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"Au bonheur d'Elise"
psychanalyse
8 septembre 2017

Mort de Kate Millett, la grande féministe qui remettait Freud à sa place

article publié dans Le Nouvel Observateur

Mort de Kate Millett, la grande féministe qui remettait Freud à sa place
L'activiste féministe Kate Millett, lors d'une fête surprise pour sa nièce, à New York, le 21 mai 1979. (Ron Frehm/AP/SIPA)

« La Politique du Mâle » l'avait propulsée de thésarde à l'université de Columbia en théoricienne centrale de la deuxième vague féministe. Kate Millett est décédée ce mercredi 6 septembre d'une crise cardiaque, à Paris, à l'âge de 82 ans. Elle y fêtait son anniversaire avec son épouse, la photographe Sophie Keir. 

Née à Saint-Paul dans le Minnesota en 1934, une ville «où il est plus agréable de revenir que de grandir», confiera-t-elle à «L’Obs», elle est la cadette de trois filles. Elle assiste aux cours de l'université du Minnesota, avant qu'une riche tante lui paye des études à Oxford. Elle y deviendra la première femme américaine à recevoir un diplôme d'études supérieures avec mention très bien. De retour aux Etats-Unis, elle entame une carrière universitaire à l'université de Caroline du Nord, qu'elle abandonne rapidement pour faire de la sculpture et d’autres petits jobs. Sur un coup de tête, elle s'envole pour le Japon. Elle revient deux ans plus tard avec le sculpteur Fumio Yoshimura, qu'elle épouse en 1965. 

Sexe, islam, féminisme… grand entretien avec Leïla Slimani

« La Politique du Mâle », tiré de sa thèse à Columbia, est publié en 1970 aux Etats-Unis. Son idée principale est que la relation entre les sexes est politique. L'essayiste et théoricienne du féminisme radical Andrea Dworkin en dira: «Je ne vois personne qui a accompli ce que Kate Millett a fait, avec ce seul livre. Il reste l'alpha et l'oméga du mouvement féminin.» «Time Magazine» l'appellera la «Mao Zedong de la Libération des Femmes». 

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"Le monde appartient aux hommes" 

« L'Obs » l'avait rencontrée à l'occasion de la sortie française de son livre en 1971. Elle résume alors la situation: 

Chaque petit garçon est élevé dans l'idée qu'il peut, s'il a du mérite et de la chance, devenir président des Etats-Unis. Pour les petites filles, le but proposé, c'est d'être élue Miss America.» 

Avant d'expliquer comment son ouvrage lui est venu tout naturellement: 

Je me suis crue obligée de parler haut. Je craignais que personne n'écoute. Mais je n'ai fait que mettre en batterie un vieux cliché: le monde appartient aux hommes.» 

Dans «La Politique du Mâle», elle met en pièces Henry Miller («il réduit la femme à ses organes génitaux»), D.H. Lawrence («un prisonnier du culte phallique») et Norman Mailer («obsédé par une homosexualité latente»). A ses yeux, seul Genet a compris «l'aspect réactionnaire des rapports de force entre les sexes». Millett livre aussi une charge féroce contre Freud. Ce sont les bonnes feuilles sur ce thème que «L’Obs» publie alors – dans le numéro contenant aussi le «Manifeste des 343 salopes».

Un "funeste projet" pour la bibliothèque féministe Marguerite-Durand

Freud remis à sa place

Selon elle, en affirmant que le destin psychologique de la femme est irrémédiablement lié à son «envie de pénis», Freud n'a fait que «rationaliser l'odieuse relation entre les sexes, ratifier la répartition des rôles et valider les différences de son tempérament». Et de trancher:

S'il est extrêmement regrettable que Freud ait choisi [...] de se concentrer sur les distorsions de la subjectivité infantile, son analyse aurait pu cependant présenter un intérêt considérable s'il avait été assez objectif pour reconnaître que la femme naît femme dans une culture dominée par les hommes, portée à étendre ses valeurs jusqu'au domaine de l'anatomie elle-même et capable, par conséquent, d'investir les phénomènes biologiques d'une force symbolique.» 

Plus loin, elle critique l'idée selon laquelle l'enfantement trouve également sa base dans le désir de pénis.

Donner le jour finit par devenir une prérogative masculine, puisque le bébé n'est que le substitut du pénis. La femme se fait battre à son propre jeu, celui de la reproduction, le seul que la théorie freudienne lui recommande.»

Ainsi, «donnerait-elle naissance à tout un orphelinat, que ce serait encore autant de petits godemichés.» 

Kate Millett remet le psychanalyste autrichien à sa place avec une démonstration implacable : 

Il semble que les filles fassent connaissance de la suprématie masculine bien avant d'avoir vu le pénis de leur frère. Elle est si bien intégrée à leur culture, si présente dans le favoritisme de l'école et de la famille, dans l'image que leur présentent de chaque sexe les médias, la religion, tous les modèles du monde adulte perçus par elle, que l'associer à un organe génital du garçon ne leur apporterait rien de plus, puisqu'elles ont déjà appris mille autre signes de différence sexuelle. Devant tant de preuves concrètes de la situation supérieure qui est faite au mâle et sentant de toutes parts le peu de cas que l'on fait d'elles, les filles envient, non le pénis lui-même, mais les prétentions sociales auxquelles le pénis autorise.» 

75 ans après sa mort : désacraliser Freud?

Résidence d’artistes féminines

Après «La Politique du mâle», Kate Millett s’est consacrée à des essais autobiographiques sur la sexualité et la maladie mentale. En 1974, elle publie «Flying», qui traite des retombées de la célébrité littéraire pour elle qui a toujours été mal à l’aise dans la lumière. Dans «Sita» (1977), elle retrace son coming-out. Dans «En Iran» (1981) , elle raconte son voyage en Iran pour la première célébration de la Journée internationale de la Femme et le groupe de soutien qu’elle a monté pour les femmes fuyant le régime de Khomeini. Dans «The Loony-Bin Trip» (1990), elle se confie sur son trouble bipolaire. 

Tu seras une féministe, ma fille

Son succès lui a permis d’acheter une grande ferme à LaGrange, dans l'Etat de New York. Elle y a fondé le Millett Center for the Arts, une résidence d'artistes féminines, financée en cultivant et en vendant des sapins de Noël. En 2012, Millett a reçu le prix Yoko Ono Lennon Courage for the arts et, en 2013, elle a été intronisée au US National Women’s Hall of Fame

Preuve de son endurance jusqu'à la quatrième génération de féministes, la productrice, actrice et scénariste Lena Dunham lui a rendu hommage sur Twitter : «Elle a été la pionnière de la pensée féministe, a déstigmatisé la maladie mentale, portait des lunettes gigantesques à la mode».

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29 août 2017

La différence entre psychiatre, psychologue, psychothérapeute et psychanalyste ?

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La différence entre psychiatre, psychologue, psychothérapeute et psychanalyste ?


  • Psychiatre = c’est un médecin. Sa spécialisation, qui nécessite 4 à 5 ans d’études après la formation médicale commune, concerne la santé mentale.

Le psychiatre est le seul praticien à pouvoir prescrire des médicaments . Il peut traiter des maladies mentales graves, comme les psychoses, la schizophrénie, les maniaco-dépressions, etc.

Il peut faire usage de psychothérapies, mais il n’y est pas obligatoirement formé.

Il peut proposer une hospitalisation dans un centre spécialisé, ou l’imposer le cas échéant.

 

  • Psychologue = sa spécialité est d’étudier le comportement humain et son fonctionnement psychique.

Le psychologue auquel nous pensons spontanément, c’est-à-dire celui que l’on consulte pour des problèmes psychologiques ou pour une souffrance émotionnelle, est un psychologue clinicien. Il existe d’autres branches de la psychologie : la psychologie expérimentale et la psychologie industrielle.

En général, le psychologue clinicien proposera des entretiens à son patient ou lui fera passer des tests pour cerner sa personnalité. Le psychologue cherche à soutenir le travail introspectif du patient pour l’aider à résoudre un problème moral.

Il exerce à son compte ou dans une institution.

Le titre de psychologue est reconnu par l’État et protégé par la loi. Ainsi, tout le monde ne peut pas se déclarer psychologue. Un psychologue est titulaire d’un diplôme de niveau bac+5. Ce n’est pas un médecin.

 

  • Psychothérapeute = la psychothérapie (du grec « soin de l’âme ») traite des troubles psychologiques, sociaux et psychosomatiques par des thérapies très diverses, de l’hypnose aux thérapies existentielles et cognitivo-comportementales.  Il convient donc de bien se renseigner avant de débuter une psychothérapie !

Pendant longtemps, le titre de psychothérapeute n’était pas reconnu par l’État. Le titre de psychothérapeute est désormais reconnu, réservé aux médecins, ou aux titulaires d’un master dont la spécialité ou la mention est la psychologie ou la psychanalyse et qui ont suivi une formation en psychopathologie clinique. Les détenteurs du titre doivent être en outre inscrits au registre national des psychothérapeutes.

Ainsi, nombre de psychothérapeutes sont médecins ou psychologues.

 

  • Psychanalyste = un psychanalyste est un adepte de la psychologie clinique développée par Sigmund Freud, dont il existe des variantes (celles de Jung, Lacan, Dolto, etc.)

Le titre de psychanalyste n’est pas reconnu par l’État. Cependant, le titulaire d’un diplôme de niveau master en psychanalyse peut demander le titre de psychothérapeute. Un psychologue peut en outre faire usage de la psychanalyse.

24 août 2017

A quoi sert le Plan Autisme 4 (partie 1) ?

Le 6 Juillet 2017 a été solennellement lancé le Plan Autisme 4. Cet événement, venant à la suite d’une campagne électorale porteuse de beaucoup de promesses et d’optimisme pour les personnes handicapées, paraît être une raison supplémentaire d’espérer. Le Plan Autisme 4 doit prendre la suite du Plan Autisme 3, qui couvrait la période 2013-2017. Celui-ci a été évalué par l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) dans un rapport paru en mai 2017[1]. L’IGAS rappelle que ce 3e Plan Autisme a été construit sur la base des recommandations de bonnes pratiques publiées par la Haute Autorité de Santé en 2012, mais que ces recommandations « demeurent contestées dans certains établissements sanitaires et médico-sociaux, et parfois mal appliquées », d’où un bilan «  hétérogène  » dans lequel les rapporteurs pointent les faiblesses persistantes. Parmi celles-ci, on note principalement :

  • un pilotage qui peine à prioriser les mesures en l’absence de données épidémiologiques et qui peine également à agir hors du secteur médico-social ;
  • une insuffisance persistante de la scolarisation pour les enfants ;
  • un retard abyssal dans la prise en charge des adultes et une méconnaissance de leurs besoins ;
  • un retard également profond dans la rénovation des formations des professionnels amenés à travailler avec des personnes autistes : la mise en œuvre des recommandations de bonnes pratiques publiées en 2012 par la Haute Autorité de Santé (HAS) n’est toujours pas à l’ordre du jour pour la majorité des organismes.

L’IGAS clôt son rapport par une liste de 48 recommandations qui témoignent de la nécessité d’un nouveau Plan Autisme, car les besoins des personnes autistes, comme les obstacles, demeurent immenses. Les familles concernées par l’autisme, retrouvant effectivement dans cette liste les difficultés auxquelles elles sont confrontées quotidiennement depuis des années, attendent à présent des pouvoirs publics que le nouveau Plan Autisme agisse de façon efficace pour améliorer la situation. Cependant, les premiers préparatifs de ce nouveau plan s’accompagnent de signaux inquiétants quant à son futur contenu.

L’apaisement, le retour par la fenêtre de la psychanalyse ?

On se souvient de François Hollande qui avait annoncé, le 19 mai 2016 lors de la Conférence Nationale du Handicap, la mise en place d'un quatrième Plan Autisme, et que ce plan serait « celui de l’apaisement et du rassemblement. Parce que nous devons avoir toutes les réponses et les réponses les plus adaptées, sans préjugés et sans volonté d’imposer une solution plutôt qu’une autre  »[2]. Cette dernière phrase, apparemment consensuelle, reprend les termes de groupes qui soutiennent, en autisme, la psychanalyse, ainsi que d’autres méthodes non recommandées (les 3i, le packing, etc). On peut lire par exemple dans le texte publié le 9 Mai 2017 sur le site de l’association RAAHP (Rassemblement pour une Approche des Autismes Humaniste et Plurielle) : « Pour apaiser les conflits, il conviendrait que le gouvernement garantisse sa place à chacun des courants. »[3] François Hollande souhaitait-il se plier à cette revendication dans un but électoral ? Les associations de défense de la psychanalyse les ont très bien accueillis ces propos[4] ! Dans le refus d’ « imposer une solution plutôt qu’une autre », les familles elles, ont lu un renoncement. Oubliée la volonté politique d’imposer aux professionnels médicaux, para-médicaux et sociaux, d’utiliser en matière d’autisme des méthodes fondées sur les preuves et évaluées par la science ? Les familles ne peuvent et ne pourront pas l'accepter.

Les résultats des élections présidentielles, accompagnés par le discours volontariste et engagé du nouveau Président de la République, leur ont donné l'espoir que le nouveau gouvernement fera passer les intérêts des personnes autistes, l'intérêt général, avant les intérêts des corporations d’obédience psychanalytique et mettra en œuvre des mesures concrètes rapidement.

Or le premier constat est décevant : il n’en est rien.

En effet, le Plan Autisme 4 commence par « une intense concertation qui se déroulera à la fois dans les territoires et au travers de groupes de travail nationaux jusqu’en fin d’année 2017 »[5]. On se demande pourquoi le gouvernement éprouve le besoin d’encore six mois de « concertation intense » : pour savoir ce qu’il faut faire ? On le sait déjà. En effet les instances publiques ont sur la table :

  • les points du Plan Autisme 3 qui n’ont pas pu être mis en œuvre alors que leur nécessité et leur urgence n’ont pas diminué ;
  • les 48 recommandations détaillées du rapport de l’IGAS ;
  • les recommandations proposées en matière de recherche, par la Commission Scientifique Internationale préparatoire au Plan Autisme 4 qui s’est tenue à Paris les 15 Mars et 3 Avril 2017.

On s’étonne donc de ce délai supplémentaire, même si on peut comprendre que la mise en place d’actions concrètes nécessite une co-construction avec tous les acteurs concernés, notamment pour faire le lien entre la politique définie au niveau national et les agents de sa mise en œuvre au niveau des territoires.

En revanche, on comprendrait très difficilement que le pilotage de certains groupes de travail au niveau national soit confié à des défenseurs avérés de la psychanalyse appliquée à l’autisme. Comment le pilotage du plan 4 peut-il espérer que des militants défendant encore aujourd'hui des interventions n'ayant en 40 ans jamais pu documenter leur efficacité, puissent être une présence constructive dans des commissions censées produire un consensus ? Faut-il rappeler :

  • l’avis n° 102 du Conseil Consultatif National d’Ethique en 2007, qui constatait « l'impasse à laquelle cette théorie [psychanalytique] a pu conduire en matière d’accompagnement, de traitement et d’insertion sociale » ?[6]
  • les recommandations de la Haute Autorité de Santé concernant les interventions éducatives et thérapeutiques chez l’enfant et l’adolescent, qui classaient les interventions psychanalytiques comme « non consensuelles » car non validées scientifiquement ?
  •  le compte-rendu de la commission scientifique internationale qui s’est tenue en avril 2017, les propos de Jonathan Green : « Je crois que nous sommes d’accord pour dire qu’il n’existe pas de preuve, nulle part dans le monde, qui soutienne le recours à la psychanalyse pour l’autisme. Nous fondons ce commentaire sur deux bases. D’une part, il n’existe aucun rapport ou étude de l’efficacité d’une telle intervention. D’autre part, la théorie sous-jacente à l’utilisation de la psychanalyse, c’est-à-dire comprendre l’autisme – c’est la base de l’intervention –, est fausse du point de vue scientifique. La méthode de traitement n’est donc pas valable dans ce cas-là, et il n’y a pas de preuve pour la soutenir. Je crois que nous avons, parmi les experts, un accord sur ce point. »[7]
  • le quotidien des familles qui découvrent que leur enfant est autiste et qui sont confrontées, chaque semaine, chaque jour, en France, en 2017, à des refus de diagnostic (« lui mettre une étiquette ne va pas l’aider »), à des diagnostics faux (« dysharmonie psychotique »), à des prises en charge inefficaces, contraires aux recommandations, dans les établissements publics de santé (rapport de l’IGAS : « une proportion importante d’HJ [hôpitaux de jour] s’oppose à l’application des RBP [recommandations de bonnes pratiques] et ne montre aucune volonté de modifier ses pratiques »), à la nécessité de payer des prises en charge conformes auprès de professionnels libéraux, à des placements abusifs sur la foi de propos ignorants de l’autisme (affaire Rachel) ?

Madame la Ministre Sophie Cluzel a justement réaffirmé devant la Commission des Affaires Sociales qu’il « ne faut pas déroger aux recommandations de bonne pratique »[8]. Les familles ne pourront accepter que des psychanalystes, qui ne cessent de refuser ces mêmes recommandations, coordonnent l'élaboration de la future politique de l’autisme en France. Comment sinon demander la confiance des usagers dans l’action politique en matière d’autisme ? Il est hors de question de remettre les enfants, leurs familles et les adultes touchés par l’autisme à leurs bourreaux, qui continuent à nuire encore à tant de personnes concernées par l’autisme, alors que l'état de la science internationale condamne explicitement leur prétendues « pratiques ».

 

D’autre part, la concertation du Plan Autisme 4 prévoit la représentation d’associations d’usagers concernés par l’autisme. Nous souhaitons que cette consultation ne soit pas purement cosmétique. En effet, les associations, confrontées chaque jour aux difficultés concrètes des personnes autistes, sont porteuses d’une expertise réelle et solide.

La mission de l’IGAS sur le Plan Autisme 3 a mis en lumière de très nombreux dysfonctionnements. Encore n’a-t-elle pas consulté les « usagers », pourtant représentés par de nombreuses associations compétentes sur le sujet. Elle aurait pu être informée encore d'autres points de blocage, qui sont responsables de la détresse quotidienne de nombreuses personnes. Par exemple, le refus de la CNSA de revoir le guide d’évaluation des besoins des personnes handicapées (GEVA) pour l’adapter à l’autisme. Autre exemple, le refus de la Direction Générale de la Cohésion Sociale de revoir le guide-barême utilisé par les MDPH. Ainsi, le déficit de capacités sociales n’étant pas un critère permettant la reconnaissance d’un handicap, alors qu’il est à la base du diagnostic, de jeunes adultes se retrouvent dans une grande précarité, dans l’impossibilité de travailler, mais se voyant refuser l’accès à l’AAH et aux aides qui peuvent en découler pour le logement. On souhaite que la consultation des usagers soit le moyen d’une réelle prise en compte de leurs besoins, et non pas seulement l’alibi d’un projet écrit sans eux.

Par ailleurs, les associations qui aident les personnes autistes sont aussi porteuses des projets pour leur défense. Lors de la concertation nous voulons être représentés par les associations compétentes, militant pour le progrès des droits des personnes autistes et pour des prises en charge fondées sur les preuves scientifiques, et non par les exceptionnels tenants de la dogmatique pseudo « liberté de choix » en autisme. L’action politique consiste à faire preuve de discernement et de courage pour faire ensuite des choix pertinents. Les choix constatés nourriront, ou non, un rétablissement de la confiance entre le politique et la majorité de la société civile. 

 

 
16 août 2017

Et si l’intelligence artificielle était la réponse à la plus grande injustice en santé mentale?

article publié sur le Huffington Post

Il reste encore plein de mystères sur l’autisme, mais une chose est sûre : on peut aider les personnes autistes et leurs familles.

15/08/2017 09:00 EDT | Actualisé il y a 5 heures
Jirsak via Getty Images


Cette injustice est tellement importante que l’UNESCO a déterminé que l’information sur la santé fait partie des droits de l’homme.

Cela fait déjà longtemps qu'on prévoit que l'intelligence artificielle (IA) va révolutionner le domaine de la santé mentale. On sait qu'elle va nous aider à mieux détecter les difficultés de santé mentale des personnes, qu'elle va nous aider à offrir de meilleurs services. Mais aujourd'hui, je vais vous parler d'une autre révolution qu'elle entrainera et dont vous n'avez jamais entendu parler : L'IA va résoudre l'une des plus grandes injustices du domaine psychosocial !

Quelle est cette injustice ? Comment l'IA va nous aider ? On va y réfléchir ensemble en prenant un exemple : l'autisme.

Il reste encore plein de mystères sur l'autisme, mais une chose est sûre : on peut aider les personnes autistes et leurs familles.

L'autisme est un trouble neurodéveloppemental qui touche plus de 1% de la population. Il se manifeste principalement par des difficultés importantes dans la communication et les interactions sociales ainsi que par la présence de comportement, d'activité et d'intérêt restreint. Il reste encore plein de mystères sur l'autisme, mais une chose est sûre : on peut aider les personnes autistes et leurs familles. Mais on ne peut les aider qu'à une condition : qu'ils reçoivent des services efficaces et adaptés.

Selon vous, qu'est-ce qui fait que certains enfants autistes vont avoir accès à d'excellents services qui vont leur permettre d'aller mieux alors que d'autres vont se retrouver à suivre des soins totalement inefficaces, qui risquent même d'empirer la situation ?

Les services disponibles ? L'argent des parents ? Le pays de naissance ? Ce sont tous des facteurs importants, mais ils ne suffisent pas !

Prenons le cas de cet enfant autiste de 5 ans mort à la suite de l'administration d'une thérapie inutile (1 , 2 *) et inacceptable en autisme : la chélation. Ou prenons le cas de nombreux enfants autistes qui suivent une thérapie psychanalytique. Une thérapie qui non seulement a été démontrée depuis longtemps comme inefficace (ex : 3, 4), mais qui en plus ose souvent accuser les parents d'avoir causé l'autisme de leur enfant (exemple).

Ces tragédies ont eu lieu dans des pays avec beaucoup de ressources, les parents avaient de l'argent (ces thérapies sont extrêmement dispendieuses), des services de qualité existaient. Alors pourquoi cet enfant est mort et pourquoi des parents ont dû vivre le traumatisme de se croire coupables de la souffrance de leur enfant ?

On prend tous nos décisions en fonction de l'information que l'on a et si on nous prive de cette information on ne PEUT pas prendre une décision optimale.

La réponse la plus facile est de mettre la faute sur les parents : « Ils ne se sont pas bien informés », « ils sont trop crédules », etc. Je trouve ça inadmissible ! Je n'ai aucun doute que ces parents ont fait le mieux pour prendre les meilleures décisions possible. Je ne remets en doute ni leur intelligence, ni leur engagement, ni leur volonté d'aider leurs enfants, ni leur habileté. NON. Je pense qu'ils sont victimes d'une injustice majeure : en tant que société on ne leur a pas donné les informations nécessaires pour prendre des décisions éclairées. On prend tous nos décisions en fonction de l'information que l'on a et si on nous prive de cette information on ne PEUT pas prendre une décision optimale.

C'est toujours cette injustice qui pousse les gens à faire confiance à des thérapies non démontrées ou dangereuses que ce soit la chélation, la psychanalyse, la communication facilitée, le packing, la holding thérapie, la sécrétine, etc.

Pour moi, ne pas donner à une personne accès aux meilleures informations sur des traitements revient à la laisser vulnérable à des thérapies dangereuses. On manque, en tant que société, à notre mission la plus basique : protéger les personnes les plus vulnérables.

Cette injustice est tellement importante que l'UNESCO a déterminé que l'information sur la santé fait partie des droits de l'homme.

Cette injustice est tellement importante que l'UNESCO a déterminé que l'information sur la santé fait partie des droits de l'homme. Pour être précis, il y est inscrit : « Tous les citoyens ont un droit d'accès à l'information qui concerne leur santé et la santé des membres de leur famille et de leur communauté. Il importe tout particulièrement d'insister sur la nécessaire protection des mères et des enfants inscrits dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, sur le droit des enfants d'accéder à l'information relative à leur santé inscrite dans la Convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant (article 26) et sur le droit de tout un chacun à une information suffisante pour pouvoir consentir en connaissance de cause à un traitement. »

Personnellement, je crois profondément à ce droit et je me bats pour lui. Je trouve inacceptable qu'aujourd'hui des gens souffrent et meurent simplement parce qu'on ne leur a pas donné accès à de l'information. L'information scientifique est un bien commun et elle doit être rendue accessible à tous !

Pourtant on est loin d'atteindre cet objectif. Et pas seulement dans le domaine de l'autisme. On a peu de chiffres à ce sujet, mais il semble qu'aujourd'hui seuls 14% de la recherche est utilisée et cela prend près de 17 ans pour qu'une recherche soit mise en application (5). Imaginez... 86% de notre recherche n'est pas utilisée... une recherche qui pourrait vous aider... que vous avez payé avec vos impôts. VOUS n'y avez pas accès !

Mais pourquoi une aussi faible circulation de l'information ? Il y a bien sûr des centaines de facteurs responsables, mais il y a déjà un facteur capital : on n'a pas la capacité de gérer la quantité de recherche scientifique et d'informations produites.

On estime plus de 3000 articles par jour en psychologie, encore beaucoup plus en médecine ! Comment voulez-vous pouvoir rester à jour ? De plus, certains auteurs estiment qu'en 2020 la quantité d'informations doublera tous les 73 jours (6). On ne sait pas comment trier, analyser, synthétiser une aussi grosse masse d'informations et on ne pourra jamais donner une information de qualité à tous sans régler ce problème.

Et c'est là que l'intelligence artificielle (I.A) peut jouer un rôle capital ! L'I.A est une experte pour traiter et analyser de grandes quantités d'informations. Elle peut donc scanner les recherches et ainsi vous donner accès instantanément à toutes les informations qui vous seront utiles pour prendre des décisions éclairées !

Le but est que chaque personne puisse venir sur l'application web, expliquer sa situation à l'I.A, poser une question et obtenir une réponse personnalisée et à jour !

Je sais que ça parait être de la science-fiction pourtant le premier prototype en autisme est en train d'être développé à Montréal : Myelin. Le but est que chaque personne puisse venir sur l'application web, expliquer sa situation à l'I.A, poser une question et obtenir une réponse personnalisée et à jour ! Si nous réussissons notre pari : tout le monde aura accès aux meilleures informations sur l'autisme et qu'enfin l'injustice du manque d'information soit une histoire du passé.

Une belle mission non ? Pour en savoir plus, regardez la vidéo de ma conférence de TEDx Laval où je parle un peu plus de cette situation : L'intelligence artificielle au service de la santé mentale.

* Les liens dans le texte vous renverront vers des vidéos, des pages d'associations ou des journaux. Les chiffres entre parenthèses vous renverront vers des articles scientifiques.

31 juillet 2017

A la botte de Macron, la psychanalyse se met En Marche.

29 juil. 2017
Par
Blog : RGB

Comment les plus prestigieux représentants de l'Ecole de la Cause Freudienne (ECF) sont à la botte d'un parti politique pour mieux suivre La Marche du Monde. Récit d'un acoquinement de canailles qui en dit long sur la bascule actuelle de la psychanalyse et de la liberté d'expression.

Hier, en pianotant sur l’écran de mon smartphone je tombe sur un article de la page Facebook Le Monde, écrit par une certaine Clotilde Leguil, et qui nous apprend que Nous vivons à l’ère de l'hypertrophie du Moi.

Partageant le même avis que cette grande psychanalyste et philosophe, je me décide donc à poster un commentaire mais quelques secondes plus tard ... impossible de le retrouver !

J'ai d'abord cru que le problème provenait de mon téléphone. Fastidieusement je me suis donc remis à écrire le même commentaire.

Mais une nouvelle fois voilà que mon commentaire disparaît !

J'ai d'abord pensé à un dédoublement de personnalité avec un Moi qui écrit un commentaire et l'autre qui l'efface secrètement. Ça serait pousser l'hypertrophie un peu trop loin ... 

Heureusement ma tendance paranoïaque à vite repris le dessus et je me suis dit que ça se pourrait bien que ce soit Le Monde qui supprime mon commentaire. Au bout de deux fois, on peut commencer à douter ... 

J'ai alors demandé à une amie de vérifier si elle voyait mon commentaire. Après vérification elle m'affirme qu'elle ne le voit pas non plus. En passant, elle m'a laissé un judicieux conseil - je n'y aurais jamais pensé seul :

"copie-colle ton message pour le republier et fait un imprime écran de ton commentaire sur la page du Monde."

Facilité dans ma tache, je m'en suis donné à cœur joie et ai posté à 8 reprises - avec un intervalle de 5/10 minutes entre chaque répétition - mon commentaire (et ce y compris en réponse à d'autres commentaires).

Et à 8 reprises mon commentaire a été supprimé.

Pour les curieux voici le commentaire en question auquel j'ai adjoint une vidéo qui vaut le coup d'œil :

" Clotilde Leguil, auteur de cet article, a tout à fait raison : nous vivons à l'ère de l'hypertrophie du Moi.
Cela se manifeste notamment chez les notoriétés publiques de l'ECF à dénoncer le désordre dont ils se sustentent.
Et ça peut même aller jusqu'à des consignes de vote pour les présidentielles et à réclamer le prix Nobel de la Paix pour BHL.
Clotilde Leguil, Jacques-Alain Miller et Bernard Henri-Lévy conquis par Emmanuel Macron. 
La psychanalyse à la botte d'un parti politique, quelle subversion ! Avec vous on est en droit de parler de la submersion de la psychanalyse. 
La récompense à votre soutien ne s'est pas faite attendre Mme Leguil.
Bravo pour votre publication dans les colonnes du Monde (qui n'est autre qu'une entreprise à se foutre du monde).

Vidéo : Clotilde Leguil conquise par Emmanuel Macron " 

Aujourd'hui, j'en suis à plus d'une vingtaine de tentatives de commentaire avec à la clé toujours le même résultat.  

La seule conclusion que j'ai pu tirer de cette drôle d’expérience est la suivante :

BHL est à la philosophie ce que Le Monde est à liberté d'expression, et ce que Clotilde Leguil & Jacques-Alain Miller sont à la psychanalyse.

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27 juillet 2017

QUESTIONS/RÉPONSES avec le Pr Christophe LANÇON - Chef de service - Pôle Psychiatrie Sud

Ajoutée le 4 déc. 2016

SOIRÉE DE L'ÉCHO - 11 mai 2016 - Pôle Psychiatrie Centre - Marseille.

25 juillet 2017

« Si Freud n’était pas déjà mort, je le tuerais »

article publié sur France TV Info

Lee Thomas

« Pendant 15 ans, j’ai consulté un psychanalyste dont la pratique s’appuyait sur la théorie de Sigmund Freud que je ne vous présente plus. Durant mes 5 premières années d’analyse, la fréquence des consultations était fixée à une fois par semaine, soit un total d’environ 240 séances. Les 10 années suivantes, nous sommes passés (avec mon accord) à une fréquence de 2 séances par semaine, soit un total d’environ 960 consultations.

En 15 ans, je me suis donc allongé environ 1200 fois et chaque séance me revenait à 40 euros (mon psychanalyste avait cette souplesse de me proposer un tarif en fonction de mon pouvoir d’achat). Mes 15 années d’analyse m’ont ainsi coûtées 48 000 euros. Bien-sûr, je n’ai bénéficié d’aucune prise en charge de la part de la sécurité sociale, car en France le titre de psychanalyste ne bénéficie d'aucun encadrement légal1 (contrairement à toutes les autres professions en santé mentale) et ne peut donc être couvert par l’assurance maladie.

Aujourd’hui, je vais mieux. Néanmoins, quelque chose me dérange : il existe en effet un certain nombre d’arguments solides2 qui tendent à me faire penser que le seul effet de ce millier de séances sur ma santé mentale ne serait qu’un effet placebo. Pour le dire autrement, il se pourrait bien que tout l’arsenal théorique de Freud ne soit qu'une vaste imposture3Cette investissement financier conséquent aurait donc été largement disproportionné par rapport au bénéfice reçu et j’éprouverais alors une rancune sauvage à l’égard de la pratique de mon psychanalyste ».

1. En France, n'importe qui peut légalement exercer en tant que psychanalyste sans diplôme, ni formation, ni expériences spécifiques. Les patients peuvent néanmoins trouver un professionnel dont le nom est enregistré dans les annuaires des associations de psychanalystes.

2. Nous disposons aujourd’hui d’une quantité de documents historiques et scientifiques qui nous amènent à remettre en question la validité de la théorie psychanalytique et donc à interroger l’éthique de cette pratique. En voici une liste non exhaustive :

Borch-Jacobsen, M. (1998). Souvenirs d'Anna O. : une mystification centenaire. Editions Aubier.

Borch-Jacobsen, M. (2011). Les patients de Freud. Sciences Humaines Editions.

Gauvrit, N. et Van Rillaer, J. (2010). Les psychanalyses : Des mythologies du XXe siècle ?

Lézé, S. (2010). L'autorité des psychanalystes. Paris : PUF.

Onfray, M. (2010). Le Crépuscule d'une idole. Grasset.

Stern, N. (1999). La fiction psychanalytique. Mardaga.

La polémique autour du rapport de l'INSERM (2004) sur l'évaluation de trois approches thérapeutiques différentes (psychanalytiques, cognitivo-comportementale, et familiale et de couple).

https://blogs.mediapart.fr/jacques-van-rillaer/blog/110617/psychanalyste-un-job-facile-pas-complique

http://www.scilogs.fr/ramus-meninges/en-marche-arriere-psychiatrie-psychologie/

3. Il s’avère que sur le divan, lorsque des patients observent un mieux-être, ces améliorations de leur état général seraient plus liées à des facteurs dits « non spécifiques », comme le fait de parler, de se savoir écouté, de croire que l’on va aller mieux, et moins à des facteurs spécifiques à la psychanalyse, comme « l’association libre » par exemple.

Pour conclure

Comparée aux autres pays du monde, l’influence psychanalytique est encore très importante en France. Les idées freudiennes persistent, notamment dans les milieux universitaires et les lieux d’enseignement. De même, les prises en charge psychothérapeutiques réalisées par les psychologues ou les médecins psychiatres s’appuient majoritairement sur les théories construites par Freud. La psychanalyse fait partie de notre patrimoine culturel, elle jouit d’un certain pouvoir social et d’une grande reconnaissance intellectuelle. De nombreux psychanalystes interviennent régulièrement en radio, télévision, on peut lire leurs articles dans la presse, leurs idées dans des ouvrages, etc. Dans notre pays, nous croyons en la psychanalyse et il est tout à fait naturel et admis que cette pratique puisse nous aider.

Comme le dit Samuel Lézé dans son ouvrage L'autorité des psychanalystes (2010), on peut se demander pourquoi les acteurs de ces pratiques (psychanalytiques) ne finissent pas par se rendre compte de leur inefficacité. Pourquoi la magie se maintient-elle sans preuves et n’aboutit-elle pas à sa critique ? Bref, pourquoi avons-nous encore foi en la psychanalyse ?

Publié par Jérome Lichtle / Catégories : Actu / Étiquettes : Freud, psychanalyse, psychanalystes

6 juillet 2017

« L’autisme, c’est un problème de lâcheté collective » déclare Danièle Langloys

La concertation sur le quatrième plan autisme doit être lancée jeudi à l’Elysée, en présence d’Emmanuel Macron. Un rendez-vous qui laisse sceptique la présidente de l’association Autisme France, Danièle Langloys.

Par Charlotte Chabas

La concertation sur le quatrième plan autisme doit être lancée, jeudi 6 juillet, à l’Elysée. Après un troisième plan qu’elle juge « raté », Danièle Langloys, présidente de l’association Autisme France, assistera au discours de clôture d’Emmanuel Macron. Elle espère surtout y voir « une parole politique forte » capable de « reconnaître les dysfonctionnements » du système de santé. « Si on ne s’y attaque pas, on pourra empiler les plans autant qu’on veut, rien ne changera sur le terrain », estime-t-elle.

Aujourd’hui, quel bilan tirez-vous du troisième plan autisme ?

Danièle Langloys : Je partage les constats de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), qui a publié un bilan particulièrement lucide, et sans langue de bois. Ça conclut qu’on est bien en deçà des promesses et que la plupart des objectifs n’ont pas été remplis.

Cette fois, il s’agit d’une dénonciation relativement claire des énormes dysfonctionnements français. Et le constat que, si on ne s’y attaque pas, on pourra empiler les plans autant qu’on veut, rien ne changera sur le terrain. Pour moi, le troisième plan autisme est donc un ratage.

Quels sont ces dysfonctionnements ?

Il y a trois problèmes de fond concernant l’autisme en France. Le premier est tout bête : on ne sait ni où sont les personnes autistes, ni qui elles sont. Au niveau mondial, les études épidémiologiques montrent dans tous les pays un taux de prévalence de l’autisme entre 1 et 1,5 % de la population. En France, la seule étude qu’on a réussi à réaliser a établi un taux de 0,36 %.

Ce n’est pas que l’Hexagone soit miraculeusement épargné, c’est juste qu’on s’est montrés jusqu’à présent incapables de réaliser une étude sérieuse pour repérer et analyser la population autiste en France. Il n’existe aucune statistique, on sait seulement qu’environ 90 % des adultes autistes n’ont jamais été diagnostiqués. C’est donc compliqué de mener une politique de santé publique au sens large quand on ne sait pas où est la population cible.

Le deuxième problème, c’est l’incapacité à refondre toutes les formations des professionnels : médecins, psychiatres, éducateurs du champ médico-social, psychologues, enseignants… On nous dit que les universités sont indépendantes, qu’elles déterminent leurs cursus. C’est pourtant un diplôme d’Etat qui est délivré à la fin, on peut donc demander à ce que la formation soit conforme aux recommandations de l’Etat. Là encore, on peut faire tous les plans qu’on veut, tant qu’on n’a pas les professionnels volontaires pour les mettre en place, ça ne sert à rien.

Enfin, il y a un troisième dysfonctionnement : l’absence de contrôle qualité derrière des subventions publiques. Aujourd’hui, il n’y a aucun moyen de sanctionner un établissement qui aurait reçu de l’argent pour mener à bien un plan et qui n’aurait pas utilisé ces fonds en ce sens. Certains hôpitaux de jour continuent de refuser d’appliquer les consignes du ministère en matière d’autisme, mais touchent toujours autant d’argent public.

Vous êtes donc sceptique sur le lancement de cette concertation ?

Mon association va avoir trente ans, ça fait trente ans qu’on demande les mêmes choses, on n’a jamais été entendu. On attend un changement de mentalité, un courage politique qui est capable de dire demain : « Oui, nous avons du retard dans le domaine de l’autisme, nous nous sommes trompés, il faut tout reprendre. » Soit on a la volonté forte d’avouer que les trois plans précédents n’ont servi à rien, soit on laisse tomber. Je doute que cette parole politique ne soit prononcée.

Quand j’entends parler de « concertation », ça me fait hurler. Quel est l’intérêt, si ce n’est une énième stratégie dilatoire. A quoi bon faire encore un état des lieux, quand tout le monde sait ce qu’il faut changer. Comme toujours, on grattera des petites mesures à la marge, sur le terrain, ça aura des mini-effets. Mais globalement, on laissera encore des familles au bout du rouleau seules face à une épreuve souvent destructrice.

Vous pensez que rien n’a évolué ces dernières années ?

Il y a des centaines d’exemples d’expérimentations positives, des bonnes intentions portées par des personnes, des associations. On sait que 37,7 % des places attribuées dans le médico-social en 2016 l’ont été pour l’autisme. On ne peut pas nier que ce sont des moyens, qu’il y a un effort national. Mais c’est toujours sur une base extrêmement précaire.

On a eu ces dernières années deux secrétaires d’Etat exemplaires, mais personne ne les a soutenues. Au cabinet de Ségolène Neuville, la dernière secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, ils ont bossé comme des fous, avec des conseillers de choc qui ont fait un travail époustouflant.

Mais ils ont buté contre le noyautage idéologique qui gangrène tout le combat de l’autisme. En France, la psychanalyse est très puissante. Je le respecte tant que c’est un lien privé entre adultes consentants, mais là ce sont des personnes vulnérables et des entourages démunis à qui on impose une vision psychanalytique qui n’a cours qu’en France.

On revient donc toujours à un problème de définition de l’autisme.

Depuis 1980, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a établi une définition de l’autisme comme un trouble neuro-développemental qui affecte les fonctions cérébrales. En clair, un fonctionnement différent du cerveau, dès l’état de fœtus. Pas une affection psychologique ou une maladie psychiatrique.

Mais c’est une définition qui n’est toujours pas acceptée partout en France. L’autisme est resté le fantasme national de la pédopsychiatrie, avec notamment la question du lien mère-enfant, le rapport au père qui aurait été manqué. Comment on peut laisser faire ça sur le plan éthique ? Les associations de parents ne pèsent pas lourd face au corps médical qui se défend.

Que préconisez-vous pour faire évoluer les mentalités ?

J’ai passé un peu de temps au Québec avec mon fils adulte, qui est autiste. Je suis arrivée dans un restaurant avec lui, la serveuse ne m’a rien demandée, elle nous a juste dit : « Si vous avez besoin d’un endroit où la lumière est plus tamisée, si vous voulez aménager un plat, n’hésitez pas. » Cette serveuse connaissait l’autisme, connaissait l’hypersensibilité de la vue ou de l’audition qui l’accompagne souvent et les troubles alimentaires très courants. Parce que, là-bas, ce n’est pas tabou de parler du handicap, de l’expliquer. C’est dans la culture du pays, grâce notamment à des campagnes nationales régulières.

En France, traiter quelqu’un « d’autiste », c’est l’insulte à la mode. Même François Fillon pendant la campagne présidentielle n’arrêtait pas de dire qu’il « n’était pas autiste ». Vous n’imaginez pas comme ça me met hors de moi.

Le grand public n’a aucune idée de ce qu’est un autiste, a toujours une vision négative du handicap. Dans la rue par exemple, si votre enfant se met à crier, on vous regarde en jugeant que vous ne savez pas l’élever, que c’est la faute de la famille. On nous dit toujours que c’est le temps de la pédagogie, que ça prend vingt ans : allez dire ça aux proches qui souffrent.

L’autisme, c’est un problème de lâcheté collective. Et pourtant, on ne peut pas dire qu’on ne sait pas, qu’on ne peut pas. C’est juste que personne ne veut mettre les mains dans le cambouis.

1 juillet 2017

L’autisme dans une bibliothèque publique française en 2017

article publié dans AGORAVOX

par Copper Lebrun

samedi 1er juillet 2017

Je me suis récemment rendu à la biblitohèque municipale (qui est tout à fait ordinaire) à la recherche des données qu'une personne lambda pourrait quérir afin de s'informer sur l'autisme.

Je remarque d'abord qu'aucun ouvrage sur le sujet n'est disponible dans les rayonnages : pas plus que sur d'autres troubles psychiques, tels que schizophrénie, bipolarité, trisomie.

La bibliothèque semble à l'égard de ces sujets à l'image de la société française actuelle : sélective dans ce qu'elle choisit de montrer au monde. Nous ne sommes pas censés vivre dans un monde où les personnes atteintes de spécificités mentales auraient droit à une quelconque représentativité.

Je me penche dès lors vers des ouvrages spécialisés où un individu concerné pourrait aller chercher l'avis de personnes qu'il considérera comme disposant d'une expertise en la matière.

Je commence par la définition donnée par un dictionnaire à l'usage des IDE (Infirmiers Diplômés d'Etat), susceptible de servir de référence aux personnels hospitaliers.

Voici :

DICTIONNAIRE MEDICAL A L'USAGE DES IDE (3e édition)

Editions Lamarre, 2009

Par Michel Lacombe, Jean-Luc Pradel, Jean-Jacques Raynaud

"Autisme n.m. Perte de communication avec le monde extérieur au profit d'un monde intérieur imaginaire, et qui se manifeste par un isolement."

Qu'en penser ? Les infirmiers sont supposés avoir de l'enfant autiste l'image de quelqu'un qui s'enferme en lui-même parce qu'il serait habité par d'incompréhensibles et troublants fantasmes. Comme le montre ce lien vers le site EgaliTED, les soins prodigués à l'hôpital psychiatrique consistent en toute logique à tenter de restaurer la relation à l'autre que l'enfant n'aurait pas eu l'opportunité de créer dans sa vie. Ce sont des exercices de "mise en relation" afin de restaurer de façon "dynamique" un lien à autrui considéré comme sain et naturel. En pratique, cela se passe ainsi : il s'isole "naturellement", donc nous allons l'isoler encore plus. Dès lors que seront avérés l'absence de langage verbal et des "bonnes" techniques de communication, l'enfant autiste sera considéré comme une machine cassée et dont les éléments s'agitent inutilement, sans qu'il soit nécessaire ni raisonnable d'y répondre autrement que par les barrières désocialisantes et déshumanisantes que sont les médicaments et le contexte enfermant de l'unité hospitalière. Selon certains experts, cela risquerait d'agraver ses troubles.

 

A la suite :

GRAND DICTIONNAIRE DE LA PSYCHOLOGIE

Editions Larousse, 2011

Par Henriette Bloch, Roland Chemana, Eric Dépret, Alain Gallo, Pierre Leconte, Jean-François Le Ny, Jacques Postel, Maurice Reuchlin

 

La prise en charge de l'enfant autiste

"Dans les pays européens, les enfants autistes sont généralement soignés dans le cadre des hôpitaux de jour."

Il semble rassurant pour les petits français que nous sommes de constater que l'Europe dans son ensemble adopte pour le soin des personnes autistes le modèle thérapeutique de l'Hexagone. Mais c'est (heureusement) faux.

http://www.santemagazine.fr/actualite-autisme-quelle-prise-en-charge-selon-les-pays-60226.html

 

"Dans ce type d'institution, qui permet le lien familial, la prise en charge thérapeutique de l'enfant s'effectue dans un esprit pluridisciplinaire : activité éducative visant à amener l'enfant à se reconnaître comme individu et à reconnaître en tant qu'individus les autres membres du groupe ; activité pédagogique et scolaire adaptée à l'état de l'enfant ; travail rééducatif de type psychomoteur ou travail de rééducation du langage, prenant en compte les caractères particuliers du trouble instrumental ; psychothérapie individuelle de l'enfant, surveillance et soins pédiatriques. [...]"

L'autiste (dans un pur jargon franco-freudien qui tente de se faire passer pour du français sous un prétexte de vocabulaire spécialisé), serait inapte à se "reconnaître comme individu" et "à reconnaître en tant qu'individus les autres membres du groupe". Difficile de ne pas voir dans cette tentative de recréer en domaine médical l'image d'un milieu familial qui serait "sain" et "constructif" les conséquences des théories encore vivaces de la mère pathogène et toxique, à laquelle il faudrait à tout prix soustraire l'enfant.

Il est en effet tout à fait faux de considérer l'enfant autiste comme un être "avorté" de la réalité, incapable d'identifier des personnes extérieures à lui, et il serait par conséquent stupide pour les parents d'un tel enfant de le croire : mais en face d'un spécialiste armé de pied en cap d'un vocabulaire terrorisant, en ont-ils les moyens ?

 

"Le pronostic à long terme a été amélioré par les thérapeutiques actuelles, mais il reste encore parfois réservé. L'évolution déficitaire, qu'elle soit globale ou en secteur, est sans aucun doute le risque évolutif majeur. Parfois, l'évolution se fait vers une persistance du processus psychotique avec possiblité d'évolution schizophrénique à l'adolescence. La névrotisation, enfin, apparaît comme une forme plus favorable d'évolution lorsqu'elle permet l'établissement d'un lien relationnel satisfaisant avec autrui."

Pour ma part, moi qui n'ai pas pris freudien deuxième langue, je peine à comprendre le processus de "névrotisation". En revanche, "processus psychotique", je le comprends. C'est grave. Irrécupérable. Comme la schizophrénie, à laquelle selon ce grand médecin, (même si la différence entre autisme et schizophrénie a été établie formellement en contexte expérimental depuis les années 70 et reconnue par le British Journal of Psychiatry) les autistes semblent malheureusement voués à l'âge adulte. Voilà donc où passent les autistes que l'on voit à la télé ou dans des reportages sur France 5 intitulés "le Monde de l'Autisme" et où ne sont présentés pratiquement que des enfants ! Ils deviennent psychotiques.

Pronostic, donc, d'enfermement et de cachetonnage pour la vie. Entre psychotiques, ils se comprendront. Comme le dit si bien Josef Schovanec, ils pourront regarder les oiseaux sous neuroleptiques. Comment se fait-il, pourtant, qu'en Angleterre, 70 % des enfants autistes reçoivent une éducation en milieu ordinaire ?

 

Je cherche désespérément un contre-argument quelque part :

DICTIONNAIRE DES TERMES DE MEDECINE (27e édition)

Editions Maloine, 2003

Par Marcel Garnier et Valery Delamare

"Autisme, s. m. (Bleuler) (gr. autos, soi-même) [angl. autism] Degré le plus avancé de la schizophrénie ; développement exagéré de la vie intérieure et perte de tout contact avec la réalité. _a. infantile Syn.syndrome de Kanner. Syndrôme autistique apparaissant avant l'âge de deux ans. V. Asperger (syndrôme d')"

OK. Là je suis tombé dans la 4e dimension. Un "dictionnaire des termes en médecine" m'informe que l'autisme est la phase la plus avancée de la schizophrénie ??? Ceci alors que les médecins généralistes, dans leur formation, n'ont pas plus d'une heure de cours sur l'autisme ??? Votre enfant, qu'est-ce qu'il a madame, un problème à sa têtête, ça ressemble à CI ça ressemble à CA, mais oui n'est-ce pas cher confrère, mon diagnostic est le suivant : pizza royale, quatre-fromages-quatre-saisons, la totale !?

 

"Asperger (syndrôme d') (A. Hans, autr. 1944) [angl. Asperger's syndrome] Variété d'autisme infantile associée à des performances exceptionnelles dans certains domaines tels que la mémoire ("idiots savants").

Ah oui, et donc bien sûr, les "Asperger" ce sont tous des savants. Associés à des idiots qui plus est. Des ordinateurs vivants qui recrachent des données sans les comprendre. Dans ce contexte, pas étonnant que pas plus d'un psychiatre sur trois ne soit capable d'évoquer le syndrôme d'Asperger quand il en ont un représentant en face d'eux, avec tous les symptômes (expérience personnelle).
 

Autant dire que je me sens bien "compris". J'ai également pu trouver un admirable résumé de la situation des autistes en France :

DICTIONNAIRE DE LA PSYCHANALYSE (réédition de 2011)

Par Elisabeth Roudinesco et Michel Plon

"L'une des synthèses les plus brillantes de l'histoire et de la genèse des différentes approches de l'autisme a été réalisée par le psychanalyste français Henri Rey-Flaud qui a distingué nettement l'autisme de la psychose. Au terme d'une longue enquête, il est parvenu à décrire le monde énigmatique des enfants autistes, un monde de souffrance, de silence et de rituels insolites, dont la présence nous touche, tant il nous rappelle celui ancestral du règne animal dont l'homme est issu, ou encore celui archaïque de la naissance, cette césure qui nous fait passer de la vie utérine à la vie sociale.
Les autistes s'expriment avec des gestes et des cris, mais aussi avec des mots, tout en s'agrippant à des objets défectueux. A l'inverse de nous, ils se bouchent le nez pour le pas entendre et les oreilles pour ne pas voir. Les enfants autistes_ environ quatre sur mille, et en majorité des garçons_ ne sont tolérés ni à l'école, ni dans les lieux publics. Ils font peur, ils sont parfois violents ou repliés sur eux-mêmes, ils ont l'air d'accomplir des tâches incohérentes et ont donc besoin d'être pris en charge en permanence par leurs parents et par des équipes de thérapeutes et d'éducateurs qui les font vivre à leur rythme, tout en les soignant. A cet égard, il est absurde, comme l'ont fait certains psychanalystes, de culpabiliser les parents, voire de les accuser d'être à l'origine de la maladie de leurs enfants. L'autisme est une énigme et il semble bien que les théories ne servent à rien si elles en s'accompagnent pas, dans la pratique du thérapeute, d'une écoute permettant à l'enfant de passer d'un chaos primordial à un univers de langage, seule manière pour lui d'entrer en contact avec le monde des autres humains."

 

Voilà donc : l'autisme est le chaînon manquant entre l'homme et l'animal. C'est bien un "avorton", mort-né aux relations humaines. C'est donc en toute logique que cette pauvre créature ne pourra passer sa misérable existence qu'entourée et surveillée en permanence.

En lisant "tolérés ni à l'école ni dans les lieux publics" j'ai vu l'image, dans ma tête, du panneau encore affiché à Shanghaï de nos jours "dogs and Chinese not allowed" ("interdits aux chiens et aux chinois").

Au sujet de quelle catégorie d'individus peut-on, en 2017 en France, tenir un pareil langage ??

 

Est-ce que j'ai bien vu ce que j'ai vu ? Une ribambelle de pseudo-spécialistes tous aussi interchangeables et inutiles les uns que les autres, afin de justifier le nihilisme thérapeutique et l'abandon moral d'êtres dont personne ne veut (qui pourrait bien en vouloir d'ailleurs ??) et que personne ne se donne le courage de laisser mourir ?

Dans cette bibliothèque, un seul ouvrage, à ma connaissance, offre une échappatoire, c'est le livre de Marcel Rufo qui évoque entre deux suggestions d'hôpital de jour les recommandations de la Haute Autorité de Santé, à savoir l'existence de thérapies telles qu'ABA et TEACCH.

Qu'en pensez-vous ? Est-ce que le corps médical dans son ensemble vous semble oeuvrer pour le bien-être et l'épanouissement des personnes autistes ? Est-ce que la moindre chance leur est donnée de s'en sortir dans notre monde ?

J'aimerais sincèrement me tromper.

J'aimerais.

Merci de votre lecture.

Copper Lebrun

Documents joints à cet article

L'autisme dans une bibliothèque publique française en 2017
20 juin 2017

En allant voter, Brigitte Macron converse sur l'autisme

article publié sur handicap.fr

Résumé : C'est en allant voter dans le Pas-de-Calais que Brigitte Macron a échangé quelques mots avec le député sortant LR Daniel Fasquelle. Leur conversation informelle a alors porté sur l'autisme...

Par , le 19-06-2017

Le dimanche 18 juin au matin, Brigitte Macron allait voter au Touquet lorsqu'elle a été accueillie par Daniel Fasquelle. Leur conversation « informelle » a porté sur l'autisme, rapporte le site de La voix du Nord (article en lien ci-dessous). « Je reçois chaque jour de nombreuses lettres à ce sujet », a confié le député qui a créé, avec quelques parents, l'EPEAM (École parentale pour enfants autistes du Montreuillois). En France, la prise en charge des enfants avec autisme reste particulièrement difficile, notamment par manque de places dans des structures adaptées.

Fasquelle : engagé en faveur de l'autisme

Daniel Fasquelle, député sortant de cette quatrième circonscription du Pas-de-Calais pour Les Républicains, également maire du Touquet, s'est illustré pour ses actions dans le domaine de l'autisme en France. En 2010, il crée un groupe d'étude parlementaire sur ce thème et obtient en 2012 le label Grande Cause nationale. En janvier 2012, il présente une « proposition de loi visant l'arrêt des pratiques psychanalytiques dans l'accompagnement des personnes autistes, la généralisation des méthodes éducatives et comportementales et la réaffectation de tous les financements existants à ces méthodes », favorisant la prise en charge comportementaliste au détriment de la psychanalyse. Fin 2016, il propose une nouvelle résolution « invitant le Gouvernement à promouvoir une prise en charge de l'autisme basée sur les recommandations de la Haute autorité de santé » (article en lien ci-dessous). Cette résolution, qui a eu le don de faire hurler les psychanalystes, est rejetée.

Brigitte Macron : des actions en faveur du handicap ?

De son côté, Brigitte Macron s'est exprimée à plusieurs reprises dans les medias sur sa volonté de jouer un rôle dans le domaine de l'éducation... mais pas seulement. Elle dit vouloir également s'investir sur d'autres sujets comme la culture, la condition des femmes ou encore le handicap. Dans la logique des annonces faites par son mari qui a déclaré vouloir faire du handicap l'une des priorités de son quinquennat ? Reste à savoir quel rôle et marge de manœuvre seront accordés à la nouvelle Première dame. Daniel Fasquelle aura, quant à lui, tout loisir de poursuivre son combat puisqu'il conserve son siège de député. Il était opposé au tandem En Marche ! Thibaut Guilluy et Tiphaine Auzière, qui n'est autre que la fille de… Brigitte Macron ! Et donc la belle-fille du Président.

© Photo d'illustration générale prise lors de la cérémonie d'investiture d'Emmanuel Macron à la mairie de Paris.

Handicap.fr vous suggère les liens suivants :

Sur Handicap.fr

Sur le web

 

16 juin 2017

Psychanalyste : un job « facile », « pas compliqué »

11 juin 2017
Par Blog : Le blog de Jacques Van Rillaer

Freud a maintes fois écrit que sa méthode était facile à apprendre et à pratiquer. La théorie élaborée par Lacan à partir de celle de Freud a fait croire à l’extrême difficulté du savoir analytique. En fait, quand bien même cette théorie apparaît comme une discipline occulte, la pratique, disait Lacan, «ce n’est pas compliqué» et il ajoutait : «on fait comme si on savait quelque chose».

Freud a commencé sa pratique de thérapeute par l’hypnose. En 1896, il évoquait la difficulté de faire se ressouvenir les sévices sexuels refoulés, condition nécessaire et suffisante de la guérison de l’hystérie. Il écrivait: «Les malades ne racontent jamais ces histoires spontanément, ni ne vont jamais dans le cours d'un traitement offrir au médecin tout d'un coup le souvenir complet d'une telle scène. On ne réussit à réveiller la trace psychique de l'événement sexuel précoce que sous la pression la plus énergique du procédé analyseur et contre une résistance énorme, aussi faut-il leur arracher le souvenir morceau par morceau» [1]. Quelques années plus tard, les souvenirs «arrachés morceau par morceau» deviendront des souvenirs spontanément racontés par des femmes «hystériques». Freud racontera alors qu’il a été victime de leurs fantasmes [2]

Influencé par sa patiente la baronne Anna von Lieben — qui fut pendant six ans sa principale patiente et source de revenus —, Freud a développé sa propre méthode: laisser le patient libre de dire tout ce qui lui passe par la tête et lui fournir des interprétations quand cela apparaît opportun. Les résultats n’avaient rien d’exaltant mais, à l’époque, la grande majorité des confrères ne faisaient guère mieux.

  1. Freud a déclaré sa méthode facile
  2. Les principes de l’analyse freudienne
  3. Des anecdotes significatives
  4. La somnolence rémunérée
  5. Lacan : grand artisan de l’occultation de la facilité de la technique
  6. Les aveux de Lacan in fine
    freud-technique-oc

Freud a déclaré sa méthode facile

James Strachey, ami fidèle de Freud et traducteur de ses œuvres en anglais, écrit dans le volume de la Standard Edition qui rassemble les écrits techniques : «La relative rareté des écrits techniques de Freud, ainsi que ses hésitations et les délais de leur production, suggère une certaine répugnance de sa part à publier ce type de matériel. [...] Au-delà de toutes les discussions sur la technique, Freud n’a cessé d'insister sur le fait qu'une authentique maîtrise dans ce domaine ne pouvait s'acquérir que par l'expérience clinique et non par des livres» (XII, p. 82).

Si Freud a peu écrit sur sa technique, c’est simplement parce qu’elle n’est pas compliquée. Lui-même l’a reconnu à maintes reprises. En 1900, il écrit que l’interprétation des rêves est facile si on utilise sa méthode des associations libres : « Il n'est pas très difficile de retirer la garde qui veille aux portes de la raison, comme dit Schiller, et de se mettre dans l'état d'auto-observation sans critique. La plupart de mes malades y arrivent dès le premier essai, moi-même je le fais facilement, surtout si j'écris toutes les idées qui me viennent, ce qui est un grand secours » [3].

En 1904, Freud rédige, pour un ouvrage sur les compulsions, le court chapitre : “La méthode psychanalytique de Freud”. Il écrit que «la tâche de la cure est de supprimer les amnésies, […] de rendre l’inconscient accessible à la conscience» et précise: «La technique de la psychanalyse, une fois qu’on l’a apprise, est beaucoup plus facile à pratiquer qu’il n’apparaît à la description» [4].

L’année suivante, dans le célèbre cas de Dora: «Chacun peut soumettre ses propres rêves à une investigation analytique, et la technique de l'interprétation du rêve est facile à apprendre d'après les indications et les exemples que j'ai donnés » [5]. — «Interpréter les rêves, extraire les pensées et souvenirs inconscients des idées incidentes du malade, et autres pratiques traductives du même ordre, cela est facile à apprendre» [6].

En 1912, dans un article sur la technique, Freud définit sa règle de l’"attention flottante" : «Cette technique [la psychanalyse] est très simple. Elle récuse tous les moyens auxiliaires, comme nous le verrons, même la prise de notes, et consiste simplement à ne vouloir porter son attention sur rien de particulier et à accorder à tout ce qu'il nous est donné d'entendre la même “attention en égal suspens” [gleichschwebende Aufmerksamkeit], selon la dénomination que j'ai déjà employée. On s'épargne de cette façon un effort de l'attention que l'on ne pourrait d'ailleurs pas maintenir quotidiennement des heures durant, et l'on évite un danger qui est indissociable de l’attention intentionnelle. En effet, du moment où l’on tend intentionnellement son attention jusqu'à un certain degré, on commence aussi à sélectionner parmi le matériel offert ; on fixe tel morceau avec une acuité particulière et on en élimine en revanche un autre, en suivant dans cette sélection ses attentes ou ses inclinations» [7].

L’année suivante, dans un autre article technique, il précise l’énorme avantage du dispositif divan-fauteuil : «Je tiens ferme à ce conseil de faire s'allonger le malade sur un lit de repos, alors qu'on prend place derrière lui de façon à n'être pas vu de lui. Cet aménagement a un sens historique, il est le reste du traitement hypnotique à partir duquel la psychanalyse s'est développée. Mais il mérite d'être maintenu pour de multiples raisons. D'abord pour un motif personnel, mais que d'autres peuvent bien partager avec moi. Je ne supporte pas d'être dévisagé par les autres huit heures par jour (ou plus longtemps). Comme pendant l'écoute je m'abandonne moi-même au cours de mes pensées inconscientes, je ne veux pas que mes mimiques procurent au patient matière à interprétation » [8].

La même année, il affirme l’existence d’un pouvoir dont chacun dispose pour psychanalyser : «Tout être humain possède dans son propre inconscient un instrument avec lequel il est en mesure d’interpréter les manifestations de l'inconscient chez l’autre» [9].

En 1925, il répète une fois de plus la facilité de sa méthode : « Le travail analytique est un art de l'interprétation [Deutungskunst], dont certes le maniement requiert pour le succès doigté et pratique, mais qui n'est pourtant pas difficile à apprendre [unschwer zu erlernen] » [10].

Les principes de l'analyse freudienne

L’analysant couché sur un divan dit tout ce qui lui passe par la tête. C’est «la règle fondamental ». L’analyste, à l’abri de son regard, écoute en état d’attention flottante. Les interventions classiques de l’analyste freudien sont les suivantes.

a) Émettre des marmottements, indiquant à l’analysant qu’il dit des choses jugées significatives ou qu’il est écouté. Smiley Blanton a bien décrit leur effet dans le journal de son analyse : «Je suis frappé par une certaine façon qu’a Freud de produire un son avec son gosier — une sorte de grognement, d'exclamation non verbale —, de modulation en somme, destinée à manifester son accord ou sa sympathie au patient, mais sans gêner son flux associatif» [11].

b) Mettre en relation des paroles de l’analysant avec des événements (réels ou imaginés) de son passé. Par exemple, Dora raconte qu’elle a été énurétique « vers 7 ou 8 ans pendant un certain temps ». Freud en déduit illico qu’elle s’est alors masturbée, car « mouiller ainsi son lit n'a pas de cause plus vraisemblable que la masturbation » [12]. Notons que Dora a nié énergiquement cette activité, mais pour Freud ce n’est là qu’une dénégation, donc une preuve.

c) Décoder des symboles. Ainsi, « l'araignée, dans le rêve, est un symbole de la mère, mais de la mère phallique dont on a peur, si bien que l’angoisse devant l’araignée exprime l’effroi devant l'inceste avec la mère et l'horreur devant l’organe génital féminin » [13]

d) Décrypter des « mots-ponts » (Wort-Brücke). Par exemple, l'Homme aux rats se dit un jour qu'il est trop gros (zu dick) et essaie de maigrir. Interprétation de Freud : son rival s'appelle Richard et est parfois surnommé Dick. En essayant d'être moins «dick», il tue inconsciemment son concurrent [14]. Ce type de décodage a été abondamment utilisé par Lacan, qui parle de «décomposition signifiante» et disait : «J’attache énormément d’importance aux jeux de mots. Cela me paraît la clé de la psychanalyse» [15]. Selon sa « théorie de la suprématie du Signifiant», l'Inconscient est régi par les propriétés phonétiques des mots en tant que tels, plutôt que par les significations auxquelles les mots renvoient. Dès lors, la pratique psychanalytique s'apparente à un jeu de calembours, un jeu facile à la portée de tous et qui fonctionne à tous les coups. Quand le patient dit «ne me prenez pas au mot», on interprète qu’il refuse de se reconnaître «homo».

e) Rester silencieux, ce qui fait comprendre à l’analysant qu’il reste «en surface», qu’il «résiste» à parler «vrai».

Si l’analysant s’oppose à une interprétation, l’analyste y voit ipso facto une « résistance » dû à un refoulement inconscient. Si l’analysant est mécontent du traitement, l’analyste n’y voit qu’un reproche adressé à quelqu’un d’autre, par exemple le père ou la mère : « II ne peut faire aucun doute pour nous [kann uns nicht zweifelhaft sein], écrit Freud, que les sentiments hostiles envers le médecin méritent le nom de “transfert”, car la situation de la cure n'est certainement [gewiss] pas un facteur suffisant pour rendre compte de leur apparition » [16]. Si des éléments de la théorie analytique peuvent s’opérationnaliser de manière à les confirmer ou les réfuter, les interprétations durant la cure sont irréfutables au sens poppérien [17]. Toute objection est «résistance» à la «vérité» de l’«Inconscient» et n’a pas droit de cité dans le réel. L’analyste a toujours le dernier mot.

Notons encore que le contenu de beaucoup d’analyses est largement constitué de simples bavardages qui n’aident en rien à résoudre de véritables problèmes, quand il y en a. Marion Mari-Bouzid, qui a fait des interviews approfondies d'enfants de psychanalystes français réputés, donne ce joli exemple : « Mon père ne voulait pas changer les configurations du cabinet parce qu'il disait : “Si je change la configuration du cabinet, mes patients vont encore passer un quart d'heure à me dire : Vous avez changé le vase, vous l'avez mis à la place de ça, tiens j'aime mieux, tiens j'aime moins... enfin bref, ils vont passer encore...”. Et c'est vrai. Et moi, j'ai été chez mon psy dernièrement, et il a viré des plantes vertes (rit) et je lui ai dit : “Je suis désolée de vous faire la réflexion, mais je ne peux pas m'en empêcher (rit) : Vous avez enlevé votre plante verte”, et j'étais morte de rire et il me dit “oui” et je lui dis : “Ça me fait rire parce que ça me rappelle mon père quand il changeait ses trucs dans le cabinet et il me disait : “Toute la journée je vais avoir droit à ‘vous avez changé des trucs’” et je lui dis : “Je ne sais pas le numéro combien je suis (rit), heureusement que ça n'est que le début” » [18].

Des anecdotes significatives

Henri Ellenberger, le célèbre historien de la psychothérapie, rapporte qu’au début de la Première Guerre mondiale un agent secret était venu voir Albert Moll [19], lui demandant de l'instruire de telle façon qu’il puisse, avec quelque vraisemblance, se faire passer pour médecin. Le célèbre sexologue lui répondit que c'était impossible, mais qu’il pouvait indiquer comment incarner le personnage d'un psychanalyste. Il lui apprit en quelques jours les rudiments et le jargon de la profession, et l'homme servit effectivement son pays tout au long de la guerre en exerçant sa nouvelle compétence [20].

Ernest Jones rapporte qu’en 1921 une «Maison d'édition anglaise de psychanalyse» publiait cette annonce : «Aimeriez-vous gagner 1.000 livres par an comme psychanalyste ? Nous pouvons vous montrer comment faire. Inscrivez-vous à 8 leçons par correspondance pour la somme de 4 guinées». Le fidèle lieutenant de Freud ajoute qu'il y avait à Londres, dès le début des années 1920, «des dizaines d’analystes sauvages» [21]. Au congrès international de psychanalyse de Bad-Homburg (1925), il fut décidé que l’analyse didactique par Freud ou un disciple patenté serait une condition pour être reconnu psychanalyste freudien.

La somnolence rémunérée

Il y a très peu de métier où l’on peut gagner sa vie en sommeillant ou en dormant pendant une partie du travail. C’est le cas de la psychanalyse. En fait, si l’assoupissement est excusable, il n’en montre pas moins que l’action de l’analyste peut se réduire à très peu de chose sans (trop) déranger l’analysant. Exemples :

Dans le compte rendu de son analyse avec Freud, Abram Kardiner rapporte : «On savait à Vienne que Freud me parlait et cela suscitait une certaine curiosité, tant et si bien qu'un jour j’eus l’honneur de recevoir une invitation de James Strachey et John Rickman à venir prendre le thé. [...] Rickman me dit : “Je me suis laissé dire que Freud parle avec vous.” — “Oui, répliquai-je, il me parle, tout le temps.” Ils dirent : “Et comment faites-vous ?” [...] Tous les deux dirent d'un commun accord : “Freud ne dit jamais un mot”. Rickman ajouta : “Je le soupçonne de dormir. En fait, je sais qu'il dort, parce que je sais ce qu'il faut faire pour le réveiller. J’arrête tout simplement de parler et au bout de quelques instants de silence Freud sursaute en me disant : “Oui... oui... continuez, je vous prie”. Je lui ai même dit un jour : “Ce que je disais n'était pas très important, Herr Professor, vous pouvez vous rendormir”» [22].

La même pratique se retrouve par exemple chez Lacan, comme en témoigne Jean-Guy Godin, qui deviendra analyste lacanien : «Il paraissait sommeiller, somnoler, ouvrait un œil, murmurait son “alors.., bien cher?” et accompagnait d'un regard pesant presque soucieux, inquiet, le trajet de l'intrus, tournant à peine sa tête posée sur sa main comme sur un axe ; son “très bien... c'est épatant... à d'main” arrêtait la séance ; “j' vous revois quand” appelait une réponse qui, une fois enregistrée, lui faisait reprendre cette somnolence apparente. Elle s'arrêtait comme par hasard, régulièrement à un point précis de mon trajet du retour : juste devant ce coin de table où — c'était convenu — je posais le prix de la séance. Il levait la tête, son œil retrouvait un éclat plus vif et, de son lointain, vérifiait la matérialité du geste» [23].

Dans La Technique psychanalytique d’Edward Glover, on trouve un conseil pour contrer la tendance à l’assoupissement : «Durant les séances, l'analyste devrait prendre des notes afin de s'éviter de sommeiller, à la manière de ces femmes-analystes qui, au cours de leur travail, s'adonnent au tricot ou au croche » [24].

 

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  L'analyste lacanien Jean-Pierre Winter

  Président du “Mouvement du coût freudien”

 

Lacan : grand artisan de l’occultation de la facilité de la technique

La principale innovation technique de Lacan est la séance à durée variable, invariablement courte ou très courte [25]. Rappelons qu’en 1963 cette pratique a conduit l’Association internationale de psychanalyse à ne plus reconnaître les didactiques dirigées par Lacan. Pour continuer à former des analystes à sa guise, il a alors créé sa propre École [26].

La principale contribution de Lacan au maintien en vie de la psychanalyse est la transformation du discours freudien, parfaitement compréhensible, en discipline occultiste. (Aujourd’hui la psychanalyse reste le type de psychologie dominant que dans les pays où le lacanisme s’est diffusé : France, Argentine, Brésil). Il est arrivé à Lacan de rappeler cette évidence : «Ai-je besoin de dire que dans la science, à l'opposé de la magie et de la religion, le savoir se communique?» [27]. Lui, il a tout fait pour que le savoir psychanalytique ne se communique plus comme en science, mais devienne un mystère dont la révélation est réservée à ceux qui s’appliquent laborieusement à déchiffrer sa Parole. Son enseignement n’était pas destiné à communiquer un savoir qui puisse soulager des troubles psychologiques, il visait à lui rendre un culte comparable à celui que des dévots rendent aux gourous des sectes [28].

J’ai moi-même été pendant plus de dix ans membre d’une École freudo-lacanienne (l’École belge de psychanalyse) et j’ai passé des centaines d’heures à déchiffrer, avec mes coreligionnaires, des textes lacaniens [29]. Un événement a fait basculer ma croyance dans la "profondeur" du discours lacanien à une interrogation sur sa dose de charlatanisme. Quelques analystes de notre École avaient passé deux soirées à analyser ces deux phrases par lesquelles Lacan avait conclut une interview à la TV : « L'interprétation doit être preste pour satisfaire à l'entreprêt. De ce qui perdure de perte pure à ce qui ne parie que du père au pire » [30]. La première phrase était problématique : Freud avait mis en garde contre l’empressement à donner des interprétations au patient [31] et « entreprêt » ne figurait pas dans Le Robert. La deuxième phrase était ô combien plus problématique. Comme des croyants devant un texte sacré sibyllin, les analystes n’avaient pas envisagé l’hypothèse que l’énoncé pourrait être faux ou être de la poésie surréaliste. Le mystagogue de l’Inconscient lacanien [32] avait averti en début d’interview : « Je parle à ceux qui s’y connaissent, aux non-idiots, à des analystes supposés ». Il fallait déchiffrer sa Parole. Les interprétations étant divergentes, celui qui avait le privilège de faire son analyse chez Lacan en personne fut chargé de demander ce qu’il en était in fine. La réponse : dans le film réalisé par Sophie Robert avec quatre déconvertis de la psychanalyse, vers la 31e minute: http://www.dailymotion.com/video/x37mnmz

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    Interview de Lacan à la télévision

                 (1974)

 

 

 Je venais de lire l’analyse par Erwin Goffman des procédés de mystification du public. Cette phrase en particulier m’éclaira : "Comme le montrent d'innombrables contes populaires et d'innombrables rites d'initiation, le véritable secret caché derrière le mystère, c'est souvent qu'en réalité il n'y a pas de mystère; le vrai problème, c'est d'empêcher le public de le savoir aussi" [33].

Les aveux de Lacan in fine

Environ cinq ans avant sa mort, Lacan s’est mis à démystifier sa propre pratique. Le 26 février 1977, il déclarait : "Notre pratique est une escroquerie, bluffer, faire ciller les gens, les éblouir avec des mots qui sont du chiqué, c'est quand même ce qu'on appelle d'habitude du chiqué. […] Du point de vue éthique, c'est intenable, notre profession ; c'est bien d'ailleurs pour ça que j'en suis malade, parce que j'ai un surmoi comme tout le monde. […] Il s'agit de savoir si Freud est oui ou non un événement historique. Je crois qu'il a raté son coup. C'est comme moi. Dans très peu de temps, tout le monde s'en foutra de la psychanalyse" [34].

En novembre, à l’occasion de l’ouverture, au Département de Psychanalyse de l'Université de Paris VIII, d’une section offrant un « Diplôme de clinique psychanalytique » après deux années de cours à raison de six heures hebdomadaires (sans obligation d'analyse didactique), Lacan s’est clairement exprimé sur la facilité de la pratique analytique : « Qu'est-ce que la clinique psychanalytique ? Ce n'est pas compliqué. Elle a une base — C'est ce qu'on dit dans une psychanalyse. En principe, on se propose de dire n'importe quoi, mais pas de n'importe où — de ce que j'appellerai pour ce soir le dire-vent analytique... On peut aussi se vanter, se vanter de la liberté d'association, ainsi nommée... Évidemment, je ne suis pas chaud-chaud pour dire que quand on fait de la psychanalyse, on sait où on va. La psychanalyse, comme toutes les autres activités humaines, participe incontestablement de l'abus. On fait comme si on savait quelque chose » [35].

L’année suivante : « La psychanalyse n'est pas une science. Elle n'a pas son statut de science, elle ne peut que l'attendre, l'espérer. C'est un délire — un délire dont on attend qu'il porte une science. On peut attendre longtemps ! Il n'y a pas de progrès, et ce qu'on attend ce n'est pas forcément ce qu'on recueille. C'est un délire scientifique » [36].

En 1979, il qualifiait la psychanalyse de « pratique de bavardage » et le psychanalyste de « rhéteur » (c’est-à-dire « orateur, écrivain sacrifiant à l’art du discours la vérité ou la sincérité » [Le Nouveau Petit Robert, 1993, p. 1981]) :

« La psychanalyse est à prendre au sérieux, bien que ce ne soit pas une science. Comme l'a montré abondamment un nommé Karl Popper, ce n'est pas une science du tout, parce que c'est irréfutable. C'est une pratique, une pratique qui durera ce qu'elle durera. C'est une pratique de bavardage. […] Le psychanalyste est un rhéteur. […] Ce que j'ai appelé le rhéteur qu'il y a dans l'analyste n'opère que par suggestion. Il suggère, c'est le propre du rhéteur, il n'impose d'aucune façon quelque chose qui aurait consistance. […] Ce qui fait le vrai et ce qui fait le faux, c'est ce qu'on appelle le pouvoir de l'analyste, et c'est en cela que je dis qu'il est rhéteur » [37].

L’année suivante, le 5 janvier, Lacan a dissout son École au motif de ne pas tomber dans le piège où s’était fourvoyé Freud : « On sait ce qu'il en a coûté, que Freud ait permis que le groupe psychanalytique l'emporte sur le discours, devienne Église ». Les analystes qui voulaient rester dans sans École devaient faire acte de candidature, Lacan se réservant de faire le tri compte tenu des « déviations et
compromissions » que son École avait nourries [38].

Pour Lacan, la Messe était dite. Pour ceux qui continueront, dans des dizaines de chapelles rivales, à se réclamer de lui, sa logomachie occultiste servira encore à dissimuler, aux yeux du public, la facilité du job d’analyste et à s’occuper sans fin des interprétations et réinterprétations de ce que pourrait signifier « quelque part » ses jeux de Signifiants.

 

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  Les jeux de mots:

 "cela me paraît la clé de la psychanalyse" (Lacan)

 La une de Libération annonçant la mort du gourou

  (9 septembre 1981)

 

 

 —————

Toutes les citations de Freud sont extraites des Œuvres complètes, traduites aux PUF. Le 1er nombre indique le tome, le 2e la page.

[1] “L'hérédité et l'étiologie des névroses” (1896) III 117.

[2] Pour des détails sur cette contradiction, révélatrice du manque de rigueur de Freud, voir : J. Van Rillaer : “Le freudisme : un conte scientifique”. En ligne : http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article2347

[3] L’interprétation des rêves (1900) IV 96.

[4] “La méthode psychanalytique de Freud” (1904) VI 7.

[5] Fragment d’une analyse d’hystérie (1905) V 167 ; VI 190s.

[6] Ibidem, V 281 ; VI 295s.

[7] “Conseils au médecin dans le traitement psychanalytique”. XI: 145s.

[8] “Sur l’engagement du traitement” (1913) XII 174.

[9] “La disposition à la névrose de contrainte” (1913) XII 88.

[10] “Autoprésentation” (1925) XVII, p. 88.

[11] Journal de mon analyse avec Freud. Trad. PUF, 1973, p. 26.

[12] Fragment d’une analyse d’hystérie (1905) VI 253.

[13] Nouvelle suite de leçons d'introduction à la psychanalyse (1933) XIX 105.

[14] Freud écrit dans son carnet de notes découvert après sa mort : « Ceci est ma trouvaille et il ne sait pas l'apprécier ». Dans le texte destiné aux lecteurs, il affirme que le patient a lui-même découvert cette signification ! Pour les citations et les références, voir J. Van Rillaer, Les illusions de la psychanalyse. Mardaga, 1981 (4e éd., 1996), p. 132s.

[15] Le Triomphe de la religion. Seuil, 2005, p. 96.

[16] Leçons d’introduction à la psychanalyse (1917) XIV 460.

[17]Sur Popper et la problématique de l’immunité de la psychanalyse, voir : https://blogs.mediapart.fr/jacques-van-rillaer/blog/180217/karl-popper-un-celebre-deconverti-de-la-psychanalyse

[18] Les enfants de la psychanalyse. Paris : Mon Petit Éditeur, 2012, p. 99s. Compte rendu de l’ouvrage : http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1976

[19] Au début du XXe siècle, Moll était le spécialiste de la sexologie le plus connu de toute l’Europe. Son ouvrage Libido Sexualis (850 pages) publié à Berlin en 1897 a été lu par Freud. Pour des détails : Sulloway, F. (1981) Freud, biologiste de l'esprit. Trad., Fayard, 285-290.

[20] A la découverte de l'inconscient. Histoire de la psychiatrie dynamique. Éd. Simep, 1974, p. 680.

[21] La vie et l'œuvre de Sigmund Freud. Vol. III. Trad., PUF, 1969, p. 53.

[22] Mon analyse avec Freud. Trad., Belfond, 1978, p. 116s.

[23] Jacques Lacan, 5 rue de Lille. Seuil, 1990, p. 151.

[24] Trad., PUF, 1958, p. 52.

[25] Pour savoir comment Lacan analysait : http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1553

[26] Pour des détails sur le véritable motif (généralement occulté) de la création de l’École lacanienne : http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1825

[27] “La science et la vérité” (1965). Rééd. in Écrits, 1966, p. 877.

[28] Cette dénonciation a été faite par des élèves de Lacan : Roustang, Perrier, Récanati et alii. A titre d’exemple, celui qui fut un temps le principal représentant du lacanisme à New York : https://blogs.mediapart.fr/jacques-van-rillaer/blog/210217/un-deconverti-du-lacanisme-stuart-schneiderman

[29] J’ai été l’assistant du Prof. Jacques Schotte, qui présenta son ami Lacan lors de sa conférence à l’université de Louvain en 1972. On le voit sur la vidéo à la minute 1 : https://www.youtube.com/watch?v=-HBnLAK4_Cc

[30] Télévision. Seuil, 1973, p. 72. Réédité in Autres écrits. Seuil, 2001, p. 545. Pour écouter ces phrases : http://www.youtube.com/watch?v=GbSfb8OQ-NE

[31] Freud a écrit qu’il ne faut communiquer des interprétations que « lorsque, par une préparation, le malade est arrivé lui-même à proximité de ce qu'il a refoulé » et « s'est attaché (transfert) au médecin de telle sorte que les sentiments à son égard
rendent une fuite rapide impossible » (“Ueber ‘Wilde’ Psychoanalyse”, 1910, G.W., VIII, p. 123s).

[32] L’inconscient lacanien n’est pas celui de Freud. Lacan déclare que «Freud n’avait que peu d’idées de ce que c’était que l’inconscient, mais il me semble qu’à le lire, on peut déduire qu’il pensait que c’était des effets de signifiant. Freud n'avait rien de transcendant, c'était un petit médecin qui faisait ce qu'il pouvait pour ce qu'on appelle guérir, qui ne va pas loin» (“L’insu que sait de l’une-bévue, s’aile a mourre” [sic], Ornicar? Bulletin périodique du champ freudien, 1978, 14, p. 5).

[33] La mise en scène de la vie quotidienne. Trad., Minuit, 1973, vol. 1, p. 71.

[34] Le texte n’a été publié que 4 ans plus tard : “Propos sur l’hystérie”. Quarto [Supplément belge à La lettre mensuelle de l’École de la cause freudienne], 1981, n° 2. Réédité en partie dans Le Nouvel Observateur, sept. 1981, n° 880, p. 88).

[35] “Ouverture de la section clinique”. Ornicar ?, Bulletin périodique du champ freudien, 1977, 9 : 7.

[36] “L'insu que sait de l'une-bévue s'aile a mourre”, Op. cit., p. 9.

[37] “Une pratique de bavardage”. Ornicar ? Bulletin périodique du champ freudien, 1979, 19 : 5s.

[38] “Lettre de dissolution”. Ornicar ? Bulletin périodique du champ freudien, 1980, n° 20-21 : 10.

Deux sites pour d’autres publications de J. Van Rillaer sur la psychologie, la psychopathologie, l'épistémologie, les psychothérapies, les psychanalyses, etc.

1) Site de l'Association Française pour l'Information Scientifique:  www.pseudo-sciences.org

2) Site de l'université de Louvain-la-Neuve

1° Taper dans Google : Moodle + Rillaer + EDPH

2° Cliquer sur : EDPH – Apprentissage et modification du comportement

A la page suivante, cliquer “Oui” à : "Règlement"

9 juin 2017

Les psychanalystes n’ont rien à dire en médiation animale

La médiation animale constitue un secteur d’avenir pour l’accompagnement et la progression de personnes handicapées, et notamment autistes, soutenu par un nombre croissant de publications scientifiques. En France, des psychanalystes tentent d’introduire leurs concepts pour expliquer les mécanismes à l’œuvre dans le contact entre animaux et personnes autistes, allant de la théorie du « Moi-Peau » (déjà invoquée pour soutenir l’injustifiable packing) au retour de l’intersubjectivité selon une perspective, bien sûr, psychanalytique... Des théories qui ne reposent sur aucune preuve, et risquent de saborder les efforts de reconnaissance institutionnelle de la médiation animale.

Publications scientifiques en médiation animale

Les théories psychanalytiques ne sont jamais invoquées dans les publications scientifiques du domaine de la médiation animale / zoothérapie, qui évaluent plutôt l’évolution des personnes en suivant des critères objectivement mesurables, tels que le développement moteur, la modification des comportements d’auto-régulation (stéréotypies), les mesures d’irritabilité, d’hyperactivité, de dyspraxie, etc. En clair, si entre le début du programme d’équithérapie et la fin, le nombre de comportements d’auto-stimulation et d’anxiété des personnes autistes a diminué, on peut en tirer la conclusion que le contact avec le cheval leur est bénéfique. Les psychanalystes ont toujours refusé d’évaluer leur approche selon des critères de ce type. Entre autres, l’étude de Borgi et collègues avec groupe contrôle, publiée en 2016, a permis de définir l’équithérapie, ou hippothérapie / médiation équine, comme étant réellement efficace pour les enfants avec TSA (Marta Borgi et al. (2016) « Effectiveness of a Standardized Equine-Assisted Therapy Program for Children with Autism Spectrum Disorder », Journal of Autism and Developmental Disorders, 46). Voilà cinq ans, la revue de la littérature scientifique effectuée par Marguerite E. O’Haire (« Animal-Assisted Intervention for Autism Spectrum Disorder: A Systematic Literature Review », Journal of Autism and Developmental Disorders, 2012, 43), soulignait l’importance de poursuivre la recherche en ce domaine avec une méthodologie rigoureuse, en dépit de contraintes logistiques parfois importantes.

Travaux d’Anne Lorin de Reure

La tendance à introduire (Lacan s’amuserait peut-être avec cette phrase) la psychanalyse en médiation animale semble s’être récemment accentuée, comme le démontre, entre autres, la publication de la thèse de psychologie d’Anne Lorin de Reure en 2016 (à noter qu’un certain Bernard Golse a fait partie du jury de thèse), intitulée « Interactions libres entre enfant autiste et animal (poney et dauphin) : étude des processus en jeu dans une sensorimotricité partagée par une triple approche clinique éthologique et vidéo ». En dépit d’un titre en apparence scientifique (éthologie, sensorialité et motricité), cette thèse cite et défend largement dans son contenu des théories psychanalytiques de type « Moi-Peau », comme l’énonce l’auteure : « je souligne la possibilité qu'a l'animal d'offrir un corps à corps qui contourne l'interdit du toucher et ne comporte pas de risque de réponses sexualisantes. Les concepts de handling (pansage du poney), de holding (portage du poney, de l'eau) de Winnicott et d'autre part le concept de Moi-Peau (peau à peau avec le dauphin, peau à fourrure avec le poney) d'Anzieu soutiennent alors mes réflexions ». Notons que l’on retrouve dans ce travail la récente marotte des psychanalystes en matière d’autisme, à savoir que la notion de TSA, pourtant largement acceptée par la communauté scientifique internationale, serait à éviter au profit d’un concept franco-français d’autismes au pluriel.

Invitations de professionnels de la médiation animale dans des colloques psychanalytiques

Des professionnels de la médiation animale sont de plus en plus souvent invités à des événements organisés par des psychanalystes ou soutenus par eux, tel que le colloque de Catherine Bergeret-Amselek, psychanalyste et membre de la société de psychanalyse freudienne, qui aura pour thème les liens entre l’autisme et la maladie d’Alzheimer. Un colloque dans lequel interviendra François Beiger, zoothérapeute, fondateur et directeur de l’institut français de zoothérapie, pour une présentation intitulée « De la démence Alzheimer au spectre autistique, la médiation par l’animal, une thérapie alternative ». On se demande ce que vient faire une pratique en cours de reconnaissance scientifique et institutionnelle au milieu de théories freudiennes rétrogrades... François Beiger semble pourtant bien informé, puisqu’il parle du spectre autistique plutôt que « des autismes » au pluriel...

La psychanalyse n’a rien prouvé en matière d’autisme


Freud n'a pas dit cela. Mais pour un mauvais praticien, l'invoquer en vue de ramener les brebis galeuses dans l'orthodoxie, c'est pratique...
En plus de quarante années, aucune des théories émises par les psychanalystes en matière d’autisme n’a pu être démontrée, aucune de leurs approches thérapeutiques n’a donné le moindre résultat objectivement mesurable. Les théories du « Moi-Peau », du « ratage de la mise en place du troisième circuit pulsionnel », et autres freuderies-lacaneries évoquant l’évitement du « risque de réponses sexualisantes », n’ont rien à faire dans le domaine de la médiation animale, qui concerne bien davantage la psychologie sociale. Nul besoin de chercher chez Freud une réponse à l’observation d’un contact facilité entre les personnes autistes et les animaux. Et pourquoi pas un désir zoophile inconscient vers l’animal, tant qu’on y est ? Au cours de mes propres approches avec les animaux (hors de toute structure, je précise), une personne, sans doute nourrie de ces bêtises, a osé cette hypothèse afin de m’éloigner de mon seul centre d’intérêt, les chevaux. Temple Grandin témoigne de façon très similaire, le psychologue scolaire de son lycée craignant qu’elle ne “se prenne pour une vache” (Ma Vie d’autiste, p. 110)... Mieux vaut rire sans doute de telles vacheries que d’en pleurer ! La seule différence étant que dans les années 1970 aux Etats-Unis (pour Temple Grandin) et 1990 en France (dans mon cas), la psychanalyse fournissait l’explication dominante en matière d’autisme, ses théories pouvaient être invoquées pour éloigner des personnes autistes du contact animalier recherché.
Par ailleurs, l’hypersensibilité ou hypersensorialité tactile relève davantage du domaine des neurosciences, la seule explication d’un contact plus agréable et moins chargé sensoriellement entre peau animale et peau humaine (en termes de fonctionnement du système nerveux) fournissant une réponse plus logique que ce fumeux « Moi-Peau » d’Anzieu (triple allitération gratuite pour mes amis lacaniens).

Reconnaissance institutionnelle de la médiation animale versus psychanalyse

Comment invoquer Freud en 2017.

Pire, l’introduction explicative de théories psychanalytiques sans aucune validité scientifique semble être le meilleur moyen de discréditer la médiation animale aux yeux des décideurs politiques et des parents d’enfants autistes, alors qu’elle connaît actuellement un développement sans précédents, soutenu par de nombreux témoignages. La médiation animale est en passe d’être évaluée par la Haute Autorité de Santé, en particulier grâce aux travaux de Laurence Hameury, de l’équipe de Tours (Laurence Hameury, L'enfant autiste en thérapie avec le cheval : Un soin complémentaire validé par la recherche, ed. Connaissances et Savoirs, 2017, 98 p.). Un bouquin qui, devinez quoi, ne fait appel à aucune théorie psychanalytique.
Ces psychanalystes qui s’accrochent à l’autisme chercheraient-ils à re-dorer leur blason en introduisant des concepts fumeux dans une approche qui « fonctionne » ? Pendant que Temple Grandin nous explique le bien-être qu’elle ressent en compagnie des vaches, certains prennent toujours leurs “clients” pour des vaches à lait !
3 juin 2017

Être psychanalyste

1 juin 2017
Par Christophe Gerbaud
Blog : Christophe Gerbaud

Le psychanalyste est un poète. La psychanalyse est une pratique qui ne guérit pas. Là n'est pas son but. Or, certains "scientistes" porteraient à penser que la psychanalyse se définit comme autre chose que littéraire. Cette vision est fausse, elle est poétique et politique de l'âme. Au même titre que leurs analysants, les psychanalystes sont des (miroirs) "fous"; mais savants; lucides, "kritikos".

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"La mélancolie est le partage de tous les hommes de génie". Aristote ; Les Problèmes - IVe s. av. J.-C.

 

« Si l’on considère que la normalité consiste à se conformer à l’ordre existant, alors on pourra interpréter mon insatisfaction comme un signe de trouble mental. Mais si l’on prend pour norme l’épanouissement de toutes les virtualités innées de l’homme et si l’on sait intuitivement, et par expérience, que l’ordre social existant rend impossible cet accomplissement suprême de l’individu et de l’humanité, alors c’est celui qui se satisfait de l’ordre existant qu’on considérera comme inférieur. » Otto Gross (Médecin et psychanalyste percçu comme génial et psychotique)

"La psychanalyse d'individus de tous les âges, de tous les pays et de toutes les couches sociales montre que la conjoncture des structures socio-économiques et sexuelle de la société ainsi que sa reproduction structurelle s'opèrent au cours des quatre ou cinq premières années de la vie par les soins de la famille autoritaire. L'Eglise ne fait ensuite que perpétuer cette fonction. Ainsi l'Etat autoritaire trouve un intérêt majeur dans la famille autoritaire : elle est la fabrique où s'élaborent sa structure et son idéologie. La structuration autoritaire de l'homme se produit - ce qu'il s'agit de ne jamais perdre de vue - en premier lieu par l'ancrage d'inhibitions et d'angoisses sexuelles dans la matière vivante des pulsions sexuelles. "La Psychologie de masse du fascisme"  Wilhelm Reich (psychiatre-psychanalyste militant révolutionnaire pour la libération sexuelle)

 

L'analyse, comme aurait dit le psychiatre Francesc Tosquelles Llauradó, à travers ses association d'idées "déconne". Cela nous renvoie au féminin qu'il y a en chacun de nous ("ce con"). Un psychanalyste est une femme ou un individu qui a fait suffisamment de travail sur soi pour entendre la souffrance d'autrui. Il s'agir, précisément, d'un travail: "d'em-pathie" (prendre, à la manière d'une mère ; la souffrance avec soi). Etre psychanalyste, c'est être poète, en ce sens qu'il s'agit de poétiser la science. Le psychanalyste qui est allé suffisamment loin en lui-même - de façon auto -analytique ou à travers une analyse avec un autre psychanalyste - reste un individu "écorché-vif", sensible (qui peut même connaitre l'agressivité) comme peut l'être tout autre homme. Mais dans la pratique clinique, il donne de son amour. Analyser est radicalement le contraire de détester dans des sursauts de haine (tirée contre soi ou autrui). Car, nous sommes toutes et tous similaires, égos en matière d'amour et de haine ; dans la mesure où nous sommes névrosés i-e : peur de devenir fou ou peur de faire face à notre noyau de folie interne. Le psychanalyste est ainsi un homme comme tous les autres, mais qui ordonne, met en mots ses comportements. Et par ailleurs, il adopte un langage qui est celui de l'inconscient, des émotions profondes. Son travail est de décortiquer tout comportement biologique, psychologique ou politico-social, à travers des symboles : des mythes, des représentations, des signes.

 

Mais un psychanalyste peu-il être, à la fois, patient atteint de déficits psychiques avérés et prompt à 'écouter un patient (analysant) ?

A cette question, il est aisé de répondre que tout dépend des cas. Cela étant dit, la richesse d'une souffrance subjective, l'expérience traumatique est dans tous les cas une mine d'or, toute une littérature pour le psychanalyste concerné. Un psychanalyste bien analysé est un individu qui sait quelles sont ses limites, qui connait par cœur ses failles ; qui a déployé tout un Savoir clinique sur ses "dites" maladies. Dans le cas d'un psychanalyste atteint de troubles identitaires, d'errance, de nomadisme ; l'activité psychanalytique - ouvrant à l'attention à l'Autre... à l'association d'idées et à son décorticage - est entièrement bienvenue. En fait le psychanalyste est un fou comme les autres, à ceci prés qu'il maitrise avec génie sa folie ; il est un fou qui ne s'ignore pas, au peintre surraliste de dire : "La seule chose que je sais, c'est que je ne suis pas fou"...  

3 juin 2017

Handicap. "Un moment fort" : la visite d'Emmanuel Macron au petit Pablo à Vannes

Ce jeudi matin, après avoir passé la nuit à la préfecture du Morbihan à Vannes, Emmanuel Macron s’est rendu au domicile d’un enfant handicapé pour un tête à tête, à l’abri des regards.

Ce jeudi matin, après avoir passé la nuit à la préfecture du Morbihan à Vannes, Emmanuel Macron s’est rendu au domicile d’un enfant handicapé pour un tête à tête, à l’abri des regards. | Cabioch Lione

Lionel Cabioch

Ce jeudi matin, après avoir passé la nuit à la préfecture du Morbihan à Vannes, Emmanuel Macron s’est rendu au domicile d’un enfant handicapé pour un tête à tête, à l’abri des regards.

Le président de la République a tenu sa promesse. Mercredi soir, en arrivant au dîner républicain organisé à la préfecture de Vannes, Emmanuel Macron a croisé par hasard lors d’un bain de foule le père de Pablo, 7 ans et demi, atteint du Syndrome du X fragile, à l’origine de retards intellectuels et physiques.


« Demain, j’irai vous voir chez vous », lui a alors promis spontanément le président. C’est ce qu’il a fait jeudi matin, avant de prendre la direction de Lorient, pour visiter le port de pêche.

"Un tête à tête sincère, fort et simple"

« C’est Pablo qui lui a ouvert la porte, les médias sont restés dehors et la garde rapprochée du président Macron sur le palier, témoigne Emmanuel Paugam, le papa de l’enfant. C’était un entretien en tête à tête. Ça a été un moment sincère, fort et simple au cours duquel Pablo lui a parlé directement. On a pu lui raconter notre histoire et exposer nos difficultés. »

Quinze minutes ont suffi au président, « visiblement très au fait de la problématique du handicap », pour s’imprégner du quotidien de la famille.

Une visibilité à six mois de l'avenir de Pablo

« On a une visibilité à six mois seulement de l’avenir de notre fils, déplore le père. Pour l’instant, il est scolarisé en Ulis, à l’école Saint-Guen à Vannes. Tous les ans, pour bénéficier du suivi scolaire, on doit justifier de sa production, de ses progrès. A chaque fois, c’est l’angoisse. Des murs, on s’en prend tous les jours ou presque. Pas plus tard que ce matin ! On vient d’apprendre que l’assistante de vie scolaire de Pablo ne sera pas la même l’an prochain car son contrat de deux ans arrive à échéance. Or notre enfant a besoin de repères stables. »

L'inclusion, un véritable combat !

Les parents ont fait de l’inclusion de leur fils un véritable combat. « Pablo est inscrit au Rugby-Club de Vannes. Avant, il n’était pas capable de courir. Désormais, il parcourt le terrain dans tous les sens. On a aussi la chance qu’il soit accepté en centre de loisirs, ce qui n’est pas le cas dans beaucoup de villes. »

La ministre en charge du handicap reprendra contact

Et pourtant, ça n’a pas été toujours simple. « Le pédopsychiatre voulait mettre Pablo en hôpital de jour. Ça revenait à faire le deuil de notre enfant. On a refusé et préféré suivre les conseils d’un généticien. Aujourd’hui, en France, l’approche psychanalytique est remboursée (alors qu’elle est interdite partout ailleurs aux moins de 12 ans) mais pas la méthode comportementale, pourtant efficace, qui se base sur la psychomotricité. »

Le président Macron a écouté Pablo et ses parents. « Il s’est engagé à ce que la ministre en charge du handicap reprenne contact avec nous. » Le couple entend saisir ce coup de projecteur inespéré pour faire avancer la cause des enfants handicapés.

22 mai 2017

Injugeable

article publié sur Maître Mô

21 mai 2017 à 18 h04 min Billet n° 222

"PUTAIN MAIS C'EST PAS VRAI, PAS ENCORE UNE FOIS !"

Je vois ma (nouvelle) greffière sursauter et je comprends qu'elle croit que je lui reproche quelque chose, puisqu'elle vient de me déposer la pile de nouvelles requêtes en assistance éducative qui m'attendait à mon retour de vacances.

Elle se détend rapidement en me voyant me ruer dans le bureau de Marina, ma binôme juge des enfants, la collègue qui par définition connaît autant mes dossiers que moi les siens - c'est-à-dire suffisamment pour se remplacer l'une l'autre sans trop de difficultés et se consulter efficacement en cas de besoin.

"Non mais sérieux, Julien, il est con ou il est con ?

- Qu'est-ce qu'il t'arrive ?

- Il me fait ENCORE une saisine pour Cyril ! Tous les ans, quoi qu'on fasse !

- Oh merde. Ça veut dire que je peux m'attendre à en avoir une nouvelle pour Jérôme et Mathieu, tu crois ?"

Elle sait bien qui est "mon Cyril", et je sais bien qui sont "ses" Jérôme et Mathieu, qui souffrent des mêmes difficultés. Et on espérait toutes les deux que Julien, notre parquetier mineurs titulaire, avait fini par l'intégrer aussi. Ce n'est pas faute de lui en avoir parlé.

La première fois que j'ai rencontré Cyril (puisque malheureusement, il y en a eu un certain nombre d'autres), il avait trois ans. J'avais reçu une requête en AE1 plus ou moins apocalyptique du Parquet, qui m'évoquait un enfant autiste, une mère, disons, compliquée et un père absent.

A l'époque, je ne savais pas grand-chose de l'autisme. Je n'étais pas médecin, encore moins psychiatre. J'avais juste la notion qu'il s'agissait d'un trouble plus ou moins envahissant du développement de l'enfant, avec divers degrés de gravité, qui compromettait la communication et les interactions avec l'extérieur et avec les tiers. Je supposais aussi qu'en souffrir exposait davantage à de multiples visites des services socio-médico-éducatifs qu'à voir débarquer Tom Cruise pour aller faire un tour au casino et compter les cartes du blackjack.

J'avais donc convoqué Cyril et ses parents, Mme VanV (nom flamand à rallonge globalement imprononçable, que nous avons réduit à "VanVé" pour aller plus vite) et M. Reynaud, manifestement séparés puisque résidant à deux adresses différentes2.

Au jour de l'audience, je m'étais aperçue avant même d'entrer dans la salle d'attente que le niveau sonore qui y régnait était inhabituellement élevé, même à l'échelle d'un Tribunal pour enfants où plusieurs cabinets fonctionnent chaque jour simultanément. J'ai appelé le dossier de Cyril et vu fondre sur moi Mme VanVé, immense Walkyrie ébouriffée dépassant largement et le mètre 80, et le quintal, fendant le groupe des justiciables en attente comme une étrave de paquebot et traînant à sa remorque un tout petit garçon littéralement enfoui sous son manteau.

J'ai tendu la main à Mme VanVé, qui l'a broyée et secouée avec énergie en me hurlant un "BONJOUR MADAME LE JUGE !" qui m'a instantanément fait penser au centurion du "Combat des chefs" qui engage Aplusbégalix pour vaincre Abraracourcix3 . En bien plus impressionnant. Je n'ai pas tendu la main à Cyril, contrairement à mon habitude, parce qu'il ne fallait pas être grand clerc pour réaliser que cet enfant était en proie à un stress prononcé et qu'un contact direct avec une inconnue n'arrangerait certainement pas les choses.

Mme VanVé était extrêmement mécontente de cette convocation, qu'elle ne comprenait pas, et a immédiatement tenu à me faire savoir, toujours au même volume, qu'elle ne voyait pas ce qu'on lui voulait et pourquoi on lui collait un juge des enfants sur le dos et c'était encore un coup de cette salope de Mme Courcel qui lui en voulait et qu'elle avait bien l'intention d'aller la voir AUJOURD'HUI MÊME et de lui en coller une qui lui ferait passer l'envie de l'emmerder surtout que ça l'occuperait bien de compter ses dents à la place et

"...Mme Courcel ?

- Ouais, l'assistante sociale du secteur, me faites pas croire que vous la connaissez pas, elle passe son temps à me faire chier ! Elle vous a raconté des conneries, Cyril il va au CMP4 toutes les semaines, j'ai jamais rien refusé, moi je voudrais qu'ils le prennent encore plus mais y a pas de place, et après ils viennent vous dire que je m'oppose et ils font vraiment de la merde, connasses d'assistantes sociales, sans compter celle de la PMI, je veux plus les voir ceux-là, et d'abord Cyril il voit MON médecin et c'est beaucoup mieux, et..."

Normalement, je recadre les parents qui débordent trop en leur expliquant que mon bureau n'est pas une foire à la saucisse et qu'on va se causer tranquillement et poliment. Mais là, j'avoue que j'étais hypnotisée par Cyril. Cyril qui courait à travers mon bureau, se cognait aux murs, grimpait sur une chaise, en sautait, tombait à terre, lançait ses chaussures, enlevait son pantalon et son t-shirt, se les faisait remettre de force par sa mère, remontait sur une chaise, ouvrait un placard et s'envoyait la porte dans la figure, courait encore, se remettait à moitié à poil, tentait de sortir, le tout rythmé par de petits couinements bizarres et les hurlements de stentore de sa mère ("CY-RIL-EUH !") toutes les huit secondes environ. Une tornade de moins d'un mètre.

En même temps que je contemplais Cyril en me demandant distraitement si un pandémonium pouvait se concevoir avec un seul démon ou si on devait plutôt dire "monodémonium", j'essayais de reprendre pied dans cette audience sous les yeux de mon greffier, bouche bée et mains dansant frénétiquement sur le clavier pour tenter de transformer en notes d'audience la litanie de récriminations braillée par Mme VanVé. J'ai tenté d'appliquer la méthode miracle des JE calmes (parler de plus en plus doucement pour forcer l'autre à baisser de plusieurs tons et écouter), en pure perte puisque Mme VanVé n'avait aucune intention d'écouter qui que ce soit. J'ai fini par crier aussi fort qu'elle, en me disant qu'il fallait bien que j'arrive à lui faire entendre, à un moment donné, que le Parquet me demandait de placer son enfant  parce qu'elle le faisait vivre dans un appartement crasseux et insalubre où les voisins les entendaient tous deux hurler jour et nuit, sans le faire suivre par les organismes appropriés à son état psychique.

Bien évidemment, l'annonce en question a été accueillie par les cris redoublés de Mme VanVé : "ME PRENDRE MON ENFANT ALORS QUE C'EST TOUTE MA VIE ?! JAMAIS, PLUTÔT CREVER, JE TUERAI VOS ASSISTANTES SOCIALES DE MERDE AVANT DE LE LAISSER PARTIR, Z'AVEZ QU'A BIEN LES PRÉVENIR !"

Je lui ai expliqué sur le même ton que c'était à moi de décider et plus à elle, et que si c'était tout ce qu'elle avait d'intéressant à me dire, elle pouvait partir. Mme VanVé a bondi de sa chaise, l'envoyant valdinguer au fond de la pièce5 , a attrapé Cyril au passage, non sans douceur ai-je remarqué, et a majestueusement et bruyamment pris la porte en la claquant évidemment au passage et en marmonnant (autant que faire se pouvait) un "salope !" bien senti.

Le temps qu'on échange trois mots (à volume enfin normal), mon greffier et moi, Mme VanVé est revenue s'encadrer sur mon pas de porte, Cyril toujours agrippé à ses jupes.

"Vous allez me le placer, c'est ça ?

- Non Madame. C'est la demande du Procureur mais je ne vais pas la suivre aujourd'hui.

- (Radoucie mais méfiante) Ah ouais ? Et pourquoi ?

- Parce que j'ai l'impression que vous contestez pas mal d'éléments de danger que j'ai dans mon dossier, par exemple sur les soins de Cyril, et que je préférerais faire une enquête avec mon service éducatif à moi pour être fixée.

- VOUS ALLEZ M'ENVOYER ENCORE LES ASSISTANTES SOCIALES ?!

- Pas les mêmes, celles-là vous ne les connaissez pas.

- (Re-radoucie) Et si j'accepte votre enquête, on me foutra la paix après ?

- Pas forcément, parce que le résultat de l'enquête peut aussi être une proposition de placement. Je vous reconvoquerai avec eux pour qu'on en parle si c'est le cas, mais je serai peut-être amenée à ordonner le placement de votre fils un jour, je ne peux pas vous garantir le contraire.

- Non, non c'est pas possible, NON, VOUS POUVEZ PAS FAIRE CA, vous imaginez pas, VOUS ALLER LE TUER, mettez-vous à ma place et à la sienne ! Je suis seule à m'en occuper, personne ne m'aide décidément."

L'audience s'est plus ou moins terminée comme ça ce jour-là. Enfin presque : plus d'une heure après le départ de Mme VanVé, M. Reynaud, père de Cyril, est venu errer dans la salle d'attente, se souvenant vaguement d'un rendez-vous avec un juge pour Cyril mais guère plus. J'ai essayé de lui résumer l'audience et ma décision, sans être sûre qu'il comprenne réellement ce que je lui racontais - il était environné d'un nuage de vapeurs d'alcool quasi-compact, mais sa façon de parler et son regard qui changeait constamment de cible me laissaient supposer l'existence de difficultés au-delà de la dépendance alcoolique.

Il y a des audiences comme ça qui donnent immédiatement envie d'aller se recoucher pour récupérer un peu. A la place, j'ai rendu une décision ordonnant une mesure judiciaire d'investigation éducative6 pour six mois, soit une enquête comportant un volet social, un volet éducatif et un volet psychologique.

Six mois plus tard, le rapport m'est parvenu, confirmant plus ou moins la réalité des éléments signalés par le Procureur mais les éclairant, au moins pour certains, d'une autre lumière. Mme VanVé et Cyril vivaient en effet dans un logement très dégradé, mais dont l'état s'expliquait essentiellement par le comportement du petit garçon qui crayonnait sur les murs, arrachait les papiers peints, lançait des objets dans les vitres, dégradait les meubles avec tout ce qui lui tombait sous la main, enfonçait de petits objets dans les évacuations d'évier et de baignoire, et par l'épuisement maternel chronique qu'on pouvait humainement comprendre. Mme VanVé précisait qu'elle ne pouvait pas laisser Cyril seul ne serait-ce que le temps de descendre la poubelle, faute de quoi l'enfant tentait d'ouvrir les fenêtres ou s'échappait de l'appartement.

Les cris existaient bien aussi, bien sûr. Ceux de Mme VanVé ("CY-RIL-EUH !"), ceux de Cyril qui n'avait pas encore acquis le langage. Les relations détestables entre Mme VanVé et la plupart des services sociaux aussi, structure de soin exceptée. Mais le service soulignait aussi la grande solitude de cette mère, qui recevait au mieux une ou deux fois par an la visite de M. Reynaud sans qu'il ne lui vienne en aide de quelque manière que ce soit, l'acceptation effective de chaque nouvelle possibilité de prise en charge thérapeutique pour l'enfant par Mme VanVé, l'attachement mutuel bien palpable entre la mère et l'enfant, et l'absence de tout acte de violence envers Cyril de la part de son imposante maman.

J'ai reconvoqué Cyril et ses parents (M. Reynaud n'est pas venu) avec le service éducatif qui avait enquêté, et pouvait exercer la mesure d'assistance éducative (AEMO) qu'il me recommandait d'ordonner, dans le but essentiellement d'accompagner Mme VanVé dans les démarches administratives nécessaires à la mise en oeuvre de toute prise en charge envisageable pour Cyril, histoire que l'irascibilité maternelle et son sentiment de persécution ne préjudicient pas à l'enfant.

Mme VanVé, bien que toujours méfiante, a quasiment réussi à me faire confiance ce jour-là (non sans que j'aie dû lui assurer à de multiples reprises que la mesure éducative n'avait pas pour but de placer son fils) et à parler à un volume normal, sans traiter quiconque de connasse. J'ai trouvé qu'on progressait.

La chance a voulu que Cyril puisse bénéficier de l'intervention de l'une des SuperEducs du service désigné, de celles qui parviennent à se faire entendre même des gens les plus hostiles et à ne jamais oublier qu'on ne devrait pas exiger des familles que nous suivons qu'elles soient cent fois plus parfaites que les autres. Mme VanVé a bien accroché avec la dame en question.

Au bout d'un an, SuperEduc m'a expliqué que Mme VanVé donnait le maximum pour son fils, même si cela pouvait paraître imparfait vu de l'extérieur (pour peu que l'extérieur puisse se targuer de sa propre perfection). Gros point noir dans la situation de Cyril : il n'était scolarisé que quelques heures par semaine et pris en charge autant que possible en hôpital de jour, aucun établissement de type Institut Médico-Educatif (IME) ne disposant de place à lui offrir. Les demandes étaient faites, les listes d'attente longues. On ne pouvait rien reprocher à Mme VanVé, qui se tenait prête à scolariser son fils dans tout établissement qu'on lui indiquerait et se chargeait de courir toute la semaine entre l'école et l'hôpital de jour pour l'accompagner où on l'attendait.

J'aimerais pouvoir dire que l'histoire s'est arrêtée là, mais vous savez déjà que non.

Un an plus tard, j'ai de nouveau été saisie de la situation de Cyril par le Parquet, qui me demandait son placement car Mme VanVé osait avoir l'exigence que son fils, à qui la société ne proposait au demeurant aucune scolarité permanente et adaptée, rentre chez elle le soir plutôt que d'être accueilli en internat lorsqu'un établissement l'accepterait. Elle se disait prête à déménager n'importe où, Lille, Marseille, Toulouse, Strasbourg, pour être à proximité de son enfant et le voir rentrer à la maison chaque soir. Le Conseil général demandait donc qu'on place Cyril d'ores et déjà. Logique, non ?

J'ai reçu une Mme VanVé passablement énervée, accompagnée d'un Cyril sensiblement plus calme, qui a même réussi à me dire bonjour en entrant dans mon bureau et à y rester relativement tranquille en jouant dans un coin avec le sac de jeux apporté par sa mère. Il arrivait à prononcer quelques mots lorsqu'il parlait à sa mère. J'ai expliqué à Mme VanVé que non, je n'allais toujours pas placer son enfant. Elle est repartie apaisée, me gratifiant même d'un sourire (et d'un quasi-plaquage au mur en passant la porte). J'ai notifié mon jugement de non-lieu au Procureur.

Une nouvelle demande de placement m'est parvenue aux alentours des 7 ans de Cyril, fondée sur les mêmes motifs. J'ai retrouvé Mme VanVé, presque résignée désormais à ces rencontres quasi-annuelles mais finalement pas mécontente de me donner des nouvelles de son fils : un peu plus de temps scolaire (avec le soutien d'un auxiliaire de vie scolaire - AVS), des prises en charge en groupe thérapeutique et en individuel, de la psychomotricité, des éducateurs spécialisés, un père désormais tout à fait absent et des conflits de voisinage qui perdurent. "Bah oui, je vous avoue que souvent, je parle fort et que ça plaît pas, vous savez."7 . J'ai prononcé un nouveau non-lieu à assistance éducative et suis allée m'en entretenir avec mon nouveau collègue parquetier, lui expliquant que oui, Mme VanVé était pénible quand elle le voulait, oui le gamin était autiste et pas qu'un peu, mais que je ne comprenais pas qu'un tas de gens estiment que la meilleure chose à faire pour cet enfant était de l'éloigner d'une mère qui lui assurait des conditions d'éducation dont n'importe quelle famille d'accueil ou foyer peinerait à lui offrir la moitié. Il a accepté de bien noter le nom de Cyril (et celui des Jérôme et Mathieu de ma collègue Marina, qui vivaient un peu le même genre de saisines successives cycliques) en gros et en évidence dans son dossier "assistance éducative" afin de pouvoir renvoyer le Conseil départemental dans ses 22 en cas de future saisine, s'il n'y avait pas d'autres éléments de danger invoqués.

Ce qui nous amène à mes propres débordements verbaux du début de ce billet, il y a quelques semaines.

Une nouvelle demande de placement pour Cyril, qui à huit ans est à peu près scolarisé à mi-temps, toujours avec l'aide de son AVS, toujours au CMP pour l'autre moitié de son temps, mais dont la mère ferait l'objet d'une procédure d'expulsion et le ferait vivre dans des conditions matérielles innommables.

Mme VanVé se repointe donc dans mon bureau, sans Cyril qui est au CMP ("Ils avaient un genre d'évaluation avec lui aujourd'hui, j'ai pas voulu reporter, et puis de toute façon, on s'explique entre nous souvent, vous et moi") et qui a peut-être une chance d'intégrer un IME voisin. Comme à chaque fois, l'évocation de la demande de placement la fait bondir. Elle me jure ses grands dieux que la procédure d'expulsion est en cours d'abandon, car le propriétaire avait voulu la virer pour dégradation de l'appartement et qu'elle a depuis réalisé les travaux nécessaires. Je lui montre les photos de son logement que j'ai dans le dossier : selon elle, tout est réparé.

"Vous pouvez me le prouver ? Par exemple en m'envoyant des photos de votre appartement aujourd'hui ?

- Oui. Je rentre chez moi et je vous les envoie direct.

- D'accord. Notez donc notre e-mail, j'attends les photos d'ici deux heures."

Mme VanVé repart ventre à terre de mon bureau. Je profite des deux heures pour appeler le CMP (suivi toujours en cours, progrès constatés sans aucune période de régression) puis l'IME qui pourrait accueillir Cyril à la rentrée et me confirme qu'il fait bien partie de leur listing.

1 h 30 après la fin de l'audience, je reçois de Mme VanVé les photos de son appartement qui me prouvent qu'elle a dit vrai. Ce n'est pas Versailles, bien entendu, mais c'est correct. Elle s'est même appliquée à prendre les photos sous le même angle que celles que je lui ai montrées, dans chaque pièce, pour que je fasse bien la comparaison.

Je commence à rédiger un nouveau jugement de non-lieu, et je me réénerve finalement moi-même : parce qu'après tout, quand bien même ne m'aurait-elle pas communiqué ces photos, aurais-je pour autant placé son enfant ? Non, bien sûr que non. Comment peut-on ne pas imaginer que placer ce gamin (parce qu'il vit dans la crasse, au moins de temps à autre, parce qu'il n'est pas intégralement scolarisé, parce que sa mère est chiante et agressive, etc et rayez la mention inutile) constituerait vraisemblablement une maltraitance institutionnelle bien plus grave et lourde de conséquences que le laisser avec sa mère qui représente son unique repère affectif depuis toujours et lui offre une prise en charge attentive, certes à la mesure de ses moyens mais plus soutenue que n'importe quel lieu de placement non thérapeutique ?

Juger en assistance éducative, c'est trouver la meilleure (ou la moins pire) solution d'aide pour un enfant en se mettant tour à tour à la place de chacune des parties en cause.

Je me mets à la place des services sociaux, et je comprends qu'on s'inquiète de la situation de cet enfant autiste qui vit dans un logement en plus ou moins bon état, avec une mère célibataire souvent épuisée mais braillarde, et qui tirerait probablement bénéfice d'une prise en charge à temps complet - ce qui ne signifie pas nécessairement une obligation d'internat et de séparation mère-fils pour autant, à mes yeux.

Je me mets à la place de Mme VanVé, et je comprends qu'elle puisse en avoir marre de ces demandes annuelles de placement de Cyril, alors même qu'il n'a à aucun moment régressé auprès d'elle et que tout ce qu'elle demande, c'est que son fils aille à l'école, voie ses soignants et rentre chez elle chaque soir. Ce n'est pas démesuré, comme exigence.

Je me mets à la place de Cyril, et j'ai l'impression qu'il ne pourra que devenir fou si j'essaye de le séparer de sa mère. Surtout que la société n'a rien de mieux à lui proposer que ce que Mme VanVé lui offre.

Je ne suis toujours pas médecin, encore moins psychiatre.

Et comme c'est finalement à ma place que je suis, je rends un énième non-lieu à assistance éducative et le notifie au Parquet. Ce n'est peut-être pas la bonne décision, mais c'est la mienne.

A l'an prochain, Cyril.

  1. Assistance éducative []
  2. Oui, mon sens de la déduction m'a facilité l'entrée à l'ENM, qu'est-ce que vous croyez ? []
  3. Oui, mes lettres m'ont aussi bien aidée à réussir le concours, je crois. []
  4. Centre médico-psychologique []
  5. Et ceux qui me connaissent bien savent à quel point je suis sensible au sort et à l'alignement de mes chaises... []
  6. MJIE pour les habitués. []
  7. Oui, j'avais remarqué, tu parles d'un scoop. []
21 mai 2017

Psychanalyse et maternophobie

17 mai 2017
Par Pierre Laroche
Blog : Le blog de Pierre Laroche

Sophie Robert travaille sur un nouveau reportage concernant les placements abusifs (d'enfants autistes). L'objet concerne bien évidemment la psychanalyse.

Sophie Robert est l'auteure du célèbre reportage Le Mur à l'épreuve de l'autisme :

http://www.dragonbleutv.com/documentaires/2-le-mur-ou-la-psychanalyse-a-l-epreuve-de-l-autisme

Sophie Robert  doit aussi sa célébrité au fait que 4 des psychanalystes interviewés dans Le Mur ont voulu faire censurer le film afin que leur pratique odieuse et tendancieuse de la psychiatrie ne soit pas révélée au grand-public. Sophie Robert a perdu en première instance. Elle a gagné en appel. Les médias se sont passionnés pour cette affaire : David terrassant Goliath... Aujourd'hui, Le Mur a été rendu public.

Elle dénonce frontalement les mêmes escrocs contre les quels de nombreuses associations (parents d'enfants autistes, parents d'enfants souffrant du TDA/H, associations de parents d'élèves, associations de parents d'enfants post-divorce, associations de lutte contre les placements abusifs, etc.) luttent depuis des décennies.

Le sujet est grave, mais on peut aussi en rire ! Voir cet exemple tiré d'un de ses reportages La Théorie Sexuelle :

https://www.youtube.com/watch?v=j0Ye5mX4vUs&feature=youtu.be&t=1m43s

Sophie Robert travaille en ce moment sur un nouveau reportage bien plus grave concernant les placements abusifs (d'enfants autistes).

Tout ce qui peut nuire à la psychanalyse ne peut que profiter aux enfants, aux mères, aux pères et aux familles. La psychanalyse c'est le cancer des familles. C'est le cancer des pères, des mères et surtout celui des enfants. Oeuvrer contre la psychanalyse est un devoir civique.

Sophie Robert recherche une aide financière pour son prochain reportage. A ce titre, elle a ouvert une tirelire sur kisskissbankbank (voir ci-dessous).

Sophie Robert : "Aujourd'hui j'ai le plaisir de vous solliciter pour le lancement de la nouvelle campagne de financement participatif d'un de mes projets, par l'intermédiaire de l'association NINSUN PROJECT : Maternophobie.

Ce programme vidéo est destiné à dénoncer les placements abusifs et les conséquences désastreuses de théories psychanalytiques "maternophobes" sur un certain nombre de familles avec autisme.

Maître Janois y parlera - entre autres - de l'affaire Rachel. Il s'agit de dénoncer les pressions scandaleuses sur les familles et la manière insidieuse sont les théories psychanalytiques d'un autre âge sont utilisées pour maintenir l'enfant autistes exclu du monde réel, de l'école, et le maintenir prisonnier d'institutions au fonctionnement obsolète.

Comme les autres films produits par Ninsun Project, cette émission sera mise à la disposition gratuite du public sur le net.

Il sera également édité un DVD pour faciliter sa projection en réunion publique.

L'objectif est d'ouvrir les yeux des pouvoirs publics - et des politiques - pour que ça change!"

Pour plus d'information, cliquez ci-dessous :

https://www.kisskissbankbank.com/fr/projects/maternophobie

17 mai 2017

Pourquoi les thérapies psychanalytiques se disent « dynamiques »

article publié dans SCIENCE... et pseudo-sciences

par Jacques Van Rillaer - SPS n°319, janvier 2017

Les thérapies psychanalytiques se définissent souvent comme des thérapies psycho-dynamiques. Le substantif « dynamique » est dérivé du grec « dunamis », force. Il apparaît chez Leibniz à la fin du XVIIe siècle pour désigner la science des forces dans leur rapport avec les corps en mouvement. À partir du XIXe, il est utilisé dans diverses disciplines : sociologie, médecine, etc. Aujourd’hui, on peut le définir comme « l’ensemble des forces en interaction et en opposition » ([1] p. 634).

La « psychologie dynamique » de Herbart

Johann Herbart (1776-1841), professeur de philosophie à l’université de Königsberg, fut l’un des premiers à chercher à faire de la psychologie une science objective. Il a développé une théorie « dynamique » des processus mentaux inconscients. Selon lui, des représentations entrent en conflit avec d’autres de sorte que certaines sont refoulées (verdrängt). Celles-ci deviennent alors des forces (Vorstellungen werden Kräften) qui demeurent actives dans l’inconscient et tentent d’émerger à la conscience.

Ses ouvrages Lehrbuch zur Psychologie (1816) et Psychologie als Wissenschaft (1824) ont été largement utilisés au XIXe siècle. Freud, dans sa dernière année au lycée, a étudié un manuel de psychologie basé sur son enseignement ([2] p. 61). Edwig Boring, dans son histoire de la psychologie, appelle Herbart « un psychologue dynamique, qui se situe dans la lignée de succession allant de Leibniz à Freud » ([3] p. 255).

La « méthode cathartique » de Breuer

Les émotions actives, comme la peur, la colère ou l’excitation sexuelle, donnent une impression d’envahissement par une énergie difficile à contenir. Déjà au XVIIIe siècle, des médecins affirmaient que des affects non extériorisés peuvent rendre malade. L’un d’eux écrivait : « Lorsque le chagrin n’est pas évacué dans les lamentations et les pleurs, mais demeure au contraire fermement logé à l’intérieur et est pendant longtemps refoulé, le corps pas moins que l’esprit est dévoré et détruit » (cité dans [4] p. 127). Cette conception s’est diffusée au XIXe siècle, lorsque la machine à vapeur – une invention qui a alors révolutionné la vie économique – servit de métaphore pour expliquer des aspects de la vie mentale. Des physiologistes comme Carpenter, des philosophes comme Nietzsche et des psychiatres comme Griesinger expliquèrent que des forces physiologiques ou psychologiques (énergies, excitations, pulsions, désirs) sont comparables à la vapeur dans une machine et doivent, sous peine de troubles, être régulées par une instance dirigeante (le moi, la volonté, d’autres forces).

Cette conception a inspiré le médecin viennois Joseph Breuer, mentor de Freud, quand il tenta de traiter une jeune fille, Anna O., souffrant d’une toux qualifiée d’« hystérique ». Il imagina que les symptômes étaient des « conversions somatiques » d’émotions qui n’avaient pu s’éliminer par la voie normale de l’action. Son traitement consistait à se remémorer des événements oubliés et à « décharger (Entladen) les affects bloqués » qui s’y rattachaient. Il a baptisé son procédé « méthode cathartique ».

Henri Ellenberger, célèbre psychiatre et historien de la psychothérapie, a découvert des documents qui prouvent que Breuer soulagea Anna O. de quelques symptômes, mais que l’état de la patiente se détériora tout au long du traitement. Finalement, Breuer la fit entrer dans un institut psychiatrique [6]. Freud savait que ce traitement avait été un fiasco. Aussi utilisa-t-il plutôt une hypnose très directive, qui visait à ramener des souvenirs à la conscience non pour les analyser, mais pour les effacer par une suggestion autoritaire ([7] p. 287-301). Ensuite, il a inventé une technique qui consiste à inviter les patients à dire tout ce qui leur passe par la tête (« méthode des associations libres ») et à leur donner des interprétations. Il écrit en 1905 : « Depuis les “Études sur l’hystérie”, la technique psychanalytique a connu un bouleversement fondamental. […] J’ai depuis lors abandonné cette technique, parce que j’ai trouvé qu’elle était totalement inadéquate à la structure si fine de la névrose. […] La nouvelle technique est largement supérieure à l’ancienne, elle est sans conteste la seule possible » ([8] p. 192).

L’inconscient « dynamique » de Freud

Malgré l’abandon par Freud du procédé cathartique, l’idée des bienfaits de l’expression émotionnelle est devenue du sens commun. Il est vrai que Freud a continué à comparer ce qu’il appelle « l’appareil psychique » à une marmite (Kessel) remplie de l’énergie émanant des pulsions (voir par exemple en 1933 dans [9] p. 156 et suivantes). Il a maintenu que les troubles mentaux sont en quelque sorte de la vapeur qui s’échappe par une soupape. Modifier des comportements, sans réduire la tension à l’intérieur du système, serait boucher la soupape, augmenter la tension intérieure et provoquer dès lors des « symptômes de substitution », comparables à de la vapeur qui sort par un autre trou.

L’index général des œuvres complètes de Freud [10] montre qu’il a très peu utilisé le mot « dynamique ». Une de ses premières utilisations apparaît en 1909 lorsqu’il précise que sa conception du trouble mental s’oppose à celle de Janet. Alors que celui-ci invoque une déficience de la force psychique, Freud déclare : « nous l’expliquons [le trouble] dynamiquement par le conflit de forces d’âme antagonistes, nous reconnaissons en lui le résultat d’un affrontement actif de deux groupements psychiques l’un contre l’autre » ([11] p. 22).

La seule publication où le terme apparaît dans le titre est « Sur la dynamique de transfert » (1912). Freud y explique que le transfert – le report sur l’analyste de sentiments éprouvés dans le passé pour quelqu’un d’autre – est tantôt « le porteur de l’action curative » (transfert positif), tantôt « la plus forte résistance contre le traitement » (transfert négatif ou hostile). Il écrit : « Nous admettons volontiers que les résultats de la psychanalyse reposent sur la suggestion ; à condition toutefois d’entendre par suggestion ce que nous y trouvons avec Ferenczi : l’influence exercée sur un être humain au moyen des phénomènes de transfert qui sont chez lui possibles » ([12] p. 114).

Notons enfin que Freud, tout en accordant une place primordiale à la recherche de significations inconscientes, invoque régulièrement des « forces pulsionnelles » quand il explique les échecs de sa méthode. Ainsi, à la fin de sa vie : « En cas de force pulsionnelle excessivement grande, le moi mûri et soutenu par l’analyse échoue dans sa tâche, tout comme autrefois le moi démuni ; la domination sur les pulsions s’améliore, mais elle demeure imparfaite parce que la transformation du mécanisme de défense n’est qu’incomplète. Rien d’étonnant à cela, car l’analyse ne travaille pas avec des pouvoirs illimités, mais avec des pouvoirs restreints, et le résultat final dépend toujours du rapport de forces relatif des instances qui luttent entre elles » ([13] p. 31).

La « psychiatrie dynamique » de Henri Ellenberger

Ellenberger reste à ce jour l’auteur de la meilleure histoire de la psychothérapie de l’Antiquité à la fin des années 1960. De 1953 à 1959, il a enseigné cette matière à la Fondation Menninger, à l’époque la plus grande institution psychiatrique du monde (située à Topeka, Kansas). Il a alors commencé la rédaction de son monumental ouvrage The Discovery of the Unconscious. The History and Evolution of Dynamic Psychiatry, qui paraîtra en 1970 (Basic Books, 932 p.). L’ouvrage a été traduit en plusieurs langues. En français, il est paru en 1974, chez Simep, avec des ajouts : À la découverte de l’inconscient. Histoire de la psychiatrie dynamique.

Ellenberger a utilisé indifféremment les expressions « psychiatrie dynamique » et « psychothérapie dynamique » pour désigner des thérapies fondées sur l’idée que les troubles mentaux résultent de forces psychiques inconscientes, souvent en opposition. Pour lui, cette conception remonte à l’Antiquité et a pris des tournants décisifs notamment avec Mesmer et Janet. Il a montré que Freud n’est qu’un des nombreux auteurs qui s’inscrivent dans cette tradition. Bien qu’il ait été psychanalyste freudien (analysé par Oscar Pfister), il estimait que Freud et ses disciples avaient produit des légendes, par exemple celle de la grande originalité de Freud. Sa pratique clinique se basait sur une conception éclectique, dans laquelle les idées d’Adler et de Rogers ont progressivement occupé une place importante. À la fin de sa vie, il a également pratiqué des thérapies comportementales (pour une biographie de cet homme exceptionnel, voir [14]).

Les « thérapies psychodynamiques »

Dès le début du mouvement freudien, différentes façons de théoriser et de pratiquer sont apparues : des cures plus actives, plus courtes, en « face à face », avec davantage d’empathie, avec des « expériences affectives correctrices » (Alexander) et même des gestes d’affection (Ferenczi). Des analystes ont utilisé des techniques « comportementales », comme l’affrontement progressif de situations phobogènes (Herzberg). Anne Millet, qui a étudié les réactions des freudiens à ces innovations, écrit : « L’histoire montre que c’est autour de leur pratique (davantage que de leurs théories) que les psychanalystes se sont déchirés de la façon la plus violente et la plus meurtrière » [15,16].

Aux États-Unis, les pratiques et les théories sont devenues un capharnaüm. Déjà en 1920, Jones signalait au Comité secret (destiné à veiller à l’orthodoxie freudienne et composé de cinq disciples fiables, réunis autour de Freud) : « Sur la base de divers rapports que j’ai eus dernièrement d’Amérique et de la lecture de la littérature récente, je suis au regret de dire que j’ai une très mauvaise impression de la situation là-bas. Tout et n’importe quoi passe pour de la psychanalyse, pas seulement l’adlérisme et le jungisme, mais n’importe quelle sorte de psychologie populaire ou intuitive » (cité dans [17] p. 435).

Depuis les années 1960, les critiques envers la psychanalyse se sont accentuées alors que se développaient d’autres traitements (pharmacologiques, comportementaux, etc.). Bon nombre de praticiens ont alors préféré l’étiquette « psychodynamique », qui permet de se distancier de l’orthodoxie freudienne et qui connote un « dynamisme » que n’évoque pas le mot « analyse ». Des auteurs représentatifs de ce courant écrivent : « Bien que la psychothérapie psychodynamique soit largement pratiquée, sa définition est vague. Typiquement, elle est considérée comme plus efficace que la psychanalyse, quoiqu’elle en soit une forme diluée [water-down]. On la voit habituellement comme se situant le long d’un continuum allant de la psychanalyse à la psychothérapie de soutien » ([18] p. 10).

Un qualificatif facilement trompeur

Le Petit Robert (1993) donne trois significations pour l’adjectif « dynamique » : 1. Relatif aux forces, à la notion de force. 2. Qui considère les choses dans leur mouvement, leur devenir. 3. Qui manifeste une grande vitalité, de la décision et de l’entrain.

L’expression « thérapie psychodynamique » se justifie si l’on se réfère au premier sens. Malheureusement, beaucoup de personnes entendent naïvement le troisième : ces thérapies seraient particulièrement aptes à vitaliser les patients, à les dynamiser, à les transformer. En fait, lorsqu’elles se limitent à rappeler des souvenirs, à les analyser et les ressasser, le qualificatif est fallacieux. Son usage rappelle celui de « profondeur ». Dans une lettre à Freud du 14 février 1910, Jones montrait ce qu’il en est : « Mon article sur la psychanalyse a été bien accueilli. Je crois bon de prendre de la hauteur scientifique et d’enrober le tout de mots tels que “profond”, “à fond”, “pénétrant” ! » ([19] p. 94). À regarder de près, les thérapies « profondes » ramènent toutes les conduites problématiques à quelques pulsions et complexes élémentaires (pour l’explicitation, voir [20] p. 216-233).

Des thérapeutes fidèles à Freud, mais qui prennent du recul vis-à-vis de sa technique ou de certains concepts, utilisent les expressions « Psychothérapie d’orientation psychanalytique » (POP) ou « d’inspiration psychanalytique » (PIP) (voir [21] p.208). Ces expressions suscitent moins d’ambiguïtés et d’illusions. Encore importe-t-il de préciser si la référence est Freud, Reich, Klein, Lacan ou un autre. Jones avait beau dire en 1926 : « Quand tant de choses circulent sous le nom de psychanalyse, notre grande réponse aux enquêteurs est “la psychanalyse, c’est Freud” » ([19] p. 684), l’usage en a décidé autrement.

Références

[1] Rey A., Dictionnaire historique de la langue française. Dictionnaires Le Robert, 1992, p. 634.
[2] Dorer M., Historische Grundlagen der Psychoanalyse. Meiner, 1932, p. 106 & Sulloway F., Freud, biologiste de l’esprit. Fayard, 1981, p. 61.
[3] Boring E., A History of Experimental Psychology,Appleton, 1957.
[4] Webster R., Le Freud inconnu. Trad., Exergue, 1998.
[5] Breuer J. et Freud S., Studien über Hysterie, Leipzig & Vienne, 1895.
[6] Borch-Jacobsen M., Souvenirs d’Anna O. Une mystification centenaire, Aubier, 1995.
[7] Freud S., L’hypnose. Textes, (1886-1893), L’Iconoclaste, 2015.
[8] Freud S., « Fragment d’une analyse d’hystérie » (1905), Œuvres complètes. Psychanalyse, PUF, Volume VI.
[9] Freud S., « Nouvelle suite des leçons d’introduction à la psychanalyse », Œuvres complètes. Psychanalyse, PUF, Volume XIX.
[10] Index général des œuvres complètes de Freud. Gesammelte Werke, Gesamtregister, Fischer, Œuvres complètes. Psychanalyse, PUF, Volume XVIII.
[11] Freud S., Conférence à l’université Clark (Worchester) « De la psychanalyse » (1910), Œuvres complètes. Psychanalyse, PUF, Volume X.
[12] Freud S., « Sur la dynamique du transfert » (1912). Œuvres complètes. Psychanalyse, PUF, Volume XI.
[13] Freud S., « L’analyse finie et l’analyse infinie » (1937). Œuvres complètes. Psychanalyse, PUF, Volume XX.
[14] Yanacopoulo A., Henri F. Ellenberger. Une vie, Liber, 2009. Voir la note de lecture.
[15] « L’analyse pour comprendre ou pour soigner ? » In Marmion, J.-Fr. (éd.) Freud et la psychanalyse, Editions Sciences Humaines, 2015.
[16] Millet A., Psychanalystes, qu’avons-nous fait de la psychanalyse ? Seuil, 2010.
[17] Borch-Jacobsen M. et Shamdasani S., Le dossier Freud. Enquête sur l’histoire de la psychanalyse, Les Empêcheurs de penser en rond, 2006.
[18] Summers R. et Barber J., Psychodynamic Therapy, Guilford, 2013.
[19] Freud S. et Jones E. Correspondance complète, PUF, 1998.
[20] Van Rillaer J., « La mythologie de la thérapie en profondeur ». In Meyer,C. et al., Le livre noir de la psychanalyse, Les Arènes, 2005.
[21] Dupont S., L’autodestruction du mouvement psychanalytique, Gallimard, 2014.

14 mai 2017

En marche arrière pour la psychiatrie et la psychologie?

13.05.2017 par Franck Ramus

 

Au cours de la récente campagne présidentielle, un groupe s'est beaucoup agité pour faire valoir les intérêts des psychanalystes auprès des différents candidats. Après une pétition en ligne, ce groupe adresse maintenant une lettre au nouveau président de la république, avec des arguments bien connus car déjà maintes fois ressassés auxquels j'ai déjà répondu. Pour l'information du nouveau président et de son équipe gouvernementale, je réponds ici aux principaux points du texte qui lui est adressé.

"La France peut s’enorgueillir d’avoir formé des cliniciens de haute qualité"

Puisqu'on vous le dit!

"Mais ils sont actuellement de plus en plus marginalisés au profit des traitements médicamenteux, qui ne sont pourtant que de simples palliatifs. Leur consommation massive est de plus très couteuse"

Il est vrai que la France présente une consommation très importante de psychotropes, en particulier d'anxiolytiques et d'hypnotiques (voir Figure). Mais cette situation perdure depuis plusieurs décennies, alors même que la France est l'un des derniers bastions de la psychanalyse. Par conséquent, la fable selon laquelle la psychanalyse serait notre dernière rempart contre Big Pharma n'a aucune plausibilité. En France, on ne choisit pas psychotropes ou psychanalyse: on a psychotropes et psychanalyse, et massivement!

Consommation totale de psychotropes par habitant dans 30 pays européens

Consommation totale de psychotropes par habitant dans 30 pays européens. Source: Organe international de contrôle des stupéfiants, 2009.

 

Si les Français surconsomment des psychotropes, c'est au contraire parce que l'offre de soins en psychothérapies efficaces est extrêmement réduite en France, du fait justement de la domination de la psychanalyse. Les pays qui ont abandonné la psychanalyse il y a longtemps, mais qui (comme la Grande-Bretagne) ont formé massivement les psychologues et les psychiatres aux thérapies cognitives et comportementales (TCC), consomment 3 à 5 fois moins de psychotropes que la France.

I. Pour une psychiatrie de qualité

1) "Adaptation du numerus clausus à l’entrée en faculté de médecine."

Oui, tout le monde s'accorde à dire qu'il est insuffisant.

2) "Une formation spécifique des futurs psychiatres et pédopsychiatres. Elle n’existe plus."

Oui, la formation des psychiatres et surtout des pédopsychiatres est insuffisante et doit être renforcée. Cela ne peut se faire que sur la base des dernières connaissances scientifiques internationales, pas par un retour aux croyances du siècle dernier.

3) "Une formation spécifique des infirmiers en psychiatrie. Elle a été supprimée."

De même, cela ne peut se faire que sur la base des dernières connaissances scientifiques internationales, pas par un retour aux croyances du siècle dernier.

4) "Il faut suspendre les enseignements donnés à l’université par les laboratoires pharmaceutiques."

Tout à fait d'accord.

5) "Les enseignements aux formations thérapeutiques non pharmacologiques, à commencer par la psychanalyse, doivent être rétablis ou valorisés."

Oui, la formation aux psychothérapies doit être valorisée et généralisée dans les cursus de psychiatrie et de psychologie. Mais il importe de former les cliniciens aux psychothérapies qui ont une efficacité prouvée, comme les TCC, sûrement pas à la psychanalyse, dont l'efficacité sur les troubles mentaux n'est pas supérieure au placebo.

6) "Promotion des lieux d’accueil sur le modèle des Maisons Vertes, ou de la clinique La Borde, de même que les lieux de vie accueillant les autismes et les toxicomanies."

Les lieux d'accueil à promouvoir sont ceux qui mettent en œuvre les bonnes pratiques validées au niveau international et préconisées par la Haute Autorité de Santé.

II. Pour une formation des psychologues adaptée aux réalités de l’époque

1) "Changement des critères qui s’opposent au recrutement des Enseignants chercheurs d’orientation psychanalytique."

Aucun critère ne s'oppose spécifiquement au recrutement des enseignants-chercheurs d’orientation psychanalytique. Les mêmes critères doivent s'appliquer à tous les enseignants-chercheurs en psychologie, et doivent garantir qu'ils sont au fait des derniers développements de leur discipline au niveau international, comme je l'ai expliqué dans un précédent article.

2) "Un enseignement concernant les autismes et la toxicomanie dès le niveau Master."

Oui, du moment qu'il est fondé sur les connaissances scientifiques internationales à jour.

3) "Un enseignement spécifique de la déradicalisation."

Oui, du moment qu'il est fondé sur les connaissances scientifiques internationales à jour.

4) "Une formation au debriefing des traumatismes des grandes catastrophes, comme les attentats."

Oui, du moment qu'elle est fondée sur les connaissances scientifiques internationales à jour.

III. Pour une médecine de ville informée de la souffrance psychique.

1) "Une formation complémentaire pluridisciplinaire des médecins."

Oui, du moment qu'elle est fondée sur les connaissances scientifiques internationales à jour.

2) "Ouverture aux formations thérapeutiques non pharmacologiques, notamment psychologiques et psychanalytiques."

Les médecins généralistes doivent être informés des différentes formes de psychothérapie et de leur efficacité, afin de ne plus aiguiller les patients vers des prises en charge longues, coûteuses, et inefficaces, qui prolongent la souffrance psychique et ne laissent d'autre alternative pour l'atténuer que les psychotropes.

3) "Les médecins doivent actuellement coter leurs actes selon une classification orientée par le DSM 5 américain. Elle doit être remplacée par la classification française CFTMA et CFTMEA."

Non, en aucun cas. La Classification Internationale des Maladies, produite par l'Organisation Mondiale de la Santé est celle qui synthétise le mieux l'ensemble des connaissances scientifiques internationales, et doit par conséquent rester la référence pour la médecine française. Se baser sur une classification nationale idiosyncrasique et reconnue nulle part ailleurs n'aurait aucun sens. Il ne peut y avoir d'exception française en médecine.

IV. Pour une recherche pluridisciplinaire

1) "Les recommandations de la Haute Autorité de Santé doivent laisser aux cliniciens un libre choix thérapeutique. Il faut rappeler qu’elles ne sont pas opposables."

Non, les cliniciens ne doivent pas avoir le libre choix de faire n'importe quoi avec les patients, au mépris des connaissances scientifiques et de leurs codes de déontologie. Ils doivent constamment mettre à jour leur formation et faire évoluer leurs pratiques vers celles qui sont établies comme étant les plus efficaces. La Haute Autorité de Santé produit les synthèses des connaissances scientifiques internationales qui permettent d'établir le référentiel incontournable de ces pratiques.

2) "Les chercheurs en psychanalyse doivent être associés aux laboratoires de recherche, et cela avec leurs propres critères d’évaluation."

Comme les chercheurs de toutes les disciplines, les chercheurs en psychanalyse sont soumis à l'évaluation "par les pairs", ce qui garantit à la fois la compétence disciplinaire et la prise en compte des spécificités de chaque discipline.

3) Une référence aux critères anglosaxons ne doit plus être obligatoire pour la publication des résultats.

4) La publication en anglais dans des revues scientifiques américaines ne pas être obligatoire pour les recrutements.

Il n'y a pas de critères "anglo-saxons" pour la publication des résultats. Simplement, la recherche est une œuvre universelle accomplie collectivement par tous les chercheurs du monde dans toutes les disciplines. Participer à cette œuvre collective implique donc de porter ses travaux à la connaissance de tous les autres chercheurs de tous les pays. Par conséquent, cela implique de publier ses travaux en anglais. Ne pas le faire revient à s'isoler et à condamner ses travaux à rester inconnus et sans influence.

V. Pour une collaboration avec les associations d’usagers à tous les niveaux de décision.

Absolument. Et les associations d'usagers, à l'image des associations de familles d'enfants autistes, demandent unanimement des soins à l'efficacité démontrée, pas des cures du 19ème siècle sans efficacité connue.

Conclusion

La République en marche doit aller de l'avant dans tous les domaines, y compris en sciences et en médecine. Cela implique de s'engager toujours plus résolument dans la voie de la médecine fondée sur des preuves ("evidence-based"), et de délaisser sans regret toutes les pseudo-médecines héritées du passé. Remettre la psychanalyse au cœur de la psychiatrie et de la psychologie françaises constituerait une marche arrière gravissime, incompatible avec les ambitions du nouveau président.

10 mai 2017

Voir ou revoir => Le MUR, la psychanalyse à l'épreuve de l'autisme le film de Sophie ROBERT devenu culte !

Ce film d'investigation est toujours d'actualité car il montre les causes "du fameux retard français" pour accompagner nos concitoyens autistes et leurs familles.

Malgré une certaine prise de conscience et hormis quelques avancées significatives nous avons encore une révolution culturelle à faire & un redéploiement de l'argent public vers des accompagnements connus et mis en oeuvre avec succès dans la plupart des pays avancés.

N'hésitez surtout pas à partager ... C'est hallucinant, consternant, stupéfiant etc. mais bien réel ! Et le fait d'une certaine école ...(Jean-Jacques Dupuis)


LE MUR ou la psychanalyse a l'épreuve de l'autisme par dragonbleutv


 

Pour en savoir plus sur ce film à scandale & son histoire tourmentée cliquez sur le lien ci-après :

Le MUR, la psychanalyse à l'épreuve de l'autisme

Dans ce documentaire de 52 minutes réalisé par Sophie Robert, onze psychanalystes exposent leur point de vue stupéfiant sur l'autisme. Produit par Océan Invisible Productions. Diffusé par Autistes Sans Frontières. Découvrez bientôt le film événement de l'autisme, après 2 années de censure.

http://www.dragonbleutv.com

 

7 mai 2017

Martin Seligman : de la psychanalyse à la psychologie positive

6 mai 2017
Par Jacques Van Rillaer

Le professeur Seligman doit sa vocation de psychologue à la lecture de Freud. Ses études universitaires lui ont fait comprendre la faiblesse méthodologique du freudisme et l’ont motivé à devenir chercheur en psychologie scientifique. Parmi ses nombreux travaux, nous évoquons ici des expérimentations sur la dépression et sa contribution au courant de la psychologie dite “positive”.

L’analyse statistique des noms des psychologues du XXe siècle cités dans les publications universitaires de psychologie (revues et manuels) montre que Seligman occupe la 13e place [1]. Sa carrière est une longue série de réussites dans la recherche expérimentale (il a publié près de 200 articles dans ce domaine), l'enseignement (il a dirigé durant 14 ans le programme de formation des psychologues cliniciens à l’université de Pennsylvanie, puis a dirigé le Centre de psychologie positive dans la même université), la rédaction d’ouvrages pour psychologues (notamment, avec David Rosenhan, un excellent manuel de psychopathologie), la publication de livres pour le grand public (plus d’une dizaine, dont plusieurs devenus des best-sellers). C’est avec raison que son nom est apparu sur la couverture de grands magazines comme Time, New York Times ou Newsweek.

seligman-photo

Une vocation de psychologue née de la lecture de Freud
Seligman est né en 1942 à Albany (Etat de New York). Sa vocation de psychologue lui est venue durant l’adolescence, à la suite de la lecture des Leçons d’introduction à la psychanalyse de Freud. Il raconte : “Quand je parvins au passage où il parle de ceux qui rêvent souvent de perdre leurs dents, j'eus comme une révélation. Ces rêves avaient aussi été les miens! Son interprétation me laissa d'ailleurs bouche bée. Pour Freud, il s'agissait d'un symbole de castration et de l'expression de la culpabilité que l'on ressent par rapport à la masturbation. Je me demandais comment il pouvait si bien me connaître... J'étais à mille lieues de penser que, pour produire ce déclic chez le lecteur, Freud avait profité de la coïncidence de la fréquence, au cours de l'adolescence, des rêves portant sur les dents et de ce phénomène plus courant encore à cet âge qu'est la masturbation. Plausible, intrigante, l'explication recelait la promesse alléchante de révélations ultérieures. Ce fut alors que je décidai de consacrer ma vie à des interrogations comme celles de Freud” [2].

Le revirement
Seligman a fait des études de philosophie à l’université de Princeton. Il a alors compris que “Freud avait soulevé de bonnes questions”, mais que sa méthode — “tirer des conclusions extrêmes de quelques cas isolés” — était inadéquate: “J'en étais venu à penser que seule l'expérimentation permettrait à la science de démêler les causes et les effets en jeu dans des problèmes affectifs et ensuite d'y remédier” [2].
De 1964 à 1965, il étudie la psychologie à l'université de Pennsylvanie. Il s’y passionne pour la psychologie expérimentale et obtient son doctorat en 1967. Après avoir enseigné trois ans à l'université Cornell, il revient à l'université de Pennsylvanie, au département de psychiatrie, là où le déjà célèbre Aaron Beck, lui aussi revenu de la pratique et des paralogismes du freudisme, élaborait la “thérapie cognitive”. Seligman y acquiert une formation de clinicien. Comme Beck, il s'intéresse particulièrement à la dépression. En 1971, il est nommé professeur à l'université de Pennsylvanie. Il y fera toute sa carrière.

Des expériences sur le conditionnement de l’impuissance
Seligman a étudié, pendant plusieurs années, un processus qui s’observe dans le monde animal et chez les humains à travers une large variété de situations: l’attitude passive adoptée à la suite de la répétition de comportements qui n’ont pas abouti à un résultat intensément désiré (gratification ou réduction de souffrance). Il appelle ce processus helplessness, mot traduit par impuissance, détresse, résignation, incapacité à s’en sortir, sentiment d’inefficacité. Le bilan de ces recherches se trouve dans son livre Helplessness (1975). Une édition remaniée est parue environ 20 ans plus tard [4].
L’expérience paradigmatique sur ce processus a été publiée par Seligman en 1967. Elle se déroule en deux phases, avec trois groupes de huit chiens. Les animaux, maintenus dans un harnais, apprennent à faire cesser des chocs électriques en appuyant le nez sur une plaque. Ils font ainsi l’expérience de leur capacité à contrôler une situation pénible. D’autres chiens sont appariés aux 1ers : ils endurent très précisément les mêmes chocs que ceux subis par les chiens du premier groupe au cours de leur apprentissage, mais ils n’ont aucun pouvoir d’agir sur les chocs. Un 3e groupe de chiens (groupe “témoin”) ne subissent pas cette 1ère étape de l’expérimentation.
La 2e phase de l’expérience a lieu 24 heures plus tard. Chaque animal est placé dans une “cage d’échappement” (shuttle box), un dispositif qui comprend deux compartiments, A et B. En A, le plancher permet d’administrer des chocs électriques. En B, l’animal ne subit jamais de chocs. Une barrière, pas très difficile à franchir, sépare les compartiments.

shuttle-box
Chaque animal est placé en A et subit des chocs. Tous les chiens, qui dans la 1ère phase avaient arrêté les chocs en appuyant sur une plaque, apprennent rapidement à franchir l'obstacle pour se rendre en B. Ceux du 3e groupe apprennent tout aussi bien. Par contre, 6 des 8 chiens qui, dans la 1ère phase de l'expérience, avaient subi des chocs sans pouvoir rien y changer, restent passivement dans le compartiment où ils endurent des chocs. Ils apparaissent résignés (helpless) à subir une situation pénible.
L'équipe de l'université de Pennsylvanie a réalisé un grand nombre d'expériences sur ce modèle, avec des animaux différents (chats, rats, pigeons) et en faisant varier plusieurs paramètres de la situation. Ainsi, les chercheurs ont constaté par exemple que des animaux soumis longtemps à des chocs incontrôlables peuvent devenir durablement passifs.

Dépressions chez l’animal et chez l’homme
Les animaux rendus sévèrement helpless présentent de nombreuses analogies avec des humains déprimés. Dans les deux cas, on observe une réduction sensible des comportements actifs, efficaces, et un ralentissement psychomoteur. Les conduites compétitives, l'appétit, l’activité sexuelle et autres activités agréables diminuent. Au plan physiologique: diminution des catécholamines et augmentation de l'activité cholinergique. Un trait essentiel de la dépression chez l'être humain est la tristesse ou le désespoir. Pour autant qu'on puisse en juger, c'est aussi le cas des chiens qui ont souffert sans possibilité de réagir.
Il y a évidemment des différences substantielles entre les dépressions chez les humains et chez les animaux. Un homme peut déprimer parce qu'il est perfectionniste, parce qu'il s'impose des normes irréalistes. Il peut déprimer pour des questions d'honneur, par suite de culpabilité, de honte ou parce qu'il rumine l'idée qu'il est, fondamentalement, dépressif et se convainc qu'il est en train de rechuter [5]. Toutefois, si l'on prend du recul, on constate un facteur causal commun à un grand nombre de dépressions psychogènes (nous laissons ici de côté les dépressions endogènes, dont l'étiologie est essentiellement physiologique): l'impuissance à contrôler des événements pénibles comme on le voudrait. Chez l'animal, c'est essentiellement l'environnement qui joue. Chez l'être humain, ce sont à la fois des circonstances et des croyances relatives à ce qui devrait être.

Une réfutation de la théorie freudienne de la dépression
Ces observations permettent une mise en question de la théorie freudienne de la dépression. Seligman écrit : “Les patients déprimés ne manifestent pratiquement plus d’hostilité envers les autres. Ce symptôme est à ce point frappant que Freud et ses disciples en ont fait la base de leur théorie psychologique de la dépression. Freud croyait que lorsqu’un objet aimé est perdu, le déprimé éprouve de la colère et retourne cette colère libérée contre lui-même, étant donné que celui qui l’a ‘abandonné’ n’est plus là pour endurer la plus grande part de l’hostilité. Cette hostilité introjectée cause la dépression, la haine de soi, les souhaits de suicide et, évidemment, ce symptôme caractéristique de manque d’hostilité envers l’extérieur. Il n’y a malheureusement guère de faits observables qui confirment cette théorie. La théorie est à ce point éloignée de données observables qu’il est presque impossible de la tester directement. On pourrait supposer qu’on puisse le faire par des observations sur les rêves. Selon la théorie psychanalytique, l’hostilité réprimée du déprimé devrait se libérer dans des rêves. En réalité, les rêves des déprimés, comme leur vie éveillée, sont exempts d’hostilité. Même dans les rêves, ils se voient comme des victimes passives et des perdants (Beck & Hurvich, 1959 ; Beck & Ward, 1961). […] L’agressivité n’est qu’une réponse du système volontaire qui se trouve minée par la croyance d’être sans pouvoir” [6].
Notons que, conformément à l’usage de son époque, Freud écrivait “mélancolie” là où on écrirait aujourd’hui “dépression”. Il parlait de “sadisme” et de “haine” plutôt que d’“hostilité”: “L’auto-tourment (Selbstquälerei) de la mélancolie, indubitablement riche en jouissance, signifie, tout à fait comme le phénomène correspondant de la névrose de contrainte [7], la satisfaction de tendances sadiques et de haine qui concernent un objet et ont, sur cette voie, subi un retournement sur la personne propre” [8].

Des expériences d’efficacité pour sortir de la dépression
Après avoir provoqué un état de passivité ou de dépression chez des chiens, Seligman a cherché comment on peut y remédier. La 1ère tentative a consisté à replacer des chiens “helpless” dans le compartiment A de la cage d’échappement, mais sans la barrière entre A et B. Les animaux n’ont guère bougé. Ensuite, Seligman s’est placé au bout du compartiment B et a appelé les chiens. Les animaux sont demeurés tout aussi inactifs. La 3e tentative a consisté à affamer les chiens et à les mettre ensuite dans le compartiment A, d’où ils pouvaient percevoir du salami placé en B. Cette séduction est restée sans effet.
Une 4e procédure a eu un effet thérapeutique : pousser l’animal à faire des expériences d’efficacité. Dans une cage sans barrière, les expérimentateurs ont tiré les chiens avec une laisse depuis A jusqu’en B. Durant les premiers essais, les animaux se laissaient traîner et quelques-uns faisaient même de la résistance. Après 25 à 200 répétitions de la procédure selon les chiens, tous sont passés de leur propre initiative de A en B. C’est alors qu’une barrière entre A et B a été placée. D’abord petite, sa hauteur a été progressivement augmentée jusqu’à devenir la barrière que les chiens “non helpless” avaient appris à franchir sans difficulté. Cette fois, tous les animaux ont réussi l’apprentissage.
Cette procédure avait déjà son équivalent dans la panoplie des psychothérapies. À l’époque, des comportementalistes utilisaient avec succès des traitements par tâches graduées, appelés “activation comportementale”. Les patients étaient invités à définir avec le thérapeute des activités réalisables, puis ils les hiérarchisaient selon le degré de difficulté et ils commençaient par effectuer les tâches les plus faciles, de manière à retrouver petit à petit un sentiment d’efficacité et d’estime de soi. Les expériences de Seligman constituent un modèle simplifié de cette thérapie. Elles n’en sont pas moins instructives.

Immuniser contre les épreuves
Une petite proportion des chiens que Seligman a soumis à des chocs non contrôlables ne sont pas devenus apathiques. Une question de tempérament? Des expériences montrent que des chiens et des rats, qui ont contrôlé à de multiples reprises des situations aversives, résistent mieux que d’autres lorsqu’ils subissent par la suite des décharges non contrôlables. Les animaux qui ont enduré des chocs incontrôlables sans “immunisation comportementale” préalable, mais aussi ceux qui ont vécu en laboratoire à l’abri d’événements pénibles résistent moins bien aux épreuves. On retrouve ici des analogies avec le monde humain: les individus qui ont subi, dans leur enfance, des traumatismes (p.ex. la mort d’un ou des parents) sont prédisposés à déprimer, mais ceux qui ont été élevés comme des enfants gâtés, sans avoir dû faire des efforts pour affronter des situations difficiles, sont également démunis. Les individus qui résistent le mieux aux épreuves de la vie sont ceux qui ont rencontré de sérieuses difficultés qu’ils ont appris à surmonter.

La “psychologie positive”
Dans les années 1990, l’essentiel des recherches de Seligman a porté sur la prévention de la dépression et les conditions psychologiques d’une vie plus heureuse.
Durant le XXe siècle, la psychologie était “pathocentrée”, elle était focalisée sur les troubles psychologiques. Peu de psychologues s’étaient employés à favoriser l’optimisme, l’amabilité, la générosité et d’autres comportements qui font une vie de qualité. En 1998, quand Seligman devient président de l’Association américaine de Psychologie, il va donner une nouvelle impulsion en popularisant le concept de “psychologie positive”. Il entend par là l’étude scientifique des conditions psychologiques d’une “vie pleine” (full life) ou, du moins, d’une vie relativement heureuse et ayant du sens. Certes, des auteurs avaient déjà parlé de “développement du potentiel humain” et de thèmes apparentés, mais la plupart n’avaient guère eu le souci de vérifier systématiquement leurs belles théories et les résultats de leurs interventions.
Seligman ne cherche pas à vendre des recettes de bonheur en tenant des discours humanistes et en racontant des histoires édifiantes. Il teste la valeur de procédures en les soumettant aux règles de la vérification empirique qu’on utilise pour évaluer les traitements médicaux et les psychothérapies.
L’objectif majeur de la “psychologie positive” est d’aider les intéressés à construire une vie heureuse par des “interventions positives” plutôt que par une focalisation sur des dysfonctionnements psychologiques et une analyse interminable d’événements du passé. Seligman écrit : “Une des deux découvertes les plus significatives qu'ait faites la psychothérapie, en cent ans, est que les réponses satisfaisantes aux grands ‘pourquoi?’ sont fort difficiles à trouver ; peut-être que, d'ici cinquante ans, les choses auront changé et peut-être que non. […] Soyez sceptique, même envers vos expériences qui vous paraissent significatives. Quand vous retrouvez la furie ressentie le premier jour de la maternelle, ne vous imaginez pas que vous avez découvert la source de votre terreur constante de l'abandon. Les liens de causalité ne peuvent être qu'illusoires et l'humilité s'impose. L'autre découverte significative résultant de tous les efforts psychothérapeutiques est que les changements sont à notre portée tout au long de l'âge adulte. Alors, même si le pourquoi de ce que nous sommes demeure un mystère, la manière de nous changer n'en est plus un” [9].
Les procédures testées se rapportent principalement à trois conditions du bien-être psychologique: savoir générer des émotions agréables, s’engager dans des activités gratifiantes et valorisantes, se dépasser en se mettant au service d’une cause ou d’“institutions positives”, comme la famille, une communauté ou un parti politique.
Des exemples de comportements inducteurs de bien-être dont Seligman a évalué l’effet sont: apprendre à savourer davantage des activités quotidiennes ; pardonner une offense en écrivant une lettre ou en arrangeant une rencontre ; exprimer sa gratitude à quelqu’un, à qui on ne l’avait jamais fait ; identifier ses points forts et les développer dans de nouvelles situations ; consacrer du temps à une activité altruiste.
La majorité des êtres humains ont tendance à être attentif à des événements “négatifs” [10]. L’exercice “Les trois bonnes choses” inverse cette tendance. Chaque soir, avant de se coucher, on met par écrit trois événements qui se sont bien passés durant la journée, et pourquoi il en a été ainsi. Des recherches empiriques montrent qu’à prendre au sérieux cet exercice tout simple, on devient plus attentif à des éléments positifs de la vie quotidienne. Le degré de dépressivité diminue chez des personnes modérément déprimées [11].

Pour en savoir plus sur l’œuvre de Seligman :
Seligman, M. (2008) La force de l’optimisme. Trad., InterEditions, 288 p.
Seligman, M. (2011) La fabrique du bonheur. Trad., InterEditions, 368 p.

Pour un exposé documenté et rigoureux sur la psychologie positive :
Shankland, R. (2014) La psychologie positive. Dunod, coll. Psycho Sup, 2e éd., 2014, 244 p.
Présentation : http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article2326
Site recommandé sur la psychologie positive : http://www.psychologie-positive.net

Deux sites pour d’autres publications de J. Van Rillaer sur la psychologie, la psychopathologie, l'épistémologie, les psychothérapies, les psychanalyses, etc.
1) Site de l'Association Française pour l'Information Scientifique:
www.pseudo-sciences.org
2) Site de l'université de Louvain-la-Neuve
1° Taper dans Google : Moodle + Rillaer + EDPH
2° Cliquer sur : EDPH – Apprentissage et modification du comportement
3° A la page suivante, cliquer “Oui” à  : "Règlement"

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[1]Haggbloom, S. et al. (1999) The 100 most eminent psychologists of the 20th century. Review of General Psychology, 6 : 135-152.
[2] Apprendre l'optimisme. Paris : InterEditions, 1994, p. 28s.
[3] Ibidem, p. 29.
[4] Peterson, C., Maier, S. F. & Seligman, M. (1993) Learned Helplessness : A Theory for the Age of Personal Control. Oxford University Press, 370 p.
[5] Sur le rôle, souvent très important, des ruminations dans la dépression, voir : “Les ruminations mentales : fonctions, dysfonctionnements, traitements” — http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article2723
[6] Seligman, M. (1975) Helplessness. Freeman, p. 89.
[7] Au lecteur non spécialisé, je signale que “névrose de contrainte” (Zwangsneurose) correspond à ce qu’on appelle aujourd’hui “trouble obsessionnel-compulsif”.
[8] “Deuil et mélancolie” (1917) Trad., Œuvres complètes, PUF, XIII, p. 272.
[9] Changer, oui, c’est possible. Éditions de l’Homme, 1995, p. 363. Noter que le titre de la traduction est trompeur. Dans What you can change and what you can’t (1993), Seligman fait le point des connaissances sur le degré de difficulté de changer différents types de changement et sur les méthodes les plus efficaces pour changer… lorsque c’est possible.
[10] C’est vrai pour les perceptions, les souvenirs et les anticipations. Pour une revue de recherches : Baumeister, R.F., Bratslavsky, E. & Finkenauer, C. (2001) Bad is stronger than good. Review of General Psychology, 5 : 323-370.
[11] Seligman, M., Steen, T., Park, N. & Peterson, C. (2005) Positive psychology progress. Empirical validation of interventions. American Psychologist, 60 : 410-421.

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