fermées en Suède, au Danemark, en Norvège, aux USA et dans la plupart des provinces du Canada. Le Danemark, a  même supprimé le mot institution de sa législation quand d’autres pays ont diminué de façon drastique le nombre d’établissements (ex. Angleterre) au profit de services dits communautaires, à savoir au plus près de la personne. Précision : les associations françaises confondent à dessein « services communautaires » (dans la communauté, au coeur de la cité, dans le quartier) et « communautarisme », pour refuser toute évolution du système.

Sur le plan international, le placement en institution est de fait de plus en plus rejeté, considéré comme une politique inadaptée et une violation des droits humains. De nombreux pays se sont lancés dans un processus de transformation des services de prise en charge et d’assistance aux enfants et aux adultes handicapés pour développer un modèle de la vie autonome. Les pays scandinaves, anglo-saxons, l’Espagne et l’Italie sont passés d’une prise en charge du handicap à une prise en compte des choix de vie et des besoins de la personne handicapée : les institutions résidentielles de long séjour ont ainsi été remplacées par des services de proximité pour que la personne vive au plus près de sa famille.

Q.- La France semble bien loin de cette approche Les associations ne devraient-elles pas être uniquement des prestataires de services ?

S. F.- En France, les personnes handicapées sont appelées usagers. Elles ne disposent ni d’un contrôle suffisant sur leurs vies ni sur les décisions qui les concernent. Soulignons aussi que les exigences de l’organisation gestionnaire tendent à passer avant les besoins et les souhaits des personnes handicapées. 

Q.- Vous pensez que les mouvements sociaux… 

S. F.- Oui, l’un des premiers mouvements sociaux modernes dans le champ du handicap, qui ait eu un retentissement international, a été la désinstitutionnalisation, à savoir sortir de centres fermés les personnes handicapées, notamment celles avec un handicap intellectuel, pour qu’elles vivent au sein de la société. Ce mouvement, introduit en Suède en 1969, et au Canada peu de temps après, basé sur le principe de la « normalisation », a été conduit par des prestataires de services et des parents d’enfants avec handicap mental. Ces précurseurs étaient convaincus que les personnes avec des troubles du développement (handicap mental, intellectuel, psychique) devaient vivre dans l’environnement le plus  » normal  » possible pour espérer qu’elles se comportent normalement.

Si les conditions minimales étaient réunies, à savoir accessibilité, aides techniques et une vie autonome garantie par des aidants personnels, chaque fois qu’une prestation s’avérerait nécessaire :

  • Les personnes handicapées pourraient décider sur un pied d’égalité de leurs choix de vie, s’organiser individuellement et collectivement, devenir des acteurs de leur vie.
  • Par contre, les associations gestionnaires n’auraient alors plus de raison d’être, du moins dans leur configuration actuelle.

Le principal défi consiste à garantir que le processus de désinstitutionnalisation soit mené à bien dans le respect des droits des personnes, de leur dignité, de leurs besoins et des souhaits de chaque individu et de sa famille, par la création de nouveaux dispositifs d’accompagnement. L’expérience a montré que la prise en charge institutionnelle produit invariablement des résultats moins bons, en terme de qualité de vie, que les services de proximité de qualité, ce qui se traduit par une vie entière d’exclusion sociale et de ségrégation. S’il est important d’impliquer les prestataires de services, dispositif qui n’existe pas en France – on parle d’associations gestionnaires -, les droits et les points de vue des personnes handicapées doivent toujours prévaloir. Dans les pays dont les gouvernements se sont engagés à passer d’un modèle institutionnel à un modèle de proximité (la vie autonome), la décision a souvent découlé des appels à la réforme lancés par des associations militantes ayant refusé de gérer des établissements.

Les Nations Unies définissent ce concept de désinstitutionnalisation – terme tabou en France – de la façon suivante :

 » La désinstitutionnalisation est un processus qui prévoit le passage des milieux de vie institutionnels et autres structures ségrégationnistes à un système permettant une participation sociale des personnes handicapées, dans lequel les services sont fournis à l’échelle de la communauté selon la volonté et les préférences individuelles. Un tel changement implique que les personnes reprennent le contrôle de leur vie, et exige que des services de soutien individualisés soient fournis aux personnes handicapées et que les services et équipements destinés à la population générale soient mis à la disposition de ces personnes et adaptés à leurs besoins. Une désinstitutionnalisation effective exige une approche systémique, dans laquelle la transformation des services institutionnels résidentiels n’est qu’un élément d’un changement plus important dans des domaines tels que les soins de santé, la réadaptation, les services de soutien, l’éducation et l’emploi, ainsi que dans la perception du handicap par la société. L’expérience montre que la désinstitutionnalisation assortie d’un soutien adéquat améliore la qualité de vie et renforce les capacités fonctionnelles des personnes handicapées. »

S.F.- Qualifié de filière gestionnaire par des chercheurs en sciences sociales le secteur associatif français rejette violemment cette approche.

L’organisation à la française du secteur du handicap ne constitue-t’il un obstacle majeur à une vie autonome des personnes handicapées ? La question mérite d’être posée. Dans un projet article-entretien nous retracerons l’historique de l' »activisme » et les avancées qu’il a permises… dans de nombreux pays.


Réponses adaptées à la personne (approche systémique vs matérialité)

 Réponses en Suède

A partir d’une analyse approfondie des besoins de la personne (jour, nuit, jours fériés, vacances), les communes prennent en charge les 20 premières heures d’aidance hebdomadaire.

Si les besoins en aides humaines sont plus conséquents, sur la base du projet personnel et/ou professionnel de la personne, l’État finance les aidants personnels au-delà de la 20ème heure hebdomadaire.

Sous forme de :

  • paiement direct à la personne handicapée qui devient l’employeur de ses aidants personnels qu’elle peut directement recruter, ou
  • de versement à un organisme agréé – une coopérative défend les intérêts de ses adhérents et se charge du volet administratif -, ou
  • du versement à la commune de l’offre de services qu’elle propose -sous-traitée à des prestataires de services.

la personne choisit la formule qui lui convient le mieux. Ce crédit d’heures (jusqu’à 168 heures par semaine) intègre les frais annexes, tels que les frais de déplacements et d’hôtels de l’aidant personnel pour les vacances. Il fait l’objet de négociations très dures pour obtenir leur financement au regard de l’ensemble des besoins de la personne, d’où l’intérêt de l’appui des coopératives (ex. STIL, GILL, JAG), non gestionnaires d’établissements, lesquelles ont une expertise très fine dans l’évaluation des besoins des personnes et défendent leurs adhérents dans leurs démarches. Les crédits d’heures peuvent être également accordés sur le lieu de travail pour tous les actes de la vie ordinaire, afin que la personne puisse être autonome dans l’environnement professionnel.

La nuit, Gisèle ne bénéficie pas d’aidant personnel, mais est équipée d’un bracelet d’appel au poignet : « Une voix par interphone me demande de quoi j’ai besoin et la « patrouille de nuit » (deux aides-soignantes circulant en voiture) passe ».

Réponses « made in France »

A l’inverse, les réponses françaises se sont traduites par la mise en place d’institutions hyper-spécialisées (par type d’handicap, par degré d’handicap, par âge, par territoire), contribuant à mettre à l’écart de la société les personnes handicapées, à les rendre invisibles et à exonérer de fait la collectivité de sa mission d’inclusion.

Le développement des institutions spécialisées, en réponse à des besoins spécifiques a contribué paradoxalement à renforcer la non participation des personnes handicapées au sein de la société et à une discrimination légalisée de cette population.

Le retour vers le droit commun est aujourd’hui un processus difficile à mettre en oeuvre, compte tenu des choix du promoteur de cette politique, à savoir l’État, coupable d’avoir développé une politique d’apartheid social.

19 août 2017

RAPPORT DU MÉDIATEUR de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur - Des grands nombres vers l’individuel

 

 

18 août 2017

Françoise est désespérée, son fils autiste est à l'asile depuis un an, contre son gré (vidéo)

article publié sur Sud info.be

Françoise est désespérée, son fils autiste est à l'asile depuis un an, contre son gré (vidéo)

Une longue vidéo désespérée a bouleversé Facebook ce jeudi (à 17h, on frôlait les 36.000 vues). Face caméra, une femme raconte l'histoire de son fils hospitalisé en psychiatrie depuis quinze mois, et qu'elle ne peut plus voir depuis le mois d'avril. Elle montre des photos, des photos d'avant, de M.

 

18 août 2017

Vidéo -> Nadia Chabane - Conférence - Autisme à l’école

Nadia chabane conférence"Données actualisées sur les troubles du spectre de l’autisme", conférence de Nadia Chabane, Professeure à l’UNIL et directrice du Centre cantonal de l’autisme (CHUV), dans le cadre de la deuxième édition de la Journée cantonale de formation continue sur le thème "Autisme à l'école: vers de nouvelles pistes", qui s'est déroulée le 1er mars 2017 à la HEP Vaud.

Nadia Chabane - Conférence - Autisme à l'école from HEP Vaud on Vimeo.

18 août 2017

Une maman dénonce les conditions de vie de son fils autiste en foyer en Belgique

Le fils de Keltoum, Ryad a 21 ans. C’est un autiste sévère. À l’âge de 16 ans, il a dû trouver un établissement en Belgique faute de places en France.
Le fils de Keltoum, Ryad a 21 ans. C’est un autiste sévère. À l’âge de 16 ans, il a dû trouver un établissement en Belgique faute de places en France.

Keltoum Oukas vient de partir en vacances mais «  pas de gaieté de cœur  ». Le week-end dernier, elle a déposé son fils, Ryad, 21 ans, au foyer d’accueil médicalisé du Petit Bonheur, à Loncin, près de Liège, en Belgique. Depuis un an, la mère de famille hémoise voit les conditions de vie de son fils, autiste sévère, se dégrader au sein de cette structure.

«  On essaie de le rapatrier  », lâche-t-elle. En cause, la distance – 200 km et deux heures de trajet –, mais surtout la sécurité et la qualité de vie quotidienne de Ryad.

« J’ai découvert où il dormait : une petite chambre, avec des trous dans le mur et un lit brancard pour dormir. »

Pas de chaussures pendant plusieurs mois, manque d’hygiène, sous-effectif… Alertée notamment par des crevasses sur les pieds de son fils, la maman a interpellé la direction. Philippe Bozard, directeur du site de Loncin, lui a répondu dans un mail qu’il s’agissait «  d’un choix de travailler en respectant [les] refus [de son fils]  » qui conduisait «  à ce que l’hygiène et les soins prodigués soient plus aléatoires  ».

Pétition sur internet

En juillet dernier, c’est l’incident de trop : «  Après un week-end, je raccompagnais mon fils. Il y avait un éducateur pour dix patients. Mon fils a commencé à se déshabiller dans l’entrée et à plier ses vêtements. Pour un autiste sévère, c’est un signe. Il voulait aller dans sa chambre, je l’ai suivi. C’est alors que j’ai découvert où il dormait : une petite chambre, avec des trous dans le mur et un lit brancard pour dormir.  » Pour la maman, c’est une pièce «  indigne  » et le manque de personnel encadrant est «  dangereux  ». Dans une «  grosse colère  », elle lance une pétition sur les réseaux sociaux pour alerter sur les conditions de vie des handicapés exilés en Belgique. Elle réunit aujourd’hui 1 279 soutiens.

La direction du centre ne tarde pas à réagir et promet du changement : une armoire dans la chambre ou encore des travaux d’aménagements. «  Je veux voir pour croire  », tempère Keltoum Oukas.

Contactée par téléphone, la direction du Petit Bonheur n’a pas souhaité s’exprimer afin de ne pas «  entretenir le côté médiatique pour garder une certaine intimité  ». Elle précise néanmoins qu’il s’agit de «  l’avis d’une seule maman  » et que «  le problème a été solutionné  ».

Aujourd’hui, la maman de Ryad fait tout pour trouver une place en France, près d’elle, pour son fils. Un centre pour adultes autistes va ouvrir à Wattrelos, mais elle reste sans réponse de sa part. En attendant, Keltoum veut surtout «  sensibiliser à ce qu’il se passe, la France se délaisse de ce qui n’est pas gérable  ».

Un quatrième plan pour l’autisme annoncé par Emmanuel Macron

C’était une promesse de campagne d’Emmanuel Macron : l’autisme doit être l’une des priorités du quinquennat. Le 6 juillet, le président a annoncé un quatrième plan autisme. Le contenu et le budget du plan seront connus d’ici la fin de l’année. Il prendra le relais du troisième plan 2013-2017 qui était doté d’un budget de 205 millions d’euros, jugé insuffisant par les associations. Selon Autisme France, 6 836 autistes français se trouvaient dans des centres d’accueil spécialisés en Belgique à la fin de l’année 2015, faute de places disponibles en France.

18 août 2017

Autisme et handicap : démarche et droits

article publié sur Canal Autisme

L'objectif de cette formation : permettre aux familles de mieux comprendre le fonctionnement des institutions (MDPH, système scolaire) de connaître leurs droits et les faire respecter. Cette formation s'articule en 4 parties et dure environ 3 heures :

1. La MDPH
2. Autres aides financières et mesures de protection
3. La scolarité
4. Les prises en charge

     
Odile DE VISMES
Présidente de l’association TouPI (Tous Pour l’Inclusion) depuis juin 2013 : association de familles d’enfants ayant un handicap cognitif (autisme, handicap mental, troubles des apprentissages, TDAH, etc). Elle accompagne des familles dans leurs démarches (dossier MDPH, démarches scolaires, etc) et dans leurs recours. Ancienne administratrice de la FCPE 75, elle a été membre de la CDAPH de la MDPH 75 pendant deux ans, ainsi que de la CDOEA de l'académie de Paris.
Le site de l'Association TouPI : http://toupi.fr
   
  • Pré-requis
Aucune connaissance spécifique n'est nécessaire pour suivre cette formation. Elle s'adresse principalement aux familles.

  • Plusieurs thématiques seront abordées pendant cette formation
- La MDPH
- Pourquoi la MDPH ?
- Processus
- Dossier enfant
- Passage à l’âge adulte
- L’organisation académique
- Les types de scolarité
- Les AVS
- ESS et équipe éducative
- Maintiens
- 1er degré : périscolaire, extrascolaire
- 2nd degré : examens, orientation
- Transports
- Aides et recours
- Les prises en charge
- Prise en charge institutionnelle
- Prise en charge en libéral
- Double prise en charge
- Transport


  • Les outils & moyens pédagogiques
Une formation 100% en ligne disponible 24h/24, 7j/7, composée de modules vidéo courts avec :
- un support de formation à télécharger
- des échanges avec les membres de la communauté Canal Autisme sur la Page Facebook

  • Durée
Cette formation dure environ 3 heures


18 août 2017

Autistes sévères, ils travaillent : une expérience réussie !

article publié sur handicap.fr

Résumé : Quel avenir pour Luc, autiste sévère ? Jean-François Dufresne a tenté une expérience professionnelle en milieu ordinaire, dans une usine, avec son asso Vivre et travailler autrement. Un succès duplicable à d'autres... Le travail, une thérapie ?

Par , le 28-06-2017

Handicap.fr : Ce projet « Vivre et travailler autrement » a été mené au nom de votre fils, Luc…
Jean-François Dufresne : Oui, c'est un garçon autiste de 26 ans, un être différent. Avoir un enfant comme lui a été une expérience merveilleuse. Il est gentil, courageux et possède des qualités formidables.

H.fr : Comment vous est venue cette idée ?
JFD : C'est une longue histoire… Luc, c'est la « mauvaise génération » pour les autistes. Son diagnostic relève du miracle. Nous étions aux États-Unis, et son grand-père, qui est médecin, l'a fait diagnostiquer là-bas alors qu'il n'y avait pas de sensibilisation ni de réelle prise en charge en France. Quand il a eu 10 ans, j'ai créé une première asso car il n'existait rien pour lui. Elle s'appelait « Apprendre autrement ».

H.fr : Et puis, quand il a eu 15 ans, toujours la même galère ?
JFD : En effet. Je me suis dit « C'est bien joli, ça marche, ça le fait progresser, il est de plus en plus sociable mais que va-t-il faire plus tard ? ». On a regardé l'offre et pas vraiment d'options. Le mettre dans un centre ? Je n'en dis pas de mal car ils ont le mérite d'exister mais ce n'est pas ce que je voulais pour mon fils. L'hôpital psychiatrique ? Pas question ! Rester à la maison ? Le constat était affligeant : aucun avenir !

H.fr : Ce sont vos souvenirs d'enfance qui vous ont soufflé la solution…
JDF : Oui, je me suis souvenu que, dans le village de ma famille, il y avait celui qu'on appelait « l'idiot du village », certainement autiste parfois. Il était protégé par les habitants mais à condition de bosser un peu en échange. J'ai alors eu l'audace de dire : « Faut les exploiter ! ». C'est une vraie provoc à laquelle je crois profondément. Est-ce qu'il faut vraiment assister les personnes handicapées, les mettre dans du coton ? Exploités, on l'est tous… Alors, s'ils veulent exister, il faut les faire travailler.

H.fr : Vous y allez fort. Vous n'avez pas peur d'attirer les foudres ?
JDF : Je nuance. Il faut faire travailler ceux qui le peuvent mais en les accompagnant, évidemment ! C'est l'objectif de la deuxième association que nous avons créée et qui s'appelle, en toute logique, « Vivre et travailler autrement ».

H.fr : Accompagner les travailleurs avec autisme, oui mais comment ?
JDF : Nous avons mis en œuvre, depuis 2014, un système inédit ; ils travaillent le matin, encadrés par trois équivalents temps plein, et, l'après-midi, ils bénéficient d'un temps de socialisation. Ils font du jardinage, du ménage, les courses, du sport…

H.fr : Accessoirement, vous dirigez le groupe Andros. Un tel projet ne pouvait-il être mené qu'avec l'implication totale d'une grosse entreprise ?
JFD : Oui, il est vrai qu'ils travaillent dans l'une de nos usines, celle d'Auneau (Eure-et-Loir), qui fabrique des produits laitiers, en milieu ordinaire, avec de grosses contraintes en termes de tenue vestimentaire, d'hygiène... Notre groupe a par ailleurs mis à leur disposition un cadre de vie merveilleux, dans le parc du château d'Auneau, propriété de notre groupe, situé juste à côté de l'usine. Huit studios y ont été aménagés pour ceux qui habitent loin ; ils payent un loyer, comme tout un chacun. Les autres rentrent chez eux.

H.fr : Il fallait prouver que l'inclusion professionnelle pouvait marcher et pas seulement avec les Asperger, c'est-à-dire les autistes dits de « haut niveau ».
JDF : Oui, tout à fait. La plupart de nos travailleurs sont non verbaux. Mon fils, par exemple, a un autisme sévère, n'est pas capable de tenir une conversation, et pourtant il s'épanouit dans son travail. Regardez notre film (ci-dessous) ; toutes les réponses sont dedans ! Notre expérience est un succès puisque beaucoup font des progrès fulgurants. La responsable de l'autisme au sein des hôpitaux de Chartres, qui fait partie depuis le début du fonctionnement de notre dispositif, m'a même confié : « Je n'imaginais pas que le travail pourrait être une thérapie aussi efficace ».

H.fr : Mais cela concerne-t-il vraiment une vaste proportion de personnes avec autisme ?
JFD : La France compte 300 000 adultes autistes en âge de travailler mais seulement 2% sont en emploi. Je considère que 30% des personnes accueillies en MAS (maison d'accueil spécialisée) ou FAM (foyer d'accueil médicalisé) pourraient travailler chez nous. C'est énorme ! Même si ce n'est évidemment pas la seule solution.

H.fr : Le résultat est-il vraiment concluant ?
JFD : Je vous assure qu'ils sont au moins aussi efficaces que les employés dits « ordinaires ». La plupart apprécient les tâches répétitives et font preuve d'une productivité étonnante. C'est bon pour eux, bon pour l'entreprise et bon pour la société.

H.fr : En effet, c'est une option tout bénef pour les finances publiques ?
JFD : Je vous laisse faire le calcul ! Une place en FAM ou MAS coûte en moyenne 85 000 euros par an et par résident. Nous avons créé une expérimentation qui, avec l'aide de l'Etat (budget Agence régionale de santé et Conseil départemental), revient à 35 000 euros par an et par personne. Cette aide nous permet de financer les 8 accompagnants : 3 sur le lieu de travail et 5 sur le lieu de vie (pour les activités, la vie quotidienne et la nuit). Nous  accueillons 8 travailleurs autistes aujourd'hui et comptons monter en puissance progressivement, avec l'objectif de 12 personnes d'ici fin 2018. J'espère que, dans quelques années, certains d'entre-eux auront une autonomie suffisante pour se lancer dans la vie ordinaire.

H.fr : Il n'y a aucune femme ?
JFD : Non parce que nous n'avons jamais eu de candidatures féminines. Nous les accueillerions bien volontiers.

H.fr : Et leurs collègues, comment réagissent-ils ?
JFD : L'usine compte 300 employés et, franchement, ils sont enchantés et fiers. Leur regard sur l'autisme a complètement changé. Même constat auprès de la municipalité et des commerçants ; tous nos travailleurs sont bien acceptés.

H.fr : Vos propos parfois tranchés attisent-ils la critique des détracteurs ?
JFD : S'ils existent, ils ne se sont jamais manifestés. Je donne souvent des conférences sur emploi et autisme et personne ne m'a encore dit que notre concept était idiot.

JFD : Existe-t-il d'autres dispositifs aussi inclusifs en France ? Et qu'en pensent les politiques ?
JFD : Pas à ma connaissance. Cette expérience a pu être tentée car elle s'appuie sur une entreprise partenaire solide. Ségolène Neuville, ancienne secrétaire d'État en charge des personnes handicapées, m'a encouragé vivement à développer ce concept et à convaincre d'autres entreprises. A ma connaissance, la nouvelle secrétaire d'État, Sophie Cluzel, apprécie également notre dispositif. Nous avons également l'appui du groupe autisme de l'assemblée présidé par le député LR Daniel Fasquelle et de la sénatrice Dominique Gillot, par ailleurs présidente du CNCPH (Conseil national consultatif des personnes handicapées).

H.fr : Comment comptez-vous diffuser vos bonnes pratiques ?
JFD : J'ai commencé à prendre contact avec quelques grandes entreprises, qui réagissent favorablement. Avec le soutien de la Fondation Malakoff Médéric, nous sommes également en train de rédiger un guide à destination des entreprises. Comme ce dispositif expérimental semble remporter un réel succès auprès de tous, son essaimage devient pour moi une priorité ; je compte bien y consacrer les 10 prochaines années de mon existence et je m'en réjouis !

 

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Sur le web

16 août 2017

Autisme : le point avec la Pr Catherine Barthélémy

article publié sur essentiel santé magazine

Autisme : le point avec la Pr Catherine Barthélémy

Alors que le 4e plan autisme est à l’étude, Catherine Barthélémy, professeur émérite à la faculté de médecine de Tours, spécialiste de l’autisme, revient sur les causes, les signes et les recherches sur cette maladie.

Plusieurs pistes expliquent l’origine de l’autisme. Que sait-on vraiment aujourd’hui ?

La cause de l’autisme, on ne la connaît pas. Mais on comprend de plus en plus cette maladie. Les personnes qui en souffrent ont des difficultés à établir une relation sociale et à s’adapter aux changements. Ce n’est pas un problème psychologique. C’est un trouble, qui se situe dans le cerveau, lié probablement à un problème de connexions.

La piste génétique a été longtemps prioritaire. Le deuxième axe est neurophysiologique. Et le troisième environnemental. Il est aujourd’hui à l’étude. Le cerveau est toujours en interface avec l’extérieur, les produits que l’on respire ou que l’on avale ont peut-être un lien avec ce trouble ?

Quels sont les premiers signes de l’autisme ?

Dans les deux tiers des cas, ce sont les parents qui se rendent compte, entre 6 et 12 mois, que leur bébé semble dans son monde, que son regard est ailleurs, qu’il n’est pas sensible à la voix et qu’il est moins réactif qu’un autre enfant aux messages de ses parents. Les parents sont alors souvent déroutés. Donc un conseil : dès que l’on a des doutes, il ne faut pas hésiter à en parler à son médecin généraliste ou à son pédiatre. Plus le diagnostic est posé tôt, mieux c’est. Même s’il faut être très prudent avant de prononcer un diagnostic car les enfants n’évoluent pas tous à la même vitesse.

Comment les enfants sont-ils pris en charge ?

Un suivi régulier est nécessaire par des équipes de pédiatrie spécialisée en pédopsychiatrie. Une prise en charge précoce et pluridisciplinaire (psychomotricien, orthophoniste…) est conseillée afin d’aider l’enfant à développer son langage, à communiquer, à gérer ses émotions. De nombreux progrès ont été réalisés. Il y a 25 ans, les deux tiers des enfants avec autisme n’accédaient pas au langage, aujourd’hui les proportions se sont inversées.

Que pensez-vous des unités d’enseignement pour enfants autistes ?

L’idée est excellente. On crée des petites unités à l’intérieur d’une école ordinaire. L’enfant fait comme ses frères et sœurs et comme ses camarades. C’est un projet d’école, l’enfant peut jouer dans la cour de récréation. Il peut également aller quelques heures en inclusion dans les autres classes. Mais il n’y a pas assez d’unités, il faut réfléchir pour conforter ce système. Avec un projet tout au long de l’enfance, pas uniquement jusqu’à 6 ans, que ce soit dans les ULIS (unités localisées pour l’inclusion scolaire), en intégration en classe ordinaire, dans les IME (institut médico-éducatif). Il faut adapter le projet éducatif à l’enfant et non pas l’inverse.

Cécile FratelliniCrédit photo : MariaDubova/Istockphotos

mis en ligne le : 15/08/2017

16 août 2017

Et si l’intelligence artificielle était la réponse à la plus grande injustice en santé mentale?

article publié sur le Huffington Post

Il reste encore plein de mystères sur l’autisme, mais une chose est sûre : on peut aider les personnes autistes et leurs familles.

15/08/2017 09:00 EDT | Actualisé il y a 5 heures
Jirsak via Getty Images


Cette injustice est tellement importante que l’UNESCO a déterminé que l’information sur la santé fait partie des droits de l’homme.

Cela fait déjà longtemps qu'on prévoit que l'intelligence artificielle (IA) va révolutionner le domaine de la santé mentale. On sait qu'elle va nous aider à mieux détecter les difficultés de santé mentale des personnes, qu'elle va nous aider à offrir de meilleurs services. Mais aujourd'hui, je vais vous parler d'une autre révolution qu'elle entrainera et dont vous n'avez jamais entendu parler : L'IA va résoudre l'une des plus grandes injustices du domaine psychosocial !

Quelle est cette injustice ? Comment l'IA va nous aider ? On va y réfléchir ensemble en prenant un exemple : l'autisme.

Il reste encore plein de mystères sur l'autisme, mais une chose est sûre : on peut aider les personnes autistes et leurs familles.

L'autisme est un trouble neurodéveloppemental qui touche plus de 1% de la population. Il se manifeste principalement par des difficultés importantes dans la communication et les interactions sociales ainsi que par la présence de comportement, d'activité et d'intérêt restreint. Il reste encore plein de mystères sur l'autisme, mais une chose est sûre : on peut aider les personnes autistes et leurs familles. Mais on ne peut les aider qu'à une condition : qu'ils reçoivent des services efficaces et adaptés.

Selon vous, qu'est-ce qui fait que certains enfants autistes vont avoir accès à d'excellents services qui vont leur permettre d'aller mieux alors que d'autres vont se retrouver à suivre des soins totalement inefficaces, qui risquent même d'empirer la situation ?

Les services disponibles ? L'argent des parents ? Le pays de naissance ? Ce sont tous des facteurs importants, mais ils ne suffisent pas !

Prenons le cas de cet enfant autiste de 5 ans mort à la suite de l'administration d'une thérapie inutile (1 , 2 *) et inacceptable en autisme : la chélation. Ou prenons le cas de nombreux enfants autistes qui suivent une thérapie psychanalytique. Une thérapie qui non seulement a été démontrée depuis longtemps comme inefficace (ex : 3, 4), mais qui en plus ose souvent accuser les parents d'avoir causé l'autisme de leur enfant (exemple).

Ces tragédies ont eu lieu dans des pays avec beaucoup de ressources, les parents avaient de l'argent (ces thérapies sont extrêmement dispendieuses), des services de qualité existaient. Alors pourquoi cet enfant est mort et pourquoi des parents ont dû vivre le traumatisme de se croire coupables de la souffrance de leur enfant ?

On prend tous nos décisions en fonction de l'information que l'on a et si on nous prive de cette information on ne PEUT pas prendre une décision optimale.

La réponse la plus facile est de mettre la faute sur les parents : « Ils ne se sont pas bien informés », « ils sont trop crédules », etc. Je trouve ça inadmissible ! Je n'ai aucun doute que ces parents ont fait le mieux pour prendre les meilleures décisions possible. Je ne remets en doute ni leur intelligence, ni leur engagement, ni leur volonté d'aider leurs enfants, ni leur habileté. NON. Je pense qu'ils sont victimes d'une injustice majeure : en tant que société on ne leur a pas donné les informations nécessaires pour prendre des décisions éclairées. On prend tous nos décisions en fonction de l'information que l'on a et si on nous prive de cette information on ne PEUT pas prendre une décision optimale.

C'est toujours cette injustice qui pousse les gens à faire confiance à des thérapies non démontrées ou dangereuses que ce soit la chélation, la psychanalyse, la communication facilitée, le packing, la holding thérapie, la sécrétine, etc.

Pour moi, ne pas donner à une personne accès aux meilleures informations sur des traitements revient à la laisser vulnérable à des thérapies dangereuses. On manque, en tant que société, à notre mission la plus basique : protéger les personnes les plus vulnérables.

Cette injustice est tellement importante que l'UNESCO a déterminé que l'information sur la santé fait partie des droits de l'homme.

Cette injustice est tellement importante que l'UNESCO a déterminé que l'information sur la santé fait partie des droits de l'homme. Pour être précis, il y est inscrit : « Tous les citoyens ont un droit d'accès à l'information qui concerne leur santé et la santé des membres de leur famille et de leur communauté. Il importe tout particulièrement d'insister sur la nécessaire protection des mères et des enfants inscrits dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, sur le droit des enfants d'accéder à l'information relative à leur santé inscrite dans la Convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant (article 26) et sur le droit de tout un chacun à une information suffisante pour pouvoir consentir en connaissance de cause à un traitement. »

Personnellement, je crois profondément à ce droit et je me bats pour lui. Je trouve inacceptable qu'aujourd'hui des gens souffrent et meurent simplement parce qu'on ne leur a pas donné accès à de l'information. L'information scientifique est un bien commun et elle doit être rendue accessible à tous !

Pourtant on est loin d'atteindre cet objectif. Et pas seulement dans le domaine de l'autisme. On a peu de chiffres à ce sujet, mais il semble qu'aujourd'hui seuls 14% de la recherche est utilisée et cela prend près de 17 ans pour qu'une recherche soit mise en application (5). Imaginez... 86% de notre recherche n'est pas utilisée... une recherche qui pourrait vous aider... que vous avez payé avec vos impôts. VOUS n'y avez pas accès !

Mais pourquoi une aussi faible circulation de l'information ? Il y a bien sûr des centaines de facteurs responsables, mais il y a déjà un facteur capital : on n'a pas la capacité de gérer la quantité de recherche scientifique et d'informations produites.

On estime plus de 3000 articles par jour en psychologie, encore beaucoup plus en médecine ! Comment voulez-vous pouvoir rester à jour ? De plus, certains auteurs estiment qu'en 2020 la quantité d'informations doublera tous les 73 jours (6). On ne sait pas comment trier, analyser, synthétiser une aussi grosse masse d'informations et on ne pourra jamais donner une information de qualité à tous sans régler ce problème.

Et c'est là que l'intelligence artificielle (I.A) peut jouer un rôle capital ! L'I.A est une experte pour traiter et analyser de grandes quantités d'informations. Elle peut donc scanner les recherches et ainsi vous donner accès instantanément à toutes les informations qui vous seront utiles pour prendre des décisions éclairées !

Le but est que chaque personne puisse venir sur l'application web, expliquer sa situation à l'I.A, poser une question et obtenir une réponse personnalisée et à jour !

Je sais que ça parait être de la science-fiction pourtant le premier prototype en autisme est en train d'être développé à Montréal : Myelin. Le but est que chaque personne puisse venir sur l'application web, expliquer sa situation à l'I.A, poser une question et obtenir une réponse personnalisée et à jour ! Si nous réussissons notre pari : tout le monde aura accès aux meilleures informations sur l'autisme et qu'enfin l'injustice du manque d'information soit une histoire du passé.

Une belle mission non ? Pour en savoir plus, regardez la vidéo de ma conférence de TEDx Laval où je parle un peu plus de cette situation : L'intelligence artificielle au service de la santé mentale.

* Les liens dans le texte vous renverront vers des vidéos, des pages d'associations ou des journaux. Les chiffres entre parenthèses vous renverront vers des articles scientifiques.

14 août 2017

Témoignage vidéo de Nora sur les placements abusifs par l'ASE

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