Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
"Au bonheur d'Elise"
asperger
4 septembre 2017

Un caissier handicapé sert une cliente lentement et écrase son pain. Elle écrit à son patron sur Facebook…

article publié sur parfait.cc

Cette histoire s’est passée alors qu’Emma faisait du shopping chez Tesco, une épicerie à Norfolk, en Angleterre. Elle s’apprêtait à quitter le magasin et a remarqué une caisse sans file d’attente. Elle a commencé à décharger son caddie et a placé ses courses sur la bande transporteuse.

L’homme à la caisse a dit bonjour et a commencé à scanner ses articles. Il y avait beaucoup d’articles ! Emma a raconté que le caissier, qui se prénomme Rob, a compté ses sacs plusieurs fois, a écrasé son pain et a également compté sa monnaie à plusieurs reprises. Elle s’est rapidement rendu compte que Rob était autiste.

Elle est rentrée chez elle et a écrit sur la page Facebook officielle de Tesco. Elle a partagé son expérience afin que tout le monde soit au courant, dont le patron de Rob.

Vous pensez probablement qu’elle n’était pas satisfaite du service proposé ?

Pas vraiment. Emma espère que son histoire peut rappeler aux personnes à être patientes et gentilles. Voici ce qu’elle a écrit !

Je veux vous parler de mon expérience dans votre magasin aujourd’hui.

Quand je suis arrivée à la caisse avec mon caddie rempli, il n’y avait aucune file d’attente et j’ai donc tout de suite placé mes articles sur la bande transporteuse.”

Le caissier m’a dit bonjour et a commencé à scanner mes articles alors que j’étais encore en train d’en ajouter d’autres sur la bande.

Je vous laisser imaginer toutes les affaires qui m’attendaient quand j’ai dû tout ranger.”

Quand je lui ai demandé cinq sacs, il les a comptés un par un, puis les a recomptés deux fois de suite avant de me les donner.”

Il ne m’a pas vraiment parlé, il a écrasé mon pain quand il l’a scanné mais j’ai attendu patiemment alors qu’il prenait son temps, surtout quand il essayait de scanner les articles plus inhabituels.”

Au moment de payer, j’avais déjà préparé le compte exacte, j’ai donc compté ma monnaie avec lui, qu’il a évidemment compté deux fois de suite.”

Mais vous savez, chaque instant était parfait.

Je lui ai demandé ce qu’il pensait de son travail et il m’a un peu raconté son expérience chez Tesco et comment ils lui avaient donné une opportunité que beaucoup d’autres n’ont pas eue.”

Voici le fils d’Emma, Ethan, qui a 12 ans et qui est atteint du Syndrome d’Asperger, qui vient du spectre autistique.

Vous voyez, ce garçon est autiste. En tant que maman d’un garçon autiste de 12 ans, le rencontrer m’a fait du bien. Les employeurs comme vous qui offrent réellement des opportunités égales à chacun sont les personnes qui changent notre vie.

Je vous remercie donc à nouveau, Tesco, c’était un plaisir de faire mes courses chez vous aujourd’hui.”

Emma a également expliqué qu’elle est partiellement sourde, et c’est la raison pour laquelle elle aime tant les histoires relatant des handicaps.

Le directeur du magasin a répondu qu’il l’avait embauché car il avait apprécié sa prestation lors de l’entretien. Il est également un membre du personnel assez populaire au sein de cette petite ville.

Emma espère qu’elle aura réussi à montrer aux employeurs que les handicaps ne devraient pas les empêcher d’employer des personnes qui ont des besoins spécifiques. Tout le monde doit avoir la possibilité d’apporter sa contribution ! Partagez cet article si vous êtes d’accord avec nous.

Source : littlethings.com

Publicité
Publicité
27 août 2017

Cartographier l'autisme en schémas pour mieux l'accompagner

 

Cartographier l’autisme en schémas pour mieux l’accompagner :

Dans l'article Autisme Asperger: approche théorique d'un spectre insaisissable, j'appréhendais l'idée du continuum autistique. Cette idée inscrit une continuité dans les troubles de l'autisme des plus légers aux plus sévères. Intronisée dans le Dsm5 elle préfigure l'idée dimensionnelle et non plus catégorielle (c'est à dire des catégories de personnes autistes).

http://aspieconseil.com

 

27 août 2017

Autisme. Handicap ou pas handicap ?

Génial ! (Jean-Jacques Dupuis)

Autisme. Handicap ou pas handicap ?

Petite mise au point. Ou l'art délicat de se faire des amis. (des ennemis ? ah. ok. Tant pis) Je vais expliquer ici ce que j'en pense, en me basant sur : - mon diagnostic, - mon quotidien, - les rencontres d'autistes ou de parents d'autistes que j'ai faites.

http://journalduneasperger.com

 

20 août 2017

Yonne – Autiste Asperger, Anthony peut continuer ses études grâce à la générosité d'une Dijonnaise

article publié sur France 3 Régions

La famille d'Anthony a réussi à trouver une famille d'accueil à Dijon, ce dimanche 20 août, après plusieurs mois de recherche. / © France 3 BourgogneLa famille d'Anthony a réussi à trouver une famille d'accueil à Dijon, ce dimanche 20 août, après plusieurs mois de recherche. / © France 3 Bourgogne

Par France 3 BourgognePublié le 20/08/2017 à 18:26

Des larmes de joie pour une nouvelle inattendue. Une famille d'accueil dijonnaise vient enfin de proposer son aide pour héberger Anthony dès la rentrée.

"C'est une femme qui vient de me téléphoner. On a pris rendez-vous. Je suis très émue, c'est génial", raconte Angélique Doudet, mère d'Anthony.

Un soulagement aussi pour Anthony : "Je suis content pour ma mère parce qu'elle s'est battu comme une lionne."

Plusieurs mois de combat ont été nécessaires pour qu'Anthony puisse poursuivre ses études à 200 kilomètres de là.

A 19 ans, il est autiste Asperger. Même s'il n'a pas de déficience intellectuelle, son handicap nécessite un accompagnement en dehors de l'école. Sauf que pour cette famille, les recherches de logement ont été un casse-tête.

"Dans les structures spécifiques pour les personnes handicapées, il n'est pas assez handicapé. Pour les structures dites classiques, pour les enfants normaux, il l'est trop. Je demande que des grandes villes comme Dijon, des villes universitaires, il y ait un foyer pour des étudiants handicapés", explique la mère du jeune homme.

Dans les structures spécifiques pour les personnes handicapées, il n'est pas assez handicapé. Pour les structures dites classiques, pour les enfants normaux, il l'est trop.


Heureusement, grâce à une famille d'accueil, Anthony pourra donc poursuivre son BTS en tourisme. Une nouvelle étape franchie pour ce jeune homme qui s'est toujours surpassé. Brevet des collèges et baccalauréat en poche, il se bat pour pouvoir intégrer le marché du travail.

"Ce n'est pas parce que l'on a un handicap que l'on a pas le droit de faire comme tout le monde. Ce n'est pas parce que tu as un handicap que tu ne peux pas être dans la société", dénonce Anthony Doudet.

Et de poursuivre : "Je me suis battu parce que de mon handicap, j'en ai fait une force. Parce que je suis bon en langue, je sais très bien parler anglais."

De mon handicap, j'en ai fait une force.


Anthony, un jeune adulte courageux, qui reconnait volontiers qu'il n'en serait pas là aujourd'hui, sans le soutien de son entourage.

 
Yonne – Autiste Asperger, Anthony peut continuer ses études grâce à la générosité d'une Dijonnaise

19 août 2017

Mères autistes : « Je me suis occupée de mes enfants d’une toute autre manière »

article publié sur le site de l'Association Francophone de Femmes Autistes - AFFA

Entretien de 4 mères autistes anglophonesAmelia Hill pour The gardian, 15 avril 2017

Traduction par Aspipistrelle (membre de l'AFFA) de l'article original : « Mothers with autism: 'I mothered my children in a very different way' »

 

Les femmes autistes sont deux fois moins susceptibles de se faire diagnostiquer que les hommes. Amelia Hill s'est entretenue avec quatre femmes qui ont pris conscience de leur propre autisme après avoir fait des recherches sur le comportement de leurs propres enfants.

 

Être autiste quand on est une femme n'est pas facile : voilà seulement deux ou trois ans que les professionnels commencent à reconnaître que cette condition n'est pas exclusivement masculine. Plus difficile encore est d'être mère autiste et encore pire, être autiste et mère d'enfants autistes.

Les experts conçoivent qu'il existe aujourd'hui une population de mères autistes non diagnostiquées. Souvent, ces femmes ne s'identifient autistes qu'après avoir effectué des recherches sur les symptômes que présentent leurs propres enfants.

On pense qu'environ 1/5 des autistes ont reçu leur diagnostic à l'âge adulte bien qu'il n'existe aucune statistique à l'échelle nationale à ce sujet. Les femmes sont plus susceptibles de passer à travers le radar du diagnostic: une étude réalisée par la National Autistic Society  a conclu que deux fois plus de femmes que d'hommes restaient sans diagnostic (10 % contre 5 %).

Une fois diagnostiquées, les mères autistes cachent souvent leur diagnostic de peur que les services sociaux ne leur retirent la garde de leurs enfants du fait des préjugés sur les traits autistiques qui peuvent être perçus comme un danger pour l'enfant.

« Leur propre autisme, souvent non diagnostiqué, agace les professionnels et elles peuvent se voir accusées de causer ou d'inventer les symptômes de leurs enfants », témoigne le Dr Judith Gould, consultante principale et ancienne directrice du  Lorna Wing Center for Autism  qui a développé les premiers tests diagnostiques adaptés aux femmes et qui forment les médecins sur la reconnaissance des femmes autistes adultes.

 

Laura James

Mariée avec quatre enfants de 19 à 26 ans dont deux neuroatypiques et deux neurotypiques, Laura James est l'auteure de Odd Girl Out, le premier mémoire écrit par une femme britannique autiste à être publié par une maison d'édition non spécialisée. Elle a reçu son diagnostic l'année dernière.

« J'ai élevé mes enfants à ma façon, bien loin de celle des mères neurotypiques. Pour commencer, je ne les ai jamais grondés. Ça ne me paraissait pas logique. S'ils font quelque chose que vous n'aimez pas, c'est parce que vous avez une idée préconçue de la façon dont les enfants doivent être, se comporter ou avoir l'air. C'est illogique. Si, d'un autre côté, ils se mettent en danger, alors je trouve plus efficace de m'asseoir et d'en discuter avec eux. »

Laura James nous raconte qu'un de ses enfants a toujours eu d'excellents résultats scolaires alors qu'un autre n'était pas très bon élève.

« Je suis aussi fière de l'un que de l'autre car je veux que mes enfants soient satisfaits, heureux  et se sentent en sécurité. Pour moi, les résultats scolaires ne sont pas synonymes de cela. J'aime éperdument mes enfants et je ferais n'importe quoi pour eux mais je crois que je ne comprends pas les débats houleux autour de la parentalité. Je ne partage pas tout simplement pas cet intérêt que les parents neurotypiques semblent avoir.

C'est peut-être à cause de ce manque d'intérêt que j'ai des relations avec mes enfants très différentes de celles qu'entretiennent la plupart des parents : ils aiment passer du temps avec moi et m'envoient des messages comme ils le font avec leurs amis et ils savent qu'ils n'ont rien à me cacher car je ne serai jamais en colère contre eux. S'ils avaient des problèmes je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour les aider, il serait donc illogique de se mettre en colère ou de les punir ».

 

Nicola

Nicola a 39 ans, diagnostiquée à 34 après avoir lue des informations concernant l'autisme au féminin alors qu'elle faisait des recherches sur les symptômes de son fils. Son fils Andrew a été diagnostiqué à l'âge de deux ans et Nicola, six mois plus tard. Cependant, cela a pris quatre ans, pour que sa fille Marion, âgée aujourd'hui de huit ans, reçoive le sien (les noms des enfants ont été modifiés).

« Mes enfants sont heureux et s'en sortent à l'école. Ce sont bien des critères qui montrent que je suis une bonne mère, non? Seulement, à cause de mon autisme, je vis dans la peur. La société pense que les mères autistes représentent avant tout des dangers pour leur enfant. Je suis terrifiée à l'idée que les services sociaux me retirent mes enfants.

Je ne m'inquiète pas de savoir si je suis une bonne mère ou non. Je sais que je le suis. Je sais aussi que mon autisme m'aide à être une bonne mère : les autistes ont des obsessions et la mienne est de m'assurer que je fais tout ce qui est en mon pouvoir pour leur donner ce dont ils ont besoin, pour les aimer, me battre pour eux et les accompagner pour qu'ils deviennent des adultes en bonne santé et heureux.

Quand mon mari et moi avons décidé d'avoir des enfants, je savais que je n'avais aucune idée de comment être mère, ma propre enfance ayant été malheureuse. Donc, j'ai fait une tonne de recherches. C'est comme cela que j'ai découvert que les enfants ont besoin d'être cajolés, qu'ils ont besoin d'affection et que, même si je n'entre pas facilement en contact tactile (je rêve de vivre dans un monde sans contact physique), je m'assure que les besoins physiques de mes enfants soient remplis. Mon fils adore recevoir des câlins, ce que je lui procure bien que je trouve cela limite intolérable.

Avoir une mère autiste a permis à mes enfants autistes de grandir dans un environnement unique sans pression et sans stress que des parents neurotypiques n'auraient pas su leur offrir. Mes parents m'ont forcé à être 'normale' et à me conformer. Ils me forçaient à me sociabiliser, à manger normalement, à me comporter normalement. Ce fut terrible : j'ai grandi dans la peur et le traumatisme.

Avant d'avoir nos diagnostics d'autisme, c'est tout naturellement, que j'ai donné à mes enfants une éducation adaptée aux personnes autistes quand je sentais que c'était ce dont ils avaient besoin. Je ne trouvais pas cela bizarre. Et dieu merci, je l'ai fait : cela signifie que mes enfants n'ont jamais été stressés à cause de leur autisme.

Je ne suis pas sûre que j'aurais pu être une aussi bonne mère avec des enfants non-autistes. Je trouve cela carrément normal que ma fille s'amuse à trier ses élastiques et qu'elle fasse en plus des recherches sur l'ordinateur sur ces mêmes élastiques. C'est comme ça que je joue et je peux le faire pendant des heures. Mais quand mon beau-fils veut que je joue avec lui aux dinosaures, je suis complètement à l'ouest ».

 

Melanie Mahjenta

Melanie Mahjenta a été accusée par des pédiatres et les services sociaux en 2015 d'une forme rare d'abus infantile : le syndrome de Münchhausen par procuration alors qu'elle se battait pour obtenir un diagnostic d'autisme pour sa fille de trois ans, Rosie.

« Le diagnostic d'autisme lui a été refusé en 2013 malgré les résultats de l'évaluation clinique qui la plaçait bien sur le spectre autistique », témoigne Melanie. « Je pense que l'équipe a rejeté les résultats de l'évaluation à cause de leur méconnaissance concernant la manifestations des traits autistiques en particulier, chez les filles. Ils m'ont refusé un second avis ce qui est illégal et m'ont accusé de fabriquer les symptômes de Rosie ».

De plus, l'équipe est passée à côté de mon propre autisme alors que je leur ai dit que je pensais être sur le spectre. Ils auraient du reconnaître mon comportement typique, même si je conçois que cela peut être difficile, qui était celui d'un parent autiste. Au lieu de cela, ils ont organisé une safeguarding meeting (réunion visant à protéger la santé des personnes) en 2014 pour discuter de savoir si je n'exagérais pas les symptômes de Rosie, ce qui a eu pour directe conséquence d'alerter les services sociaux et de considérer Rosie comme enfant en danger, une décision prise sans aucune vérification.

Quand Rosie a été considérée comme enfant en danger, mes amis m'ont conseillée d'arrêter de me battre pour son diagnostic. Mais je ne pouvais pas arrêter : être autiste, c'est ne pas tolérer l'injustice.

Je comprends que mon autisme me rend difficile à prendre du recul. En effet, je ne sais pas lâcher l'affaire quand je suis convaincue d'avoir raison. Je n'arrive pas toujours à regarder les gens dans les yeux, ce qui donne l'impression que j'ai une personnalité évitante. Les personnes autistes peuvent être hyperfocalisées. Cependant, ils ont pris mon opiniâtreté pour un signe d'instabilité.

Mais bien que ces traits soient difficiles à gérer pour les gens, mon autisme a finalement été une bonne chose. Peut-être qu'une personne neurotypique aurait accordé au docteur du crédit et aurait abandonné. Ou alors ils auraient cessé le combat de peur de perdre leur enfant. Mais moi, je me suis battue et grâce à cela, Rosie a finalement obtenu son diagnostic d'autisme ce qui a permis d'obtenir des aides. De plus, une médiateur a reconnu tous mes arguments et nous a même dédommagés ».

 

Carly Jones

Carly Jones a 35 ans. Elle est divorcée et mère de 3 filles Chloe, Honey et Cherish agées respectivement de 18, 14 et 9 ans.

« Chloe est neurotypique. Honey a été diagnostiquée Asperger à 6 ans en 2008 et Cherish a été diagnostiquée autiste deux ans plus tard à l'âge de deux ans. J'ai été moi-même diagnostiquée 4 ans après soit à l'âge de 32 ans en 2014

Ne pas savoir ce qui "clochait" chez moi avant l'âge de 32 ans a été catastrophique de bien des façons. Ne pas avoir connaissance de mon autisme a eu pour conséquence que je n'arrivais pas à gérer l'école. Je suis tombée enceinte à 15 ans, j'ai été victime d'abus, je suis tombée sous le contrôle de certaines personnes et avais de mauvaises fréquentations.

Mais, une partie de moi est soulagée que je n'ai pas eu connaissance de mon autisme avant d'avoir des enfants. Je ne sais pas si j'aurais été assez courageuse pour en avoir si j'avais su que j'étais autiste. J'aurais sûrement pris trop de précautions et penser que je ne pourrais pas être une bonne mère.

Il y a tant de préjugés sur les mères autistes que je me considère chanceuse d'avoir échappé à l'interrogatoire des services sociaux. C'est une crainte permanente chez les mères autistes. Je ne dévoile mon autisme que lorsque cela peut servir à obtenir de l'aide pour mes filles. Je le fais car qu'est ce qui va se passer quand mes filles voudront devenir mère à leur tour ? Quels obstacles, empêchements, déchirements auront-elles à faire face si les mères autistes d'aujourd'hui ne se battent pas pour montrer aux autres qu'elles peuvent réussir dans la sphère familiale ?

Le besoin d'accompagnement dont une fille autiste a besoin pour socialiser est grand. Du fait que je sois autiste, je le comprends, et je passe le temps qu'il faut pour les aider avant de sortir, pour travailler toutes les scénarii sociaux et apprendre à réagir en fonction. De plus, nous travaillons à des stratégies pour la gestion des imprévus. Une mère neurotypique ne le comprend pas forcément, et elle pense pas automatiquement à le préparer mentalement avant une sortie.

Parce que j'ai été victime d'abus moi-même, je sais au combien il est courant pour les personnes autistes d'être terriblement abusées. J'ai du trouver des moyens pour aider mes filles à prendre conscience de leur propre vulnérabilité sans qu'elles ne le perçoivent comme un déficit, une faiblesse. Je sais aussi de par ma propre expérience que les autistes taisent les abus dont ils ont été victimes parce qu'ils présupposent que chacun est déjà au courant. Je dois sans cesse me rappeler d'insister auprès de mes filles afin qu'elles mes racontent tout ce qui peut paraître important dans leur journée afin de le garder en sécurité et qu'elles soient heureuses ».

Publicité
Publicité
15 août 2017

Atypical ou l’autisme au cœur d’une comédie familiale

article publié dans Le Figaro

Par  Mis à jour le 11/08/2017 à 10:36 Publié le 11/08/2017 à 10:14

VIDÉO - Surprise estivale, la fiction de Netflix dépeint le passage à l’âge adulte d’un jeune de 18 ans atteint de cette maladie. Malgré les bons sentiments, elle sait être juste et touchante.

Après13 Reasons Why sur le harcèlement et To the Bone sur l’anorexie, Netflix poursuit avec sensibilité son exploration des adolescences douloureuses et en marge. Ce vendredi, la plateforme de streaming lance Atypical, une comédie familiale douce-amère en huit épisodes sur l’autisme. À 18 ans, Sam (Keir Gilchrist, United States of Tara) est un ado comme les autres. Il rêve d’indépendance et d’amour. Sauf que le jeune homme, incollable sur l’Antarctique et ses manchots, est atteint d’autisme. La perspective de le voir s’émanciper angoisse ses parents (trop) protecteurs, Elsa et Doug (Jennifer Jason Leigh et Michael Rapaport), qui ont construit leur famille entièrement autour de leur fils, jusqu’à en oublier leurs propres besoins.

Nombreuses anecdotes

Atypical suit Sam dans ses tentatives maladroites de séduction. Peu évidentes : le jeune homme prend toute suggestion de manière littérale. L’humour, jamais moqueur ou blessant, naît aussi des échanges acides entre Sam et sa sœur Casey qui se chamaillent. Comme dans n’importe quelle fratrie.

Malgré ces bons sentiments, Atypical dépeint le handicap au quotidien avec justesse. Le feuilleton n’occulte ni les angoisses d’Elsa et de Doug face au futur incertain de Sam, ni le poids que l’autisme a fait peser sur leur couple, ni la tentation de sacrifier l’avenir prometteur de Casey pour qu’elle continue à veiller sur son aîné, ni l’incompréhension des camarades de Sam quand celui traverse une crise de panique…

De nombreuses anecdotes sentent le vécu. Sûrement parce que la créatrice Robia Rashid a côtoyé l’autisme de près dans sa famille. «De plus en plus de jeunes sont diagnostiqués autistes. Ils ont les mêmes aspirations que leurs pairs mais leurs expériences, leurs difficultés ne sont pas prises en compte dans les fictions actuelles. Avec Netflix, il y avait une réelle possibilité de sortir de la zone de confort habituelle », confie au Figarola scénariste qui a fait ses armes sur How I Met your Mother . «Être un ado ou un parent peut donner lieu à de grands moments de solitude, surtout quand vous vous occupez d’enfants en situation de handicap. Avec cette série, j’espère que chacun se sentira moins isolé».

Robia Rashid, pour qui «l’amour et les tensions qui animent une famille sont universels», estime qu’«au fond, le message d’Atypical, c’est que personne n’est normal». Si la série - surtout dans ses derniers épisodes - s’égare parfois dans des ressorts de soap opera, la performance nuancée et émouvante de Keir Gilchrist, qui s’est battu pour avoir le rôle, lui permet de retomber sur ses pieds et de rester sincère. Ce qui suffit pour qu’on lui souhaite de connaître une deuxième saison.

12 août 2017

Un blog à découvrir : Les tribulations d'une aspergirl

 

[VIDÉO] Syndrome d'Asperger, le diagnostic

Le 30 juin, la chaîne locale LCM (La Chaîne Marseille) diffusait une excellente double émission consacrée au syndrome d'Asperger & à son diagnostic Quel dommage que ce TSA soit encore si peu & si mal connu en France...

http://les-tribulations-dune-aspergirl.com

 

11 août 2017

Autisme : "J'ai été diagnostiquée Asperger à 33 ans. Avant, je croyais être folle"

article publié dans le Nouvel Observateur

Autisme : "J'ai été diagnostiquée Asperger à 33 ans. Avant, je croyais être folle"Diagnostiquée autiste Asperger tardivement, Marie a subi harcèlement et racket lorsqu'elle était une enfant "bizarre" pour les autres (photo d'illustration). (FREDERICK FLORIN/AFP)

L’autisme touche trois garçons pour une fille, mais certaines associations et études pointent la difficulté à déceler les troubles du spectre autistique chez les filles. Diagnostiquée tardivement, Marie témoigne.

Alors que la concertation du quatrième plan autisme s'est déroulée début juillet, des études scientifiques affirment que l'autisme – touchant davantage les hommes que les femmes – serait en réalité sous-diagnostiqué chez les filles. S'exprimant de façon différente chez les petits garçons et les petites filles, il serait moins décelable chez ces dernières car elles adoptent mieux les attitudes requises en société.

Âgée de 36 ans, Marie* a appris il y a seulement trois ans qu'elle était atteinte du syndrome d’Asperger, une forme d'autisme sans déficience intellectuelle ni trouble du langage. Membre de l’Association francophone de femmes autistes (AFFA), qui lutte pour sensibiliser à la spécificité de l’autisme féminin et à son diagnostic, cette mère de deux enfants, eux-mêmes atteints de troubles du comportement, raconte :

"C'est pour ma fille – autiste Asperger, comme moi –, que j'ai décidé de m'engager. Quand je la vois aujourd’hui, je me revois enfant. Je ne veux pas qu'elle subisse ce que j’ai enduré. Toute ma vie, je me suis sentie bizarre, différente. Petite, j'étais dans ma bulle. C'était moins fatigant que d'affronter le monde extérieur, ses bruits, ses sollicitations… Je passais des journées entières avec mes livres, à trier et à catégoriser ma collection de fiches sur les espèces animales.

A l'époque, le diagnostic du syndrome d’Asperger n’existait pas. Et puis, j'ai toujours su m’adapter malgré ma différence. Gamine, lorsque tout que le monde riait à une blague, je faisais semblant de la comprendre et je riais aussi. Je suis passée entre les mailles du filet. Je n'ai été décelée autiste Asperger qu’à 33 ans.

"Ton fils n'a rien, tu divagues"

C’est la découverte de l'autisme modéré de mon fils aîné, qui m'a amené à mon propre diagnostic. Très vite après sa naissance, je me suis rendu compte que quelque chose n’allait pas. Des proches m'ont dit :

"Mais il n’a rien ton fils, c'est toi qui divagues."

C'était très lourd à porter. Je me suis éloignée d'amis, de membres de ma famille. Un bébé, c'est mignon. Mais un bébé qui va mal, se tape la tête contre les murs, ça intéresse beaucoup moins. Le handicap est un fabuleux tri. J'ai perdu des proches. Mais ceux qui restent, eux, restent à vie.

J'ai alors cherché de l’aide et me suis tournée vers un centre d’action médico-sociale précoce. Très vite, les choses se sont retournées contre moi. Vous voyez l’affaire Rachel ? J'ai sensiblement vécu la même chose.

Soupçonnée de maltraitance infantile

Un signalement a été fait auprès des services de l'aide sociale à l’enfance (ASE) : on me soupçonnait du syndrome de Münchhausen par procuration, une forme rare de maltraitance infantile. A l'instar de ces mères qui inventent des pathologies à leurs enfants voire les font tomber malades pour susciter l'attention du corps médical, on me soupçonnait de vouloir rendre mon fils autiste.

On m'a reproché un regard trop fuyant – signe indéniable que je mentais –, et un manque d’empathie, assorti à de trop grandes connaissances paramédicales. On m'accusait d’être folle, et surtout, d'être une mauvaise mère.

"Si ma fille a pu être diagnostiquée, c'est parce que son frère et moi l'avons été."

Cette menace de perdre la garde de mes enfants, malgré le soutien indéfectible de leur père dont je suis aujourd'hui séparée, m'a poussée à contacter nombre de spécialistes médicaux. J'étais prête à recevoir n'importe quel autre diagnostic que celui d’un syndrome de Münchhausen par procuration. Pour une mère, il n'y a pas pire.

"Je ne suis pas un monstre"

Je me souviens très bien du jour où, quelques mois après le signalement, un ponte de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière m'a diagnostiquée. Il m'a dit :

"Vous êtes atteinte d'un trouble autistique Asperger."

J'ai pleuré. J'étais tellement soulagée.

"Ce n'est pas de votre faute", a-t-il ajouté.

Et là, on remonte le fil de sa vie jusqu’à l'enfance ; et tout s'emboîte. Lors des funérailles de ma mère, par exemple, je n'ai pas pleuré. Cela m'a été beaucoup reproché. C'était pourtant mon pilier, la seule qui ne me jugeais pas pour ce que j'étais. Pendant des années, on nous dit que c'est de notre faute, on nous enjoint à faire des efforts, mais on ne peut pas. C'est comme demander à un aveugle de voir !

Ce jour-là, je me suis dit :

"Je ne suis pas un monstre."

Trente-trois ans de ma vie trouvaient enfin une réponse.

Enfant, j'ai été qualifiée de "déficiente intellectuelle"

Toute mon enfance, j'ai senti que quelque chose n'allait pas. Dès l'école maternelle, je me faisais moquer et dépouiller. Je n’avais pas de copains, je cumulais les mauvais résultats. Mes professeurs ne me comprenaient pas. Sur les bulletins scolaires, ça donnait ça :

"Enfant très intelligente, mais Marie* est à côté de la plaque. Que se passe-t-il ?"

J'ai redoublé quatre fois. L'école a été une grosse souffrance. J'ai même été qualifiée de "déficiente intellectuelle" par un psychologue scolaire. J'étais lente, donc on en concluait forcément que j'étais limitée. Or, si les autistes Asperger ne sont pas tous des génies, ils ne souffrent d’aucun retard mental. Après avoir réalisé des tests, on a évalué mon QI à 134.

Toujours est-il que je n'étais pas autonome à 12 ans. Mon beau-père squattait devant la douche pour me contraindre à y aller. A 18 ans, j'étais incapable de prendre un bus seule. Je paniquais.

J'avais aussi des troubles alimentaires. Je pouvais passer trois heures à table à faire le hamster, des boules de viande coincées dans mes joues. Et ça avait le don d’agacer mes parents qui, démunis, finissaient par croire à de l’insolence. Je passais pour une gamine capricieuse, hyper-sensible. Des coups, j'en ai pris toute mon enfance. Cela ne justifie rien, mais sans diagnostic médical, mes parents ne pouvaient pas comprendre.

Trop sage pour être dépistée

En même temps, je parvenais suffisamment à m'adapter pour être considérée comme la petite fille modèle. Je ne faisais pas de bêtises, je ne demandais jamais à sortir et je passais tout mon temps à la bibliothèque municipale. On me demandait quelque chose ? Je le faisais sans broncher, encore aujourd’hui je ne sais pas dire "non" ni mentir.

A l'adolescence, je me suis retrouvée encore plus seule. Les filles de mon âge s'intéressaient aux garçons, se maquillaient entre elles. Moi, je m’en fichais complètement.

Je suis Asperger : ni singe savant, ni "débile mental", je m'en suis sorti. Et j'en ai bavé

Puis, il a fallu travailler. J'ai eu un poste quelques temps en agence d'intérim, avant d'arrêter à l'arrivée des enfants. Les interactions sociales sont très compliquées pour moi. J'ai du mal avec tout ce qui est sous-entendu, implicite : souvent, je comprends les choses de travers. Travailler en équipe ou passer un entretien d’embauche m’est impossible.

Où sont les petites filles autistes ?

Aujourd'hui, j'agis pour mes enfants, pour éviter que ma fille ne rencontre les difficultés que j'ai affrontées. Si elle a pu être diagnostiquée tôt et peut aujourd’hui être accompagnée à l'école d’une auxiliaire de vie scolaire, c'est parce que son frère a été dépisté avant elle, et moi aussi. Dans une famille normale, une petite fille comme la mienne n'aurait que très peu de chance d'être repérée. C'est aussi parce que j'ai une connaissance accrue de l'autisme que j'ai pu en parler, m'interroger. Dans l’école spécialisée de mon fils, on compte seulement deux petites filles autistes. Où sont les autres ? Il n'est pas normal qu’aussi peu de filles soient diagnostiquées.

"Une petite fille qui marche sur la pointe des pieds ? Elle danse !"

La connaissance de l'autisme féminin doit changer. Celui-ci est plus fin, il faut vouloir regarder pour le voir. Ma fille de 8 ans aligne tout le temps ses petites figurines animales de plastique. On va juste se dire que c’est une fillette qui adore les animaux. Mais si un garçon aligne toutes ses petites voitures, on y verra tout de suite la stéréotypie, ce rituel consécutif à une forte émotion qui permet aux autistes de canaliser celles-ci. Un garçon marchant sur la pointe des pieds ? On va s'inquiéter. Une petite fille ? Elle danse ! Si une enfant pleure ou hurle pour un rien, on pensera qu’elle est hystérique ou fait un caprice…

Même pour les garçons, ce n'est pas simple : on a toujours cette image des autistes à la "Rain Man", mais en réalité tous les autistes ne sont pas des petits génies. Certaines femmes ne se posent même pas la question car, comme ce fut mon cas, elles se sentent folles plus que petits génies ! Il faut sortir de ces stéréotypes qui font plus de tort que de bien."

Propos recueillis par Chloé Pilorget-Rezzouk

*Le prénom a été modifié

Chloé Pilorget-Rezzouk

Chloé Pilorget-Rezzouk

Journaliste

 

8 août 2017

Autisme : une pétition réclame le retour de trois enfants chez leur mère

article publié sur Le Figaro
Par
Mis à jour le 07/08/2017 à 20:42
Publié le 07/08/2017 à 19:42

Image de Rachel, la mère des enfants autistes, extraite d'un film de soutien.

 

196 associations protestent contre une décision de justice retirant une fratrie de 6 à 11 ans à leur mère Rachel.

C'est une affaire «ubuesque» qui dure depuis plus de deux ans. Début juillet, le placement des trois enfants de Rachel, âgés de 11, 8 et 6 ans, a été renouvelé pour la troisième année consécutive par un jugement du tribunal de Grenoble. Depuis l'été 2015, l'histoire de cette jeune mère de famille est devenue un symbole d'une véritable «violence institutionnelle» et d'une incompréhension totale entre les familles d'enfants autistes et les services de l'Aide sociale à l'enfance (ASE), l'ancienne DDASS.

 «Le drame de Rachel est emblématique de ce que subissent des centaines de familles avec autisme. En France, demander un diagnostic d'autisme peut valoir un signalement»

La pétition

Dans une pétition mise en ligne fin juillet, 196 associations, dont la puissante Unapei, Autisme France ou encore la Fnath, dénoncent une situation de «placement abusif» des enfants de Rachel. Aujourd'hui forte de 35.000 signatures, elle doit être remise au président de la République. «Le drame de Rachel est emblématique de ce que subissent des centaines de familles avec autisme. En France, demander un diagnostic d'autisme peut valoir un signalement, surtout aux mères seules: cette violence frappe des centaines de familles, accuse la pétition. Beaucoup de services de l'Aide sociale à l'enfance voient dans ces mères des femmes perverses dont il faut éloigner les enfants: de nombreux juges des enfants suivent aveuglément les délires de ces services.» Les signataires de ce texte virulent réclament notamment une délocalisation de l'affaire et «le respect des droits des enfants privés de leur mère». C'est en juillet 2015 que Rachel s'est vu retirer ses trois jeunes enfants. Il était alors reproché à cette maman divorcée une «recherche effrénée auprès des professionnels de la confirmation du diagnostic d'autisme». Le jugement se fondait sur une expertise psychiatrique réalisée par une pédopsychiatre qui concluait à l'absence de troubles autistiques des enfants et à un syndrome de Münchhausen par procuration pour Rachel. Soit l'invention par cette dernière de problèmes médicaux pour sa fille et ses deux fils.

«Une méconnaissance de ce handicap»

Depuis, les Centres de ressources autisme de Lyon et Grenoble ont diagnostiqué les deux aînés autistes tandis que des signes d'hyperactivité avec troubles de l'attention ont été décelés chez le plus jeune. Malgré ces nouveaux éléments, le placement a été confirmé par la cour d'appel début 2016, afin de protéger les enfants «de la représentation invalidante et alarmiste» de leur mère, et renouvelé en juin de la même année.

Cet été, Me Janois, l'avocate de Rachel, avait bon espoir d'obtenir le retour à la maison de la fratrie. Notamment grâce au rapport des travailleurs sociaux témoignant du comportement approprié de Rachel avec ses enfants lors des rencontres bimensuelles organisées entre eux. Las, le 7 juillet, le placement est prolongé au motif que Rachel majore les handicaps de ses enfants et que ces derniers peuvent «modifier leurs positionnements en fonction de ce qu'elle attend», selon le jugement consulté par Le Figaro.

«Il y a un vrai problème culturel sur la définition de l'autisme et une méconnaissance de ce handicap par les professionnels de l'enfance», se désole Me Janois.

Au conseil départemental de l'Isère, en charge de l'Aide sociale à l'enfance, on relève que «l'ordonnance de placement du juge s'impose au département» et que ce dernier «adapterait ses modalités d'accompagnement» si une nouvelle décision était prise.

«Nous travaillons avec les services de l'ASE pour éviter des situations telles que celle de Rachel», indique pour sa part Sophie Cluzel, secrétaire d'État chargée des Personnes handicapées. Beaucoup de professionnels méconnaissent ce handicap. Cela sera un des axes de travail du nouveau plan autisme.»

https://www.change.org/p/placement-abusif-justice-pour-rach…

http://premium.lefigaro.fr/…/01016-20170807ARTFIG00235-auti…

 

8 août 2017

Autisme : mère et fille en résistance

06/08/2017 05:35

Apolline et Aude, radieuses à l'occasion de la première exposition de la jeune femme et de la présentation de leur livre, un projet commun.

Autiste Asperger, ce n’est qu’à 18 ans que le diagnostic a été posé pour Apolline. Un handicap qu’elle tente d’apprivoiser avec sa mère, sa meilleure alliée.

 Ce sont deux femmes. Une mère et sa fille, toutes deux animées du même courage, de la même volonté farouche face à un handicap dont on ignore encore tout ou presque. L'autisme aurait pu tout balayer dans leur vie saccageant les rêves, foulant aux pieds les joies, les moments de bonheur. Mais Aude Tonneau-Silari et sa fille Apolline ont résisté, tenu, face à ce trouble envahissant du développement diagnostiqué bien trop tardivement (lire par ailleurs).

En 2015, nous avions rencontré Apolline dans le cadre des journées de l'autisme consacrées cette année-là, à Poitiers, à l'intégration sociale et professionnelle des jeunes autistes A 20 ans, la jeune femme s'était livrée sans appréhension, évoquant avec pudeur les épisodes douloureux qui avaient jalonné sa scolarité, ses échecs dont ce son bac pro « Optique et lunetterie » qu'elle avait raté de peu, mais surtout ses envies, ses rêves, son avenir dans le design.

Illustratrice jeunesse

Si ces deux années passées dans une école d'arts appliqués où elle a étudié l'architecture d'intérieur ne se sont pas concrétisées par l'obtention d'un diplôme, elles lui ont permis de mûrir, d'affronter une vie qu'elle sait sans concession et surtout d'affirmer ses choix. Elle vient d'ailleurs de prendre une nouvelle voie.
Il y a quelques jours, c'est une Apolline radieuse qui a accueilli famille, amis et connaissances à la Maison des Sadébriens, à Sèvres-Anxaumont. En cette fin du mois de juillet, ils sont nombreux à avoir fait le déplacement – parfois de très loin – pour assister à sa première exposition. Car c'est dans l'art qu'Apolline s'épanouit. La peinture, la gravure, la photo… Une trentaine d'œuvres sont réunies. L'une d'elles attire particulièrement. Il s'agit d'une aquarelle intitulée « Le petit baigneur breton ». Ce tableau a quelque chose d'hypnotique… C'est le regard de l'enfant, sa profondeur.
« C'est vrai que beaucoup de gens sont attirés par ce tableau », confie avec simplicité la jeune fille qui ne semble pas réaliser l'effet qu'il produit. D'autres amis l'interrogent à ce moment-là et elle répond alors à toutes les sollicitations, heureuse de présenter son travail, de l'intérêt qu'il suscite.
Ce jeudi-là est sa journée, elle fête aussi avec quelques heures d'avance son 22e anniversaire et le début d'une nouvelle aventure. Elle suit désormais une formation d'illustratrice jeunesse, à distance. Et ça lui va comme un gant pouvant gérer ainsi des codes sociaux encore trop lourds à porter, parfois. Dessiner, imaginer, créer… C'est dans ce domaine qu'elle excelle. Qu'elle peut être enfin elle-même. Elle écrit de plus en plus, des histoires, des poèmes. « Elle crée quand elle se sent inspirée, la nuit parfois, raconte Aude Tonneau-Silari dont le sourire épanoui en dit long sur la joie qu'elle éprouve aussi ce jour-là. Elle s'organise de mieux en mieux. Elle fait aujourd'hui partie d'un atelier photo, s'est lancée dans la création d'émaux sur cuivreElle va aussi intégrer le projet Phares (*) de l'université… ». Une autre victoire qu'elles savourent.

 (*) Le dispositif « Phares » est proposé par la fondation de l'université de Poitiers et l'association étudiante HandiSup dans le cadre du projet « Soutien aux étudiants autistes Asperger ».

en savoir plus

" C'est ma fille qui m'a fait grandir "

C'est à un double évènement auquel la famille Silari avait convié proches et connaissance, ce jeudi-là. Une exposition et la sortie d'un ouvrage. Dans le vestibule, quelques exemplaires d'un livre sont posés là. Le titre : « Une petite leçon de course d'obstacles ». Son auteur Aude Tonneau-Silari (Bairille son nom de plume) Il s'agit du récit du parcours d'Apolline, un projet commun mère-fille car illustré par la jeune femme. Ce sont des instants de vie qu'Aude Tonneau-Silari a voulu partager avec légèreté. « Je ne voulais pas que ce soit triste. Ce sont des situations qui sont parfois terribles à vivre sur le moment mais dont on parvient à rire plus tard… C'est ça, cet espoir que je veux transmettre aux mamans qui sont dans le doute. Quand le diagnostic a été posé, il y a quatre ans, j'ai lu tout ce que je trouvais sur le sujet et ça m'a beaucoup éclairée. En écrivant ce livre, j'ai donc pensé à ces parents face à cette situation pour les aider à comprendre ».
Au fil des pages, l'auteur confie s'être débattue dans les méandres d'un univers médical qu'elle connaît pourtant bien mais qui l'a laissée sans réponse. Elle évoque sans détour son désarroi face « à un bébé triste qui ne sourit jamais, ne manifeste rien », les difficultés d'une enfant « si jolie et pourtant si tourmentée » aux réactions parfois violentes, l'agressivité des autres à son égard, sa culpabilité aussi d'avoir voulu jusqu'aux dix ans de sa fille faire d'elle une enfant comme les autres… Une enfant différente qui, dit-elle avec émotion, l'a fait grandir, prendre confiance en elle, l'a construite… »

 « Une petite leçon de course d'obstacles », Aude Bairille, 22,40 €, aux éditions Persée.

Sylvaine Hausseguy
5 août 2017

Prise en charge de l’autisme : les initiatives grenobloises face au retard français

Par AMa | le 03/08/2017 | 22:57 | logo petit

DÉCRYPTAGE – L’autisme, un mystérieux trouble comportemental ? Beaucoup préfèrent y voir une « particularité » à intégrer. Place Gre’net a rencontré des associations grenobloises, des psychiatres et des psychologues pour faire le point sur la prise en charge de l’autisme dans le milieu scolaire et médical. Constat ? La France a bien des retards en comparaison à ses voisins européens.

julien

Julien, le fils de Magalie Pignard. © Magalie Pignard

Julien a le visage d’un ange et le sourire innocent d’un enfant de onze ans. Mais à la différence des autres, il ne parle toujours pas. « Malgré tout, j’ai le sentiment de mieux le comprendre que certaines personnes neuro typiques [sans troubles, ndlr]», confie sa mère Magalie Pignard, dévouée à l’éducation de son fils, atteint d’autisme.

L’origine exacte de ce trouble comportemental demeure très mystérieuse, même pour les scientifiques. Toutefois, ces derniers s’accordent à dire qu’il existe des prédispositions génétiques, favorisant le développement du trouble. C’est pourquoi Magalie, alors âgée de 32 ans, a décidé à son tour de réaliser un diagnostic, une fois celui de son fils établi.

“Les codes sociaux, ce n’est pas vraiment mon truc »

Coup de théâtre pour cette enseignante : les médecins diagnostiquent un léger syndrome d’Asperger. A priori, quand on la rencontre, rien ne porte à croire qu’elle est atteinte de troubles autistiques. Un peu timide, parfois “maladroite », Magalie Pignard s’est pourtant souvent sentie différente. « C’est vrai que les codes sociaux, ce n’est pas vraiment mon truc », affirme en riant cette quadragénaire à l’allure élancée. Elle est par ailleurs, comme souvent les autistes Asperger, dotée de capacités artistiques ou intellectuelles étonnantes. Musicienne dans l’âme, Magalie est par exemple capable de reconnaître les notes de musique dès la première écoute d’un morceau.

Magalie Pignard et son fils en photo © Anaïs Mariotti

Magalie Pignard et son fils en photo. © Anaïs Mariotti

Pour le docteur Philippe Narang, psychiatre indépendant à Grenoble et spécialisé dans l’autisme Asperger, cette particularité n’est pas un handicap mais plutôt une “dyslexie des relations sociales“. En d’autres termes, “l’apprentissage des codes sociaux n’est pas automatique pour ces personnes », précise le médecin.

“Trois élèves sur huit ont appris à parler”

Magalie ne garde pas de bons souvenirs de la scolarisation de son fils en milieu ordinaire. En 2009, elle a décidé de fonder à Grenoble l’association Le Tremplin, avec sa mère, Françoise Galletti. Son objectif ? Permettre une meilleure intégration des personnes autistes, grâce aux méthodes pédagogiques de l’analyse appliquée du comportement (ABA).

Née dans les années 1960 aux États-Unis, « l’analyse appliquée du comportement est un principe scientifique qui se base sur la motivation et sur les particularités de la personne » explique Coralie Fiquet, psychologue spécialisée dans l’autisme et dans la méthode ABA à Grenoble. Les programmes sont individualisés et spécialement créés en fonction des compétences de l’enfant. « D’une personne à une autre, la manifestation des troubles autistiques est totalement différente. L’ABA tient compte de ces particularités », explique Magalie Pignard.

Application de la pédagogie ABA à l'association Le Tremplin à Grenoble © Marina B Photographie

Application de la pédagogie ABA à l’association Le Tremplin à Grenoble © Marina B Photographie

Au Tremplin, un éducateur spécialisé se charge ainsi d’un élève à la fois. À la clef, des récompenses permettent de stimuler leurs progressions. “Trois élèves sur huit ont d’ailleurs appris à parler, grâce à l’ABA, dans notre association“, se félicite Françoise Galleti, directrice de la fondation. « La communication est la première étape pour débloquer d’autres troubles », ajoute-t-elle.

En parallèle, Magalie a aussi cofondé l’Association francophone des femmes autistes, un espace d’écoute et de dialogue qui a pour objectif de lever certains tabous, dont celui des violences sexuelles. Dans son entourage, Magalie relate en effet des cas de viols : “Ces violences sont fréquentes, particulièrement chez les autistes dénués de parole. Mais personne n’en parle, par honte ou par méconnaissance », déplore-t-elle.

“La France a quarante ans de retard sur ses voisins européens”

« La France a quarante ans de retard sur ses voisins européens en matière d’autisme », estime Magalie Pignard. Un constat partagé par le Docteur Fiquet : « La France a en effet beaucoup de retard, notamment en raison d’une méconnaissance de l’autisme et d’un manque d’informations. » De plus, « des idées reçues et des stéréotypes ont longtemps freiné sa prise en charge », ajoute-t-elle.

La méthode ABA a d’ailleurs été adoptée très tardivement en France, dans le courant des années 2000, contrairement à d’autres pays européens, comme l’Italie, qui la pratiquent depuis de nombreuses années. Et ce n’est qu’en 2012 que l’approche psychiatrique de l’autisme a été abandonnée par la Haute autorité de la santé au profit de l’approche comportementale (ABA), désormais recommandée par cette institution publique.

Application de la méthode pédagogique ABA à l'association Le Tremplin ©Marina B Photographie

Application de la méthode pédagogique ABA à l’association Le Tremplin. © Marina B. Photographie

Il faut dire que ces approches comportementales ont fait l’objet de désaccords idéologiques au sein même de la sphère médicale. Les détracteurs de l’ABA contestent le système de récompenses, qu’ils qualifient de « dressage » ou de « conditionnement ». Pour le Dr Élisabeth Giraud Baro, psychiatre à la clinique du Dauphiné et fondatrice du Centre expert Asperger à Grenoble, il n’en est rien.

Dr. Elisabeth Giraud Baro, psychiatre à la clinique du Dauphiné. © DR

Dr Élisabeth Giraud Baro, psychiatre à la clinique du Dauphiné. © DR

« Le changement est très anxiogène pour une personne autiste. La méthode ABA modifie l’environnement de la personne. Les récompenses leurs permettent donc de dépasser leurs peurs », explique-t-elle.

D’ailleurs le système de « récompense » est, selon elle, un stimulant inhérent à la nature humaine. « Il en est de même dans le monde du travail. Le salaire encourage nécessairement la motivation professionnelle. »

Autrefois, les médecins imposaient la socialisation des personnes autistes. Un « calvaire » pour ces derniers. Or, on sait aujourd’hui que « l’environnement doit être adapté à la personne, et non pas l’inverse », explique la psychiatre, qui a introduit les thérapies cognitives et comportementales à Grenoble, grâce à son Centre.

Une véritable révolution, qui implique un consensus au sein de l’équipe médicale. Et surtout, davantage de moyens à disposition des soignants.

L’autisme est encore assez méconnu, même dans le milieu médical

Pour le Dr Giraud Baro, hors de question de se montrer pessimiste. « En vingt ans d’expérience, j’ai vu la situation nettement s’améliorer », affirme-t-elle. Toutefois, des problèmes de taille continuent de freiner une meilleure prise en charge de l’autisme en France.

Dr Philippe Narang, psychiatre à Grenoble spécialisé dans le syndrome d'asperger.

Dr Philippe Narang, psychiatre à Grenoble spécialisé dans le syndrome d’Asperger.

Selon le psychiatre Philippe Narang, ce retard français s’explique tout d’abord par un important manque d’informations et de connaissances. En réalité, l’autisme est encore assez méconnu, même dans le milieu médical. Un manque de formation qui a parfois engendré des erreurs de diagnostic…

Au cours de ma carrière, j’ai rencontré des personnes qui ont d’abord été diagnostiquées schizophrènes. Après une révision du diagnostic, les médecins se sont rendu compte qu’il s’agissait en réalité d’un syndrome d’Asperger », témoigne le Dr Narang. Des erreurs médicales – dues à une “méconnaissance totale” – loin d’être anodines ayant débouché sur des prises en charge inadéquates.

Ainsi, ces personnes sont parfois orientées vers des hôpitaux psychiatriques, bien que ces structures ne soient pas adaptées à ce type de trouble. “Par mimétisme, ils imiteront le comportement des personnes internées, ce qui ne favorise pas leurs progressions”, explique Philippe Narang.

La France manque considérablement de moyens et de financements

Pour Magalie Pignard, l’hospitalisation en milieu psychiatrique serait une manière de désengorger les instituts médico-éducatifs (IME), très souvent surchargés. “On donne encore des neuroleptiques qui, au lieu de faire progresser l’enfant, augmentent ses troubles“, estime-t-elle.

Image d'illustration, médicament. Photo Domaine Public

Image d’illustration, médicaments. DR

Dans la grande majorité des cas, ces psychotropes ne sont pas adaptés. Mais comme toutes règles, il y a des exceptions », précise toutefois le psychiatre. En effet, la prise de neuroleptiques peut être justifiée pour un laps de temps très court, quand l’autisme est associé à des troubles neurologiques (crise d’épilepsie, épisode schizophrénique…), confirme Élisabeth Giraud Baro.

Malgré tout, ils ne peuvent en aucun cas se substituer à un traitement de fond. Fort heureusement, « la tendance médicale recommande davantage un traitement éducatif que médicamenteux » explique-t-elle. “Si les médicaments sont nécessaires, il faut une dose très faible et provisoire. Sinon, les effets secondaires peuvent dégrader la personne et augmenter ses chances de développer une déficience intellectuelle », explique le Dr Narang.

En plus du manque de connaissances, la France manque considérablement de moyens et de financements. En résultent des listes d’attente pour obtenir une place dans les IME, source de souffrances pour les familles. “Il faut trois ans pour pouvoir faire un diagnostic. Et les familles attendent en moyenne deux ans pour obtenir une place dans un IME », explique la psychologue Coralie Fiquet. Parfois, des adultes restent même hospitalisés dans le pôle pour enfants, en raison du manque de places.

Scolarisation des élèves autistes : vers l’intégration ?

« À la maternelle, les enseignants m’ont demandé de n’amener mon fils que six heures par semaine à l’école. Et de compléter avec l’hôpital de jour pour éviter, semble-t-il, le poids de la prise en charge », témoigne Magalie Pignard. Pour Coralie Fiquet, il n’y a pourtant pas de doute : « Dans la mesure du possible, il faut tendre vers une intégration maximale des enfants autistes en milieu ordinaire. »

Si en Italie, la quasi totalité des élèves autistes est scolarisée en milieu ordinaire,  seulement 20 % d’entre eux l’étaient en France, en 2014. L’Hexagone avait d’ailleurs été sanctionné par le Conseil de l’Europe, accusé d’avoir “délaissé l’éducation des jeunes autistes“. La loi du 11 février 2005 sur l’égalité des chances avait laissé espérer une meilleure intégration scolaire des personnes handicapées mais les résultats sont toujours en-deçà des espérances…

Photographie d'illustration. Association Le Tremplin à Grenoble. © Marina B Photographie

Association Le Tremplin à Grenoble. © Marina B Photographie

La méthode ABA permet justement de favoriser la scolarisation des enfants en milieu ordinaire, assure Coralie Fiquet. « En moyenne, un enfant sur deux réintègre l’école ordinaire grâce à l’analyse du comportement », certifie-t-elle. Mais pour parvenir à un tel résultat, des moyens doivent être alloués par l’État et les collectivités territoriales.

“Il est indispensable d’aider et de soutenir les enseignants”

D’abord, “les enseignants devraient pouvoir être formés fréquemment et dès le début de leur carrière pour accueillir tout type de handicap », estime Philippe Narang. Ensuite, l’effectif des classes doit impérativement être diminué. “Dans une classe de trente élèves, entre l’élève brillant, le cancre, le dyslexique et celui autiste, l’enseignant ne peut pas tout assurer seul », affirme-t-il. Enfin, il est indispensable de recruter des enseignants spécialisés et des auxiliaires de vie scolaire pour l’aide individuelle (AVS-I).

Enfants à l'école. © Joël Kermabon – placegrenet.fr

Enfants sur le chemin de l’école. © Joël Kermabon – placegrenet.fr

En somme, il existe une réelle volonté de la part du corps enseignants, “mais on ne leur donne pas les moyens. Il est impératif de les aider et de les soutenir », argue le Dr Narang. Et l’actuelle suppression des postes dans l’Éducation nationale freine encore davantage l’avancée de cette intégration. Des réformes sont largement envisageables, mais actuellement au point mort, faute de financement par les pouvoirs publics.

Pourtant, les associations et les médecins s’accordent à dire que la scolarisation en milieu ordinaire est non seulement bénéfique pour les enfants autistes mais aussi pour les élèves sans handicap. « À l’école, les enfants autistes peuvent imiter les codes sociaux des autres enfants. S’ils restent entre eux, ils ne progresseront pas », estime Magalie Pignard. Sans compter que cette politique permet de stimuler l’entraide, la solidarité et la tolérance chez les enfants dès leur plus jeune âge. L’autisme, une simple différence parmi tant d’autres ?

Anaïs Mariotti

 

« IMAGINONS UN EXTRATERRESTRE QUI DÉBARQUE SUR TERRE »

« Le réel handicap, c’est le regard des autres », affirme Magalie Pignard. À travers une intéressante métaphore, elle partage sa vision de l’autisme : “Imaginons un extraterrestre, qui débarque sur Terre et qui ne comprend rien aux codes sociaux et aux coutumes. Cela ne signifie pas qu’il n’est pas moins intelligent que les autres. »

 

Enfant autiste à l'association Le Tremplin à Grenoble. © Marian B Photographie

Enfant autiste à l’association Le Tremplin à Grenoble. © Marian B Photographie

Pour le docteur Philippe Narang, “il n’y a pas de handicap, il y a surtout un fonctionnement cognitif différent“. Il explique que le schéma de pensée des personnes autistes n’est pas moins efficace que les autres, mais fondamentalement différent. Pour une personne lambda, le raisonnement est “probabiliste” : “Constamment, nous raisonnons sous forme d’hypothèses », explique le psychiatre.

Un esprit “en arborescence”

À l’inverse, une personne Asperger a davantage un raisonnement analytique et pragmatique. “Leur esprit est en arborescence, il fonctionne comme un arbre décisionnel », poursuit-il. C’est pourquoi ils ont notamment des difficultés à comprendre l’ambiguïté, les sous-entendus ou encore l’ironie.

Alors peut-on réellement parler de handicap ? “Les autistes Asperger ont un handicap dans les relations sociales, mais dans d’autres domaines, c’est moi qui suis handicapé ! », ironise Philippe Narang. En d’autres termes, “ils sont extrêmement performants dans certains domaines techniques, là où la majorité des gens ne le sont pas. Il n’y a pas de handicap, mais simplement des modes de raisonnement différents.”

“La variété des personnes fait la richesse d’une société”

Aux yeux de Magalie Pignard, l’autisme n’est pas un trouble à combattre. “Je considère que la variété des personnes fait la richesse d’une société », estime-t-elle. Il s’agit plutôt de comprendre, d’appréhender et d’intégrer, sans vouloir absolument modifier le comportement de ces personnes.

En d’autres termes, ce ne sont pas les autistes qui doivent coûte que coûte intégrer la société. “C’est la société qui doit s’efforcer de les intégrer.” Finalement, « la définition du handicap dépend du regard que lui porte la société », estime-t-elle.

L’ATYPIK, UN RESTAURANT PAS COMME LES AUTRES

À la terrasse du restaurant l’Atypik à Grenoble, Annie Raymond attend celui qu’elle nomme “son merveilleux“. Diagnostiqué autiste Asperger, son fils Clément est un jeune homme de 23 ans qui n’a pas froid aux yeux.

Clément portrait

Clément, 23 ans, membre actif à l’association et au restaurant l’Atypik à Grenoble. © Anaïs Mariotti

À ses heures perdues, il travaille au café-restaurant l’Atypik, un lieu convivial qui porte bien son nom où sa mère est  bénévole. Créée en 2013 par la compagnie des TED, un sigle qui signifie “troubles envahissants du développement”, cette enseigne emploie de jeunes autistes comme serveurs ou cuisiniers.

Le restaurant est aussi un lieu de vie, de formation et d’activité pour les personnes autistes et leur famille. Depuis quatre ans maintenant, L’Atypik, situé près de la place Notre-Dame, a un mot d’ordre : valoriser la différence. Il permet également à ces jeunes d’intégrer le monde du travail en toute sécurité.

Clément veut se lancer dans la politique

Mais Clément ne compte pas travailler dans la restauration à l’avenir. Après avoir gagné un concours d’éloquence à l’âge de 17 ans, il veut désormais se lancer dans une carrière politique.

Passionné de géopolitique, d’histoire et de sciences sociales, il souhaite plus précisément devenir conseiller municipal. Avec ses larges connaissances culturelles et politiques, le jeune homme ne semble pas moins capable que les autres mais reconnaît rencontrer davantage de difficultés. “Les discriminations, j’en suis victime tous les jours, mais je préfère ne pas parler de choses qui fâchent”, raconte-t-il en esquivant rapidement ce sujet qui semble douloureux.

Sans aucun regret, sa mère, ancienne comédienne, a mis de côté sa carrière pour s’occuper de lui. Ensemble, ils veulent aujourd’hui bouleverser le regard de la société. « Il est plus difficile d’être autiste en France qu’ailleurs », affirme-t-elle. Et pour cause, elle estime que « le système français cherche à gommer les différences au lieu de les accepter et les mettre en valeur ».

2 août 2017

L’autisme serait plus difficile à diagnostiquer chez les filles

article publié dans La Croix

Sylvain Labaune, le

L’Association francophone de femmes autistes (AFFA) alerte : plusieurs études récentes montrent qu’il est plus difficile de diagnostiquer l’autisme chez les filles.

Celles-ci auraient davantage tendance à camoufler leurs difficultés que les garçons, du fait notamment d’une meilleure capacité à imiter les comportements sociaux.

Au centre Objectif Vaincre l'Autisme de Gland, en Suisse. ZOOM

Au centre Objectif Vaincre l'Autisme de Gland, en Suisse. / Amelie Benoist/BSIP

Nombre de femmes pourraient être autistes sans le savoir. C’est en tout cas le sens de plusieurs travaux universitaires publiés récemment. Les statistiques témoignent depuis toujours d’une surreprésentation masculine dans la population atteinte, le ratio généralement admis étant de trois hommes pour une femme, et jusqu’à neuf hommes pour une femme chez les autistes dits intelligents. Jusqu’alors, les scientifiques ne savaient pas clairement expliquer cette différence.

L’hypothèse la plus solide, avancée par une étude (1) du Centre américain pour les informations biotechnologiques (NCBI), est que l’autisme des filles serait sous-diagnostiqué. Et ce, parce que les femmes auraient davantage tendance à camoufler leurs comportements autistiques, au prix « de grands efforts entraînant une grande fatigue », précise Pauline Duret, chercheuse en neurosciences cognitives de l’autisme à l’Université de Montréal.

Elles auraient en effet plus de facilité à masquer leurs difficultés en imitant les comportements sociaux « normaux », explique une autre étude (2). Ce serait particulièrement le cas pour les autistes dits « de haut niveau » ayant une intelligence normale ou supérieure à la moyenne, et pour les autistes Asperger ou autistes dits intelligents.

Des efforts pour paraître « normale »

« Les études montrent que les compétences communicationnelles et langagières des filles seraient meilleures que celles des garçons », explique Adeline Lacroix, spécialiste des spécificités des femmes autistes de haut niveau.

Par exemple, poursuit-elle, une fillette autiste recevant un cadeau qu’elle n’apprécie pas, et qui ne saisit pas l’intérêt de le recevoir, va plus facilement feindre la gratitude et même remercier. À l’adolescence, elle aura également plus de facilités à nouer des relations amicales.

À lire : Autisme : « Nous demandons un repérage précoce »

La jeune femme, elle-même diagnostiquée autiste Asperger en 2014 à l’âge de 29 ans, témoigne de l’évolution qui l’a amenée à vouloir paraître « comme tout le monde » : « Avant de savoir de quoi je souffrais, j’avais l’impression d’être différente. J’étais quelqu’un d’assez solitaire. Les relations étaient compliquées parce que j’ai des centres d’intérêt très précis. Mais en même temps je me disais qu’il fallait que je fasse des efforts pour être normale”. À l’adolescence, j’ai commencé à essayer de m’intégrer et je me suis fait une amie proche », confie-t-elle.

Une autre différence entre les sexes pourrait expliquer le sous-diagnostic : les autistes développent habituellement des centres d’intérêt intenses, et ceux des filles attireraient moins l’attention des spécialistes.

Des techniques de détection inadaptées

« Par exemple, quand un garçon va se passionner pour les calendriers ou les plans de métro, elles s’intéresseront aux animaux, à un groupe de musique à la mode ou même à la psychologie », explique Pauline Duret. Des passions plus communes et qui, de ce fait, n’apparaissent pas comme des « bizarreries ».

« S’il faut rester très prudent sur les chiffres, on peut néanmoins raisonnablement penser qu’il existe un biais dans le processus de détection des femmes autistes », estime Catherine Barthélémy, pédopsychiatre spécialiste de l’autisme et professeur honoraire au CHRU de Tours.

Les tests de diagnostic actuels ont d’ailleurs été élaborés à partir d’un échantillon majoritairement composé de garçons, poursuit-elle, « ces derniers étant statistiquement plus nombreux ». Il est donc probable que « les techniques de détection ne soient pas adaptées à un public féminin », au vu des différences de « symptômes » entre les deux sexes.

L’enjeu n’est pas mince. La non-détection de l’autisme chez les filles empêche d’accéder aux soins et de bénéficier dès l’enfance d’un accompagnement. Un accompagnement qui serait également précieux pour leur éviter d’être victimes d’agressions sexuelles, une réalité sous-estimée selon l’AFFA, qui recueille beaucoup de témoignages en ce sens.

À lire : Handicap, les enfants qui en ont besoin seront aidés à la rentrée

Sylvain Labaune

(1) Plateforme en ligne PubMed, 2012 (Dworzynski & Al.)

(2) Revue Molecular Autism, 2015 (Halladay & Al.)

1 août 2017

Le mythe de « l’autisme léger ou sévère » (fin)

article publié dans le Huffington Post (Canada)

Il faut reconnaître que les autistes font partie de la société, comme n’importe quel autre individu, et cesser de les catégoriser comme un groupe d’individus que la société doit accueillir.

20/07/2017 09:00 EDT | Actualisé 20/07/2017 10:35 EDT
Getty Images
Il ne faut jamais sous-estimer l’intelligence ni la capacité de compréhension d’un autiste.

Maintenant que nous savons que l'histoire médicale de l'autisme a engendré des dérives importantes à l'égard des autistes, que faisons-nous? La première étape est de parler d'inclusion plutôt que d'intégration. Il faut reconnaître que les autistes font partie de la société, comme n'importe quel autre individu, et cesser de les catégoriser comme un groupe d'individus que la société doit accueillir.

Pour ce faire, l'étape primordiale est l'annulation des demandes et des exigences envers les autistes afin qu'ils se conforment pour être socialement acceptables et qu'ils apprennent par cœur et imitent le mode de fonctionnement des neurotypiques. Demanderiez-vous d'une personne paraplégique de faire un effort pour marcher ou d'une personne sourde de faire un effort pour vous entendre? Bien sûr que non, cela serait totalement absurde. Alors, pourquoi le faire avec les autistes? Nous devons donc cesser toutes tentatives de normalisation.

En contrepartie, pour que cette inclusion fonctionne, les autistes devront s'affirmer comme tels et accepter d'utiliser des mesures d'inclusion au même titre qu'une personne sourde ou paraplégique. Les autistes ne pourraient tenir rigueur à des personnes ou à la société si ceux-ci refusent les mesures d'inclusions qui leur sont offertes à condition que celles-ci soient adaptées à chaque autiste, au même titre qu'elles sont adaptées pour un amputé des bras ou des jambes par exemple.

-Advertisement-
We Are Sorry,
Video no longer available
Ecode: 9999
En contrepartie, pour que cette inclusion fonctionne, les autistes devront s'affirmer comme tels et accepter d'utiliser des mesures d'inclusion au même titre qu'une personne sourde ou paraplégique. Les autistes ne pourraient tenir rigueur à des personnes ou à la société si ceux-ci refusent les mesures d'inclusions qui leur sont offertes à condition que celles-ci soient adaptées à chaque autiste, au même titre qu'elles sont adaptées pour un amputé des bras ou des jambes par exemple.

Il faut aussi savoir qu'une des fausses croyances des plus communes sur « l'autisme léger ou sévère » est que l'avenir de la personne autiste est prédéterminé, et que celle-ci est figée dans cet état à vie. Mais en réalité, l'autisme est évolutif dans le temps.

Il faut chercher des outils pour favoriser la communication et les apprentissages conformément à leur neurologie, c'est-à-dire à leur mode de pensée autistique.

L'état d'un autiste n'est pas immuable. Un autiste évolue à son rythme. Les variantes neurologiques des autistes dont l'intelligence focalisée et la surperception les amènent à avoir un rythme de développement totalement différent des non-autistes. La comparaison entre le développement des autistes et des non autistes est donc impossible. Il ne faut jamais sous-estimer l'intelligence ni la capacité de compréhension d'un autiste. Il faut chercher des outils pour favoriser la communication et les apprentissages conformément à leur neurologie, c'est-à-dire à leur mode de pensée autistique.

Pour favoriser l'autonomie d'une personne autiste, nous devons tout d'abord respecter et comprendre sa neurologie. Même si en apparence, un enfant autiste qualifié de « sévère » ou de « bas niveau » ne semble rien faire, ne rien apprendre et être enfermé dans son monde, ce n'est jamais le cas. Tel un éventail, l'enfant autiste se focalise sur les détails pour s'ouvrir graduellement, à son rythme, vers l'extérieur. En ce sens, les enfants autistes n'ont pas de retard d'apprentissage et font simplement des apprentissages différents. Il est donc essentiel de voir l'autisme comme un mode de fonctionnement différent et non un handicap ou un déficit à combler, car c'est ainsi que les plus grandes erreurs sont commises.

L'autisme ne disparaît pas en vieillissant. Cependant, les autistes acquièrent des connaissances et des aptitudes, graduellement au fil des années, afin de fonctionner dans la société avec plus ou moins d'aisance, avec plus ou moins de soutien. Il s'agit généralement de comportements adaptatifs c'est-à-dire que la personne autiste s'adapte aux exigences et contraintes de la société ainsi qu'à l'environnement pour vivre au rythme de la société actuelle, selon les conventions et codes sociaux. Nous pourrions ainsi parler d'autisme « invisible » en comparaison à un autisme « visible » durant l'enfance.

La pensée autistique est le point commun de toutes les personnes autistes et l'autisme les inclues toutes.

Les autistes sont divers entre eux, comme les personnes non autistes, et ils n'ont pas besoin de se faire catégoriser. Certains autistes ont des traits observables plus prononcés et évidents que d'autres. Certains auront davantage besoin d'aide et d'outils pour se développer. Le tout fortement teinté par le bagage personnel, familial, social et environnemental de chaque individu. La pensée autistique est le point commun de toutes les personnes autistes et l'autisme les inclues toutes.

Les éléments clés pour aider une personne autiste à se développer sont la compréhension de la pensée autistique et la préférence d'un mode de communication conçu pour cette neurologie particulière, comme le langage conceptuel de SACCADE. Il faut aussi favoriser et encourager leurs intérêts spécifiques, et non les réprimer. Les intérêts spécifiques sont le moteur d'apprentissage des autistes. Il faut aller au-delà des apparences et comprendre les comportements des autistes afin d'entrer en contact avec eux et de répondre à leurs besoins.

C'est ainsi que les autistes se sentiront et seront inclus à cette société à laquelle ils participeront pleinement. Les autistes désirent et choisissent de vivre avec les non-autistes. Ils demandent simplement que ce désir et ce choix se fassent de manière inclusive et non discriminatoire.

Un texte coécrit avec Mathieu Giroux.


LIRE AUSSI
» Le mythe de « l'autisme léger ou sévère »
» BLOGUE Le mythe de « l'autisme léger ou sévère » (suite)
» L'intelligence autistique

31 juillet 2017

Dinosaures : à 10 ans, un jeune garçon corrige une erreur du Musée d'Histoire naturelle londonien

09h46, le 31 juillet 2017, modifié à 10h11, le 31 juillet 2017

Dinosaures : à 10 ans, un jeune garçon corrige une erreur du Musée d'Histoire naturelle londonien
Le musée s'est dit impressionné par les connaissances de Charlie (image d'illustration du musée) @ TOLGA AKMEN / AFP

Charlie Edwards était sûr de lui, le dessin de dinosaure ne correspondait pas à la description du cartel.

Protoceratops dessiné à la place d'un Oviraptor au Musée d'Histoire naturelle de Londres. Une grossière erreur relevée par Charlie Edwards, un jeune garçon de 10 ans, passionné de paléontologie, rapporte la BBC jeudi

Un garçon aux grandes connaissances. En visite au grand musée londonien avec ses parents et son frère le 21 juillet dernier, le jeune garçon atteint du syndrome d'Asperger (une forme d'autisme), a été fort étonné de découvrir un dessin de Protoceratops, dinosaure qui se tient sur quatre pattes, à côté de la description d'un Oviraptor, qui se tient sur seulement deux.

Sûr d'avoir relevé une erreur, Charlie n'en a pas démordu. "Quand il nous l'a dit, nous avons répondu 'Ok nous savons que tu as raison, mais c'est le Musée d'Histoire naturelle'", a expliqué sa mère. "Il s'est avéré qu'il avait raison."

L'erreur a été corrigée. Car le garçon a tenu à informer un membre du musée de sa découverte. Un porte-parole a expliqué que "la galerie des dinosaures a été rénovée plusieurs fois" et qu'une "erreur s'était glissée". Le musée a ajouté qu"il était "très impressionné par les connaissances de Charlie". Depuis, le cartel a été corrigé. 

30 juillet 2017

Interview vidéo de Josef Schovanec sur RTS.ch

Ecran total, Mardi, 22h15

Il est un saltimbanque de l’autisme. Un rescapé de la camisole chimique. Il est aussi l’auteur de «L’Eloge du voyage à l’usage des autistes et de ceux qui ne le sont pas assez » et de « L’autisme pour les Nuls ». Aujourd’hui Docteur en philosophie et diplômé de Sciences-Po Paris, il nous livre son regard hors norme, sur le monde.
Maitena Biraben reçoit Joseph Schovanec.

30 juillet 2017

Le mythe de « l’autisme léger ou sévère » (suite)

article publié dans le Huffington Pos (Canada)

Est-ce possible de repartir à zéro et de considérer les personnes autistes comme des êtres humains, sans défaillance neurologique pour la sociabilité et de les inclure à cette société ?

09/07/2017 08:00 EDT | Actualisé 09/07/2017 08:35 EDT
UrsaHoogle via Getty Images
La similarité et la confusion entre l’autisme prototypique et syndromique résident durant la période préverbale qui peut se prolonger jusqu’à l’adolescence dans certains cas.

Comme présenté dans la première partie, l'évaluation médicale des autistes s'est faite et se fait encore à partir de critères subjectifs, émis et interprétés par des non-autistes. Ainsi, les dérives et les préjudices sur les autistes ont été et sont nombreux.

Au fil du temps, petit à petit, les premières observations et descriptions des autistes réalisées par Léo Kanner et Hans Asperger semblent s'être perdues au fil des années, ce qui laisse place à plusieurs confusions et « faux » diagnostics. Il serait ainsi essentiel de revenir aux critères initiaux afin de séparer les autistes prototypiques et Asperger, c'est-à-dire ceux ayant un fonctionnement cognitif différent et les autistes syndromiques, c'est-à-dire ceux ayant les manifestations de l'autisme (intérêts spécifiques et difficultés sociales) mais ayant le même fonctionnement cognitif que les neurotypiques. Ces manifestations autistiques sont majoritairement la conséquence d'un syndrome génétique et la plupart ont une déficience intellectuelle.

-Advertisement-
We Are Sorry,
Video no longer available
Ecode: 9999

Une démarche que le Dr. Laurent Mottron et son équipe ont entamée en essayant de définir des critères plus objectifs et quantifiables. Il faut comprendre que les autistes vivent tous des difficultés similaires par rapport à l'interaction sociale et la communication et que ce sont les manifestations et les réactions à celles-ci qui diffèrent. Catégoriser les autistes en fonction d'un niveau ou d'un degré de sévérité est aussi absurde que de catégoriser les personnes ayant un trouble de la vision. Les personnes myopes n'ont pas une problématique plus « légère » que les personnes presbytes et le daltonisme n'est pas plus « lourd » que la myopie.

La similarité et la confusion entre l'autisme prototypique et syndromique résident durant la période préverbale qui peut se prolonger jusqu'à l'adolescence dans certains cas. À ce moment précis, les autistes prototypiques semblent avoir « un bas niveau de fonctionnement » ou un autisme « sévère » comparable à une déficience intellectuelle au niveau verbal. Cependant, ils ne présentent aucune déficience intellectuelle réelle et leur potentiel cognitif est extrêmement favorable. Ils ont simplement choisi de ne pas utiliser le langage verbal comme moyen de communication puisque cela n'est pas un besoin fondamental pour eux compte tenu des exigences que représente l'acquisition d'une langue et la réponse à leurs besoins. À la place, ils développent leurs exceptionnelles capacités perceptives. Acquisition qui se reflète dans leurs jeux comme par exemple, le classement de voiture par taille et couleur ou le tournoiement d'objet.

De plus, il ne faut pas oublier que les niveaux ou les degrés de sévérité de l'autisme ont été établis par des non-autistes selon des critères non-autistes. Ainsi, ces qualificatifs sont une représentation des aptitudes et des comportements priorisés et valorisés par les non-autistes pour la socialisation. Ceux-ci désignent simplement le niveau d'adaptabilité sociale qu'un autiste a atteint.

Car ne l'oublions pas, l'autisme était et est encore un trouble aux yeux de la médecine et comme tous les troubles, la guérison est l'objectif ultime.

À la limite, il serait même possible de s'interroger à savoir si ces qualificatifs ne représentent pas toutes les étapes du processus de guérison de l'autisme. Car ne l'oublions pas, l'autisme était et est encore un trouble aux yeux de la médecine et comme tous les troubles, la guérison est l'objectif ultime.

Mais lorsque cette maladie est incurable, comment évaluer les progrès des soins prodigués? La médecine devait créer une échelle d'évaluation. D'un côté, il y a ceux qui acquièrent certaines compétences sociales et se font assimiler par la société. De l'autre côté, il y a les « bêtes » déconnectées et condamnées à une exclusion, ceux qui représentent un fardeau social. Une échelle capable de décrire la progression des autistes vers l'esprit humain « normal ». Une reconnaissance de la réussite folklorique et fugace des thérapies cruelles et barbares pour ramener un être vers « la sociabilité humaine acceptable ».

En ces termes, rien ne paraît plus absurde que cette description d'une pensée médicale et pourtant, électrochocs, psychotropes, domptages animaliers et plusieurs autres thérapies cruelles ont été utilisées et testées pour ramener les autismes dans le monde sociable des neurotypiques.

Les dérives médicales décrites ont toutes eu lieu à différentes époques à l'égard de la femme, du gaucher, de l'homosexualité et de diverses autres minorités. Elles ne sont que la représentation de la petitesse du savoir par rapport à la différence.

Cette classification des niveaux augmente la stigmatisation des autistes en contribuant à augmenter les fausses croyances sur l'autisme. Celle-ci contribue également à diviser les autistes en deux clans et génère une sorte de lutte entre parents d'enfants autistes « sévères » et les adultes qui prennent la parole. Cette classification condamne l'autiste à son autisme en croyant que jamais il ne sera autonome. Le tout au détriment de la compréhension du fonctionnement interne de la pensée autistique.

Et maintenant, est-ce possible de repartir à zéro, d'oublier les erreurs et les horreurs du passé et de considérer les personnes autistes comme des êtres humains, sans défaillance neurologique pour la sociabilité et de les inclure à cette société ? Certainement et ce sera le sujet de la troisième partie.

Un texte coécrit avec Mathieu Giroux.

Sources :

NeuroTribes. The legacy of autisme and the future of neurodiversity, Steve Silberman, (Penguin books 2016)

L'intervention précoce pour enfants autistes. Nouveaux principes pour soutenir une autre intelligence, Laurent Mottron, (Mardaga, 2016)

http://social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_josef_schovanec.pdf

http://quebec.huffingtonpost.ca/melanie-ouimet/intelligence-autiste_b_15730560.html

LIRE AUSSI
»
Le mythe de « l'autisme léger ou sévère »
» L'intelligence autistique
» Retour sur le plan d'action sur le trouble du spectre autistique

30 juillet 2017

Le mythe de "l’autisme léger ou sévère"

article publié dans le Huffington Post

Pour comprendre l'absurdité du mythe sur la sévérité de l'autisme, il faut connaître un peu l'histoire médicale de l'autisme puisqu'elle est à la base de celle-ci.

29/07/2017 07:00 CEST | Actualisé il y a 22 heures
Getty Images/iStockphoto
Le mythe de "l’autisme léger ou sévère"

L'idée que le continuum autistique serait trop grand et trop vaste est un sujet de discussion qui revient fréquemment dans le monde de l'autisme. On entend souvent qu'il y a trop de différences majeures entre les personnes autistes.

Nous avons tendance à catégoriser les autistes entre eux et à les étiqueter de "légers" ou de "sévères". On entend souvent que les autistes "sévères" n'ont rien en commun avec les autistes "légers". On compare les autistes Asperger et les autistes de Kanner en suggérant que les premiers ne seraient que très faiblement "atteints" et que les deuxièmes auraient un degré de "sévérité" si prononcé que l'espérance d'une vie "normale" est vouée à l'échec en leur présumant une intelligence et une autonomie limitative absolue.

Mais lorsque nous nous appelons autistes, de quoi parlons-nous?

Pour comprendre l'absurdité du mythe sur la sévérité de l'autisme, il faut connaître un peu l'histoire médicale de l'autisme puisqu'elle est à la base de celle-ci. Ainsi, ce texte se voudra une brève synthèse historique et factuelle servant de référence pour les textes suivants.

L'autisme fut découvert par deux chercheurs autour des années 1940 soit le Dr. Léo Kanner et le Dr. Hans Asperger. Ils avaient découvert que plusieurs personnes, ayant différents diagnostics neurologiques, avaient en commun les mêmes caractéristiques: des limites dans les interactions sociales et des intérêts spécifiques. Asperger apportait une nuance en spécifiant la faculté spécifique pour le vocabulaire et la communication verbale alors que Kanner parlait des facultés sensorielles et des comportements plus "stéréotypés" allant jusqu'à parler de l'autisme infantile. Fait important à souligner, dans aucun cas, la déficience intellectuelle n'était invoquée. Asperger allait même jusqu'à donner le sobriquet affectueux de "petit génie" à ces enfants. Étant les pères de l'autisme, leurs contributions se retrouvent dans le DSM-4, en vigueur de 1994 à 2013, sous l'étymologie du Trouble envahissant du développement (TED).

Dans le DSM-4, l'autisme est classifié sous le titre de TED et est subdivisé en plusieurs catégories: le trouble autistique (autisme classique ou Kanner), le syndrome d'Asperger, TED non spécifique, le Syndrome de Rett et le trouble désintégratif de l'enfance.

Ces catégories définissaient donc les autistes selon différents critères:

  1. des altérations au niveau des interactions sociales
  2. des altérations au niveau de la communication
  3. des intérêts restreints.

Le syndrome d'Asperger était un trouble autistique sans les altérations au niveau de la communication et sans retard dans le développement du langage.

Puisque ces deux catégories ne représentaient pas tous les cas possibles d'autistes, le TED non spécifique fut créé pour les personnes ne répondant pas aux critères du trouble de l'autisme, mais ayant des difficultés similaires.

Finalement, le Syndrome de Rett et le trouble désintégratif de l'enfance sont des maladies neurocognitives dégénératives c'est-à-dire que l'enfant a un développement typique jusqu'à un certain âge avant de régresser. C'est deux diagnostics ont été retirés du DSM-5 puisqu'ils n'ont rien en commun avec l'autisme sauf certaines manifestations subjectives et stéréotypées.

Le terme "léger" est aussi apparu pour qualifier le syndrome d'Asperger comparativement au trouble autistique classique puisque le syndrome d'Asperger n'a que deux critères comparativement à trois pour le trouble autistique

En somme, avec des critères subjectifs et des cas pratiques ne se retrouvant pas dans les trois catégories de l'autisme, les intervenants ont dû qualifier eux-mêmes les autistes. Ainsi est née l'appellation de "haut niveau" pour faire référence aux autistes n'ayant pas de déficience intellectuelle, mais ayant les critères du trouble autistique. Le terme "léger" est aussi apparu pour qualifier le syndrome d'Asperger comparativement au trouble autistique classique puisque le syndrome d'Asperger n'a que deux critères comparativement à trois pour le trouble autistique.

Cependant, comme les cas pratiques ne répondaient pas toujours à ces critères, le tout combiné aux nouvelles découvertes scientifiques, la catégorisation de l'autisme fut modifiée avec le DSM-5.

Le DSM-5 (2013 à aujourd'hui) regroupe les autistes (trouble autistique, syndrome Asperger et TED non spécifique) sous l'appellation du Trouble du spectre de l'autisme (TSA).

Ainsi, les chercheurs reconnaissent que les catégories du DSM-4 sont en fait, une seule condition médicale avec différents niveaux pour les deux critères du diagnostic: la communication et les interactions sociales et les comportements, activités et intérêts restreints ou répétitifs. Fait à noter, les altérations pour la communication sont maintenant universelles à tous les autistes (Asperger inclus). Ainsi, selon la sévérité qualitative des altérations aux critères et les besoins de support et d'accommodement, les autistes sont classés comme de "bas (fortement altéré ou grand besoin) à haut niveau (faiblement altéré ou faible besoin)" pour chaque critère. Un autiste peut donc avoir toutes les combinaisons possibles de bas et de haut niveau allant de la correspondance pour les deux critères ou de bas niveaux pour un critère et de haut niveau pour l'autre. Ainsi, cette représentation sur un spectre et personnalisée pour chaque autiste permet à la théorie de respecter la pratique.

Finalement, le Dr. Laurent Mottron a émis une hypothèse que le spectre de l'autisme serait composé de trois catégories d'autisme: syndromique, prototypique et Asperger. Cette hypothèse est le fruit, entre autres, de plusieurs recherches basées sur des tests objectifs et quantifiables.

Ce n'est pas l'autisme qui est à la source du soutien considérable dont ils ont besoin, mais bien leur syndrome spécifique combiné à leur déficience intellectuelle

Les autistes syndromiques représentent environ 15% des diagnostics d'autisme. Ces "autistes" sont qualifiés de cas lourds. Cependant, il ne s'agit pas d'autisme à proprement parler: leur fonctionnement cognitif diffère de celui de l'autisme prototypique. Ce n'est pas l'autisme qui est à la source du soutien considérable dont ils ont besoin, mais bien leur syndrome spécifique combiné à leur déficience intellectuelle.

L'autisme prototypique représente environ 70% des diagnostics. Celui-ci représente l'autisme non verbal ou avec un retard de l'utilisation du langage pour communiquer et axé sur la perception et le sensoriel.

Finalement, les Asperger, environ 15% des diagnostics, sont les autistes décrits par Asperger, c'est-à-dire des autistes ayant une capacité surdéveloppée pour le vocabulaire et la langue et des difficultés dans la coordination ou la motricité.

Pour l'autisme prototypique ou l'Asperger, c'est le développement du cerveau et l'utilisation des différentes zones du cerveau qui influenceraient la socialisation et la communication, les intérêts spécifiques ainsi que les pics de performances de chaque catégorie.

En conclusion, l'autisme, jusqu'à tout récemment avec le Dr Mottron et son équipe, a été évalué sur des critères subjectifs et qualitatifs, par des non-autistes avec des concepts et des théories non-autistes pour qualifier les autistes. En somme, c'est comme si vous demandiez à une personne voyante d'évaluer la "non-voyance" sur les capacités d'une personne non voyante à marcher, à sauter ou à avoir un contact visuel lors d'une discussion. Cette situation a créé des dérives importantes et préjudiciables pour les autismes et celles-ci seront le sujet de la seconde partie.

Un texte co-écrit avec Mathieu Giroux.

Sources:

http://social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_josef_schovanec.pdf

NeuroTribes. The legacy of autisme and the future of neurodiversity, Steve Silberman, (Penguin books 2016)

L'intervention précoce pour enfants autistes. Nouveaux principes pour soutenir une autre intelligence, Laurent Mottron, (Mardaga, 2016)

Sur le spectre-volume 1, Magazine du groupe de recherche en neurosciences de l'autisme de Montréal, 2016,http://www.autismresearchgroupmontreal.ca/SurLeSpectre/Sur_le_spectre_no_1_2016-04.pdf

Ce billet est également publié sur Le HuffPost Québec.

29 juillet 2017

"Atypical", la série US sur l'autisme sort cet été

article publié sur handicap.fr

Résumé : La série humoristique "Atypical", qui met en scène le quotidien d'un adolescent atteint de troubles autistiques et sa famille, sortira le 11 août 2017 sur la plateforme de streaming en ligne Netflix. Un show qui devrait attiser la curiosité...

Par , le 23-07-2017

La série humoristique américaine Atypical débarque sur les écrans le 11 août. Pourquoi ce nom ? Robia Rashid, auteur de How I met your mother et à la tête du projet, lance le pari de filmer le quotidien et les enjeux d'un garçon autiste de 18 ans et de sa famille légèrement déjantée. La plateforme de vidéo Netflix, qui a commandé une première saison de huit épisodes, semble innover en se penchant de plus près sur ce handicap…

Lumière sur l'autisme à l'adolescence

Montrer le quotidien d'un garçon atteint de troubles autistiques, qui cherche à s'émanciper n'est, en effet, pas un challenge des plus simples. Le pitch pour cette première saison ? Un héros en quête d'indépendance et d'amour qui se verra confronté aux problèmes familiaux, aux premiers bouleversements liés à ses 18 ans et aux questions fondamentales que peut se poser un garçon autiste en général...

Casting haut en couleurs

Du côté des acteurs, on retrouve Jennifer Jason Leigh (vue dans le film Les Huit salopards, de Quentin Tarantino), qui interprète une mère de famille envahissante. Sam, le personnage principal, est joué par le comédien britannique Keir Gilchrist tandis que l'acteur Michael Rapaport, connu grâce à Prison Break, endosse le rôle du père de famille.

Un teaser pour se faire une idée

La thérapeute du jeune homme est incarnée par Amy Okuda, déjà vue dans How to get away with murder. Afin de faire découvrir l'univers de cette nouvelle production, le géant du streaming a diffusé le 18 juillet 2017 le premier teaser de la série produite par Sony Pictures Television (en lien ci-dessous). À découvrir pour se faire un avis…

© Netflix

Ajoutée le 18 juil. 2017

"Atypical" est une histoire sur le passage à l'âge adulte de Sam (joué par Keir Gilchrist), un autiste de 18 ans à la recherche d'amour et d'indépendance. Tandis que Sam se lance dans une aventure à la fois drôle et émouvante à la découverte de lui-même, les membres de sa famille doivent faire face aux changements qui surviennent dans leur propre vie. Jennifer Jason Leigh, Michael Rapaport, Brigette Lundy-Paine et Amy Okuda font également partie de la distribution. "Atypical" sera disponible le 11 août en exclusivité sur Netflix.

23 juillet 2017

L’article « Ces femmes autistes qui s’ignorent » republié sur la chaîne de télé australienne ABC News

article publié sur le site de l'Association Francophone des Femmes Autistes

L'article « Ces femmes autistes qui s'ignorent » publié sur The Conversation - France, le 05 juillet 2017, a été traduit en anglais et diffusé sur The conversation - Australie.

Il a alors été republié le 20 juillet sur le site de la chaîne de télé australienne ABC News.

L'article "Ces femmes autistes qui s'ignorent", republié sur la chaîne de télé ABC News en Australie

Appel aux pouvoirs publics

Grâce au travail collectif d'une petite poignée de femmes particulièrement investies, la France est désormais à la pointe concernant cette problématique à laquelle il devient URGENT pour les pouvoirs publics de s'y intéresser :

en effet, nous sommes submergées de messages de femmes qui se découvrent autistes et qui sont bouleversées et en plein effondrement car leur vie bascule.

Entre autres, elles ne comprennent pas comment les pros ont pu ne pas les orienter sur cette piste.

Ces femmes demandent légitimement à avoir une évaluation diagnostique, et nous sommes bien impuissantes  à les orienter car les Centres Ressources Autisme ont une liste d'attente d'au moins un an, et généralement ne sont pas au fait des spécificités féminines.

Les rares professionnels libéraux compétents sont pris d'assaut et ne prennent plus de nouvelles personnes.

 

Action de sensibilisation

Un de nos projets est donc la sensibilisation de la problématique féminine auprès des Centres Ressources Autisme et auprès des organismes de formation (initiale et continue) à l'autisme,.

 

En savoir plus :

  • La commission scientifique internationale, réunie au ministère de la Santé le 03 avril 2017, s'est exprimée sur les différences de symptomatologie entre les hommes et les femmes TSA lors du diagnostic. Cette commission établit les priorités de la politique publique en matière d'autisme pour les cinq prochaines années en tenant compte des dernières recherches et de l'état des connaissances internationales. Voir leur réponse ici.
  • Le Pr Mottron mène actuellement, avec le groupe de recherche en neurosciences cognitives de l'autisme de Montréal, un projet de recherche « Autisme au féminin » : des volontaires (diagnostiquées officiellement ou auto-diagnostiquées) sont toujours recherchées pour ce projet : en savoir plus ici.
  • Le 08 avril 2017 s'est tenue, au salon international de l'autisme, une conférence de Fabienne Cazalis et Adeline Lacroix sur les femmes autistes : cette conférence présente une recherche bibliographique concernant les spécificités des femmes asperger et autistes haut niveau, menée par Adeline Lacroix (Université Savoie Mont Blanc) sous la direction de Fabienne Cazalis (CNRS, EHESS).
  • Le Professeur Mottron a fait le 31 mars 2017 une présentation sur les femmes autistes, dans le cadre de la conférence  « Le point sur l'autisme invisible », organisée par le Comité  Consultatif National d'Autistes de France (CCNAF), en partenariat avec le Centre Ressources Autisme de Haute Normandie, le centre hospitalier du Rouvray et de l'association scientifique du Rouvray.
23 juillet 2017

Morbihan : chez cet agriculteur autiste, les stagiaires sont également autistes ou en situation de handicap

article publié sur le site d'actu Bretagne - Pontivy journal

David Guillemet est autiste Asperger. Agriculteur installé à Ploërdut (Morbihan), il accueille des stagiaires des lycées agricoles, eux aussi autistes ou en situation de handicap.

Publié le 21 Juil 17 à 9:15 / Modifié le 21 Juil 17 à 9:03
Camille est en stage chez David Guillemet, à Ploërdut, pour une durée d’un mois. (Pontivy Journal)

Camille est autiste Asperger. Elle vient de terminer sa première année de BTS Production animal au lycée agricole du Nivot, à Lospérec (Finistère). À la rentrée, la jeune femme de 18 ans passera en 2e année. « Je voudrais devenir soigneur en parc zoologique. » C’est son rêve depuis qu’elle a visité le zoo de Doué-la-Fontaine quand elle était en classe de première. « On m’a conseillé un bac S, puis ce BTS car on effectue des stages en exploitation agricole où on apprend aussi à manipuler les animaux. »

Depuis deux semaines, Camille est en stage chez David Guillemet, agriculteur à Ploërdut (Morbihan). Lui-même autiste Asperger, il a pris l’initiative d’accueillir dans sa ferme des stagiaires également autistes ou en situation de handicap. C’est la troisième fois que l’étudiante vient à la ferme du Runasquer. Une exploitation de 114 hectares et un troupeau de 43 vaches Salers, élevées en bio.

Le syndrome d’Asperger est une forme d’autisme sans déficience intellectuelle ni retard de langage. C’est un désordre du développement d’origine neurobiologique qui affecte essentiellement la manière dont les personnes communiquent et interagissent avec les autres.

« Les stagiaires ne sont pas là pour faire les corvées »

Ce jour-là, Camille s’est occupée des bêtes. Comptage des animaux dans les champs. Y a-t-il eu des vêlages ? Vérification des abreuvoirs… Cet après-midi, ce sera travail sur les clôtures. 60 km à entretenir… « Même s’ils vont en faire, parce que ça fait partie du métier, les stagiaires ne sont pas là pour faire les corvées », assure David Guillemet, agriculteur installé à Ploërdut depuis novembre 2014.

Avant de s’occuper de Salers, David Guillemet a eu une autre vie. Il a été directeur informatique dans un groupe important de la grande distribution, en région parisienne. Puis, il y a connu des soucis de santé, un burn-out, qui s’est soldé par un licenciement.

J’ai bien essayé de trouver un poste plus cool, mais vu mon état de santé, aucun employeur n’était prêt à prendre le risque…

« J’en  ai bavé »

David Guillemet a été diagnostiqué tardivement autiste Asperger, à l’âge de 18 ans. « J’en ai bavé toute ma jeunesse. »

David s’est alors investi dans l’associatif, notamment comme délégué des parents d’élèves au lycée agricole de son fils. « J’ai siégé dans différentes commissions, dont la commission des dossiers atypiques. » Entendez, les profils à problèmes, les situations sociales particulières (étudiantes enceintes…), ou encore les élèves handicapés.

« Un jour, un représentant syndical qui siégeait dans cette commission a lancé : la filière agricole est en crise, alors si en plus il faut prendre des débiles en stage… »

La vilaine remarque a fait tilt. David, qui a toujours élevé des bovins pour son plaisir, décide alors de s’installer comme agriculteur-éleveur, avec en toile de fond, le projet de former des jeunes en situation de handicap. « J’ai toujours été partisan du nivellement par le haut et de la démonstration par l’exemple. »

« Il faut aller par paliers »

Monter un tel projet n’a pas été sans difficulté. « Tout est fait pour décourager les personnes en situation de handicap de travailler. » Après avoir trouvé des terres, les premiers animaux arrivent en mai 2015 au Runasquer. Après une année de mise en route, le premier stagiaire arrive en septembre 2016. Un garçon de 17 ans, autiste, qui en raison de son handicap, a énormément de mal à trouver un stage chez un agriculteur. « Au début, il leur faut une certaine routine, sinon, c’est un facteur perturbant. »

David a développé une méthode : « Tous les jours, on se fixe une petite marche supplémentaire à gravir. » À son premier stage, Camille restait figée au volant du tracteur. Impossible pour elle de démarrer, de passer une vitesse…

"Le premier jour, on explique. Si ça ne marche pas, on n’insiste pas. On recommence le lendemain. Là, elle lâche l’embrayage. Le surlendemain, elle passe une vitesse. À la fin de la semaine, elle roule dans les champs Chez les autistes, il faut y aller par paliers. Dès qu’on a franchi une marche, on passe du tout ou rien assez rapidement."

Depuis un an, David a déjà accueilli quatre stagiaires. Certains sont là en stage de découverte de deux semaines. D’autres, plus longtemps. « Il faut savoir comment leur parler. Comment aborder la question du handicap. Connaître leur seuil de fatigabilité… Pour moi, c’est également très formateur. Ça me permet de mieux gérer mon autisme, à moi aussi… »

« Savoir jauger ses limites »

Pour les apprenants, le stage se doit d’être bénéfique.

"Ils repartent avec une critique positive qui va leur permettre de revoir, le cas échéant, le curseur de leur projet. Le plus dur dans ce métier, c’est de savoir jauger ses limites. J’ai eu un stagiaire qui se fatigue assez rapidement. Alors, au lieu de poursuivre en production animale, il va certainement s’orienter vers un BTS Acse (Analyse et conduite de système d’exploitation). Ça lui permettra d’aller, soit vers la production mécanisée, soit de faire carrière comme consultant technique ; il a une bonne capacité d’analyse."

Camille, elle, a trouvé sa voie. Elle aime le contact avec les animaux. Et les Salers de David le lui rendent bien…

Publicité
Publicité
<< < 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 30 > >>
Publicité
"Au bonheur d'Elise"
Visiteurs
Depuis la création 2 398 895
Newsletter
"Au bonheur d'Elise"
Archives
Publicité